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querida13

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Billets posté(e)s par querida13

  1. querida13
    Pendant sept ans ,en remplacements, je suis passée sur plus de soixante écoles. Parfois situées entre quinze et trente kilomètres de chez moi.
    J'avais l'impression dans mon travail d'être une véritable femme orchestre. On m'a tellement exploitée, tellement fait déplacer, en me faisant retourner sur des écoles en zones sensibles de Marseille Nord que j'ai fini par faire des hémorragies et un polype. J'ai eu droit à trois opérations ,la dernière me diminua fortement.
    Je n'étais qu'un paquet de douleurs. Ces douleurs durèrent trois mois d'affilée.On me donna les médicaments calmants antalgiques qui ont tué Michaël Jackson.Je les pris avec parcimonie. Certaines douleurs ne sont pas parties et je me les traîne, je vis avec, je suis devenue très fatigable. Aller chanter avec mon petit clan était la seul chose qui me distrayait.
    Dans mon petit clan, formé d'un expatrié, d'une femme en rupture de bans, et de deux femmes, et parmi elles il y avait une fille qui chantait plutôt bien et qui était très acclamée.Elle était gaie, elle était pétillante, faisait des numéros très drôles et un jour, je la vis coiffée différemment et comme je la complimentais de sa nouvelle coupe elle me dit qu'en réalité, elle était chauve car elle était en chimiothérapie car elle avait le cancer. J'ai dû faire une tête très contrariée car elle me dit: ne fais pas cette tête, après tout on ne meurt qu'une fois.
    Avant mon opération du polype on a jugé bon de me reposer et on m'a collée loin des élèves, dans deux bibliothèques à reclasser. J'eus quelques élèves en soutien; Comme l'année précédente on m'en avait donné près d'une centaine, cela me fit tout drôle!
    Quand j'étais petite, il y avait un livre sur les princesses dans la BCD de la maternelle. L'auteur  en avait décrit et dessiné une qui était bibliothécaire, elle figurait parmi les princesses oubliées.
    Dans ce rôle de princesse oubliée je nettoyai, étiquetai, classai, rangeai, répertoriai les livres de deux bibliothèques et l'année suivante je classai une autre bibliothèque: il y avait six mille livres. je requalifiai une salle d'arts plastiques en musée d'école, et la remis en état, pour que l'année suivante les ateliers puissent s'y dérouler.
    Du coup ces trois bibliothèques purent être rouvertes au prêt car je les avais organisées selon la méthode  internationale Dewey.
    Réellement fatigués mes pieds, ma voix et ma vue fléchirent tous ensemble. Je passai devant un médecin du travail très inquiet pour moi. Il m'arrêta. J'avais fait un dossier à la MDPH car après vingt quatre ans de travail avec un handicap vocal, un directeur d'école digne de ce nom m'avait dit quelle marche à suivre pour que mon handicap soit reconnu. 
    Je revins voir l'oto rhino laryngologiste qui m'avait opérée autrefois et on me dirigea sur l'hôpital de la conception à Marseille et je pris rendez-vous avec un médecin spécialiste des cancers de la gorge qui me proposa de regonfler avec des injections de cartilage d'abord puis de silicone ensuite, ma corde vocale lésée.
    Après l'opération j'eus très mal. J'avais une sorte d'angine très forte et l'impression d'avoir une agrafe coincée dans la gorge. On m'a fait faire un enregistrement avant/après.Ma voix était méconnaissable.On m'en a fait faire deux autres après  silence d'un mois et rééducation.Mon timbre a changé quatre fois en deux ans.
    Après le mois de silence, j m suis remise à chanter et ce fut la stupeur générale ...Le DJ, à qui je n'avais pas parlé de mes histoires, vint me dire que ....j'avais beaucoup progressé.
    l
     
     
  2. querida13
    Il y a des soirs où rien ne va plus. Où j'ai manié  tellement de prénoms dans la journée et dans la semaine (parfois cent trente) que je ne me souviens plus du nom des gens que l'on m'a présentés dans la quinzaine précédente.
    Il y a des vendredis plus difficiles que d'autres. Les enfants sont plus excités en fin de semaine et ma voix au karaoké ne me permettait que des chansons où l'agilité n'est pas de mise. Car en chant, on travaille avec son outil, la voix et il faut adapter son travail  à ce qu'on peut faire parfois les moyens manquent alors il faut réviser ses prétentions à la baisse, et ça se complique si les gens sont plus excités ou n'écoutent pas, ou si certains braillent ou beuglent.Parfois,il y a des jalousies parce que le DJ t'a fait passer davantage que d'autres.Parfois, je n'avais pas réservé et prenais un petit en cas sur un petit bout de comptoir...ou seule dans mon coin.
    Le DJ parfois devenait facétieux...il coupait le début de la chanson en me faisant débuter a cappella ou alors il s'amusait à distordre la tonalité du morceau pour savoir si j'allais rectifier le tir.Je le rectifiais!Ou alors en pleine concentration, il venait m'affubler d'un chapeau marrant (je priais pour qu'il n'y ait pas de poux dans ces couvre-chefs qui migraient de tête en tête!) comme il joue de la trompette et de la guitare, de temps en temps nous faisions un final en live...De temps en temps aussi il m'oubliait...Et je me morfondais.Souvent je me prenais dans l'oeil cette horrible lampe rouge clignotante  toute la soirée.
    A force de venir au même endroit on a fini par se connaître .Tout le monde vient me saluer.Quand j'arrive seule on m'intègre dans un groupe;On discute un peu, bien qu'en général,le bruit de la sono m'assourdit constamment.
  3. querida13
    Suis-je faite pour chanter? La première fois que j'ai été exposée en public, seul, à quatre ou cinq ans, je me souviens encore de mon malaise profond, d'avoir eu la sensation d'être devenue rouge comme une cerise. Ma voix était mal assurée, Elle portait la trace de l'angoisse.
    Parler, chanter devant un public n'a jamais été anodin pour quiconque s'y exerce. Derrière chaque orateur ou chanteur, il y a un savoir à transmettre, un travail fait en amont. Une transmission faite en aval.
    Avez vous vu ce film de Fernandel nommé le schpountz?
    Une équipe de tournage fait croire à un simplet de villageois qu'il a du talent. Il quitte son travail d'épicier auprès de son oncle pour tenter sa chance à Paris, comme acteur.Le malheureux finit par occuper des emplois subalternes au cinéma mais, quand sa chance passe, il la prend et finit par réaliser son rêve.
    Dans l'industrie du spectacle combien de schpountz pour une seule vedette? Combien d'artistes utilisés comme faire valoir de membres de jurys pour  une poignée de réussites? Combien d'aigrefins prêts à exploiter le talent que certains mettent sottement à disposition gratuitement malgré tout ce qui a été dépensé pour le faire éclore en cours, déplacements, trajets, années de répétitions, de travail aride et peu rémunérateur?
    Je me souviens de ma première récompense à dix ans . J'avais déjà cumulé quatre années de cours de piano et quatre années de cours de solfège. Quelque  quatre cents cours en somme.J'avais à dix an,conquis huit diplômes, acquis à chaque niveau .j'étais déjà passée devant huit jurys.
    Il a pris à je ne sais quel politicien de l'époque la lubie de récompenser les jeunes talents prometteurs. Alors il a convoqué les enfants et leur a offert des colifichets.
    Je me souviens quand je suis passée devant la table d'apparat, devant une (autre) assemblée d'adultes, des paroles élogieuses de mes maîtres. Du miel après des années de dureté exigeante.
    Soudain, je fis mentalement la rétrospective de tous les efforts et déplacements qu'il m'avais fallu fournir pour que tombent de leurs lèvres ces maigres compliments. Des pleurs et des larmes, des contraintes, des plaisirs que je n'avais pas eus comme les enfants de mon âge pour aligner les heures de répétitions et de travail.
    Et soudain, ce fut le moment. L'édile me remit un ridicule porte- clés en laiton...Je fis une drôle de tête. L'événement a été immortalisé sur une photo....Et dans mon esprit en un éclair, j'eus cette pensée révoltée en scrutant le colifichet:
    -Quoi???Tout ça pour ça?
    je parlai ultérieurement de la maigreur de la récompense à de copines, la prof s'approcha et me dit:
    -Eh bien mais il faut encore s'estimer heureuse qu'il aient pensé à te donner quelque chose!
    Et je pensai qu'elle avait bien dû s'estimer heureuse que mes parents lui paient ses cours!
    Souvent, je pense à ce petit trésor de dialogue entre le maître de musique et le maître à danser dans le bourgeois gentilhomme de Molière.(ActeI, Scène I).A vous de transposer la scène:
    maître de musique:Nous avons trouvé ici un homme comme il nous le faut à tous deux.Ce nous est une douce rente que ce monsieur Jourdain avec les visions de noblesse et de galanterie qu'il est allé se mettre en tête. et votre danse et ma musique auraient à souhaiter que tout le monde lui ressemblât...
    Sil existe des schpountz, il existe aussi bien des arts de tondre les schpountz!
    Hier, j'ai regardé un film très juste réalisé par Alex Lutz intitulé: le talent de mes amis.
    Ne sommes nous pas comme le héros de ce film?
    Taraudés par la nécessité de subvenir à nos besoins, de tirer parti de nos talents, coincés dans de occupations  ou des situations qui ne nous enthousiasment guère, tiraillés entre le chant des sirènes qui  vous attirent en des eaux inconnues et dangereuses(les conseils du  psy du film) et la voix de la raison (l'ami raisonnable et terre à terre).
     
     
  4. querida13
    Il y a eu des moments de découragement. Des moments où je me disais que oui, je chantais en public mais que cela ne me rapportait rien. Que celui qui faisait son beurre était le propriétaire du restaurant, qui avait épisodiquement et à bon compte une chanteuse issue du conservatoire de Marseille. Mais ne côtoyer que des enfants et des instits  était très réducteur pour moi bien que je me fusse déplacée sans cesse depuis bien des années.Je connaissais mes amis depuis trop longtemps et j'avais envie de connaître d'autres milieux.J'étais servie! Et cependant insatisfaite.
    Depuis mon adolescence, je tenais un journal .J'y ai écrit de nombreux poèmes. Ecrire faisait aussi partie de mes envies quand j'étais jeune, j'ai suivi des études littéraires et j'étais toujours fourrée dans des livres, dans des bibliothèques; gamine, on me surnommait souvent le rat de bibliothèque.
    Un jour en allant dans une réunion instits professeur de collèges pour un CM2, je suis tombée sur un document qui était affiché dans une des classes.Il parlait de poèmes japonais composés dès le XVIIeme siècle: les haïkus.
    Ces petits poèmes s'inscrivent dans la philosophie bouddhiste.Tu es un être perdu dans une très grande quantité de vide.A ta disposition tu n'as à vivre qu'une  juxtaposition d'instants. A toi de saisir l'instant que tu vivras en été ,en automne, en hiver ou au printemps de l'année ou de ta vie, et d'en faire un petit poème de trois vers composés de 5,7 ou 5 pieds.Il y a deux maîtres du haiku: Buson et Bashô.j'ai eu la chance de tomber par hasard sur un bouquin de Buson, ici à l'autre bout de la terre.j'ai pris rapidement le virus et me suis mise à en composer moi aussi.
    J'ai rassemblé mes poèmes, illustré et écrit, composé.Et j'ai fini par les envoyer à un éditeur qui  aurait bien voulu m'éditer avec un contrat très contraignant mais en  autofinançant ma propre édition tout en étant à la disposition d'un éditeur situé à de nombreuses centaines de km de mon domicile pour faire la promo de mon livre;Tout cela pour ne retirer péniblement que quelques euros de mes ventes... Pas folle la guêpe, j'ai pesé le pour et le contre , ai refusé ces conditions et j'ai édité mon premier bouquin à compte d'auteur et ce ,à très peu d'exemplaires en choisissant de faire travailler un artisan des environs..Puis j'ai pris encore le virus et je suis à ma troisième petite édition artisanale. Mon tirage est très confidentiel et peu de monde peut se targuer d'avoir en sa possession la première édition de mes poèmes et de mes haïkus...Un jour j'ai été exposée, avec des artistes locaux dans la galeries marchande du carrefour à Vitrolles;J'ai vu mon nom sur une affiche haute de deux mètres écrit en lettres de quarante centimètres de hauteur. J'étais fière de moi. Un peu comme un acteur qui voit enfin son nom en haut de l'affiche.Un de mes amis,sculpteur, me dit que j'étais un nouveau Rimbaud mais je le soupçonne d'être très indulgent à mon égard (il fait d'adorables merveilles)..Tandis que le cardiologue de mon mari a trouvé que j'étais aussi bonne que La Fontaine. Lui aussi d'ailleurs peint des toiles exquises qu'il expose dans sa salle d'attente.
    Quelques exemplaires marinent dans mon placard et de temps en temps j'en vends quelques uns.Les commerçants de la galerie marchande ne sont guère venus m'acheter de livres; Alors j'ai cessé de me servir chez eux.Je m'aperçois que j'ai acheté leurs bouquins à nombre d'auteurs mais qu'eux ne m'ont pas rendu la pareille.Alors, moi aussi j'ai cessé d'acheter leurs parutions.
      Un journalsite est venu m'interwiever.Il trouvait que pour composer tout cela j'avais dû avoir à ma disposition beaucoup de tems pour écrire mais pour moi, il et tellement facile de zapper une coupe d'Europe de foot,de ne pas regarder la télé réalité, de zapper Koh lanta ou de ne pas regarder amour gloire et beauté que j'ai toujours eu du temps pour écrire , pour apprendre à chanter pour lire..
     
  5. querida13
    J'ai aidé cette copine à se préparer...
    Autrefois pour savoir une chanson, on achetait le disque, on l'enregistrait on allait repêcher les paroles dans un bouquin de paroles,ou on achetait Podium, ou on se repassait les paroles avec le magnétophone, et on les recopiait... Eventuellement si on était riche et doué on pouvait aussi s'acheter la partition et la jouer au piano, ou à la guitare.
    A l'époque j'avais chez moi une télé sur laquelle était branchée un lecteur DVD. Mon mari m'avait offert un ampli karaoké, mon frère m'avait offert les micros, et à chaque fois qu'un événement festif arrivait je me faisais acheter un disque .Je mis mon appareillage à disposition de ma copine; elle répéta...Elle fut au point pour chanter bientôt cinq chansons au karaoké familial où j'étonnai tout le monde en entonnant une dizaine de tubes. 
    Cette année-là, Je fis ds remplacements vers Rognac. J 'y repérai des karaokés. J'allai à l'oustalet.Le DJ m'avait à la bonne et me faisait chanter beaucoup.Il  tomba un jour gravement malade et le suivant avait un matériel différent.Ses baffles portaient sur mes oreilles.Je ne suis plus allée dans cet endroit depuis très longtemps. Question de survie!
    Quand j'arrivais dans un établissement du coin, les enfantsme  reconnaissaient et me surnommaient " la maîtresse au piano".Ils venaient tous se renseigner sur moi:
    -Dans quelle classe tu vas aujourd'hui?
    Chez les CE2.... mine déçue....
    -Ah zut , ce n'est pas chez nous!
    Ils savaient qu'ils allaient apprendre une nouvelle chanson! C'est qu'ils aimaient bien l'avoir leur "maîtresse au piano"...Les chanceux se réjouissaient et les autres arboraient une tête d'enterrement.
    Comme j'avais aussi publié trois livres de poésies, je leur enseignais comment était fabriqué le livre...J'explorais les bibliothèques avec eux pour qu'ils trouvent diverses formes de livres et leur apprenais comment différencier un dictionnaire d'un livre de sciences, ou d'un roman, ou d'un livre de poésies ou d'un manuel. Entre autres...Car combien ne me réduisaient qu'à une artiste alors que le métier requiert des connaissances approfondies en histoire, géo, EPS, sciences, français, maths,travaux créatifs, anglais ou autre langue....et littérature!
    Parfois en discutant avec les parents j'apprenais qu'unetelle n'était pas contente que la maîtresse soit " trop" artiste! Comme si je passais mes journées à chanter! Certaines ne volent pas haut, vraiment! Pourtant, ils avaient le même matériel que la classe d'à côté.
    On ne se refait pas....Mais pour sa défense, le chant permet de faire passer beaucoup de choses:
    D'abord comprendre, copier un texte,l'illustrer, comprendre son vocabulaire, comprendre son texte et son sens. S'orienter dans l'espace grâce à des gestes.Ensuite il y a tout un travail de la voix sa place, sa pose, sa justesse, son volume, la place de la respiration, le vivre ensemble dans la pratique chorale, le plaisir de chanter et de participer à une oeuvre collective,la (rare) nouveauté d'être accompagné d'un instrument, le gain de confiance en soi à travers la prise de parole en groupe ou en soliste....Et la cerise sur le gâteau....La représentation en public...Chaque année, ou même deux fois par an un pack allant de une à sept chansons parfois plus....Parfois devant l'école, parfois devant les parents, parfois en public. 
     
  6. querida13
    J'ai toujours eu un petit faible pour Auris en Oisans.Parce que la montagne y est plus belle qu'ailleurs. Parce que l'hiver, on va y skier en faisant la jonction avec l'Alpe d'Huez,Oz en Oisans et Vaujany. Parce qu'il y a dans le coin des choses superbes que j'adore:le village de bourg d'Oisans, agréable et commerçant,le village ancien des artisans de  Venosc, le barrage du Chambon et la route qui va vers la Grave et La Meije, le col de l'Isoard qui redescend vers Serre Chevalier et Briançon.C'est sauvage et fleuri.
    De plus l'équipe fait tout son possible pour faire vivre son coin de montagne. Un jour, j'ai assisté à une représentation gratuite de la troupe  de comédiens amateurs du village qui jouait l'amour foot et ce fut un grand moment de bonheur: ils possèdent pour cela un véritable petit joyau d'infrastructure:un théâtre.
    Un soir ,j'y étais avec quelques amis. Encore une soirée karaoké, évidemment, avec des chansons postérieures à 2000.la soirée s'annonçait bien, on allait enfin nous éviter les vieilles rengaines, les vieilles scies habituelles pour se lancer dans un répertoire un peu plus contemporain. Je m'y inscrivis... J'attendais mon tour avec impatience .
    Dès que les premiers jeunes chanteurs s'élancèrent sur scène, je fus non seulement déçue par la pauvreté mélodique des chansons chantées et choisies, mais aussi du manque de travail des interprètes. D'habitude , dans un karaoké amateur, on peut espérer que cinq sur dix chanteront juste. Sur les cinq autres, trois chanteront de manière incertaine et deux chanteront faux.
    Mais là c'était la totale:huit sur dix chantaient faux , pourtant  les mélodies banales et répétitives n'étaient pas en cause.Manque d'oreille? Manque de répétitions? Manque de recul sur soi-même? Nous applaudissions par politesse mais je ne cessais de maugréer tout bas:ah, que c'est mauvais...
    Enfin mon tour passa et j'interprétai sur scène devant cent personnes,pour que tu m'aimes encore...
    Je fis un véritable triomphe.La foule était en délire.Je descendis de la scène quelques enfants vinrent à ma rencontre et certains me touchèrent timidement.Je passai le micro à la personne suivante qui me regarda avec reconnaissance, elle me dit:
    -Merci pour le micro et merci d'avoir chanté juste..;Au moins quelqu'un chante juste dans cette soirée, merci ,vous avez sauvé nos oreilles du fiasco total...
    -A vous de relever le niveau, lui répondis-je avec un petit clin d'oeil, comme ça je me sentirai moins seule...
    -Ce ne sera pas bien difficile dit -il résigné,vu ce qui est passé avant vous!Mais ça va êre difficile de passer après vous!
    -Courage!
    Il avait un joli brin de voix ,cela en faisait deux.
    Enhardie par la médiocrité de l'ensemble, mon amie passa avec moi pour la chanson suivante.Je fus incapable de surmonter ses canards.
    Il y a des soirs où rien ne va plus!
     
     
     
     
     
      
  7. querida13
    A Aix,la première fois que j'y fus, je n'ai pas été très chaleureusement accueillie.
    Après mon opération,et j'en subirai cinq en quinze ans,je fus convoquée chez le médecin du travail.Elle me dit qu'on ne passait pas si facilement d'un ghetto de pauvres à un ghetto de riches.
    Elle m'apprit qu'une institutrice était venue avec son djembé sur la commune et qu'elle avait soulevé un tollé général de la part de parents d'élèves.
    Alors, la maîtresse au piano, autant dire que je devais être pour eux la maîtresse intermittente du spectacle!
    Pour ma part, je trouvais que c'était imbécile de réagir comme cela:
    La ville était un pôle phare du festival d'art lyrique ,spectacle qui se déroule dans la cour de l'évêché, elle s'est équipée d'une salle de concerts et a une très jolie salle d'opéra.
    De nombreux bars accueillent des musiciens qui se produisent en l'égayant, sur le cours Mirabeau l'allée ombragée de Platanes,décorée de fontaines et centre névralgique de la ville. Il leur faudra former des musiciens.Autrefois la ville était consacrée à son dieu protecteur Apollon...Dieu des arts et du soleil.Aix,patrie de Zola et de Cézanne ville d'eaux et d'arts est prédestinée à se consacrer à la culture.
    En fait ce mélange de petites ruelles pavées si commerçantes à l'architecture magnifique, la présence de la sainte Victoire l'éclairage du ciel particulier,le chant des fontaines,mêlé aux cris particuliers des corneilles et à la musique,la présence des monuments m'a enchantée depuis mon enfance et l'université m'attirait comme un aimant...Depuis que j'allais voir mes cousins là- bas je savais qu'un jour j'y vivrais et en cela,la réalité a dépassé toutes mes espérances.Mon frère y était né...
    J'ai été inopinément rendue à Aix après une énième confrontation avec l'inspecteur qui me dit qu'il en avait marre de moi et de mon piano...
    Toutes les gammes,les exercices, cette formation rigoureuse et longue, cette maîtrise,ces concours,d'auditions, ces heures de vocalises,d'apprentissages de chants,de morceaux,ce temps et cet argent passés à choisir des instruments(cinq dans ma carrière et sur mes deniers personnels)ce temps consacré à faire chanter juste des enfants,ce temps à nous produire devant des publics de parents,ce temps passé à canaliser des énergies, des attentions, à apaiser des tensions,à exulter par le chant,à travailler en somme,tout cela fut balayé en un geste rageur de la main...
    Quand il vit que j'avais été si populaire près de l'étang de Berre,l'inspecteur me mit dans un local Algéco et me fit faire des photocopies.Je passai des journées insignifiantes dans ce placard constellé parfois de crottes de rats et qui a été détruit parce qu'il contenait de l'amiante.
    puis quand il vit que les ZEP, la solitude,ne m 'affectaient pas il me fit courir dans tous les sens et me fit reprendre un poste à trois classes,dans des classes surchauffées.M'inspecta un vendredi après midi par un temps d'orage, moment où les enfants sont le plus excités avec une classe de ZEP que j'avais eue quelques demi journées précédemment,en faisant hausser le chauffage par le directeur.J'eus ce jour une petite fille de migrants qui ne parlait pas le français et constatai qu'elle ne comprenait rien aux consignes parce qu'elle parlait une autre langue.Il interprêta cela comme un manque de pédagogie.Je continuai à courir ,eus souvent les classes de toute une école entière,lors des équipes éducatives.J'eus ensuite dans l'effectif de trois classes, une élève handicapée qu'il fallut sans AVS transporter dans le bus et il fallait soulever et brandir cinquante kilos d'un corps inerte et paralysé.Il faisait chaud ,j'étais surmené avec ce poste à trois classes surchauffée par un début d'été torride.
    je fis un malaise vagal.Il me sous nota nettement et me renvoya sur Aix.
    Je revins donc à mes amours pour faire encore trois classes différentes.Sur deux écoles.
    J'appris qu'on m'avait mise autrefois à l'école que je qualifiais mentalement du nom de "l'école des vieilles folles"(j'en tairai le nom) à cause du drôle de comportement de certaines institutrices, pour me forcer à prendre une direction d'école.Dans l'état où j'étais avec mes opérations, je crois que c'était peine perdue.
    Avant de partir de La dernière école maternelle dans laquelle j'officiai autour de l'étang de Berre une mère d'élève me dit que j'étais "trop artiste" pour les parents de l'école;Les enfants chantaient des comptines pendant le dernier quart d'heure de l'attente de l'heure des mamans!Ils faisaient pourtant la même chose que les enfants de la classe d'à côté.Et avaient eu le même type d'évaluation.C'est pourtant un beau compliment qu'elle me fit.
    A Ventabren au karaoké,,heureusement,il y avait des gens qui me parlaient d'autre chose que de pédagogie.C'était mon petit clan.Mon oxygène;mine de rien,ces personnes m'ont fait supporter grâce à leur gentillesse et à leur chaleur et leur accueil,des temps difficiles et très durs,avec des heures de trajet,des changements constants,des adaptations continuelles,des publics différents.
    J'inscrivais sur les feuillets des chansons variées à chaque fois.Le DJ T.... me faisait souvent faire les balances et réglages du début de soirée.Il est sympa et nature,il vient avec ses chapeaux,ses instruments de musique,il met l'ambiance ,salue tout le monde et on passe une gentille soirée.Parfois il se moque de mes choix,il croit que je n'y arriverai pas et paf, ça passe.Ca l'intrigue,ça l'agace aussi,il me regarde d'un air incrédule qui me fait rire...Parfois il me dit que je lui mets des chansons qu'il ne se souvenait pas d'avoir dans son livret.La plupart des habitués sont assez prévisibles, ils ont un répertoire de chansons et se tiennent aux titres qu'ils ont choisis.Pas moi.J'apprends sans cesse.Je change,je bouscule mes habitudes, de toutes façons,l'habitude, les rituels me sclérosent et m'ennuient.Je n'ai pas envie de n'utiliser que 10% de mon cerveau.
    Alors ces derniers temps,pour le chambrer un peu à chaque fois que je lui sors un titre ,je lui dis :one more.
    la dernière fois j'ai fait une petite liste des chansons que je suis capable de chanter.
    Je n'ai pas compté les chansons pour enfants,les comptines;
    j'ai réussi à écrire trois cent vingt titres.Heureusement que les paroles s'affichent sur l'écran car je ne suis pas sûre de me souvenir de toutes les paroles,Nagui peut toujours m'attendre!
  8. querida13
    Cette année là ,j'eus droit à une proposition malhonnête durant mon inspection.Le supérieur hiérarchique partait à la retraite à la fin de l'année,il se lâchait et perdait le sens des limites.
    Je le remis en place;ma note pédagogique baissa;Les élèves que l'on m'avait triés sur le volet cette année là(je le sus par un élève de CM2 à la récréation qui ingénument m'avoua que j'avais eus les pires élèves de cette école),étaient difficiles,certains étaient sournois et s'ingéniaient à faire réagir un élève ombrageux en le provoquant par des manoeuvres occultes que je m'ingéniais à déjouer et à mettre en évidence.
    Ils se déconsidérèrent aux yeux de leurs petits camarades car il devenait évident qu'ils faisaient punir injustement celui qui s'énervait depuis pas mal de temps (cela durait depuis quelques années,il en devenait dingue,le pauvre,et ses résultats avaient chuté!Du coup, remis en confiance les résultats du gamin se remirent à remonter en flèche!)ils cessèrent vite leur petit jeu,car je convoquais les parents à chaque fois qu'ils le titillaient.Ils se vengèrent en jouant les victimes innocentes auprès de leurs parents qui se convainquirent que j'avais leurs enfants dans le nez et que je n'avais aucune autorité.J'ai dû retenir fermement l'un d'entre eux qui allait fermer brutalement une porte battante sur les doigts d'un camarade,la mère exigea des excuses parce que j'avais touché son gamin...Ils trouvèrent n'importe quoi!
    Pourtant avec ces élèves, je fis de remarquables avancées.Ils apprirent à coopérer par le sport,à chanter ensemble et donnèrent un concert de chants de noël mémorable en organisant la salle en un tournemain.En orthographe et conjugaison,ils avancèrent à pas de géant.
    Comme j'avais été harcelée dans mon travail,j'allai en tribunal administratif.Et malgré la grande fatigue qui harassait mon dos je dus encore me défendre,monter des dossiers,faire des démarches.
    Je crois que c'était l'énergie des mères qui me portait.
    L'année suivante,les dossiers bouclés,je renonçai à avoir ma propre classe,et je pris des décharges.Si je rechutais au moins les élèves auraient un maître titulaire.
    Après avoir travaillé à mes débuts avec des enfants du plus bas niveau social,je travaillai vingt cinq ans après mes débuts avec des enfants de la bourgeoisie et même de la noblesse.
    Sur l'une des classes,j'eus pour collègue une sorte de vieille folle maniaque qui refusait que je touche quoi que ce soit des affaires de la classe prenant cela comme un affront personnel que j'utilise une paire de ciseaux pour couper des photocopies ou que je m'asseye sur la chaise du service qu'elle considérait comme SA propriété.Elle m'avait réservé un bureau tout branlant,qu'elle avait pris soin de mettre au fin fond de la classe,classe qui avait des plafonds très hauts et était assez sonore. Avec la maîtresse de la classe d'en face, elles se détestaient cordialement,elles s'invectivaient souvent,devant les élèves,prenant les collègues à partie...Oh,là,là,quel cirque!J'étais fort mal à l'aise!
    Un collègue directeur,m'informa que c'était la forme d'humiliation qu'on avait choisie en haut lieu pour faire comprendre aux instits qu'l était temps de prendre une direction d'école,mais dans l'état où je me trouvais,avec parfois encore de longues hémorragies,je ne risquais pas de prendre quoi que ce soit.
    A partir du moment où l'on sut que ma note avait baissé les langues se déchaînèrent ,des lettres de calomnies circulèrent.Moi,j'en apprenais de belles:ça couchaillait sévèrement,les promotions canapé étaient probables.
    Je trouvais des intrications- et pas que hiérarchiques-,entre les personnes entre les pattes desquelles j'étais passée.Une directrice,maîtresse d'un inspecteur, me demanda même de faire une déclaration d'accident après qu'un enfant se fût couronné le genou en dérapant sur un plot en sport.
    Un jour ,une cantinière assez rogue,se dégela bizarrement pour l'occasion, vint faire l'appel et joua très inhabituellement les chauffeuses de salle.Elle fit rire bruyamment les enfants ,les fit délirer un peu en jouant les tatas Yoyo.Je fus intriguée.
    Je sus que l'inspecteur était dans les couloirs et il a envoyé un rapport disant qu'il avait entendu que la classe était très agitée alors que j'en étais en charge.
    Haro sur le baudet,j'avais fait ds vagues;je gagnai mon affaire en tribunal administratif;Aux trois quarts de l'année,je fus "déportée" sur Vitrolles.
  9. querida13
    Il y a trente écoles en ZEP à Marseille,de nos jours elles sont baptisées zone violence;Je passerai dans treize au début de carrière et dans treize autres à la fin.Je les connais presque toutes, même celle où l'on tire à la kalachnikov maintenant.Je connais celles de Vitrolles et celle d'Aix.
    Il y a quelques temps, je lisais une interview de Christine Bravo,cette première de promo,qui posait dans sa première école en se targuant d'avoir commencé comme instit quelques misérables petites années!Je me dis qu'elle n'a pas fait long feu dans la profession pour se vanter autant de l'avoir exercée!
    Tenir trente ans,c'est avoir le sens de l'orientation, savoir trimballer son matériel,s'adapter dans les dix matières que vous enseignez aux huit niveaux de classe que l'on peut avoir dans les classes maternelles ou primaires.Organiser l'espace classe,repérer les terrains de sports, et adapter ses séances à l'espace ainsi qu'au matériel disponible,Trouver du matériel à jour parce que les écoles des quartiers pauvres sont souvent extrêmement mal équipées en matériel pédagogique pour enseignants et ce qui reste date du siècle dernier (encore que de nos jours,avec le développement de l'informatique ,il y a des facilités).C'est faire des recherches,créer ses documents,acheter du matériel ,gérer une coopérative,savoir s'orienter dans des écoles diverses,se renseigner rapidement sur la configuration des lieux, trouver des stratégies pour appeler les enfants qu'on ne connaît ni d'Adam ni d'Eve , parfois baptisés des noms bizarres donnés au bout du monde et les restituer à leurs parents,subir les critiques d'un inspecteur qui vient vous voir une fois tous les quatre ans et qui vous sert une volée de bois vert pour finalement vous augmenter un demi point avare à votre note pédagogique,ce qui vous fait avancer à l'ancienneté alors que vous en bavez des ronds de chapeau,quand il ne vous rétrograde pas quand vous avez un coup de mou(ou que vous êtes carrément malade),être appelée à huit heures vingt pour un remplacement à huit heures trente,et enchaîner avec les soutiens avec sa quatrième heure dans la semaine ,savoir où aller manger entre midi et demi et une heure,Faire entre trente minutes et une heure de trajet pour aller bosser et revenir,maîtriser le matériel de reprographie,s'adapter aux cahiers d'un autre,à sa manière de classer le travail,assister à des conférences pédagogiques,à des réunions,organiser des événements pour collecter des fonds:kermesse,spectacle,vide grenier...Organiser des sorties et remplir les documents pour avoir l'aval du supérieur hiérarchique,s'adapter à un nouvel environnement,gérer les parents,savoir régler les conflits avec enfants,parents,hiérarchie,savoir s'adapter aux lubies des ministres et depuis que je suis scolarisée il y a dû en avoir cinq ou six majeures,accueillir des stagiaires,savoir travailler des week -ends entiers lors des évaluations pour remplir avec des stylos à couleurs des livrets atrocement épais et longs à renseigner et à transporter avec des paquets de cahiers épais eux aussi quand l'instit de notre enfance se contentait d'inscrire la matière et la note en face sur une seule feuille!...Se situer dans le programmes et instructions officielles (des pour chacune des classes où vous débarquez!Connaitre le projet d'école,le plan d'évacuation,le système d'évaluations,avoir où sont planqués les documents de'urgence,savoir s'il y a des PAE s'occuper d'un gamin handicapé s'il y en a un dans la classe!.
    En ce moment,il paraît qu'on manque de deux mille profs!
    Ceux qui sont restés sont morts à la tâche, je crois, tu as bien fait de t'envoler,Christine,mais...Ne la ramène pas trop quand même!
    Après avoir traversé une enfance mouvementée, des années de forçage vocal,Tchernobyl,les écoles insalubres,un accouchement difficile,des nuits perturbées,une carrière remuante,
    alors que bon nombre de personnes se faisaient opérer de la thyroïde,je me mis à faire angine sur angine à être enrouée et à être très lasse.
    Puis cela passa quand je refis mes nuits et arrêtai un régime amaigrissant que j'avais fait pour perdre les kilos de ma grossesse.
    Je repris contact avec le copain de l'école normale qui m'avait accompagnée au piano lors de mon numéro ,nous montâmes un petit spectacle à l'intérieur d'un centre social, d'une douzaine d'arias ..Il me présenta une autre pianiste qui se proposa pour m'accompagner,la pianiste me présenta un professeur de chant ,qui était jury de concours.
    Je me remis à travailler et obtins un premier prix.
    je participai à un autre spectacle à l'église de sainte Marguerite et cette fois ci j'étais accompagnée d'un hautbois et je chantai en allemand.Pour ne pas massacrer les paroles,mon frère me lut le texte et j'inscrivis la prononciation en phonétique.
    Ce fut un moment magnifique .L'acoustique était parfaite,ma voix s'élevait et se répercutait sur les voûtes et résonnait avec clarté,on sentait toute la richesse des harmoniques.Instant de grâce parfaite, applaudissements, acclamations.
    Un vendeur de pianos marseillais vint me voir à l'entracte et me félicita chaudement,il me dit :
    -On sent que vous avez appris l'allemand.
    j'éclatai joyeusement de rire et corrigeai:
    -On sent que mon frère ,qui lui, a appris l'allemand,m'a fait répéter mon texte parfaitement.
    -en tous cas ,bravo,je vous souhaite une longue carrière ,c'est bien parti.
    J'acceptai le compliment .Mais il se trompait.
    Je passai deux concours nationaux ,y rencontrai une de mes anciennes camarades de classe qui ,elle ,a fait de la scène,depuis,je fus rapidment éliminée.j'avais appris le écès e ma grand-mère et j'us la voix voilée e chagrin d'abord.Puis le angine réapparurent.Elles ne se soignaient plus.
    J'eu bientôt dans le cou une petite boule en forme de peite mirabelle.
    On détecta une tumeur.
    On m'opéra.
    Quand je me réveillai je ne parvenais plus à parler normalement!
  10. querida13
    Aphone,je reçois mon premier prix de chant un mois après son passage,totalement aphone!Je suis d'une tristesse profonde!Jamais victoire ne fut aussi amère!J'ai la mort dans l'âme!Ce diplôme,je ne pourrai jamais m'en servir!
    L'ORL qui m'a opérée devait faire une biopsie.mais quand il a ouvert mon cou à la clinique de Marseille nommée,-vous saisirez l'humour de la situation-,chantecler(!!!) il est tombé sur une tumeur développée au dépens du nerf pneumogastrique qu'il fallait retirer très vite sinon elle allait coller à des veines et il aurait fallu pratiquer des pontages.
    Cette tumeur bénigne extrêmement rare a pour nom: chémodectome.
    Au premier repas après l'opération, ,je manque m'étouffer , je n'avale plus ni l'eau ,ni la nourriture.Ma langue est à moitié paralysée.quand je la tire,elle va de travers!Je parle d'une voix hachée,il faut reprendre souffle tous les trois mots.Le médecin diagnostique une paralysie récurrentielle.Le nerf pneumogastrique est attaché au nerf récurrent, quand l'un est sectionné l'autre ne fonctionne plus.Donc,j'ai une corde vocale,l'hémilangue gauche paralysées.Ma voisine de chambre,opérée d'une éventration me remonte le moral.La pauvre découvre l'horreur de ma situation en même temps que moi!Je trouve des stratégies pour ne pas m'étouffer en mangeant mais je fais pas mal de fausses voies.De plus la sensation quand je passe ma main sur le cou et sur le maxillaire est différente.
    En sortant de l'hôpital ,je croise dans l'ascenseur,un jeune homme qui vient de l'étage inférieur,il a eu un accident de moto il y a quelques jours.Il est extrêmement jeune,extrêmement beau et il est totalement paralysé.
    Il me sourit pourtant!Je n'ai rien à côté de ce qu'il endure et lui sourit!c'est à ce moment là que je me mets à relativiser:Il y a des gens dans un état pire que le mien!A partir de ce moment là, je décide de me battre;
    Je m'inscris à la rééducation.La soeur d'une de mes amies est apprentie orthophoniste ,elle m'indique le nom de deux femmes chevronnées et réputées sur la région.Je prends rendez- vous avec elles.
    Du côté de l'école ,je vais remplir des papiers d'absence.La directrice qui m'a vue manquer quelques semaines dans l'année parce que je multipliais les angines et aphonies croyait que je faisais "encore du cirque" selon ses termes et est surprise de me voir débarquer avec un énorme pansement dans le cou!Une collègue vient m'apprendre qu'une autre collègue , alors qu'elle me remplaçait de service de cour pendant mon absence,m'a fait endosser un accident scolaire survenu à un élève alors que j'étais à l'hôpital,tirons sur l'ambulance!
    Du reste personne de l'éducation nationale ne viendra prendre de mes nouvelles,durant les quatre mois de mon absence!Ni médecin de prévention ,ni inspecteur,ni collègue,ni directeur,ni syndicaliste,ni personnel académique de la DRH!Une indifférence totale,insultante venant d'une administration désincarnée et inhumaine!
    Après la rééducation, on me donnera enfin une classe à l'année et celle que je préfère le CE2
    les effectifs? entre 27 et trente élèves!
    A aucun moment personne n'est venu vérifier dans quel état j'étais.La première inspection dans cette circonscription fera mention d'une importante opération des cordes vocales ce qui est faux ,les cordes sont en bon état!Personne ne me dit quoi faire...C'était marche ou crève,j'ai donc marché!
    J'ai donc appris à faire marcher:pour le souffle je savais toujours comment le placer,les techniques de chant m'ont été bien utiles.
    L'ORL me dit que la corde vocale valide allait compenser sur la corde vocale invalide.Je perdais de l'air à la phonation parce que mes cordes vocales ne s'accolaient que par le bas et plus par le haut.
    Il fallait en tournant le cou ,en pressant manuellement sur la corde vocale valide en appuyant sur le cou faire descendre la corde vocale sur l'autre pour limiter la perte d'air!
    Au bout d'un mois de rééducation ,je chante une chanson à mon fils.Je chante juste mais c'est haché, ma voix a perdu sept notes les suraiguës,la voie parlée est aiguë,j'ai toujours du mal à reprendre souffle et je me sens extrêmement fatiguée.
    Je me ménage:je stoppe les invitations;je rationne mes sorties.On me propose de faire une intervention et de reprendre des cours pour chanteurs à la voix abîmée.Je décline l'offre.Ma priorité est de me retaper pas de courir au milieu des embouteillages,de la pollution et avoir été trifouillée une fois(avec quel résultat) m'avait déjà suffi pour l'année.Déjà ,je mange mieux,je m'étouffe encore parfois en buvant.
    A ce moment là,mon mari va touche une somme d'argent car la boîte dans laquelle il est employé a fermé.I il retrouvera un travail équivalent quasi instantanément un peu mieux payé.Il m'offre un piano!
  11. querida13
    Ah ,ce piano, quel cirque pour l'obtenir!Je veux un Clavinova électrique avec des rythmes,des sonorités d'instruments différents et pas d'accordements ruineux à faire réaliser tous les cinq ans et surtout le son d'un piano de concert.
    Mais en attendant que l'on nous le livre,le vendeur nous en prête un autre.On verse des arrhes,mais le piano mettra six mois à nous parvenir.Mon mari et forcé de se déplacer en magasin aller faire accélérer le mouvement en tempêtant quelque peu, et moi de faire une lettre recommandée avec AR réclamant les arrhes sous quinzaine si le contrat n'était pas honoré.Le piano arrive enfin et celui qui est prêté est remporté vers d'autres cieux.
    Je ne chante plus de lyrique? OK, la musique est toujours là pour moi!J'apprends une trentaine de morceaux pour mon loisir....
    A l'école les enfants sont ravis,je les fais chanter une demi heure deux matins par semaine,avec l'orgue, ils apprennent la mélodie juste et très rapidement,on chante en sortie,on va chanter les chants dans la classe du directeur à Noël et le directeur enchanté ,cela va de soi, décide de faire un spectacle de fin d'année à la fin de la kermesse annuelle et achète une sono!A la fin de l'année mes élèves qui ont chanté en public six chansons dont une en anglais m'acclament et scandent mon nom.Ils ont en CE2 chanté un medley en canon, c'était magnifiquement réussi!
    Je fais écrire les gamins davantage par rapport à avant.
    L'année suivante malgré ma voix déglinguée qui porte mal sur les terrains de sport, je parviens à les entraîner au handball et lors d'une rencontre USEP on flanque une pâtée mémorable sur le score de trente deux à deux à une école invitée!Les gamins sont dégoûtés:"c'était trop facile maîtresse,ils ne savent même pas jouer ,ils se sont présentés ,ils n'étaient même pas entraînés!"me disent- ils en riant, encore surpris de de leur victoire facile!
    Pendant ces années-là était organisé un événement sportif qui s'appelait la fête du stade.
    A certains moments de l'année les profs s'absentaient de leur classe une demi-journée pour aller apprendre deux danses et des déplacements sur des terrains puis on les transmettait aux enfants .ensuite avec une partie des écoles participantes de Marseille (environ deux cents) on allait sur le stade vélodrome aller exécuter des mouvements d'ensemble dansés en synchronisation;C'était merveilleux!Je pense que pour beaucoup, c'était leur première participation à des spectacles grandioses et des étoiles brillaient dans les yeux!j'en ai fait cinq!
    Je rame,parfois je suis enrouée,parfois je suis totalement aphone et suis obligée de m'arrêter.Mon fils est à la maternelle puis arrive à la primaire.Je tiens pour lui ,aussi!Une dame vient me voir un jour ,elle est mère d'un garçonnet adorable de la classe:elle est atteinte à trente ans ,d'une leucémie, elle vient me demander de prendre soin de son enfant pendant l'année où elle se battra contre cette maladie.
    Finalement, j'ai toujours relativisé mon handicap.
    Je l'ai considéré comme un dent qui tombe,les cheveux que l'on perd,une mobilité que l'on n'a plus à cause de la vieillesse.J'ai passionnément aimé faire du patin à roulette quand j'étais petite je n'en fais plus;A l'âge adulte j'ai aussi aimé de même faire du chant lyrique.Autre âge,autre goûts, j'accuse le coup, j'ai des regrets mais il faut tant bien que mal tourner la page;"comme un joueur de foot blessé qui ne peut plus faire de la compétition" me dit à juste titre un de mes amis!
  12. querida13
    Des gens ont transité par wagons dans ma vie;certains pour un laps de temps, de brefs instants,d'autres pour quelques minutes...Passants qui passent ,commerçants...
    D'autres pour quelques jours,pour quelques semaines ou pour quelques mois voire des années.(famille éloignée ,camarades de classe,voisins,copains de vacances,collègues,élèves ,profs,ETC...)
    A part les gens de ma famille,les grands parents monolithiques tant ils ont eu la solidité du roc,rares sont les personnes qui résistent à l'épreuve du temps,mais aussi à celle des épreuves et de la maladie, de l'ennui, du désintérêt, ou à l'usure du temps.
    Il y a pourtant des gens que je regrette, que je reverrais bien, mais je deviens fatigable et je crains de les importuner;parfois je sens bien que des gens que je croise çà et là, me connaissent et qu'ils hésitent à me saluer, peut -être pour les mêmes raisons que les miennes.J'ai moi aussi du mal à les remettre dans leur contexte.Ce serait simple de me dire, je suis untel vous me reconnaissez? et de venir bavarder avec moi mais ils renoncent à le faire!Il y a ceux qui échangent des numéros et qui ne rappellent pas.
    Pour la plupart, je n'ai guère choisi de partager l'espace lorsqu'ils sont rentrés en contact avec plus ou moins de gentillesse avec moi ou plus ou moins d'animosité,d'indifférence,d'autorité. Ils y sont venus souvent par le hasard d'une classe d'âge identique à la mienne ou parce qu'ils avaient besoin de moi (ou moi d'eux),certains qui m'étaient totalement indifférents et que je n'aurais jamais introduits dans ma vie y sont ainsi rentrés avec leurs gros sabots l'ont parfois bousculée,piétinée,chamboulée et puis sont repartis aussi sec sans autre forme de procès.
    Il y a eu aussi ceux que j'aurais aimé retenir et qui sont partis au loin et ceux que la mort a emportés irrémédiablement!Je suis un peu écoeurée,un peu mal à l'aise,un peu bousculée nous passons,nous sommes interchangeables,nous sommes utilisés,nous sommes abordés,nous sommes jetés au suivant.Dommage,en général, il y a beaucoup de gens que j'ai bien aimé côtoyer dans la vie!Bien que j'aie l'air un peu froid ,comme ça !Pourtant ,moment de grâce,il est des gens qui tiennent à nous,on ne sait par quelle alchimie...
    J'ai quelques amies que j'affectionne beaucoup,elles durent depuis longtemps.
    Une grande amie avec qui je partage les passions du ski et du chant m'a dit :bon tu as perdu la voix ,tu n'as plus la même puissance, ni le même timbre,mais tu chantes plus juste que la plupart des gens ,ils faut voir comment chantent certains!
    -Pourquoi tu as des éléments de comparaison?
    -Oui déjà puisque j'enseigne moi aussi et ce ne sont que des enfants..
    -Mais je suis une adulte!
    -Justement,en ce moment sur la côte,de nouveaux concepts de bars et de boîtes ouvrent, et ils fonctionnent sur une mode importée du Japon,les gens mangent ou boivent ou dansent et à un moment donné de la soirée un animateur organise un tour de chant et ce sont les clients qui chantent!ca s'appelle des karaokés.
    -J'imagine la qualité de la prestation après qu'ils ont bu! raillai-je!
    -Eh bien justement,comme ce n'est pas d'une qualité exceptionnelle tu ne risques rien à essayer, de plus les gens ne sont pas là pour juger mais ils s'amusent et ils sont indulgents si c'est mauvais ,ils aident les autres en chantant en choeur et on finit tous par chanter ensemble ,c'est drôlement sympathique tu verras!
    J'hésitai mais j'étais tentée.
    Elle reprit:
    -tu sais il y a des tas d'artistes qui ont eu des problèmes vocaux regarde Bonnie Tyler sa voix est cassée mis elle chante quand même,comme Delpech.
    Cela faisait un sacré bout de temps que je n'avais chanté que des comptines à mon enfant et que je chantais devant les enfants de ma classe pour leur apprendre des chansons, en plus de leur faire cours,depuis un an et demie après mon intervention.Je tentai le coup,un soir dans une boîte karaoké de la côte.
    A une heure donnée,après avoir dansé, des livrets se mirent à circuler dans la boîte et des télévisions se mirent à s'éclairer,à l'image s'afficha un petit perroquet chantant dans un micro.des petits papiers furent distribués il fallait écrire son nom et le titre d'une chanson qu'on allait interpréter. J'inscrivis les champs Elysées de Joe Dassin.une cassette vidéo (pas de DVD encore,ni d'ordinateur) se mit à faire défiler l'accompagnement musical et des paroles qui s'éclairaient d'une couleur différente au fur et à mesure que les paroles devaient être chantées ce qui facilitait le départ après introduction!
    Je passai la première.
    L'animateur avertit le public:
    -Et maintenant nous allons accueillir (mon prénom) et je vous demande d'être de la plus grande indulgence vis à vis d'elle car elle n'est pas très habituée à se produire en public et il ne faut pas lui en vouloir si elle se trompe ou ne chante pas bien.
    Je regarde, profondément surprise, un gars que je ne connaissais ni d'Adam ni d'Eve dégoiser un chapelet ininterrompu de billevesées sur moi ,qu'il voyait pour la première fois et qu'il ne reverrait certainement jamais plus,avec l'assurance de quelqu'un qui était de mon cercle d'amis intimes!
    Pour le coup ,j'ai envie de me dépasser.Le micro me restitue la puissance perdue,je reprends souffle en l'écartant de ma bouche et j'ai conscience qu'il me faut produire un effort terrible pour prendre un air qui s'enfuit bien trop rapidement dès que j'émets mes sons.Mais je connais cette chanson sur le bout des doigts,depuis l'enfance et je l'interprête juste et en rythme.
    Les conversations s'arrêtent ,le public écoute et les gens apprécient,ils finissent par m'applaudir à tout rompre;Je jette un oeil de côté à l'animateur,il ouvre une bouche de poisson bien attrapé et ses bras lui en tombent de surprise .Dès que la musique cesse ,je vois qu'il est interloqué et si surpris à son tour qu'il laisse un petit silence magique s'installer;il me regarde,admiratif et dit finalement:
    -mais..mais...Mais c'est que c'est très bien!
  13. querida13
    Sur la douzaine de personnes qui passèrent après moi ce soir -là, une seule chanta un morceau placé avec une voix travaillée.Les autres personnes chantaient maladroitement,un peu à la manière des enfants,et comme prévu,les gens les aidaient à venir à bout du morceau qui finissait par des applaudissements encourageants.
    La plupart des artistes montent leur numéro,se font connaître, voyagent,se déplacent possèdent leur organisation et leur staff.Je ne sais pas si ils ont une fortune personnelle,ni comment ils gagnent leur vie,ni qui les engage qui les rémunère,comment ils négocient un contrat,qui ils contactent,comment on fabrique et distribue un disque ou une production,comment on la diffuse,comment l'on rencontre les animateurs de spectacles télévisuels,comment ils peuvent se produire dans une grande salle de concert,comment on fait la première partie du spectacle d'un autre chanteur plus connu;quand on m'a donné des cours cela a toujours été des cours de technique instrumentale ou vocale assortis de quelques expériences scéniques mais cela n'a jamais été des cours de gestion de carrière artistique.De plus, je n'ai aucune personne dans mon entourage qui est un artiste à proprement parler sur qui prendre exemple;de ce côté là, c'est le flou...artistique.
    A vrai dire ,je n'avais pas de problème pour me nourrir, ni pour me loger,même si ce n'était pas la vie de château!Ma mésaventure vocale m'avait fait revoir mes prétentions à la baisse même si je ne savais pas dans quel sens me diriger!
    J'ai senti qu'il fallait que je reprenne confiance en moi car j'étais profondément affectée par cette saleté de tumeur bénigne,car pour être bénigne,elle ne m'en avait pas moins perturbé l'existence et été source de handicap et de gêne, et j'ai pris conscience qu'il fallait que je me familiarise avec le public pour que je règle mes problèmes de trac.
    Je commençai à chercher des cassettes de karaoké et je m'entraînai à la maison.
    Je choisis des lieux de vacances et notamment les campings où il y avait des animations karaoké;que ce soit au ski ,à la plage,je repérais systématiquement les lieux (restaurants,bars ,boîtes...)où l'on chantait.Je repris les commandes de ma vie:à un moment on en a assez d'être le consommateur gavé,l'admirateur passif, on a envie d'être fier de ce que l'on fait et d'être dans le bagad de Lann Bihoué comme dit Souchon!On a envie de reprendre les rênes de son existence,de faire et de produire à son tour.
    J'avais bien conscience que c'est le restaurateur, le barman ,l'animateur qui tiraient les marrons du feu de mon talent,les sales tiques,mais comme j'aime bien sortir, histoire de ne pas passer toute ma vie qu'avec des enfants,autant que cela me serve car mon envie, c'est aussi de chanter.J'aurais aimé en vivre,mais tant pis,personne ne me le proposait..;Alors profitez-en: c'est gratuit!
    Chaque été, je changeai de camping:je me produisis dans tous les karaokés et soirées de la côte méditerranéenne et de la côte Atlantique jusqu'à l'île de Ré .Dans le même temps, la plupart des installations se modernisèrent en passant de la cassette vidéo au vidéo disque.
    La plupart du temps après avoir fait le tour des candidats, l'animateur me fait chanter entre deux et cinq titres.D'année en année ,mon répertoire s'étoffe.Je connais plus de trois cents titres,"un vrai juke box", raille mon orthophoniste.
    Il faut dire que la production,relayée par les médias,qui diffusent ds programmes sur le monde entier,est énorme!Je suppose que si j'avais continué sur ma formation classique j'aurais engrangé un répertoire d'une centaine d'arias,de mélodies ou d'extraits d'opéras que je n'aurais pas forcément appréciés,alors que le répertoire de la pop que j'apprécie est beaucoup plus étendu.
    Vous m'avez peut être entendue chanter accompagnée à la guitare,à l'orgue, à l'orchestre ,au piano ou a capella,des chants et de comptines d 'enfants,des mélodies classiques,des airs de tous pays,de l'opéra,un peu partout en France .Vous m'avez écouté jouer de l'orgue ou du piano ou de la flûte,vous m'avez peut être applaudie ou acclamée,vous m'avez croisée,j'ai peut-être dirigé en chorale vos enfants, vous m'avez peut être parlé,nous avons peut-être passé les vacances à quelques mètres les uns des autres,vous m'avez vue trimballer mon orgue de classe en classe,je vous ai peut-être acheté des objets,vous m'avez soignée, servie au restaurant,dans les administrations,logée dans des locations,vous avez mangé avec moi,avez été mes copains,mes collègues de travail,je vous ai vendu mes objets au vide grenier du coin ,peut -être!...Parfois vous m'avez mal accueillie ou je vous ai mal accueillis parce que j'ai aussi le droit d'être de mauvaise humeur et d'avoir des émotions et des mouvements d'impatience quand je suis exténuée ou mécontente ou de mauvais poil!
    J'ai eu du succès.Il a été confidentiel:pas de couverture de Podium,je ne suis pas passée chez Drucker,personne ne s'arrache mes autographes,mon arrivée quelque part ne crée pas d'émeutes,personne ne me déroule de tapis rouge, ni n'envoie de policiers pour me garder,ou de fleurs quand j'arrive quelque part.Mon loisir c'est d'être parfois la chanteuse de bal comme dans la chanson de Goldman.
    Mais je suis toujours happée par quelque chose de bien collectif qui étouffe ma personnalité:école,colonie,camp,chorale,theâtre, ou la petite entreprise des autres, en somme!Et puis,quelle exigence autour des artistes,désormais!
    Il faut qu'elles soient belles,jeunes,quitte à être retouchées par la chirurgie esthétique,et dénudées et parler sexe comme Madonna ou Farmer. Est ce que Piaf avec son mètre cinquante, ses robes de veuve et sa vie en rose aurait percé de nos jours?
  14. querida13
    Mes amis ont joué le jeu,tous m'ont accompagnée au karaoké,fait découvrir des karaokés différents et quand ils en ont eu marre,j'ai trouvé d'autres amis que cela intéressait.
    Ainsi j'apprends de nouvelles chansons,je révise les anciennes et lorsque les soirées de quelques endroits tournent à la même répétition de la même soirée tant les habitués chantent leurs chansons habituelles,je varie en changeant de titres .Et comme je finis par en connaître près de trois cents, le choix est large.
    J'ai sympathisé avec des DJ,j'ai été félicitée par des personnes que mes chants avaient émus,de parfaits inconnus m'ont invitée à chanter avec eux,on m'a offert des verres,des repas,des parts de gâteaux d'anniversaire fêtés au karaoké,juste parce que l'on était content de m'avoir entendue chanter et parce que j'avais contribué à embellir la soirée!!
    Un jour,je crois une femme assez mûre qui dit à sa fille:
    celle là tout ce qui l'intéresse c'est de chanter!
    C'est plutôt avoir une vision réductrice de mon existence .
    Disons que la musique est une composante importante dans ma vie.
    Je ne suis certes pas loin de penser comme Nietszche que :
    "Sans la musique ,la vie est une erreur!"
    Parfois nous avons enduré de pénibles soirées où nombre de chanteurs étaient médiocres.
    Les pires sont les débutants qui se croient des experts et qui vous inscrivent au programme des morceaux de bravoure terribles comme I will survive de Gloria Gaynor.
    Non seulement il faut savoir lire l'anglais très vite car la chanteuse débite un chapelet de paroles virulentes contre un gars qui l'a plaquée et qui lui revient,mais encore il faut une belle souplesse vocale pour pouvoir placer cette mélodie rapide sur un accompagnement disco.Parfois la prestation de ces débutants consiste en deux piteux: I will survive à peine murmurés qui montrent que le chanteur novice n'a pas survécu à la difficulté;de plus le public ne peut que le laisser se dépatouiller tout seul parce que la chose est tellement technique que peu se risquent à la chanter!
    Dans chaque karaoké,il y a une imitation plus ou moins bien réussie de Johnny Hallyday.
    Il y a quelqu'un qui va imiter Piaf.Quelqu'un qui massacre le titre insignifiant d'un artiste mineur et chacun se demande pourquoi ce gars ou cette fille s'est évertuée à mémoriser cette daube.
    Il y a la chorale de copains éméchés qui braillent faux à tel point que l'auteur, souvent décédé, doit s'en retourner dans sa tombe.Parfois il y a un enfant surdoué, un peu perdu au milieu des adultes..il y a le duo bancal:le gars (ou la fille) chante juste,l'autre non,ou le gars braille de sa voix de ténor et couvre la fille qui murmure à la Birkin.Il y a l'audacieux qui inscrit le groupe de ses copains avec lui et ses copains ne connaissent pas la chanson et il se retrouve tout seul à la chanter très mal!
    Le spectacle est aussi dans la salle:
    il y a la personne qui se fait aveugler par la lumière stroboscopique,celle qui est trop près des baffles et qui sort de a salle bien saoulée, ivre de bruit avec des acouphènes, il y a celui que le DJ oublie et qui se morfond dans un coin,il y a l'amoureux éperdu qui regarde sa talentueuse dulcinée se produire avec des étoiles dans les yeux alors que la prestation est médiocre.Il y a l'homme aviné qui s'en ressert un autre.Il y a celui qui déteste la chanson et se bouche les oreilles.Tranche de vie!
  15. querida13
    Deux fois par mois pendant dix ans je chanterai entre deux et cinq chansons au karaoké.le patron du bar disait que j'étais de la famille!Je discutais avec l'équipe de cuisiniers et de serveuses,je les aimais bien.Le DJ m'avait à la bonne et un jour,il m'a enregistré un CD.J'ai chanté de magnifiques duos avec le patron du restaurant.C'était un célibataire craquant, brun et sexy,qui ressemblait à Jean Dujardin,et qui était toujours entouré de minettes! Quant à moi, J'ai passé des soirées entourée d'amis.
    Un soir,Une grande amie m'a un jour invitée et payé l'hôtel pour que je chante pour elle et sa soeur dans un karaoké à la Seyne sur mer!Les chansons que je connaissais et qu j'ai interprétées dans le répertoire d'accompagnements que possédait le bar étaient toutes tristes!Le propriétaire du bar a dit a ma copine:"elle a des problèmes existentiels."Elle aussi a eu envie de prendre des cours et s'est mise à chanter de son côté.Nous avons interprêté bon nombre de duos ensemble et nous estomaquons souvent une salle avec "casser la voix" ou "là bas" ou "si maman si".
    Mon mari aime bien pêcher:Il s'est trouvé un copain qui partageait le même hobby et dont la jeune amante aimait chanter alors de son côté,elle venait avec moi.Mon mari lui avait trouvé un travail au magasin.
    Nous avions mis au point des duos également:elle aimait particulièrement la solitudine de Laura Pausini.Elle ne possédait pas le registre pour interprêter le couplet final alors je prenais le relais et terminais la chanson;Egalement,avec elle,je prenais la voix de Joelle du groupe il était une fois dans leur tube:j'ai encore rêvé d 'elle!
    C'était l'année où Céline Dion s'est mise à chanter les chansons de Goldman.J'ai adoré tous les titres de cet album,alors je les ai tous appris.Nous avions pris l'habitude de chanter j'irai où tu iras toutes les deux et c'était en place alors que c'est une chanson pas spécialement facile.Nous avons visité nombre de karaokés sur Marseille,vers les plages et surtout celle du Prado.
    J'avais retrouvé un certain équilibre.Ce n'était plus de l'opéra,je n'en vivais pas,ma voix accusait parfois la fatigue,mis je faisais aussi ce qui me plaisait et ça me faisait du bien.Les gens étaient corrects et gentils avec moi,j'étais chaleureusement félicitée.
    En vacances,cet été là un grand karaoké était organisé en public à Argelès.C'était en plein air.Détestant attendre je me suis emparée d'un livret du répertoire et ai hâtivement inscrit :si j'étais un homme de Diane Tell au programme.Je suis passée la première!C'était une vraie scène avec un nombre impressionnant de gens.Je n'en menais pas large,en étant face,je sentais une certaine mollesse du genou,un malaise diffus..mais mon trac céda aux premières mesures.On m'écoutait favorablement.Sauf...mon mari et deux gars: je vis gesticuler mon mari qui parlait avec animation avec les deux badauds.J'en ratai la phrase finale et c'est le public qui termina.J'eus les félicitations dithyrambiques du DJ et j'entendis quelqu'un murmurer:
    Ca va être difficile de passer après ça!
    Je me dirigeai vers le trio et le ton montait:
    mon mari dit au gars,ben voilà ,tu vois c'est ma femme alors répète lui ce que tu viens de dire connard!
    Non,non ,ça va dit l'autre!
    Que se passe t-il dis je éberluée.
    Mon mari me tire à l'écart tandis que les autres s'éloignent.
    Ah toi me dit il tu chantes,tu chantes et pendant ce temps tu n'entends pas ce que j'entends!
    Qu'est ce qu'il ont dit?
    Ben, ça ne va pas te plaire...Ils disent que tu tiens bien le micro et qu'ils mettraient bien autre chose à la place!
    Je ricane:et tu veux qu'ils me répètent ça,je comprends pourquoi on ne les voit plus!
    Ignore-les,ces cons!
  16. querida13
    Ma petite collègue a fini par changer d'école.Elle allait mieux.J'ai appris avec l'expérience que les élèves sont comme le vin:il y a des bonnes et des mauvaises années!Quand on cumule quelques années difficiles on donne énormément de soi, si on n'est pas un peu aidé par une bonne ambiance ou de la solidarité entre collègues,on est démoralisé et physiquement on s'use plus vite.
    Je l'amenais encore à ce karaoké, à Aix, sur le cours Mirabeau,la royale, qui a fermé désormais,et sur celui de la rue d'Aubagne.Elle avait rencontré quelqu'un ,il parlait mariage et les amoureux sont souvent seuls au monde.Elle est venue un soir chanter avec son fiancé.Un chic type .Elle s'est mise à m'appeler de moins en moins...A sortir avec son copain plutôt qu'entre filles ce qui était dans mon esprit,tout à fait logique.Notre relation s'était distendue.
    Et puis un jour, je croise la mère d'un de mes élèves dans la galerie marchande du centre commercial,
    Alors que moi aussi j'avais demandé mon changement d'établissement ,histoire d'être dans une meilleure école bien plus rapprochée de chez moi ,ce qui me faisait gagner vingt minutes de trajet et qui scolarisait mon fils dans une école de meilleur niveau.
    "Vous ne savez pas ce qui lui est arrivée? me demande la mère ,surprise,vous sembliez pourtant être bonnes copines!"
    Non ,je ne savais rien.J'aurais mieux fait de ne rien savoir d'ailleurs!J'aurais mieux fait de m'engouffrer entre les écrins de la boutique du bijoutier,ne jamais croiser cette messagère du malheur!
    Elle s'était suicidée en sautant du troisième étage.Elle avait réduit les antidépresseurs,le médecins en avait changé, mais elle a rechuté.
    le soir même ,horrifiée ,j'ai téléphoné chez elle pour en avoir le coeur net,je suis tombée sur son copain qui m'a confirmé le drame.Oui,Elle était morte et même enterrée.Bouleversée,J'ai décliné l'offre d'aller me recueillir sur sa tombe.
    Cela fait vingt et quelque années que ça s'est passé,des pages se sont écrites et se sont tournées.Il me reste ce traumatisme, ce chagrin ,cette blessure.
    Un mois après en sa mémoire j'ai chanté vole de Céline Dion;
    Vole ,vole petite aile
    Ma douce,mon hirondelle,va t'en loin va t'en sereine
    qu'ici rien ne te retienne
    Quitte tes heures épuisés
    Oui vole tu l'as pas volé
    deviens souffle sois colombe pour t'envoler...
    J'ai fini épuisée ,en larmes la voix voilée de chagrin...et depuis
    Je ne puis entendre au fur et à mesure sans un gros serrement au coeur...In mémoriam.
    Car oui "sa plus belle bavure ,c'est de m'avoir laissée au fur et à mesure!"
  17. querida13
    Soudain la vie dans l'école où j'étais m'a semblé invivable et chargée d'émotions négatives,je voyais ma petite collègue y passer en pensée.De plus on me surmenait :les sorties finissaient bien après l'heure,et,pour ma part, ma journée n'était pas terminée avec la fin du travail:mon mari travaillait dans une ville voisine éloignée et j'assumais seule l'entretien du foyer et l'éducation de mon fils,les trajets,la sortie de l'école.Je fis quelques fausses couches,je me sentais épuisée.Pourtant j'ai adoré travailler avec les enfants de ce quartier de Marseille et les parents me gâtaient beaucoup.j'ai eu avec ma voix malade,cinq classes dont l'effectif était compris entre vingt-huit et trente élèves durant cinq ans.
    Je demandai ma mutation et l'obtins mais en contrepartie on me donna une classe près d'une maternelle (donc très bruyante pendant les récréations)extrêmement dégoûtante puisqu'elle servait de débarras pour divers matériaux qui servaient aux travaux manuels.Chutes de papiers,boites de chaussures,livres anciens et usagés,catalogues,bureaux souillés de glaise ou d'encre,matériel en sale état.J'eus à déblayer une véritable petite décharge de un mètre de hauteur sur chaque bureau et à aménager une classe propre.Cela me prit un semaine de travail intense pendant sept heures par jour en pleines chaleurs de fin d'année,il régnait une chaleur de serre en ct endroit .Pendant quatre ans on me donna tous les cours doubles en cycle III et je changeai chaque année de classe.
    Je vois en ce moment,des gens qui découvrent l'excellence éducative du chant ,véritable vecteur de projets ;Bien avant la réalisation des choristes ou de sister act jétais convaincue de cela.j'étais ce genre de pédagogue que certains n'hésitaient pas à qualifier de marginale!
    Quand vous prenez une bande d'enfants mal dégrossis en début d'année,montant faussement les degrés de la gamme,et qu'à la fin de l'année vous produisez une chorale,vous assistez à un miracle;Je produisis quatre chorales.En plus du travail ordinaire d'une classe.
    Les plans vigie pirate limitèrent nos sorties.Ces années -là il y eut une politique intéressante:on mit des emplois jeunes dans l'école et ils assuraient des ateliers bibliothèque et informatique et cela permettait à certains moments de la semaine de prendre les élèves les plus lents ou les plus faibles en demi-groupe et de les rattraper: c'était idéal,je me sentais beaucoup plus efficace avec des élèves en phase!Je tombai enceinte et eus mon second enfant :un garçon!
    Désireuse de me rapprocher du travail de mon mari ,car ses déplacements nous coûtaient cher en entretiens de voitures,en essence et en temps,je vendis notre appartement et pour faire la transition ,demandai un logement de fonction car à l'époque la mairie était tenue de proposer des logements de fonction pour les enseignants;on me l'octroya de très mauvaise grâce malgré les lois qui contraignaient les municipalités
    à loger ses maîtres.Débarrassée du surmenage et de la fatigue des trajets ,je devins plus efficace,il me suffisait de descendre à l'école,et j'étais sur place,de plus ,personne ne vandalisait l'école car il y avait toujours une présence.On décala ma classe d'une salle l'année suivante et le vacarme récréatif de la maternelle s'atténua!On disposait d'un gymnase et de terrains de sport magnifiques.On y était toutes les fins de journée.Les enfants adoraient!
    En revanche,l'appartement était plus petit.Il manquait une chambre.débarrassée d'un loyer trop lourd,je m'allégeai des dettes de la voiture, et commençai à envisager de faire construire ou d'acheter une maison.
    Pour commencer à envisager ce projet mon mari et moi
    avions pratiquement travaillé à temps plein pendant trente ans, si nous groupions les deux temps de nos carrières.Finir de payer le crédit prendrait encore vingt-cinq ans supplémentaires!
  18. querida13
    Je suis à Serre Chevalier,il n'y a presque personne dans ce bar karaoké.Le DJ se fait plaisir ,il me fait chanter sept chansons et me laisse partir en me regardant avec étonnement et à regret.
    Camping à l'île de Ré un été ,la prestation est médiocre, tous les chanteurs ânonnent ou font des couacs une animatrice pousse du bras le responsable des platines qui désorienté ne trouve plus personne à faire chanter et dit en me désignant du menton:
    -"Fais donc chanter la chanteuse supérieure!"
    Soudain je suis entourée d'une ribambelle de petits enfants aux yeux brillant d'admiration!Ils me regardent timides comme si j'étais une star!
    Un jour je passe une audition avec un orchestre semi professionnel.J'apprends trois chansons d'artistes mineurs qui ne me plaisent pas.Je ne convaincs pas.Ils ont pris une jeune femme qui possédait un gros registre de paroles.Mon registre à moi est dans ma tête!(sinon,j'ai bien un gros registre de comptines et de chants d'enfants avec ds partitions pour l'école..;et le chant classique!)
    A l'école,vers Noël ,on organise un goûter dans le centre social de Saint Jérôme,il y a une jolie exposition de peintures,mes élèves chantent des chants traditionnels accompagnés de mon nouvel orgue,-le précédent a rendu l'âme- acheté à crédit pour soutenir le chant des enfants:on dirait de petits anges :les parents en restent bouche bée et viennent me féliciter du travail visiblement accompli!
    L'année suivante on doit interpréter le chant final d'une pièce de théâtre ,pendant quatre mois j'entraîne toutes les classes dans la salle de théâtre de l'école.Mais à la fin de la pièce ,la récitante omet de donner le signal de départ et la chorale ne part pas;Nous sommes vaguement déçus,La jeune femme s'en aperçoit et, alors que nous sommes en rang nous interpelle et nous dit :vous n'avez pas chanté on ne vous a pas donné la partition pour apprendre la chanson?
    -Mais oui mais vous avez envoyé la musique sans avertir le groupe de chanter!Il aurait suffi de dire :"vous avez appris une chanson les enfants ,c'est à vous ,une, deux,et de donner le signal du départ et on aurait compris que c'était notre tour!"
    Alors,elle nous fait réinstaller dans la salle de spectacle et donne l'impulsion et là, les enfants entonnent le chant sans problème.
    Une année ,je garde une partie de mes élèves de CM1 en CM2, lorsqu'ils partent de l'école ,ils me quittent le dernier jour en pleurant,ils me disent:on ne va plus revoir l'école,on ne sera plus ici,on était bien avec vous!
    C'étaient des élèves sympathiques auxquels j'ai pris plaisir à enseigner.
    Une année à l'arbre de noël du comité d'entreprise de mon mari ,il y a un chanteur qui anime la soirée;Mon mari a dit que je chanterais avec l'employée que mon mari a fait embaucher et avec laquelle nous avons exploré les karaokés de Marseille.Les collègues de mon mari ont voulu vérifier.Ils ont négocié avec l'animateur une plage de temps où l'on interviendrait.Croyaient-ils qu'on allait tergiverser,se défiler,refuser?Pas du tout:on sélectionne dans son registre de paroles quelques chants et nous donnons l'aubade;recevons les félicitations , applaudissement et acclamations.Je parais même en solo et en duo, dans la plaquette de fin d'année commémorant les temps forts du semestre.
    Ma copine va susciter l'admiration d'un gars qui chante divinement et la poursuivra de ses assiduités. Elle laissera tomber son compagnon pour le beau chanteur qui l'épousera,lui.
    Avec lui ,j'ai chanté des duos mémorables comme question de feeling...
    Nous chantons dans un karaoké situé derrière le palais de justice de Marseille:le cuisinier passe sa tête derrière la trappe pour nous écouter.Entre quatre et cinq chansons par soirée parfois six.J'en apprends toujours de nouvelles.
    Lorsqu'elle va se marier(je serai d'ailleurs son témoin) ,ma copine va vivre sa vie et terminé les sorties;Une copine d'enfance célibataire viendra la relayer parfois!J'explore les karaokés de Plan de Campagne!Mon mari en a assez de m'entendre!
    Un soir alors qu'il invite un de ses chefs, il lui fait part de ma passion pour le chant et la musique.Il se moque gentiment.Piquée au vif,je lui dis que c'est facile de se moquer mais que peu sont capables de chanter juste,en mesure e en articulant les paroles et je lui demande si ,lui, serait capable de chanter quelque chose!Justement ,j'ai quelques cassettes vidéos qui me servent de support d'entraînement.
    Pris au jeu,les autres invités scandent:"chef,une chanson,chef une chanson!"
    -"Je ne chante que du Brassens",répond-il persuadé que ce chanteur un brin intello antédiluvien ne fait pas partie de mon répertoire "et je ne chanterai que chanson pour l'auvergnat"!
    il tombe mal ,j'ai appris ce chant en colo à dix ans:c'est la seule chanson de Brassens qui est sur mes cassettes!
    -aAh ça?Ca tombe bien,j e l'ai!
    -Nooon?
    -Ouiiiii!Il se récrie, se fait prier,veut négocier une retraite honorable...
    -Ah, ce qui est dit est dit chef!
    Et le voilà qui entonne sa chanson,pas trop mal,juste et en rythme!
    Et nous finissons la soirée en chantant sur le reste de la cassette!
    Un des associés de mon karaoké favori va vendre ses parts et va à saint Tropez ouvrir une boîte.Avec les employés du karaoké on organise une expédition pour aller le voir ,un soir!Un joli petit souvenir!
    Il reviendra un an plus tard.Je chanterai nombre de chansons en duo avec lui ,bien avant que ce soit la mode de partager une chanson entre deux artistes et bien avant Manhattan-Kaboul!
    J'écris des paroles sur la musique de la solitudine;un soir je les interprète en français dans la salle comble;tout le monde est surpris.Je suis acclamée.Un type,ému, m'offre même un verre.
    J'ai passé de super soirées en cet endroit.Il en est qui vont au stade beugler devant un match de foot,il en est qui s'enivrent,il en est qui se droguent,il en est qui vont à l'opéra ou au cinéma;Moi, je chante...
    L'année où je visitais les terrains sur Aix et où j'ai trouvé mon bien,les affaires ont décliné pour mon karaoké,et il a été vendu.
    Je n'ai plus jamais revu son équipe...Un grand vide m'habite quand je pense à eux...
    On m'a dit que mon duettiste était parti vivre aux états unis,qu'il avait rencontré quelqu'un et eu une petite fille!
    Moi je vais continuer ma vie sur Aix.Et puis là -bas il y a "la Royale" la brasserie du cours Mirabeau.mais las, la Royale elle aussi a fermé!
    A tous points de vue c'est un nouveau départ!
  19. querida13
    Je retrouve un jour par hasard ma jeune amie ,devenue mère entre temps.
    Elle me dit avoir des nouvelles des tenanciers du karaoké tex-mex que nous avions l'habitude de fréquenter avant son mariage.Elle s'est mise à chanter en amateur avec son mari .
    Si je l'avais embringuée dans pas mal de soirées,en revanche, elle ne m'a pas renvoyé l'ascenseur et c'est bien dommage, enfin, c'est la vie!Moi,j'ai momentanément délaissé le chant pour un autre projet:faire construire ma maison!
    Elle me dit que le patron du bar a été arrêté,jugé et mis en prison pour trafic de drogue on a trouvé chez lui un paquet de plusieurs kilos de cocaïne;Et moi qui le prenais pour un honnête commerçant!
    Les gens vous frôlent, vous côtoient,vous parlent, vous sont sympathiques,mais sait on jamais à qui l'on a affaire?Apprendre la nouvelle de ses activités illégales et son emprisonnement m'a fait d'autant plus de peine que je l'aimais bien.Et je dois dire que jamais au grand jamais il ne m'a proposé de substance illicite ,rien que de la nourriture,je n'aurais jamais soupçonné qu'il y eût ce genre de trafic dans son établissement!Je tombais de haut!
    Mais paraît il qu'avant sa vente,les affaires du bar restaurant périclitaient, s'était- il "reconverti" ou faisait- il son trafic depuis longtemps ?Je ne peux le dire.j'ai la nostalgie des merveilleuses soirées que j'ai passées dans cet établissement, il y a déjà seize ans que je n'ai plus revu personne on dirait qu'une page s'est définitivement, irrémédiablement tournée.
    Trouver ma maison, les crédits pour la financer m'avaient pris pas mal d'énergie.
    En attendant que ma maison fût achevée,je commençai à concevoir mon jardin et me mis à la chasse aux végétaux.Je visitais les jardineries,revenais avec des kilos de terreau,feuilletais les catalogues spécialisés.Je montais chaque dimanche avec des flacons de lessive remplis d'eau et de bacs en plastiques pleins pour arroser mes précieux plants.Une fois même,les ayant trop remplis,les bacs se mirent à déborder sur le tapis de sol du coffre et une dame affolée me donna l'aubade d'un concert de klaxons sur l'autoroute et en faisant arrêter mon véhicule sur la bande d'arrêt d'urgence elle me dit,affolée:
    -Je vous signale que vous êtes en train de perdre de l'essence à flots.
    -non ce n'est pas de l'essence répondis-je c'est de l'eau j'en transporte pour arroser un jardin en attendant que l'eau soit installée.
    Elle ne comprit vraisemblablement rien à ce que je disais,elle reprit la route en marmonnant:
    -je vous aurai avertie!
    -Merci mais ne cherchez pas à comprendre,ce n'est pas bien grave!
    A un moment donné,dès que ma maison fut terminée,j'obtins ma mutation et nous déménageâmes pendant les grandes vacances.Je fis mes cartons ,dépouillai les meubles de tout leur contenu et commençai à transbahuter les livres,la vaisselle,les affaires d'hiver dans la maison neuve. Puis les vêtements suivirent le même chemin.je m'occupai des formalités du changement d'adresse de la fermeture ou ouverture des comptes des impôts,du gaz, de l'électricité,du téléphone dans les deux foyers. Quand les meubles furent vides mon mari démonta les meubles et nous louâmes un camion,mon frère vint aider mon mari à charger et décharger le réfrigérateur et le lave linge.Nous décrochâmes lustres et rideaux et nous partîmes pour de bon!C'était le deuxième déménagement en deux ans!
    mon mari se moqua de mon jardin,et me dit que j'avais fait bien des efforts et dépensé beaucoup d'argent pour planter quelques arbres maigres au fond du jardin,et quelques bâtons.
    Quinze ans plus tard,il faut grimper sur l'échelle pour tailler le sommet des "bâtons"...Et les cerises au sommet de mon cerisier qualifié de maigrichon sont inaccessibles!Il ne suffisait que d'un peu de patience et d'attente!
  20. querida13
    L'année de son ouverture, nous avons mené toute l'école à Eurodisney.
    Quelle sensation;féérie de l'architecture de carton pâte,mêlée aux infrastructures commerciales et hôtelières et aux manèges et jardins somptueux.Divers univers se juxtaposent en décors magnifique.
    Un retour à l'enfance.Dans Mainstreet Les élèves de quartiers nords m'interpellent de tous les côtés.
    -Maîtresse regarde ceci,maîtresse regarde cela !dingo défile puis Mickey,ils sont ravis.
    Et moi, inquiète dans la cohue, je leur demande de bien rester groupés afin de n'en perdre aucun.
    La musique de la parade éclate.Toute la foule vient s'amasser autour de notre petit groupe pour voir un défilé de chars où trônent les princesses de contes de fées habillées à la mode Disney!
    Une dame compréhensive,un peu déconcertée par notre volume sonore et par notre verbe haut de méditerranéens expansifs, me serre le bras pour m'encourager et me dit:
    -Eh bien ,bonne chance maîtresse!
    Ca ira!
    Mais j'ai fini par y amener mes fils et mon mari;en famille,plus tard.
    Quelques animations avaient changé;Mon mari est allé chercher des boissons avec les enfants et je me suis engouffrée dans la salle aux écrans à karaokés.
    On y chantait avzc plus ou moins de bonheur les chants des films.Ca piaillait dans tous les coins avec plus ou moins de justesse.
    Je sélectionne le chant du roi lion, ça tombe bien ,mon fils le met en boucle sur sa cassette vidéo,trois fois par semaine.je le connais donc par coeur.Une fois le début piano ,chanté d'une voix grave, passé,je commence à entonner c'est l'histoire de la viiiie et soudain les autres voix se taisent et écoutent ma mélodie les yeux fixés sur moi! Et quand j'eus terminé des petites mains m'applaudirent en se poussant du coude et leur attention revint aussitôt à leur écran!
    Au restaurant de nuit,un pianiste ne joua que pour moi,car son art n'était pas de la musique d'ambiance et je saluai son jeu et son talent en ayant la politesse de me taire et de l'écouter puis de l'applaudir.Parenthèses enchantées.
    Elle est vache parfois la vie:elle nous taraude d'ennui, nous tanne de malheurs,nous perclut de douleurs et parfois sans avertir, elle nous offre des fleurs,des cadeaux, des surprises, des bonus de manière inopinée et c'est comme ça car,pour reprendre la première phrase de carmina burana de Orff;ô Fortuna,velut luna,semper variabilis...Aussi dans la vie vaut il mieux être bien éveillé pour savoir cueillir les petits bonheur, car le temps un jour aura passé et en comparant les instants que nous avons vécus au cours de notre existence on se dira;eh oui le bonheur c'était ça et rien d'autre!Pouvoir des petites choses!
  21. querida13
    Ma jeune amie et moi continuions de temps en temps d'explorer les karaokés du coin .Son nouveau compagnon,qui avait une magnifique voix de ténor nous escortait parfois.Ainsi,nous trouvâmes près du portde Marseille, derrière le palais de justice un restaurant qui faisait surtout des affaires à midi et qui le soir animait un karaoké peu fréquenté.Quelle aubaine!Peu de monde signifiait que nous chanterions d'affilée sept chansons chacune sans attendre que d'autres monopolisent la sono.
    La première fois que nous chantâmes et dès que je me retournai pour aller rendre le micro je m'aperçus que l'équipe de cuisine s'était réunie près du passe- plats pour nous écouter chanter.Ils nous applaudirent discrètement.
    Nous apprîmes dans cet établissement et nous répétâmes les derniers tubes des années 95/2000 à notre rythme et le compagnon en question me présenta sa mère.Admirative elle me dit: quand tu chantes,ça "le" fait!
    Ca "le faisait" à vrai dire pour chacun de nous trois et quand nous étions à une table de notre ancien repaire,à certains moments il y avait un défilé de personnes qui venaient nous serrer la main pour nous remercier d'avoir passé un excellent moment!C'était sympa!
    A chaque fois que je reviens derrière le palais de justice je jetais discrètement on oeil vers la trappe en acier et je voyais toujours les cuisiniers qui écoutaient religieusement.
    Ma jeune amie finit par se marier et je fus son témoin.Elle eut deux filles et je suppose qu'elle trouva beaucoup d'occupations car nos relations se distendirent;Quant à moi, je fus accaparée par deux déménagements et la construction de ma maison puis l'élaboration d'un jardin, en sus de mon boulot.
    Je ne la revis guère car elle fut mutée à l'autre bout du département.
    Quant à moi j'explorais les karaokés de Plan de Campagne avec mon amie d'enfance et mon amie de promo.Et fréquentai un moment,avant son agrandissement le caliente café quand il n'était qu'un bar intime et non cette usine qu'il est devenu!Je découvris au bureau, qui n'a malheureusement aucun espace à consacrer aux chanteurs mais qui ,il y a quinze ans de cela était tout rutilant de nouveauté et avait un décor magnifique.Il a hélas bien vieilli depuis.Après quelques années de silence...
    Je revois ma jeune amie avec son mari un soir.Ses deux maternités ne l'ont pas vieillie.Son mari est un peu distant.
    Ils divorceront quelques mois plus tard.
    Un soir elle me présente un autre compagnon et nous allons chanter à Saint Giniez en face du stade vélodrome au 3615.
    je suis contente de la revoir.De l'eau a passé sous les ponts.La vie a été dure pour chacune de nous;Nous avons vécu la vie difficile des working mums,avons encaissé les coups durs de la vie,avons perdu des êtres chers,nous nous sommes construites à la force du poignet,nous avons encaissé les chocs...
    Je chanterai quatre chansons ce soir-là,en présence d'une tablée de jeunes adultes très métissés très panachée.A l'image de cette société marseillaise qu'on aimerait tant diviser et opposer mais qui s'accommode très bien de ses disparités et de sa multiplicité.
    Ils sont là pour passer un bon moment,ils dînent ne riant et en discutant.Ils ont entre vingt et vingt cinq ans .
    Pendant la deuxième partie de la soirée, après les agapes: le DJ !Nous renouons avec nos duos!Puis je chante l'aigle noir, de Barbara.Ah, que n'ai je pas fait là!
    Dès les premières mesures,un jeune black, très athlétique très beau ,a une révélation.Il est enchanté,ensorcelé,subjugué, tombe instantanément amoureux.Il se penche vers sa compagne et lui dit assez distinctement pour que je l'entende:
    -Elle,il faut que je l'épouse!
    Il ne cesse de me fixer d'un regard brûlant et insistant.
    A la fin de ma prestation,il vient me féliciter chaudement,s'installe à côté de moi et au bout d'une dizaine minutes de conversation pressante où j'essaie vainement de lui faire comprendre que je ne suis pas libre,que je suis bien trop vieille pour lui,il me demande un genou en terre en mariage...Comme ça,spontanément,carrément!
    je considère son beau visage,sa jeunesse, sa fougue,bien séduisantes ,ma foi,puis je lui assène brutalement,avec un soupir de regret:
    -Tu es bien tentant et tu as tout ce qu'il faut là où il faut ,ce n'est pas le problème,mais tu sais ça fait dix minutes que j'essaie de t'expliquer que je suis mariée et j'ai deux enfants et que je ne dois pas être loin d'avoir l'âge de ta mère!
    Il est profondément déçu prononce un :
    -ah, merde et retourne enfin , vers celle que je suppose être sa soeur,mon magnifique aigle noir!
    Ma copine me considère d'un regard étonné!
    La vie vous réserve de ces surprises parfois!
  22. querida13
    Ayant rattrapé mon retard ,je monte dans la meilleure classe de la section au collège.Le choix de deux autres langues plombe mes répétitions.Il me faut ingurgiter des listes de vocabulaire ,des tonnes de conjugaisons latines et grecques et de déclinaisons.Je ne travaille pas assez le piano et si je veux progresser ,il n'y a pas de miracle,il faut répéter.
    L'excité arménien n'a ni l'onction ,ni l'habileté des dames du conservatoire national de région,il assène brutalement ses vérités et il est très mal éduqué,assez négligédans satenue que dans son vocabulaire.
    De plus la maison coûte cher en entretien et il faut programmer de nombreux travaux pour l'embellir, or c'est le premier choc pétrolier et le monde est en crise:chômage,inflation,montée des prix les temps sont durs.Cette lubie du piano commence à coûter cher et ne rapporte rien ,des remarques aigres fusent.de plus on ne m'y accompagnent plus,je dois y aller à vélo,pour descendre,ça va, mais pour remonter ,il me faut pédaler fermement!Il faudrait accorder l'instrument mais on reporte ce travail sans cesse.Les remarques sur mon jeu s'intensifient.
    J'apprends la lettre à Elise,pour le dernier concours de Moyen II,mon interprétation impétueuse et passionnée laisse le jury estomaqué.
    Les relations ne sont pas au beau fixe entre le prof qui se fait payer des jours de grève et ma mère.De plus mon frère est venu prendre des cours de piano,cela ne lui plaît pas et il est insupportable.Le prof le fesse et l'insulte.C'est le prétexte: ma mère claque la porte.On ne m'inscrira plus nulle part.
    Mais on m l'a dit:j'ai les bases ,il suffit donc ensuite de travailler.pour l'instant mes études me prennent tout mon temps ,mais en définitive en me libérant des cours au centre,on me libère trois heure et je continue de travailler seule sur ces plages horaires;Avec mes disques,je découvre Chopin,je joue du Chopin,je découvre Satie?je joue du Satie!Je joue seule la sonate au clair de lune et un prélude de Rachmaninov...Je joue pour mon plaisir,et je finis par savoir jouer à force de jouer,sans pression,sans concours,sans contrainte,sans surveillance,et surtout sans payer un centime!
    Mais survient un événement de taille dans mon existence:mes parents sont engagés dans une colonie à la montagne ,à la direction...
    Ce qui était au départ un essai perdurera près de quinze ans.
  23. querida13
    Cette année-là fut une des années les plus déterminantes de ma vie:mes parents furent engagés dans une colonie de vacances d'abord à l'essai puis pour trois mois à Villard près de Grenoble.Ils commençaient à avoir une belle expérience et ils étaient chevronnés.
    Ils faisaient tourner des camps depuis dix ans et ,je l'avais vu en les comparant avec d'autres directions,ce qu'ils proposaient étaient un niveau largement au dessus des autres tant pour les activités proposées que pour l'encadrement des gamins.
    L'engagement en question perdura quinze ans.
    Cela signifia que pendant quinze ans,durant les quatre séjours de l'année, il passa cinquante gamins à chacune de l'une de ces sessions et une douzaine de personnes à l'encadrement.Avec une moyenne de 250 personnes par an ,le nombre de personnes qui me côtoyèrent fut très important.
    En fait pendant l'année scolaire, j'étais une élève sérieuse, studieuse,qui passait inaperçue,même surnommée le rat de bibliothèque ,tandis que pendant les vacances j'évoluais dans un milieu épanouissant ,hyper sympa et décontracté ,voire même un peu débraillé,avec mes pairs,une cour de petits et de potes,et c'était le paradis,l'île aux enfants, en somme!
    Le milieu était intellectuellement très riche.Chaque membre du personnel ramenait sa culture,ses jeux,ses idées,son savoir et ses chants;J'en apprenais une dizaine par an et ma joie était d'aller chanter avec le mono -guitariste.Nous donnions entre une et deux veillées spectacles par séjour et à chaque fois j'interprétais un chant différent ou participais à des sketches,des scènes de théâtre,des chorales,des danses.je devenais une bête de scène.J'appris à dompter le trac.On se taisait souvent pour m'écouter chanter alors même que nous débutions en groupe.On me demandait de venir chanter pendant les balades à pied, je menais les choeurs.Grâce à ces camps,j'ai conscience de n'avoir pas eu une adolescence très ordinaire.Trois mois par an ,j'étais une enfant de la balle!Mais par rapport aux autres enfants j'avais une autre perspective car j'appréhendais les choses côté scène et côté coulisses, et j'apprenais comment se gérait un petit établissement!
    De plus, étant donné que l'hiver était parfois enneigé, j'appris à skier.
    Peut être un jour écrirai je un livre sur cette période de ma vie(j'y songe fortement).
    Les deux dernières années de collège furent un peu moroses mais mes vacances m'aidaient à tenir le coup;bientôt j'allais retrouver mes montagnes,mes chemins,les fleurs alpines,les jeux les rires ,les champs et les chants,le terrain de foot ou de volley,les chevaux et les poneys,la patinoire,la piscine ou le ski selon les saisons et surtout ...Les Potes!!!
  24. querida13
    Avez vous remarqué avec quelle intensité les petits bébés observent leurs mains?On dirait qu'ils cherchent ce qu'ils vont en faire pour échapper à l'ennui d'exister! Nos mains avec leurs pouces opposables, reliés à un cerveau inventif,c'est peut-être ce que la nature a fait de plus abouti,dans sa magnifique création.Avec nos mains nous aménageons, recréons le monde,nous le modelons,nous le réinventons.
    Lorsqu'il devint évident que j'allais dépasser le stade du collège,je délaissai donc l'étude intensive du piano pour ,et me concentrai exclusivement à décrocher le BAC.Je fus la première fille de ma famille à l'obtenir.
    L'âge légal d'accès au travail est seize ans.Mes deux mains savaient déjà faire pas mal de choses.
    Evidemment écrire, compter,modeler,fabriquer des objets,plier,jouer de trois instruments de musique(orgue,piano,flûte),
    mais aussi balayer,nettoyer,prendre soin du linge,servir,préparer des repas,pâtisser,couper,faire des lits,déménager,déplacer des objets,jouer à plusieurs sports collectifs (volley,rugby,foot,handball,basket,divers jeux...)peindre,dessiner,diriger,avertir,mimer,utili-ser divers appareils,rendre la monnaie,soigner les petites plaies....
    La colo de vacances devint mon employeur.Je mis à profit tout ce que je savais faire.Déjà,j'aidais pas mal mes parents à préparer le séjour:nettoyages,convoyage des draps,des lits, des couvertures,transport des provisions...Je me mis à aider les monitrices:pour aider les petits à faire les lits,à défaire leurs valises,pour faire les inventaires de début et de fin de séjour,mener les groupes..J'apprenais à garder l'oeil aux aguets..Et prévenais des dangers.
    Puis l'année du bac à dix sept ans,je fis aide de cuisine, et les années suivantes,technicienne de surface,puis lingère,puis dès que j'obtins mon BAFA animatrice,monitrice de ski,adjointe de direction dès que j'obtins mes diplômes universitaires.Car je passai le concours d'instits et l'obtins.
    Mes mains apprirent à conduire une voiture!Le monde était à moi:j'organisai mes premiers voyages!
    La création artistique faisait donc partie d'un tout.Dans ce tout il m'était difficile de me spécialiser.Il aurait fallu abandonner tout le reste pour choisir une seule voie.je n'abandonnai rien.Etre instit c'est continuer à exercer tous ses talents,quand vous êtes instits vous êtes un femme orchestre:
    Vous faites des maths ,du français,de l'histoire,géo ,inst civique,vous enseignez la musique,le sport ,les sciences,vous continuez à fabriquer ex nihilo des objets ,vous pratiquez les arts visuels,l'anglais parfois vous sortez vous exercez la pédagogie, vous animez un groupe,vous dirigez,vous soignez les bobos,vous communiquez et vous êtes avec des gamins,vous organisez des spectacles.
  25. querida13
    Mais décidément,il m'était difficile de négliger la musique.Quand je rentrai au lycée, une copine me dit que la prof organisait de heures de chorale optionnelle et qu'à la fin de l'année nous participerions à un concert donné à la cathédrale romane de Marseille qui est située à côté de la Major!
    Elle me testa et comprit que je soutenais ma voix.
    J'ai chanté mon premier canon à la maternelle!Ensuite je me souviens de la prof d'anglais qui nous fit interprêter silent night au collège à Noêl et qui me mit avec les altos!Je dois connaitre une dizaine de canons, et à la colonie je menais souvent ds groupes.c'est toujours un enchantement de voir deux groupes s'accorder et combiner un chant mélodieux:pour moi chaque canon réussi est un petit miracle!
    Bien que je fusse soprano léger,la prof me mit d'office dans les altos.Et toute l'année ,une heure par semaine ,j'appris le cantique de Jean Racine de Fauré et l'ave verum corpus de Mozart.
    J'ai une quinzaine d'années ,en juin ,par une nuit tiède,je me vois,arriver à la cathédrale un peu intriguée par l'expérience,je rejoins les copains,nous sommesbien habillés Dans le choeur de La vieille chapelle romaneune scène a été montée et elle luit du feu de dizaines de petites bougies allumées pour l'occasion.il y a un orchestre qui joue son galimatias d'accordement.Nous montons sur scène,le chef d'orchestre fait taire les instruments et soudain l'orchestre se met à jouer en harmonie sous l'impulsion du sorcier fou qui semble le mener à la baguette! nous chantons avec des hommes et ds femmes inconnus,et c'est superbe.Nous chantons nos deux chants je voudrais que la féérie dure toujours...Dans la foulée un de mes camarades de classe, musicien lui aussi se joint au choeur suivant car il a dégoté je ne sais où la partition du morceau suivant,il me demande de le suivre, selon lui ,je suis tout à fait capable de déchiffrer ,mais je ne trouve pas ça sérieux, je décline l'invitation!
    Je me jurai de recommencer dès que possible mais las,la chorale n'était qu'une expérience pédagogique ponctuelle!
    L'année suivante ma prof tenta le quatuor de flûtes et je jouai de l flûte alto.Ce fut ma seule expérience en orchestre de chambre!Du coup je pasai musique en option au bac, j'obtins la note de 19/20...
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