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Ambre Agorn

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Ambre Agorn Membre 2 078 messages
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Le 21/01/2024 à 11:10, tison2feu a dit :

Bonjour Ambre Agorn,

Qu'est-ce qui prouve que cette valeur, le courage, aurait toujours été la même à travers les âges ?

Plus on remonte dans le temps et plus on se rend compte que le comportement courageux était le principal comportement attendu des hommes afin de garantir la survie du groupe ethnique. Or, le courage était une vertu guerrière - donc une affaire d'hommes - parce que la guerre était un état permanent entre les différents groupes ethniques (cf. travaux anthropologiques de Pierre Clastres). Le courage était une affaire de virilité, demandant à la fois force physique et force d'âme. Nous sommes bien loin du sens actuel donné au mot "courage", n'est-il pas ?  

Ce constat est renforcé sur le plan linguistique. Que racontent les langues à propos du mot "courage" ? J'ai constaté que les mots "homme" et "courage" sont construits à partir d'une seule et même racine lexicale, dans de très nombreuses langues d’Europe, d’Afrique, du Caucase, d’Asie du Sud. En clair, il n'existe dans ces langues qu'un seul mot pour dire aussi bien "homme" que "être courageux". Etre un homme, c'était par excellence être courageux. Le courage était donc la valeur suprême, celle qui définissait le mieux la conduite attendue d'un homme, à savoir surmonter ses peurs et être préparé à risquer sa vie pour le groupe. C'était la valeur des valeurs, la vertu des vertus (le mot "vertu" étant issu du latin virtus, lui-même formé sur vir "homme"; cf. français "virilité"). 

Bonjour Tison2feu

Le mot courage ne vient-il pas du mot cor le cœur?

Oui, j'avais remarqué la même chose quant au lien entre virilité, vertu et vir le mâle, l'homme guerrier. Cependant, il me semble que notre mot homme vient plus exactement du humus la terre, et que notre virilité s'apparente alors à la qualité du comportement du mâle autant dans la procréation que dans son état guerrier, je me trompe?

Il y a donc d'un côté le mot vir, et en parallèle le mot homo. Je ne saurai dire s'ils sont contemporains à un certain moment.

Si notre courage aujourd'hui vient du mot cœur, cela signifie peut-être que le courage de ce mot ne signifie tout simplement pas la même chose que la virilité d'une autre époque, virilité qui s'apparente à la notion de courage attendu pour un homme guerrier.

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Membre, 34ans Posté(e)
Ambre Agorn Membre 2 078 messages
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Bonjour DU

Le 20/01/2024 à 14:49, deja-utilise a dit :

Oui bien sûr, mais ce processus n'est en aucun cas du courage ou d'en faire preuve ou usage, c'est autre chose, en l'occurrence de l'anticipation ou de la prévoyance, ou plus génériquement, une forme de sagesse.

Et encore une fois, la sagesse semble s'opposer au courage. Non pas s'opposer dans le sens de lui faire la guerre, mais dans le sens où plus il y a de sagesse, moins il n'y a de place pour le courage! C'est peut-être aller un peu vite en besogne, mais si l'on reprend les liens dont parle @tison2feu entre la signification ancienne du mot courage et sa parenté avec l'attitude attendue d'un homme-guerrier, alors la chose semble se confirmer (mais je ne suis pas assez calée pour affirmer une telle chose, juste pour poser des questions): le sage dans la tribu n'est pas le guerrier, il est soit un personnage à part apparenté au sorcier, soit une (des) personne âgée. Ces personnages masculins devaient bien avoir un mot qui les signifie, et n'étaient pas assimilés au terme de l'homme-guerrier. Il y avait donc des comportement de personnes qui ne rentraient pas sous le vocable d'homme-guerrier. Sans parler d'opposition, alors, il serait peut-être plus juste de parler de parallèle: on est soit courageux, soit sage.

 

Le 20/01/2024 à 14:49, deja-utilise a dit :

Je ne pense pas que la part d'ignorance soit nécessaire, elle peut être fortuite ou contingente.

Si je prends le cas de la peur du dentiste, pour faire une opération que l'on a déjà faite, il n'y a aucune inconnue ou ignorance, on sait très bien ce qui nous attend, mais la peur risque fort de prendre le dessus, comme toute phobie. Il en va de même avec la peur du vide, bien que l'on ait toutes les informations sur la situation, qu'on les comprend parfaitement quand on est encore au niveau du sol, cela n'empêche pas d'avoir la tête qui tourne une fois en hauteur, la volonté, la raison et même les encouragements/rappels de l'entourage ni changent strictement rien.

Je comprends ce que tu dis. Cependant, vu que tu prends cet exemple, j'ai eu le vertige. Tu sais cette sensation de tête qui tourne, du paysage qui se brouille, ce poids sur le corps qui oblige à se mettre au sol à quatre pattes ou couché, cette impossibilité d'avancer des jambes en coton et frappées d'immobilité. Ca m'avait surprise, je ne savais pas. Depuis ce jour j'évitais soigneusement les visions vertigineuses (j'habitais en montagne, alors je te parle de gorges, de falaises de plusieurs dizaines de mètres). Et puis un jour, on faisait une randonnée dans le massif de la Chartreuse. Il y avait une route qui surplombait le vide, une vision magnifique de la paroi rocheuse, la route serpentant soit dans le vide soit contre la roche, les tunnels, l'eau s'écoulant ça et là en petite cascades, le torrent au fond, etc. Impossible d'approcher: plus je m'approchais du bord, plus je m’aplatissais au sol et je n'arrivais pas à atteindre le bord pour voir. Mais je voulais aller voir. J'ai donc fermé les yeux jusqu'à la rambarde, je me suis accroupie et j'ai regardé. Au début c'était vertigineux, et puis petit à petit, ça s'est atténué et j'ai pu tout admirer.

Bon, tout ça pour quoi? Et bien voilà: encore une fois on pourrait dire: c'était courageux. Alors que non, c'est juste que quelque chose de plus fort que ma peur m'a poussée à ce moment. A moins que le courage soit ceci: trouver quelque chose de plus fort que sa peur pour agir.

 

Le 20/01/2024 à 14:49, deja-utilise a dit :

Cependant comme tous les médecins, avec le temps vient un certain détachement, ou plutôt une désensibilisation d'avec le patient, ce qui semble être le prix à payer pour faire ce qu'il y a à faire par nécessité. De même, comme énoncé dans le livre " Banalité du bien, banalité du mal, Le 101ième bataillon de réserve de la police allemande " pour les assassinats des Juifs, le plus dur psychologiquement est effectivement la première fois, le pas le plus dur à franchir, tel le Rubicon, une fois fait, plus de retour en arrière possible, les choses s'enchainent sans trop plus - avec la même intensité/vivacité - réveiller la conscience comme lors de la première fois, et ce avec d'autant plus d'aisance - ou moins de réticence - que les occasions se multiplient...

Effectivement, a force de faire, on se désensibilise. Mon petit papa me disait toujours: "C'est le premier pas qui compte, les autres suivront". Une fois que l'on a réalisé quelque chose qu'on croyait impossible, après, on sait que c'est possible, alors on se sent apte à le refaire.

 

Le 20/01/2024 à 14:49, deja-utilise a dit :

Non bien évidemment, c'était pour montrer la stratégie similaire dans les deux cas, un travail en amont, pour ne pas avoir à affronter la difficulté avec la seule volonté une fois devant le fait en train de s'accomplir, bien trop faible pour y faire face seule et ses maigres moyens. 

En effet la raison sera toujours prise au dépourvue par les émotions vives, il faut donc ruser pour lui redonner l'avantage, en différant la prise de décision par exemple, mais cela n'est possible que si on est en mesure d'anticiper les conséquences et implications de ce qui va advenir, donc faire preuve d'imagination reposant sur des analogies/similitudes de cas et ainsi la mémoire, ensuite être suffisamment réceptif à ces mêmes conséquences à froid et la déception ou le regret qui s'en suivraient, donc faire appel à nos sentiments, y compris moraux et emphatiques, de même que le dégoût ou la colère anticipés/pressentis; ce qui anté-rétrospectivement permet de prendre des décisions en amont pour se prémunir de nos propres failles/faiblesses devant la situation qui sera vécue au présent, raison d'être de la publicité/promotion sur les punitions édictées à titre préventif ou les risques encourus par exemple. Mais aussi et surtout, de se donner les moyens d'y parvenir, je me rappelle du cas d'une conseillère/coach en prévention des maladies sexuellement transmissibles, qui bien que parfaitement consciente des risques étant donné son métier même, n'avait pourtant pas pu elle-même se retenir d'avoir non seulement un rapport non protégé au moment où l'excitation s'est faite jour, mais qui plus est, en étant infidèle à son mari ! Savoir, même parfaitement, ne suffit pas, il faut aussi se donner les moyens de réussir envers/contre notre propre faillite volontariste - une fois en situation.

Ca me rappelle un autre fil au sujet de l'intelligence par rapport aux neurones.

Ce qu'il faudrait, ce serait de créer, de façon volontaire, un nouveau chemin neuronal. On pourrait voir ceci comme un apprentissage. C'est à dire, si on reprend l'exemple de l'addict au chocolat, ne pas en acheter n'est pas un nouveau chemin, c'est éviter un circuit. Cependant, si on instaurait une désensibilisation progressive par une exposition à la tentation de façon plus ou moins sécurisée, il suffirait là aussi d'une première "victoire" pour faire advenir les suivantes et ainsi créer un nouveau circuit neuronal d'actions non dépendantes à la présence de chocolat.

...j'ai un peu quitté le sujet du courage!

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tison2feu Membre 3 035 messages
Forumeur alchimiste ‚
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Il y a 6 heures, Ambre Agorn a dit :

Bonjour Tison2feu

Le mot courage ne vient-il pas du mot cor le cœur?

Oui, j'avais remarqué la même chose quant au lien entre virilité, vertu et vir le mâle, l'homme guerrier. Cependant, il me semble que notre mot homme vient plus exactement du humus la terre, et que notre virilité s'apparente alors à la qualité du comportement du mâle autant dans la procréation que dans son état guerrier, je me trompe?

Il y a donc d'un côté le mot vir, et en parallèle le mot homo. Je ne saurai dire s'ils sont contemporains à un certain moment.

Si notre courage aujourd'hui vient du mot cœur, cela signifie peut-être que le courage de ce mot ne signifie tout simplement pas la même chose que la virilité d'une autre époque, virilité qui s'apparente à la notion de courage attendu pour un homme guerrier.

La question que je me posais, Ambre, c'était de savoir si la valeur dont il est question ici, en l'occurrence le courage, restait au fil du temps toujours la même (comme tu l'écrivais supra). 

Que la définition du mot courage ait pu évoluer, c'est évident - puisque tous les mots évoluent - mais pas au point, me semble-t-il, de signifier autre chose. Pour preuve, ton intuition de départ selon laquelle ce mot "courage" est galvaudé, dans notre société postmoderne, à un point tel que l'aspect hors norme, si caractéristique de l'action courageuse, s'en trouve complètement éludé. Cela tend à prouver que même si l'action courageuse est en forte baisse sur le marché des valeurs, elle n'en a pas disparu pour autant. Restée en veille dans nos esprits, elle ne demande qu'à être ravivée lorsque le contexte est favorable.

A défaut de guerre - grande pourvoyeuse d'actions courageuses - la flamme continue malgré tout d'être entretenue deci delà en France depuis bientôt 80 ans, grâce à quelques belles actions d'éclat individuelles. Mais la demande de héros serait plus pressante, à n'en pas douter, si une nouvelle calamité venait à s'abattre sur le pays. Tel fut le cas avec la pandémie de covid où des milliers d'infirmières, engagées en première ligne, devinrent soudainement ces nouvelles héroïnes de l'ombre.

Exit donc la part de virilité ayant pu servir à définir en partie et fort anciennement tout comportement courageux dans des sociétés patriarcales, faites par des hommes et pour des hommes. 

(Le mot "humble" vient également du latin humus, ce qui laisse à penser que "homme" est à prendre au sens de terrien, par opposition au dieux).

Modifié par tison2feu
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tison2feu Membre 3 035 messages
Forumeur alchimiste ‚
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Le 15/01/2024 à 05:46, Ambre Agorn a dit :

C'est drôle: vu comme ça, et j'y pensais justement, on dirait que le courage s'oppose à la raison! Car s'il est spontané, c'est que la raison a peu eu voix au chapitre. Si la peur doit être raisonnée, doit être illusionnée ou désensibilisée par un subterfuge ou un stratagème, alors le raison a plus ample part, et le courage en résultant n'est pas aussi sûr quant à l'action qui suivra. Si la raison a part entière aux palabres, alors il y a fort à parier qu'il n'y ait pas d'actes commis, donc pas de courage à la clé. Non, je ne suis pas en train de fustiger le courage ou la raison, j'aime bien quand il faut tâter et essayer pour atteindre un certain équilibre faisant intervenir des contraires.

[...]

(Suite :))

Puisque j'ai tenté de remonter à l'essence du courage en tant que valeur guerrière, j'aimerais creuser davantage à partir d'une autre de tes bonnes intuitions, Ambre, portant cette fois-ci sur la question de la recherche d'un "certain équilibre faisant intervenir des contraires".

Depuis Aristote, le courage a été considérée comme un sommet entre deux excès: témérité et lâcheté. Attardons-nous davantage sur cette notion de "témérité", toujours dans un contexte de guerre afin de mieux donner du poids aux mots et découvrir tout ce que ce terme peut recéler d'excès et d'hybris dans le comportement: rage, fureur, furie, acharnement, déchaînement, colère, haine, frénésie, fanatisme, folie, inconscience, barbarie, férocité, brutalité, cruauté, bestialité. L'excès de courage conduit au summum de l'inhumanité, au vice des vices. C'est le faux courage du salopard.

Une façon originale / géniale de pousser beaucoup plus loin le juste milieu aristotélicien consisterait à faire intervenir des contraires, non pas en opposant deux vices (témérité et lâcheté), mais en opposant deux vertus. Quelle peut bien être la vertu opposée et complémentaire du courage ? Puisque nous venons de voir que l'inhumanité est le pire vice dans lequel on peut tomber par excès de courage, nous pouvons déduire aisément que la vertu d'humanité (bonté) est la vertu opposée et complémentaire du courage.

Depuis Platon, nous savions déjà que le courage devait s'ouvrir aux "idées de justice, afin d'éviter que l'âme ne tombe dans une férocité un peu bestiale". Il y avait l'idée qu'un homme possèdant une vertu dans toute sa perfection, en l'occurrence le courage, ne pouvait être admiré que s'il possèdait en même temps une autre vertu permettant d'atteindre un certain équilibre. J'ai tenté, pour ma part, de montrer la nécessité de s'ouvrir aux idées d'humanité, terme pouvant englober plusieurs vertus dont celles de bonté, justice et rectitude.

Tout un travail de réflexion en amont sur la notion de courage, basée sur le raisonnement et intériorisée en soi, est donc nécessaire. Je choisis librement, en amont, de me fixer à grands traits des limites à ne pas franchir (excès par manque ou par défaut). Au moment d'agir, vient s'ajouter un processus de délibération extrêmement rapide, voire fulgurant, associant intelligence de la situation, résolution de risquer (après évaluation ultime de la prise de risque et la prise de précaution, résultant à nouveau d'un choix libre) et émotion de peur.

Pourquoi opposer émotion et raison, étant donné que l'évaluation cognitive joue un rôle déterminant dans le phénomène de l'émotion ? (cf. Traité de Psychologie des émotions, Psycho Sup).

Modifié par tison2feu
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tison2feu Membre 3 035 messages
Forumeur alchimiste ‚
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Le 17/01/2024 à 08:59, deja-utilise a dit :

 

À l'opposé, celui qui est face à des difficultés, auxquelles il ne peut se soustraire, car pris dans des injonctions situationnelles - et certainement extérieures - ou matérielles immédiates, n'a pas d'autre choix que de composer et s'adapter bon an mal an, peut-être dans la douleur et la souffrance, mais sans avoir émis le moindre choix volontaire - de dépassement de soi, l'élan vital qui anime chacun de nous étant le principal moteur à l'action en dernier ressort, il n'y a pas eu délibération à surmonter quoi que ce soit, mais simplement et essentiellement réaction - de l'organisme psychosomatique - à des stimuli menaçants et/ou nocifs.

 

Bonjour DU (encore moi ! :)),

Comment savoir avec certitude s'il y a "simplement et essentiellement réaction - de l'organisme psychosomatique - à des stimuli menaçants et/ou nocifs" ?

Ne doit-on pas également prendre en compte le rôle de la fonction d'arbitrage S3 mise en évidence par Olivier Houdé et son équipe, étant donné que ces travaux portent précisément sur le raisonnement et la prise de décision ?

Physiologiquement, cet « arbitre interne » agit au moyen de neurones qui sont capables d’envoyer des ordres inhibiteurs et/ou activateurs à S1 (système 1: raisonnement intuitif, hyper rapide et qui ne doute de rien) en introduisant une dose de doute lorsque la stratégie rapide s'avère erronée.

La question que je me pose, c'est de savoir si, au moment où nous agissons, nous prenons conscience de l'envoi de ces ordres ayant la capacité d'inhiber les automatismes de pensée intuitifs et erronés. S'il n'en est rien, alors cette capacité d'envoyer des ordres d'une partie du cerveau à une autre ne peut qu'être éduquée en amont, bien avant de se trouver en situation réelle d'agir courageusement.

 

 

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Membre, If you don't want, you Kant..., Posté(e)
deja-utilise Membre 5 768 messages
If you don't want, you Kant...,
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Il y a 20 heures, tison2feu a dit :

Bonjour DU (encore moi ! :)),

Bonjour Tison, ( oui je vois ça, mais je ne vais pas m'en plaindre ! )

 

Il y a 20 heures, tison2feu a dit :

Comment savoir avec certitude s'il y a "simplement et essentiellement réaction - de l'organisme psychosomatique - à des stimuli menaçants et/ou nocifs" ?

Tu as raison, il faudrait pour être rigoureux considérer les choses dans un continuum, allant d'un extrême à l'autre, chez l'animal dont l'homme, n'importe quel concept ne se retrouve jamais pur en pratique, bien que l'on puisse toujours indiquer des pôles ou des tendances majoritaires, en réalité c'est souvent un mixte qui est en jeu, une répartition avec des " poids " différents. 

 

Il y a 20 heures, tison2feu a dit :

Ne doit-on pas également prendre en compte le rôle de la fonction d'arbitrage S3 mise en évidence par Olivier Houdé et son équipe, étant donné que ces travaux portent précisément sur le raisonnement et la prise de décision ?

Tout-à-fait. Même si je ne l'ai pas explicité, c'est plus ou moins de cela dont il est question, il faut être capable par soi-même et non par une force extérieure, de contrecarrer ses propres volitions premières, cela passe donc par un contrôle de ses propres réactions, dans une résolution d'un conflit - si tant est qu'il existe - entre au moins deux instances psychiques.

" L'instinct " ou l'intuition étant le mode par défaut du fonctionnement humain entre autres, il faut donc en passer par ailleurs pour le déjouer, il faut être en mesure de le désactiver en somme, et si ce désengagement provient de soi-même et non de l'extérieur, alors on peut fort bien appeler ça courage face à un danger, et intelligence face à une tâche cognitive !

 

Il y a 20 heures, tison2feu a dit :

Physiologiquement, cet « arbitre interne » agit au moyen de neurones qui sont capables d’envoyer des ordres inhibiteurs et/ou activateurs à S1 (système 1: raisonnement intuitif, hyper rapide et qui ne doute de rien) en introduisant une dose de doute lorsque la stratégie rapide s'avère erronée.

Ce n'est pas tout-à-fait cela.

Comme je le soupçonnais avant de lire l'agrégation des Que-sais-je dans son livre Comment raisonne notre cerveau d'O. Houdé, il y a intervention du cortex cingulaire antérieur, bien qu'il n'en fasse pas mention dans cette synthèse - étalée sur plusieurs années. Il faut pour se faire regarder ce qu'il a écrit ailleurs, en l'occurrence dans une intervention dans Pour la Science de juillet 2002: La correction des erreurs de raisonnement, de Olivier Houdé ( Je me le suis procuré en pdf, je pourrais te le fournir si tu le désires ).

Dans le cortex cingulaire antérieur, il y a d'abord le cas échéant détection d'une incohérence, ensuite il y a relais vers le cortex préfrontal pour trouver " ce qui cloche ", c'est-à-dire la partie inhibitrice ou Système 3 qui se met dès lors éventuellement en marche, autrement dit le doute n'est pas produit par le système 3 lui-même, ce dernier est là pour en faire quelque chose si je puis dire, le " doute " émane plutôt du cortex cingulaire antérieur en amont !

 

Il y a 20 heures, tison2feu a dit :

La question que je me pose, c'est de savoir si, au moment où nous agissons, nous prenons conscience de l'envoi de ces ordres ayant la capacité d'inhiber les automatismes de pensée intuitifs et erronés. S'il n'en est rien, alors cette capacité d'envoyer des ordres d'une partie du cerveau à une autre ne peut qu'être éduquée en amont, bien avant de se trouver en situation réelle d'agir courageusement.

C'est une très bonne question, qui s'est posée à des chercheurs, et à laquelle Wim De Neys a répondu, dans Smarter than we think:

https://www.researchgate.net/publication/5386097_Smarter_Than_We_Think

 

C'est tout l'intérêt de la présence du cortex cingulaire antérieur, car sans celui-ci nous serions incapables d'enclencher une pensée plus analytique - nous serions tout bonnement à un stade de cécité cognitive, il faut donc en préambule, que cette fonction cérébrale détecte quelque chose, ensuite une partie de nous, peut ainsi au moins sentir - ou pressentir - que quelque chose ne va pas, sans pouvoir forcément être en mesure de savoir quoi exactement, ni où, ni comment y remédier, il peut donc il y avoir une certaine conscience minimale/minimaliste que nous sommes disons dans l'erreur, mais être en même temps incapables de passer outre la réponse intuitive ou automatique, il n'y a rien de nécessaire entre ces deux étapes, il faudra dès lors être en mesure d'inhiber cette réponse facile pour mettre en branle la procédure difficile, chronophage et énergivore pour appréhender la problématique de manière rationnelle cette fois-ci.

 

 

Bien à toi, D-U

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Membre, If you don't want, you Kant..., Posté(e)
deja-utilise Membre 5 768 messages
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Bien le bonjour à toi,

 

Le 23/01/2024 à 06:54, Ambre Agorn a dit :

Et encore une fois, la sagesse semble s'opposer au courage. Non pas s'opposer dans le sens de lui faire la guerre, mais dans le sens où plus il y a de sagesse, moins il n'y a de place pour le courage! C'est peut-être aller un peu vite en besogne, mais si l'on reprend les liens dont parle @tison2feu entre la signification ancienne du mot courage et sa parenté avec l'attitude attendue d'un homme-guerrier, alors la chose semble se confirmer (mais je ne suis pas assez calée pour affirmer une telle chose, juste pour poser des questions): le sage dans la tribu n'est pas le guerrier, il est soit un personnage à part apparenté au sorcier, soit une (des) personne âgée. Ces personnages masculins devaient bien avoir un mot qui les signifie, et n'étaient pas assimilés au terme de l'homme-guerrier. Il y avait donc des comportement de personnes qui ne rentraient pas sous le vocable d'homme-guerrier. Sans parler d'opposition, alors, il serait peut-être plus juste de parler de parallèle: on est soit courageux, soit sage.

On peut certes envisager les choses ainsi, quoique j'ai bien peur que cela ressemble plus à l'élaboration d'un mythe, un peu comme avec J.J. Rousseau et " l'état de nature bonne " de l'Homme avant sa compromission avec la " société ".

Le courage, comme toute autre affection interne peut se révéler à n'importe qui, quelle que soit sa condition d'existence et/ou sa place au sein d'un groupe, personne n'en ayant le monopole, même si des individus seront placés ou se placeront dans un environnement plus propice pour en faire preuve/usage éventuellement, e.g. le pompier ou le mineur de fond versus l'ingénieur en bureau d'étude ou la secrétaire, la différence étant au niveau des " occasions " qui peuvent conduire à l'éprouver. Autrement dit, le nombre d'opportunités n'a trop rien à voir avec le fait de pouvoir ontologiquement en faire preuve potentiellement, de manière latente ou en puissance ! Tout comme n'importe qui peut susceptiblement tomber amoureux, mais que les occasions peuvent être rares, voire même jamais se présenter suivant le mode d'existence, ou tout à l'inverse, apparaitre à tour de bras, ce que les nouvelles générations appellent le poly-amour.

 

 

Le 23/01/2024 à 06:54, Ambre Agorn a dit :

Je comprends ce que tu dis. Cependant, vu que tu prends cet exemple, j'ai eu le vertige. Tu sais cette sensation de tête qui tourne, du paysage qui se brouille, ce poids sur le corps qui oblige à se mettre au sol à quatre pattes ou couché, cette impossibilité d'avancer des jambes en coton et frappées d'immobilité. Ca m'avait surprise, je ne savais pas. Depuis ce jour j'évitais soigneusement les visions vertigineuses (j'habitais en montagne, alors je te parle de gorges, de falaises de plusieurs dizaines de mètres). Et puis un jour, on faisait une randonnée dans le massif de la Chartreuse. Il y avait une route qui surplombait le vide, une vision magnifique de la paroi rocheuse, la route serpentant soit dans le vide soit contre la roche, les tunnels, l'eau s'écoulant ça et là en petite cascades, le torrent au fond, etc. Impossible d'approcher: plus je m'approchais du bord, plus je m’aplatissais au sol et je n'arrivais pas à atteindre le bord pour voir. Mais je voulais aller voir. J'ai donc fermé les yeux jusqu'à la rambarde, je me suis accroupie et j'ai regardé. Au début c'était vertigineux, et puis petit à petit, ça s'est atténué et j'ai pu tout admirer.

Dans la mesure où tu as puisé dans tes propres ressources, on peut effectivement se poser la question, de quoi as-tu fait preuve à ce moment-là !? En tous cas, comme le rappelle Tison2feu, il y a eu certainement enclenchement du " système 3 " de ton cerveau: l'inhibition d'une réaction automatique/réflexe, par un procédé qui t'auras été propre à cet instant-ci.

 

Le 23/01/2024 à 06:54, Ambre Agorn a dit :

Bon, tout ça pour quoi? Et bien voilà: encore une fois on pourrait dire: c'était courageux. Alors que non, c'est juste que quelque chose de plus fort que ma peur m'a poussée à ce moment. A moins que le courage soit ceci: trouver quelque chose de plus fort que sa peur pour agir.

Ça ressemble assez à ce que j'en ai dit antérieurement, je rajouterai que ce " quelque chose " doit être intrinsèque et non extrinsèque pour que l'on puisse l'appeler " courage ", dans le cas contraire, c'est de la contrainte, du forçage, de la stimulation ou de l'incitation par quelqu'un ou quelques autres, bref, c'est une force extérieure à nous-même qui nous pousse à agir, alors que le courage est un combat avec soi-même à partir de ses propres ressources.

Bien sûr, on peut se poser la question, de savoir si par exemple une peur plus grande doit être comprise comme faire preuve de courage face à une situation perçue comme dangereuse en premier lieu, surmonter un obstacle qui nous fait peur présentement à cause ou grâce à un état de terreur plus grand anticipé/envisagé/futur, n'est sans doute pas à considérer comme du courage. Est-ce qu'une autre stimulation interne, peut aussi être interprétée comme tu le fais sceptiquement ? Disons par la curiosité, comme cela semble être pour ton anecdote ? J'aurais tendance à répondre comme toi, par la négative également. Je pense que l'acte de courage vise à dépasser notre état de peur en lui-même, de surpasser notre élan de fuite ou de tétanisation, d'y remédier, non pas tant en terme de finalité ou d'objectif ( je l'ai fait quand même ), mais dans le processus en cours ( il est hors de question que je me laisse mener par le bout du nez par mes réactions animalesques/instinctives ). Car au même titre que si j'y suis enjoint par mon entourage du moment, ce n'est pas le résultat d'y être parvenu en lui-même qui prime pour parler d'acte courageux, mais comment j'y suis arrivé finalement et qu'est-ce que je cherchais réellement à éteindre ou à surmonter: mon état ou l'objectif ?! J'ai du mal à voir pour la curiosité si elle peut être utilisée pour l'un ou pour l'autre ou exclusivement l'un, en revanche je pense que d'arriver à se mettre en colère, par une sorte d'effet d'emballement de nos pensées contraires/antagonistes à la peur, est à ranger dans la manifestation du courage puisque résultant d'un choix, celui de refuser notre condition présente dictée par le sentiment de peur.

Ce sont des pistes de réflexion, ma pensée n'est pas figée sur ces points, je n'ai pas encore tranché définitivement. 

 

Le 23/01/2024 à 06:54, Ambre Agorn a dit :

Effectivement, a force de faire, on se désensibilise. Mon petit papa me disait toujours: "C'est le premier pas qui compte, les autres suivront". Une fois que l'on a réalisé quelque chose qu'on croyait impossible, après, on sait que c'est possible, alors on se sent apte à le refaire.

Disons que lorsqu'il est question de morale dans la première action, une fois que l'on se voit soi-même avoir cédé, c'est comme une digue qui lâche, point de retour en arrière, on ne peut effacer ces manquements, il y a une part d'irréversibilité, qui nous pousse alors à baisser les armes, la lutte ayant été manifestement perdue dès la première bataille, il y a comme une capitulation de notre esprit, et pour faire suite et se rasséréner, on a vite fait en suivant d'avoir recours à la rationalisation !

Dans un autre registre, celui de la dissonance cognitive, il a été montré par exemple à des sujets, à qui l'on demandait de lire à haute voix à un public un discours contraire à leur idéologie politique, quand bien même on leur avait dit en amont que cela ne signifiait pas qu'il devait souscrire aux idées dedans, juste de les lire sans partie pris, ils ont été ensuite de leur propre chef conduit à défendre ces mêmes idées pourtant opposées à leur position politique, par le simple fait qu'ils les avaient malgré tout tenues face à d'autres, pourtant sans aucune conviction au moment de la diction, cette dissonance étant insupportable, il fallait rendre compte de nos actes et de nos pensés, et d'une manière ou d'une autre les harmoniser entre eux.

 

 

Le 23/01/2024 à 06:54, Ambre Agorn a dit :

Ce qu'il faudrait, ce serait de créer, de façon volontaire, un nouveau chemin neuronal. On pourrait voir ceci comme un apprentissage. C'est à dire, si on reprend l'exemple de l'addict au chocolat, ne pas en acheter n'est pas un nouveau chemin, c'est éviter un circuit. Cependant, si on instaurait une désensibilisation progressive par une exposition à la tentation de façon plus ou moins sécurisée, il suffirait là aussi d'une première "victoire" pour faire advenir les suivantes et ainsi créer un nouveau circuit neuronal d'actions non dépendantes à la présence de chocolat.

...j'ai un peu quitté le sujet du courage!

Oui en quelque sorte, on peut s'apprendre à changer nos réactions ou nos schèmes de pensées, c'est justement ce qu'explique Wendy Wood dans son livre, comment créer par soi-même une autre " voie " et s'y tenir:

https://www.babelio.com/livres/Wood-Bonnes-habitudes-mauvaises-habitudes/1298088

C'est un processus long, laborieux et engageant, mais possible en effet !

 

Bien que je ne sois pas certain que cela fonctionne systématiquement, d'une part, si on ne manifeste pas le désir de changement, alors rien n'est possible, ensuite même avec de la volonté et l'envie de le faire, on peut encore rencontrer des obstacles insurmontables, je pense à ce que j'appelle comme Konrad Lorenz le phénomène " d'empreinte ", comme il existe dans l'orientation sexuelle par exemple, une fois que celle-ci a été prise ( consciemment ou non ), elle ne sera plus révisable par la suite, on ne peut pas décider d'en changer, un hétéro ne peut pas de lui-même devenir homo et réciproquement, quel que soit le moyen utilisé, d'ailleurs toutes les " techniques " employées à l'époque où l'homosexualité était considérée comme une déviance, perversion ou une maladie mentale, elles ont échouées, elles ont surtout détruit des existences en faisant jouer un rôle étranger/faux aux protagonistes auxquels ils n'adhéraient pas vraiment hormis par la contrainte institutionnelle, ou soit par le recours assez radical au suicide, ou moins tragiquement par la fuite, le camouflage, l'imposture, etc...

Il a été par ailleurs montré, en l'occurrence sur les idéologies, que rien n'était efficace pour convaincre les gens, si leurs idéaux pour eux sont des valeurs cardinales, alors il n'existe aucun recours pour les faire changer ou évoluer, le seul débouché possible étant la polarisation si l'on insiste davantage... La seule perspective un tant soit peu optimiste, est via la " preuve sociale " ou le mimétisme/conformisme, cela permet de faire changer les comportements à défaut des réflexions/cognitions, par la suite, les générations suivantes pourront s'imprégner et intérioriser ses nouvelles dispositions. Le corolaire, c'est que plus une personne est âgée moins elle est prompte ou encline au changement, l'ouverture active de l'esprit étant semble t-il évolutivement inverse des années qui passent pour le-plus-grand-nombre, elle se rétrécie avec les ans... D'ailleurs la sagesse populaire le sait, puisqu'elle considère souvent que les " vieux " redeviennent des enfants capricieux, bornés et entêtés ! La décrépitude n'est pas que corporelle, elle est aussi intellective.

 

Bien à toi, D-U

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bouddean Membre 10 426 messages
Maitre des forums‚ 7ans‚
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Le 24/01/2024 à 13:52, tison2feu a dit :

(Suite :))

Puisque j'ai tenté de remonter à l'essence du courage en tant que valeur guerrière, j'aimerais creuser davantage à partir d'une autre de tes bonnes intuitions, Ambre, portant cette fois-ci sur la question de la recherche d'un "certain équilibre faisant intervenir des contraires".

Depuis Aristote, le courage a été considérée comme un sommet entre deux excès: témérité et lâcheté. Attardons-nous davantage sur cette notion de "témérité", toujours dans un contexte de guerre afin de mieux donner du poids aux mots et découvrir tout ce que ce terme peut recéler d'excès et d'hybris dans le comportement: rage, fureur, furie, acharnement, déchaînement, colère, haine, frénésie, fanatisme, folie, inconscience, barbarie, férocité, brutalité, cruauté, bestialité. L'excès de courage conduit au summum de l'inhumanité, au vice des vices. C'est le faux courage du salopard.

Une façon originale / géniale de pousser beaucoup plus loin le juste milieu aristotélicien consisterait à faire intervenir des contraires, non pas en opposant deux vices (témérité et lâcheté), mais en opposant deux vertus. Quelle peut bien être la vertu opposée et complémentaire du courage ? Puisque nous venons de voir que l'inhumanité est le pire vice dans lequel on peut tomber par excès de courage, nous pouvons déduire aisément que la vertu d'humanité (bonté) est la vertu opposée et complémentaire du courage.

Depuis Platon, nous savions déjà que le courage devait s'ouvrir aux "idées de justice, afin d'éviter que l'âme ne tombe dans une férocité un peu bestiale". Il y avait l'idée qu'un homme possèdant une vertu dans toute sa perfection, en l'occurrence le courage, ne pouvait être admiré que s'il possèdait en même temps une autre vertu permettant d'atteindre un certain équilibre. J'ai tenté, pour ma part, de montrer la nécessité de s'ouvrir aux idées d'humanité, terme pouvant englober plusieurs vertus dont celles de bonté, justice et rectitude.

Tout un travail de réflexion en amont sur la notion de courage, basée sur le raisonnement et intériorisée en soi, est donc nécessaire. Je choisis librement, en amont, de me fixer à grands traits des limites à ne pas franchir (excès par manque ou par défaut). Au moment d'agir, vient s'ajouter un processus de délibération extrêmement rapide, voire fulgurant, associant intelligence de la situation, résolution de risquer (après évaluation ultime de la prise de risque et la prise de précaution, résultant à nouveau d'un choix libre) et émotion de peur.

Pourquoi opposer émotion et raison, étant donné que l'évaluation cognitive joue un rôle déterminant dans le phénomène de l'émotion ? (cf. Traité de Psychologie des émotions, Psycho Sup).

Merci ! trouver  deux vertus qui s'opposent tout en étant complémentaires était quelque chose qui ne m'était jamais venu à l'idée, et maintenant, cela parait tellement évident .

Au courage, j'opposerais une vertu lui étant pourtant complémentaire : la patience .

Le courage est celui qui défriche , qui laboure , qui sème , la patience est celle qui laisse le temps à la graine de germer , qui l'arrose et en prend soin ,  sans jamais abandonner le terrain .

 

 

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tison2feu Membre 3 035 messages
Forumeur alchimiste ‚
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Le 26/01/2024 à 08:14, deja-utilise a dit :

Ce n'est pas tout-à-fait cela.

Comme je le soupçonnais avant de lire l'agrégation des Que-sais-je dans son livre Comment raisonne notre cerveau d'O. Houdé, il y a intervention du cortex cingulaire antérieur, bien qu'il n'en fasse pas mention dans cette synthèse - étalée sur plusieurs années. Il faut pour se faire regarder ce qu'il a écrit ailleurs, en l'occurrence dans une intervention dans Pour la Science de juillet 2002: La correction des erreurs de raisonnement, de Olivier Houdé ( Je me le suis procuré en pdf, je pourrais te le fournir si tu le désires ).

Dans le cortex cingulaire antérieur, il y a d'abord le cas échéant détection d'une incohérence, ensuite il y a relais vers le cortex préfrontal pour trouver " ce qui cloche ", c'est-à-dire la partie inhibitrice ou Système 3 qui se met dès lors éventuellement en marche, autrement dit le doute n'est pas produit par le système 3 lui-même, ce dernier est là pour en faire quelque chose si je puis dire, le " doute " émane plutôt du cortex cingulaire antérieur en amont !

[...]

C'est une très bonne question, qui s'est posée à des chercheurs, et à laquelle Wim De Neys a répondu, dans Smarter than we think:

https://www.researchgate.net/publication/5386097_Smarter_Than_We_Think

C'est tout l'intérêt de la présence du cortex cingulaire antérieur, car sans celui-ci nous serions incapables d'enclencher une pensée plus analytique - nous serions tout bonnement à un stade de cécité cognitive, il faut donc en préambule, que cette fonction cérébrale détecte quelque chose, ensuite une partie de nous, peut ainsi au moins sentir - ou pressentir - que quelque chose ne va pas, sans pouvoir forcément être en mesure de savoir quoi exactement, ni où, ni comment y remédier, il peut donc il y avoir une certaine conscience minimale/minimaliste que nous sommes disons dans l'erreur, mais être en même temps incapables de passer outre la réponse intuitive ou automatique, il n'y a rien de nécessaire entre ces deux étapes, il faudra dès lors être en mesure d'inhiber cette réponse facile pour mettre en branle la procédure difficile, chronophage et énergivore pour appréhender la problématique de manière rationnelle cette fois-ci.

 

Merci D U pour ces précisions concernant le rôle du cortex cingulaire antérieur, dont il n'est pas fait mention en effet dans le volume récapitulatif d'O. Houdé Comment raisonne notre cerveau (2023, 2e édit. mise à jour) que je me suis également procuré. Cet article de Pour la Science serait donc bienvenu dans mes archives ! :bo:

Sur la question de l'accès à la conscience, cette étude de W. De Neys montre en effet que la zone de détection de conflit (cingulaire antérieur)  était activée même lorsque les gens raisonnaient de manière stéréotypée.

Et puis il y aurait aussi à découvrir et à tirer profit des multiples travaux du grand spécialiste de la "conscience d'accès" Stanislas Dehaene...  

􏰝􏰆􏰋 􏰁􏰥􏰋􏰔􏰅􏰂􏰉􏰂􏰋 􏰏􏰊􏰂 􏰶􏰏􏰊􏰂􏰁􏰥 􏰮􏰔􏰆 􏰶􏱈􏰶􏰆 􏰋􏰃 􏰅􏰉 􏱎􏰏􏰊􏰆 􏰈􏰵􏰃􏰊􏰎􏰃􏰽􏰃􏰂􏰃􏰏􏰊 􏰥􏰂􏰉􏰃􏰂 􏰋􏰤􏰥􏰄􏰃􏰭􏰃􏰮􏰔􏰆􏰶􏰆􏰊􏰂 􏰉􏰄􏰂􏰃􏰣􏰥􏰆 􏰅􏰏􏰁􏰋􏰮􏰔􏰆 􏰅􏰆􏰋 􏰁􏰥􏰤􏰏􏰊􏰋􏰆􏰋 􏰋􏰂􏰥􏰁􏰥􏰏􏰂􏰍􏰤􏰥􏰆􏰋 􏰥􏰂􏰉􏰃􏰆􏰊􏰂 􏰥􏰣􏰃􏰂􏰥􏰆􏰋􏰟 􏰅􏰉 􏱎􏰏􏰊􏰆 􏰈􏰆 􏰈􏰥􏰂􏰆􏰄􏰂􏰃􏰏􏰊 􏰈􏰆 􏰄􏰏􏰊􏰭􏰅􏰃􏰂 􏰥􏰂􏰉􏰃􏰂 􏰉􏰄􏰂􏰃􏰣􏰥􏰆 􏰶􏱈􏰶􏰆 􏰅􏰏􏰁􏰋􏰮􏰔􏰆 􏰅􏰆􏰋 􏰐􏰆􏰊􏰋 􏰁􏰉􏰃􏰋􏰏􏰊􏰊􏰉􏰃􏰆􏰊􏰂 􏰈􏰆 􏰶􏰉􏰊􏰃􏱉􏰁􏰆 􏰋􏰂􏰥􏰁􏰥􏰏􏰂􏰍􏰤􏰥􏰆􏰨 􏰝􏰆􏰋 􏰁􏰥􏰋􏰔􏰅􏰂􏰉􏰂􏰋 􏰋􏰔􏰐􏰐􏱉􏰁􏰆􏰊􏰂 􏰮􏰔􏰆 􏰅􏰆􏰋 􏰐􏰆􏰊􏰋 􏰈􏰥􏰂􏰆􏰄􏰂􏰆􏰊􏰂 􏰅􏰆􏰔􏰁􏰋 􏰤􏰁􏰥􏰧􏰔􏰐􏰥􏰋 􏰅􏰏􏰁􏰋􏰮􏰔􏱇􏰃􏰅􏰋 􏰈􏰏􏰊􏰊􏰆􏰊􏰂 􏰈􏰆􏰋 􏰁􏰥􏰤􏰏􏰊􏰋􏰆􏰋 􏰃􏰊􏰂􏰔􏰃􏰂􏰃􏰣􏰆􏰋􏰨􏰆􏰋 􏰁􏰥􏰋􏰔􏰅􏰂􏰉􏰂􏰋 􏰏􏰊􏰂 􏰶􏰏􏰊􏰂􏰁􏰥 􏰮􏰔􏰆 􏰶􏱈􏰶􏰆 􏰋􏰃 􏰅􏰉 􏱎􏰏􏰊􏰆 􏰈􏰵􏰃􏰊􏰎􏰃􏰽􏰃􏰂􏰃􏰏􏰊 􏰥􏰂􏰉􏰃􏰂 􏰋􏰤􏰥􏰄􏰃􏰭􏰃􏰮􏰔􏰆􏰶􏰆􏰊􏰂 􏰉􏰄􏰂􏰃􏰣􏰥􏰆 􏰅􏰏􏰁􏰋􏰮􏰔􏰆 􏰅􏰆􏰋 􏰁􏰥􏰤􏰏􏰊􏰋􏰆􏰋 􏰋􏰂􏰥􏰁􏰥􏰏􏰂􏰍􏰤􏰥􏰆􏰋 􏰥􏰂􏰉􏰃􏰆􏰊􏰂 􏰥􏰣􏰃􏰂􏰥􏰆􏰋􏰟 􏰅􏰉 􏱎􏰏􏰊􏰆 􏰈􏰆 􏰈􏰥􏰂􏰆􏰄􏰂􏰃􏰏􏰊 􏰈􏰆 􏰄􏰏􏰊􏰭􏰅􏰃􏰂 􏰥􏰂􏰉􏰃􏰂 􏰉􏰄􏰂􏰃􏰣􏰥􏰆 􏰶􏱈􏰶􏰆 􏰅􏰏􏰁􏰋􏰮􏰔􏰆 􏰅􏰆􏰋 􏰐􏰆􏰊􏰋 􏰁􏰉􏰃􏰋􏰏􏰊􏰊􏰉􏰃􏰆􏰊􏰂 􏰈􏰆 􏰶􏰉􏰊􏰃􏱉􏰁􏰆 􏰋􏰂􏰥􏰁􏰥􏰏􏰂􏰍􏰤􏰥􏰆􏰨 􏰝􏰆􏰋 􏰁􏰥􏰋􏰔􏰅􏰂􏰉􏰂􏰋 􏰋􏰔􏰐􏰐􏱉􏰁􏰆􏰊􏰂 􏰮􏰔􏰆 􏰅􏰆􏰋 􏰐􏰆􏰊􏰋 􏰈􏰥􏰂􏰆􏰄􏰂􏰆􏰊􏰂 􏰅􏰆􏰔􏰁􏰋 􏰤􏰁􏰥􏰧􏰔􏰐􏰥􏰋 􏰅􏰏􏰁􏰋􏰮􏰔􏱇􏰃􏰅􏰋 􏰈􏰏􏰊􏰊􏰆􏰊􏰂 􏰈􏰆􏰋 􏰁􏰥􏰤􏰏􏰊􏰋􏰆􏰋 􏰃􏰊􏰂􏰔􏰃􏰂􏰃􏰣􏰆􏰋􏰨

 

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Membre, If you don't want, you Kant..., Posté(e)
deja-utilise Membre 5 768 messages
If you don't want, you Kant...,
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Bonjour Tison

Il y a 3 heures, tison2feu a dit :

Merci D U pour ces précisions concernant le rôle du cortex cingulaire antérieur, dont il n'est pas fait mention en effet dans le volume récapitulatif d'O. Houdé Comment raisonne notre cerveau (2023, 2e édit. mise à jour) que je me suis également procuré. Cet article de Pour la Science serait donc bienvenu dans mes archives ! :bo:

Sur la question de l'accès à la conscience, cette étude de W. De Neys montre en effet que la zone de détection de conflit (cingulaire antérieur)  était activée même lorsque les gens raisonnaient de manière stéréotypée.

Et puis il y aurait aussi à découvrir et à tirer profit des multiples travaux du grand spécialiste de la "conscience d'accès" Stanislas Dehaene... 

Il n'est pas impossible que j'ai vaguement confondu deux productions des deux auteurs que sont O. Houdé ( celui-ci citant celui-là ) et W. De Neys, même si le premier parle plus volontiers de Gyrus cingulaire pour le Cortex cingulaire antérieur, dans son intervention dans Pour la Science de juillet 2002, il ne laisse a posteriori pas entendre aussi explicitement/clairement que le second ce que j'ai dit/rappelé, si je dois me raviser, entre autres:

" We noted that although people hardly ever explicitly refer to normative considerations during reasoning, more implicit detection measures such as the activation of the anterior cingulate cortex or autonomic skin-conductance levels already indicated that our brain is sensitive to the presence of conflict between cued intuitive and normative considerations " dans Biased but in Doubt: Conflict and Decision Confidence, W. De Neys et al.

 

Je " connais " par lectures interposées effectivement ce neuro-psychologue qu'est S. Dehaene, tout comme je prends de temps en temps connaissance des " avis " de N. Gauvrit et accessoirement F. Ramus.

 

  • Merci 1
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tison2feu Membre 3 035 messages
Forumeur alchimiste ‚
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Il y a 10 heures, bouddean a dit :

Merci ! trouver  deux vertus qui s'opposent tout en étant complémentaires était quelque chose qui ne m'était jamais venu à l'idée, et maintenant, cela parait tellement évident .

Au courage, j'opposerais une vertu lui étant pourtant complémentaire : la patience .

Le courage est celui qui défriche , qui laboure , qui sème , la patience est celle qui laisse le temps à la graine de germer , qui l'arrose et en prend soin ,  sans jamais abandonner le terrain .

 

 

Bonjour Bouddean,

Ce schème de pensée consistant à opposer deux vertus est pratiquement absent de toute la philosophie dite "occidentale". Je ne l'ai rencontré qu'une fois chez Blaise Pascal et, plus tard, chez le philosophe français Paul Franceschi (philosophie analytique) qui en a fait un système de pensée encore plus sophistiqué (1) ! A noter qu' il s'agit là d'un mode de pensée typiquement chinois (taoïste) qui consiste à harmoniser des forces opposées mais complémentaires, selon le principe dynamique Yin Yang.

Oui, le terme découragement évoque l'impatience, d'où la possibilité d'une opposition complémentaire entre courage et patience.

Dans le même ordre d'idées, tu peux également chercher le vice potentiel pouvant se cacher dans une vertu, ou à l'inverse chercher la vertu potentielle qui se cache dans un vice. :)  

« Nos vertus ne sont, le plus souvent, que des vices déguisés » (célèbre épigraphe aux Maximes de François de La Rochefoucauld, 1665)

_______________

(1) A titre d'exemple, voici la matrice de concepts élaborée par P. Franceschi à partir du concept de courage versus prudence:

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Modifié par tison2feu
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Dompteur de mots Membre 1 841 messages
Forumeur activiste‚
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Le 23/01/2024 à 00:54, Ambre Agorn a dit :

Je comprends ce que tu dis. Cependant, vu que tu prends cet exemple, j'ai eu le vertige. Tu sais cette sensation de tête qui tourne, du paysage qui se brouille, ce poids sur le corps qui oblige à se mettre au sol à quatre pattes ou couché, cette impossibilité d'avancer des jambes en coton et frappées d'immobilité. Ca m'avait surprise, je ne savais pas. Depuis ce jour j'évitais soigneusement les visions vertigineuses (j'habitais en montagne, alors je te parle de gorges, de falaises de plusieurs dizaines de mètres). Et puis un jour, on faisait une randonnée dans le massif de la Chartreuse. Il y avait une route qui surplombait le vide, une vision magnifique de la paroi rocheuse, la route serpentant soit dans le vide soit contre la roche, les tunnels, l'eau s'écoulant ça et là en petite cascades, le torrent au fond, etc. Impossible d'approcher: plus je m'approchais du bord, plus je m’aplatissais au sol et je n'arrivais pas à atteindre le bord pour voir. Mais je voulais aller voir. J'ai donc fermé les yeux jusqu'à la rambarde, je me suis accroupie et j'ai regardé. Au début c'était vertigineux, et puis petit à petit, ça s'est atténué et j'ai pu tout admirer.

Bon, tout ça pour quoi? Et bien voilà: encore une fois on pourrait dire: c'était courageux. Alors que non, c'est juste que quelque chose de plus fort que ma peur m'a poussée à ce moment. A moins que le courage soit ceci: trouver quelque chose de plus fort que sa peur pour agir.

"Cet acte est courageux."

Le réflexe qui nous vient à la lecture ou à l'audition d'une telle phrase est d'assumer qu'il s'agit d'une proposition énonciative, c'est-à-dire une proposition qui dit ce qui est. Et c'est normal puisqu'elle en emprunte tous les codes: le sujet, le prédicat, le copule. Parce que nous faisons cette assomption, nous nous donnons tout le loisir d'en questionner les zones d'être. En nous demandant par exemple ce qu'est très précisément le courage, de quelle glande il émane, à partir de quel processus psycho-physiologique on peut le situer.

Mais en fait, cette assomption ne résulte que d'une illusion d'optique qui découle du fait que nous jouons constamment à cache-cache avec nos intentions éthiques. Et d'un certain point de vue, cela est parfaitement compréhensible puisque le propre des intentions éthiques est de tendre vers l'être. Une proposition éthique, c'est une proposition normative, une proposition qui dit ce qui devrait être, qui tente donc d'influer le cours des choses afin de le ramener à ce qu'elle valorise très précisément. Dire de cet acte qu'il est courageux est donc en fait une proposition éthique déguisée. L'on aurait tout aussi bien pu dire "voilà comment tu dois agir", "voilà comment il convient que tu agisses". C'est à la fois une marque de reconnaissance et un défi. C'est comme quand l'on dit à un cancéreux qu'il est courageux, après avoir entendu le récit de ses aventures en chimiothérapie. Bien entendu qu'il n'a fait que ce qu'il n'avait pas le choix de faire, qu'il ne s'est que laisser porter par le manège médical. Mais l'intention éthique derrière consiste à rendre les faits et gestes du cancéreux plus aisés en les augmentant d'une sorte de dignité morale.

Évidemment, pour qu'une proposition éthique sur le courage ait un sens, il faut qu'elle réponde minimalement au schéma sémantique traditionnel du courage, à son contexte d'émergence primitif. Mais justement, il ne s'agit que d'un schéma et non pas d'un cadre rigide. Le langage est jazz, il n'est pas baroque: on lui donne un thème et après, il s'agit d'improviser à l'intérieur du territoire défini par le thème, en essayant de ne pas perdre l'auditeur. Ou alors est-il plutôt devenu jazz ? Il en va peut-être après tout de langage comme de la musique: plus les normes morales sont strictes et plus les formes musicales le sont également.

Après, tout n'est peut-être qu'une question de dosage. À trop jazzer, on perd parfois la force, la densité évocative du thème, comme dans certaines pièces de free jazz qui n'ont ni queue ni tête. On prend alors goût d'écouter une bonne vieille cantate de Jean-Sébastien Bach.

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Membre, If you don't want, you Kant..., Posté(e)
deja-utilise Membre 5 768 messages
If you don't want, you Kant...,
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@tison2feu, je ne voulais pas spécialement revenir sur cette approche, dont nous avons déjà eu l'occasion de discuter il y a bien longtemps à présent, mais force est de constater que je ne l'ai pas digérée, ce qui signifie que si je n'arrive pas à faire mienne une idée, c'est qu'il y a quelque chose qui ne va pas, comme ça m'est déjà arrivé sur une conception statistique en Math que je n'arrivais pas à m'approprier, et que bien des années plus tard, deux mathématiciens ont montré une mis-conception ou une mésinterprétation qui avait fait consensus pendant des décennies ! D'où certainement mon incapacité à l'intégrer dans mon arsenal intellectif. 

Je vais donc te tarabiscoter un petit peu, sans mauvaise arrière pensée bien évidemment, le but n'étant pas de te piéger il va sans dire:

 

" Quelle peut bien être la vertu opposée et complémentaire du courage ? Puisque nous venons de voir que l'inhumanité est le pire vice dans lequel on peut tomber par excès de courage, nous pouvons déduire aisément que la vertu d'humanité (bonté) est la vertu opposée et complémentaire du courage.  "

" Oui, le terme découragement évoque l'impatience, d'où la possibilité d'une opposition complémentaire entre courage et patience. "

" A titre d'exemple, voici la matrice de concepts élaborée par P. Franceschi à partir du concept de courage versus prudence "

 

 

Ce qui me chagrine là-dedans, c'est l'utilisation du terme " opposé ", qui me laisse entendre qu'ils ne sont pas du " même côté " bien au contraire, par exemple ici: https://dictionnaire.lerobert.com/definition/oppose

Pour ma part, après quelques réflexions dernières, je pense que ce qui donne l'impression d'opposition ne se situe aucunement dans les concepts en eux-mêmes, ce que tu appelles ici les vertus, mais bien plutôt dans la situation qui les concerne, en effet en répondant à Bouddean, tu acquiesces en disant que le courage se trouve en opposition à la patience, or un simple contre-exemple suffit à montrer que ce ne peut pas être vrai tout le temps ou ontologiquement, et que c'est précisément la situation qui dicte qu'ils sont soit congruents, soit en opposition, c'est-à-dire, si la situation les fait mettre en conflit ou non ! Par exemple, si une personne est gravement malade d'une maladie incurable ou difficilement, elle peut décider d'affronter cette adversité avec courage - nonobstant ce que l'on entend exactement par là - tout comme elle peut faire aussi monstration de patience dans la durée face à ses tourments qui vont durer plus ou moins longtemps et peut-être même s'aggraver, il n'y a dès lors pas opposition, mais bien complémentation dans leurs survenues et traitements. De même le sauveteur qui va secourir une personne coincée sur une falaise abrupte, peut à la fois faire preuve de courage et en même temps de prudence en prenant les précautions adéquates pour ne pas empirer la situation pour la victime, lui-même voire d'autres personnes éventuellement présentes, là également il y a complémentarité sans opposition, puisque dans ces deux cas/exemples, il n'y a pas conflit entre les deux vertus en jeu, elles sont congruentes !

Quand je lis ce que tu rapportes, j'ai l'impression qu'il se passerait la même chose avec nos sens - plutôt qu'avec des vertus ou des vices, je ne vois pas bien comment intrinsèquement l'ouïe pourrait être en opposition avec la vue par exemple, en revanche suivant l'évènement en lice, on pourrait effectivement avoir conflit ou incongruence entre la perception visuelle et sonore, comme lorsqu'un avion à réaction transperce le ciel, son image ne correspond pas à la localisation du son perçu/émis, il y aurait ainsi " opposition ", alors que la voiture qui nous klaxonne pendant que nous traversons les " clous " ne présente pas cette contradiction, les sens de la vue et de l'audition sont en phase, il n'y a pas ici d'opposition. Dans un cas comme dans l'autre il y aurait malgré tout complémentarité entre la vue et l'ouïe, il n'y a que chez les personnes synesthètes qu'il pourrait il y avoir réellement chevauchement " contradictoire " ou conflictuel fondamentalement, mais ce serait abusif de parler d'opposition, bien plutôt parler de contamination serait plus juste.

 

Consécuitivement, ne pourrait-on pas envisager un cas de figure où le courage et la bonté se présentent simultanément et sans conflit/incongruité ? Je ne sais pas, une personne qui met en jeu sa propre existence ou son intégrité physique et/ou mentale pour secourir des gens, leur venir en aide ou les soustraire à des maux !? L'individu qui aura également recueilli un " Juif " chez lui, pendant l'occupation alors qu'il était demandé de les dénoncer sous peine de grave sanction, ne fait-il pas preuve à la fois de courage et de miséricorde envers une personne en détresse - au moins pour un regard extérieur !?

 

:bienvenue:

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FROD Membre 405 messages
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il y a 31 minutes, deja-utilise a dit :

@tison2feu, je ne voulais pas spécialement revenir sur cette approche, dont nous avons déjà eu l'occasion de discuter il y a bien longtemps à présent, mais force est de constater que je ne l'ai pas digérée, ce qui signifie que si je n'arrive pas à faire mienne une idée, c'est qu'il y a quelque chose qui ne va pas, comme ça m'est déjà arrivé sur une conception statistique en Math que je n'arrivais pas à m'approprier, et que bien des années plus tard, deux mathématiciens ont montré une mis-conception ou une mésinterprétation qui avait fait consensus pendant des décennies ! D'où certainement mon incapacité à l'intégrer dans mon arsenal intellectif. 

Je vais donc te tarabiscoter un petit peu, sans mauvaise arrière pensée bien évidemment, le but n'étant pas de te piéger il va sans dire:

 

" Quelle peut bien être la vertu opposée et complémentaire du courage ? Puisque nous venons de voir que l'inhumanité est le pire vice dans lequel on peut tomber par excès de courage, nous pouvons déduire aisément que la vertu d'humanité (bonté) est la vertu opposée et complémentaire du courage.  "

" Oui, le terme découragement évoque l'impatience, d'où la possibilité d'une opposition complémentaire entre courage et patience. "

" A titre d'exemple, voici la matrice de concepts élaborée par P. Franceschi à partir du concept de courage versus prudence "

 

 

Ce qui me chagrine là-dedans, c'est l'utilisation du terme " opposé ", qui me laisse entendre qu'ils ne sont pas du " même côté " bien au contraire, par exemple ici: https://dictionnaire.lerobert.com/definition/oppose

Pour ma part, après quelques réflexions dernières, je pense que ce qui donne l'impression d'opposition ne se situe aucunement dans les concepts en eux-mêmes, ce que tu appelles ici les vertus, mais bien plutôt dans la situation qui les concerne, en effet en répondant à Bouddean, tu acquiesces en disant que le courage se trouve en opposition à la patience, or un simple contre-exemple suffit à montrer que ce ne peut pas être vrai tout le temps ou ontologiquement, et que c'est précisément la situation qui dicte qu'ils sont soit congruents, soit en opposition, c'est-à-dire, si la situation les fait mettre en conflit ou non ! Par exemple, si une personne est gravement malade d'une maladie incurable ou difficilement, elle peut décider d'affronter cette adversité avec courage - nonobstant ce que l'on entend exactement par là - tout comme elle peut faire aussi monstration de patience dans la durée face à ses tourments qui vont durer plus ou moins longtemps et peut-être même s'aggraver, il n'y a dès lors pas opposition, mais bien complémentation dans leurs survenues et traitements. De même le sauveteur qui va secourir une personne coincée sur une falaise abrupte, peut à la fois faire preuve de courage et en même temps de prudence en prenant les précautions adéquates pour ne pas empirer la situation pour la victime, lui-même voire d'autres personnes éventuellement présentes, là également il y a complémentarité sans opposition, puisque dans ces deux cas/exemples, il n'y a pas conflit entre les deux vertus en jeu, elles sont congruentes !

Quand je lis ce que tu rapportes, j'ai l'impression qu'il se passerait la même chose avec nos sens - plutôt qu'avec des vertus ou des vices, je ne vois pas bien comment intrinsèquement l'ouïe pourrait être en opposition avec la vue par exemple, en revanche suivant l'évènement en lice, on pourrait effectivement avoir conflit ou incongruence entre la perception visuelle et sonore, comme lorsqu'un avion à réaction transperce le ciel, son image ne correspond pas à la localisation du son perçu/émis, il y aurait ainsi " opposition ", alors que la voiture qui nous klaxonne pendant que nous traversons les " clous " ne présente pas cette contradiction, les sens de la vue et de l'audition sont en phase, il n'y a pas ici d'opposition. Dans un cas comme dans l'autre il y aurait malgré tout complémentarité entre la vue et l'ouïe, il n'y a que chez les personnes synesthètes qu'il pourrait il y avoir réellement chevauchement " contradictoire " ou conflictuel fondamentalement, mais ce serait abusif de parler d'opposition, bien plutôt parler de contamination serait plus juste.

 

Consécuitivement, ne pourrait-on pas envisager un cas de figure où le courage et la bonté se présentent simultanément et sans conflit/incongruité ? Je ne sais pas, une personne qui met en jeu sa propre existence ou son intégrité physique et/ou mentale pour secourir des gens, leur venir en aide ou les soustraire à des maux !? L'individu qui aura également recueilli un " Juif " chez lui, pendant l'occupation alors qu'il était demandé de les dénoncer sous peine de grave sanction, ne fait-il pas preuve à la fois de courage et de miséricorde envers une personne en détresse - au moins pour un regard extérieur !?

 

:bienvenue:

Je suis assez d'accord avec vous, pour la référence que faisait @tison2feu à Blaise Pascal, il ne faut pas confondre le plan de la vérité et celui de la morale. Dans le domaine de la vérité, il faut en effet affirmer les vérités opposées en même temps, mais dans le domaine de la morale, il faut tenir le milieu entre les extrêmes qui sont toujours mauvais. "Rien que la médiocrité n’est bon : c’est la pluralité qui a établi cela, et qui mord quiconque s’en échappe par quelque bout que ce soit. Je ne m’y obstinerai pas, je consens bien qu’on m’y mette, et me refuse d’être au bas bout, non pas parce qu’il est bas, mais parce qu’il est bout, car je refuserais de même qu’on me mît au haut. C’est sortir de l’humanité que de sortir du milieu."

Et aussi : "Nous ne nous soutenons pas dans la vertu par nos propres forces, mais par le contrepoids de deux vices opposés." Et non pas de deux vertus opposées!

Pascal a en morale une conception assez proche d'Aristote, où le courage serait le juste milieu entre les deux vices de la lâcheté et de la témérité. Dans la pensée d'Aristote, la prudence étant la sagesse pratique, il me semble assez clair que le vrai courage doit être prudent.

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tison2feu Membre 3 035 messages
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il y a 9 minutes, FROD a dit :

Je suis assez d'accord avec vous, pour la référence que faisait @tison2feu à Blaise Pascal, il ne faut pas confondre le plan de la vérité et celui de la morale. Dans le domaine de la vérité, il faut en effet affirmer les vérités opposées en même temps, mais dans le domaine de la morale, il faut tenir le milieu entre les extrêmes qui sont toujours mauvais. "Rien que la médiocrité n’est bon : c’est la pluralité qui a établi cela, et qui mord quiconque s’en échappe par quelque bout que ce soit. Je ne m’y obstinerai pas, je consens bien qu’on m’y mette, et me refuse d’être au bas bout, non pas parce qu’il est bas, mais parce qu’il est bout, car je refuserais de même qu’on me mît au haut. C’est sortir de l’humanité que de sortir du milieu."

Et aussi : "Nous ne nous soutenons pas dans la vertu par nos propres forces, mais par le contrepoids de deux vices opposés." Et non pas de deux vertus opposées!

Pascal a en morale une conception assez proche d'Aristote, où le courage serait le juste milieu entre les deux vices de la lâcheté et de la témérité. Dans la pensée d'Aristote, la prudence étant la sagesse pratique, il me semble assez clair que le vrai courage doit être prudent.

Bonsoir Frod,

Voici la citation de Pascal à laquelle je faisais référence:

 "Je n'admire point un homme qui possède une vertu dans toute sa perfection, s'il ne possède en même temps dans un pareil degré la vertu opposée : tel qu'était Épaminondas, qui avait l'extrême valeur jointe à l'extrême bénignité ; car autrement ce n'est pas monter, c'est tomber. On ne montre pas sa grandeur, pour être dans une extrémité ; mais bien en touchant les deux à la fois, et remplissant tout l'entre-deux. Mais peut-être que ce n'est qu'un soudain mouvement de l'âme de l'un à l'autre de ces extrêmes, et qu'elle n'est jamais en effet qu'en un point, comme le tison de feu que l'on tourne. Mais au moins cela marque l'agilité de l'âme, si cela n'en marque l'étendue." 

 

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FROD Membre 405 messages
Forumeur accro‚
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il y a 18 minutes, tison2feu a dit :

Bonsoir Frod,

Voici la citation de Pascal à laquelle je faisais référence:

 "Je n'admire point un homme qui possède une vertu dans toute sa perfection, s'il ne possède en même temps dans un pareil degré la vertu opposée : tel qu'était Épaminondas, qui avait l'extrême valeur jointe à l'extrême bénignité ; car autrement ce n'est pas monter, c'est tomber. On ne montre pas sa grandeur, pour être dans une extrémité ; mais bien en touchant les deux à la fois, et remplissant tout l'entre-deux. Mais peut-être que ce n'est qu'un soudain mouvement de l'âme de l'un à l'autre de ces extrêmes, et qu'elle n'est jamais en effet qu'en un point, comme le tison de feu que l'on tourne. Mais au moins cela marque l'agilité de l'âme, si cela n'en marque l'étendue." 

 

Bonsoir Tison de feu,

Comme un tison de feu, justement, c'est-à-dire que c'est une illusion : "en vertu de la persistance des images sur la rétine, il suffit qu’un tison enflammé fasse plus de dix tours à la seconde pour représenter à l’œil une circonférence de feu. La succession rapide produit ainsi l’illusion de la simultanéité." (Brunschvig). Et Pascal de dire ailleurs " Ces grands efforts d’esprit où l’âme touche quelquefois sont choses où elle ne se tient pas ; elle y saute seulement non comme sur le trône pour toujours, mais pour un instant seulement." Ce tison de feu est une boutade envers les stoïciens qui ferment les yeux sur la faiblesse de l'homme, c'est-à-dire son incapacité de tenir fermement la propriété de la vertu : "Stoïques. Ils concluent qu’on peut toujours ce qu’on peut quelquefois et que, puisque le désir de la gloire fait bien faire à ceux qu’il possède quelque chose, les autres le pourront bien aussi. Ce sont des mouvements fiévreux que la santé ne peut imiter. Épictète conclut de ce qu’il y a des chrétiens constants que chacun le peut bien être."

La conclusion du fragment que vous citez, qui comme souvent fonctionne par contradictions successives, est qu'il ne s'agit pas d'une véritable grandeur qui serait étendue et simultanéité, mais d'une agilité mouvementée d'un point agité et inquiet, c'est-à-dire d'une inconstance, signe de misère. La grandeur, qui n'est pas la vertu dans le vocabulaire pascalien, ramène toujours dialectiquement à la misère. Quant à la vertu, il faut retourner à la distinction entre le lieu et le point : on peut occuper le lieu de la vertu par accident, et même à deux moments différents le lieu de deux vertus différentes, cela ne signifie pas qu'on a trouvé le vrai point.

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tison2feu Membre 3 035 messages
Forumeur alchimiste ‚
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Il y a 3 heures, deja-utilise a dit :

@tison2feu, je ne voulais pas spécialement revenir sur cette approche, dont nous avons déjà eu l'occasion de discuter il y a bien longtemps à présent, mais force est de constater que je ne l'ai pas digérée, ce qui signifie que si je n'arrive pas à faire mienne une idée, c'est qu'il y a quelque chose qui ne va pas, comme ça m'est déjà arrivé sur une conception statistique en Math que je n'arrivais pas à m'approprier, et que bien des années plus tard, deux mathématiciens ont montré une mis-conception ou une mésinterprétation qui avait fait consensus pendant des décennies ! D'où certainement mon incapacité à l'intégrer dans mon arsenal intellectif. 

Je vais donc te tarabiscoter un petit peu, sans mauvaise arrière pensée bien évidemment, le but n'étant pas de te piéger il va sans dire:

 

" Quelle peut bien être la vertu opposée et complémentaire du courage ? Puisque nous venons de voir que l'inhumanité est le pire vice dans lequel on peut tomber par excès de courage, nous pouvons déduire aisément que la vertu d'humanité (bonté) est la vertu opposée et complémentaire du courage.  "

" Oui, le terme découragement évoque l'impatience, d'où la possibilité d'une opposition complémentaire entre courage et patience. "

" A titre d'exemple, voici la matrice de concepts élaborée par P. Franceschi à partir du concept de courage versus prudence "

 

 

Ce qui me chagrine là-dedans, c'est l'utilisation du terme " opposé ", qui me laisse entendre qu'ils ne sont pas du " même côté " bien au contraire, par exemple ici: https://dictionnaire.lerobert.com/definition/oppose

Pour ma part, après quelques réflexions dernières, je pense que ce qui donne l'impression d'opposition ne se situe aucunement dans les concepts en eux-mêmes, ce que tu appelles ici les vertus, mais bien plutôt dans la situation qui les concerne, en effet en répondant à Bouddean, tu acquiesces en disant que le courage se trouve en opposition à la patience, or un simple contre-exemple suffit à montrer que ce ne peut pas être vrai tout le temps ou ontologiquement, et que c'est précisément la situation qui dicte qu'ils sont soit congruents, soit en opposition, c'est-à-dire, si la situation les fait mettre en conflit ou non ! Par exemple, si une personne est gravement malade d'une maladie incurable ou difficilement, elle peut décider d'affronter cette adversité avec courage - nonobstant ce que l'on entend exactement par là - tout comme elle peut faire aussi monstration de patience dans la durée face à ses tourments qui vont durer plus ou moins longtemps et peut-être même s'aggraver, il n'y a dès lors pas opposition, mais bien complémentation dans leurs survenues et traitements. De même le sauveteur qui va secourir une personne coincée sur une falaise abrupte, peut à la fois faire preuve de courage et en même temps de prudence en prenant les précautions adéquates pour ne pas empirer la situation pour la victime, lui-même voire d'autres personnes éventuellement présentes, là également il y a complémentarité sans opposition, puisque dans ces deux cas/exemples, il n'y a pas conflit entre les deux vertus en jeu, elles sont congruentes !

Quand je lis ce que tu rapportes, j'ai l'impression qu'il se passerait la même chose avec nos sens - plutôt qu'avec des vertus ou des vices, je ne vois pas bien comment intrinsèquement l'ouïe pourrait être en opposition avec la vue par exemple, en revanche suivant l'évènement en lice, on pourrait effectivement avoir conflit ou incongruence entre la perception visuelle et sonore, comme lorsqu'un avion à réaction transperce le ciel, son image ne correspond pas à la localisation du son perçu/émis, il y aurait ainsi " opposition ", alors que la voiture qui nous klaxonne pendant que nous traversons les " clous " ne présente pas cette contradiction, les sens de la vue et de l'audition sont en phase, il n'y a pas ici d'opposition. Dans un cas comme dans l'autre il y aurait malgré tout complémentarité entre la vue et l'ouïe, il n'y a que chez les personnes synesthètes qu'il pourrait il y avoir réellement chevauchement " contradictoire " ou conflictuel fondamentalement, mais ce serait abusif de parler d'opposition, bien plutôt parler de contamination serait plus juste.

 

Consécuitivement, ne pourrait-on pas envisager un cas de figure où le courage et la bonté se présentent simultanément et sans conflit/incongruité ? Je ne sais pas, une personne qui met en jeu sa propre existence ou son intégrité physique et/ou mentale pour secourir des gens, leur venir en aide ou les soustraire à des maux !? L'individu qui aura également recueilli un " Juif " chez lui, pendant l'occupation alors qu'il était demandé de les dénoncer sous peine de grave sanction, ne fait-il pas preuve à la fois de courage et de miséricorde envers une personne en détresse - au moins pour un regard extérieur !?

 

:bienvenue:

Pour essayer de clarifier les choses et d'apporter des éléments que je n'avais jamais signalés à l'époque, cher D U, je te propose de partir de la matrice proposée par P. Franceschi.

Tu noteras que les deux concepts duaux (ou expressions) qui sont situés au milieu de la matrice sont accompagnés d'un "0", car considérés comme neutres, c'est-à-dire purement descriptifs et nullement prescriptifs: 

0 Propension à prendre des risques          .          Propension à ne pas prendre de risques 0

En revanche, dans les deux autres séries, les concepts sont accompagnés de signes "+"  ou "-" selon qu'ils sont connotés méliorativement ou péjorativement, en tant que jugements moraux:

+ Courage                                             .          Prudence +

- Témérité                                             .          Lâcheté -   

 

A ma décharge, je reconnais que si je remplace  (- témérité) par (- Inhumanité), il va falloir modifier toute la matrice. Idem si je remplace (Prudence +) par (Patience +). Au final, je préfère conserver la traditionnelle dualité courage / prudence.

Mais un problème subsiste à mes yeux dans le fait d'accorder la primauté à la notion de risque (et d'évitement du risque), alors que le courage sera aussi parfois la capacité à souffrir sans se plaindre et donc sans rapport avec cette notion de risque. De toute façon ce genre de matrice est forcément réductrice, donc à utiliser avec beaucoup de souplesse.

:bienvenue:

 

Modifié par tison2feu
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tison2feu Membre 3 035 messages
Forumeur alchimiste ‚
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Il y a 12 heures, FROD a dit :

Bonsoir Tison de feu,

Comme un tison de feu, justement, c'est-à-dire que c'est une illusion : "en vertu de la persistance des images sur la rétine, il suffit qu’un tison enflammé fasse plus de dix tours à la seconde pour représenter à l’œil une circonférence de feu. La succession rapide produit ainsi l’illusion de la simultanéité." (Brunschvig). Et Pascal de dire ailleurs " Ces grands efforts d’esprit où l’âme touche quelquefois sont choses où elle ne se tient pas ; elle y saute seulement non comme sur le trône pour toujours, mais pour un instant seulement." Ce tison de feu est une boutade envers les stoïciens qui ferment les yeux sur la faiblesse de l'homme, c'est-à-dire son incapacité de tenir fermement la propriété de la vertu : "Stoïques. Ils concluent qu’on peut toujours ce qu’on peut quelquefois et que, puisque le désir de la gloire fait bien faire à ceux qu’il possède quelque chose, les autres le pourront bien aussi. Ce sont des mouvements fiévreux que la santé ne peut imiter. Épictète conclut de ce qu’il y a des chrétiens constants que chacun le peut bien être."

 

La conclusion du fragment que vous citez, qui comme souvent fonctionne par contradictions successives, est qu'il ne s'agit pas d'une véritable grandeur qui serait étendue et simultanéité, mais d'une agilité mouvementée d'un point agité et inquiet, c'est-à-dire d'une inconstance, signe de misère. La grandeur, qui n'est pas la vertu dans le vocabulaire pascalien, ramène toujours dialectiquement à la misère. Quant à la vertu, il faut retourner à la distinction entre le lieu et le point : on peut occuper le lieu de la vertu par accident, et même à deux moments différents le lieu de deux vertus différentes, cela ne signifie pas qu'on a trouvé le vrai point.

 

Cette analyse du fragment de Pascal m'est précieuse à plus d'un titre et je vous en suis recconnaissant. Plusieurs éléments m'échappaient jusqu'à présent et je me suis sans doute trop attarder sur l'opposition duale opérée d'entrée de jeu par Pascal entre ces deux vertus. Oublions donc ma référence à Pascal qui n'a plus lieu d'être ici. 

  • Merci 1
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Membre, If you don't want, you Kant..., Posté(e)
deja-utilise Membre 5 768 messages
If you don't want, you Kant...,
Posté(e)

Bonjour Tison, merci pour ta réponse

Il y a 14 heures, tison2feu a dit :

Tu noteras que les deux concepts duaux (ou expressions) qui sont situés au milieu de la matrice sont accompagnés d'un "0", car considérés comme neutres, c'est-à-dire purement descriptifs et nullement prescriptifs: 

0 Propension à prendre des risques          .          Propension à ne pas prendre de risques 0

Il y a à mon sens quelque chose d'illogique en désignant des termes " neutres " de part et d'autre des deux vertus et en voulant les garder distincts, en effet la propension à prendre des risques " neutre " devrait coïncider avec la propension à ne pas prendre de risques " neutre ", il y a selon moi équivalence ou égalité dans cette neutralité !

Simplement, comme je le soupçonne mais dont je ne t'ai pas parlé, en particulier ces deux vertus prises en exemple, quoique ce serait valable pour d'autres couples " complémentaires " ou non, sont tout bonnement dans des dimensions différentes, d'où ma référence aux sens(!) précédemment ( on pourrait l'appliquer à des caractéristiques somatiques aussi, comme la taille et le poids par exemple ), disons pour fixer les idées dans un repère cartésien, que l'origine c'est-à-dire le zéro ou l'élément neutre serait commun aux deux axes que sont les ordonnées ( l'horizontale X ) et les abscisses ( la verticale Y ), où la première vertu " s'étale " sur l'axe des X en ayant son élément neutre en " 0 ", et l'autre vertu aurait quant à elle son déploiement sur l'axe des Y, tout en ayant elle aussi son élément neutre en " 0 ", elles se déploient donc dans des directions différentes ( j'oserais même dire orthogonales au sens mathématique du terme ) et non pas opposées stricto sensu, que l'on ne devrait donc pas appeler " opposées " contrairement à ce qui se passe sur chaque ligne et donc pour chaque vertu elle-même, par exemple la lâcheté étant opposée à la fois au courage et/ou à la témérité, qui elles se trouvent à un autre bout ou un autre " côté ", la partie " milieu " pouvant être vu aussi comme un côté relativement - et localement - à une des extrémités !

 

 

Il y a 14 heures, tison2feu a dit :

En revanche, dans les deux autres séries, les concepts sont accompagnés de signes "+"  ou "-" selon qu'ils sont connotés méliorativement ou péjorativement, en tant que jugements moraux:

+ Courage                                             .          Prudence +

- Témérité                                             .          Lâcheté -   

 

Cela je pense que je l'ai très bien assimilé, c'est le dualisme avec la notion " d'opposition " que je réfute ou rejette, puisque je n'y vois ni contraire ni " conflit " en soi, mais seulement la résultante ou conséquence d'une situation précise le cas échéant, tout comme l'inverse dans le cas contraire.

 

Il y a 14 heures, tison2feu a dit :

Mais un problème subsiste à mes yeux dans le fait d'accorder la primauté à la notion de risque (et d'évitement du risque), alors que le courage sera aussi parfois la capacité à souffrir sans se plaindre et donc sans rapport avec cette notion de risque. De toute façon ce genre de matrice est forcément réductrice, donc à utiliser avec beaucoup de souplesse.

Je suis heureux de le lire, mais je ne suis pas sûr que tu mesures - pleinement - la problématique profonde que j'ai antérieurement soulevée et que je rappelle une nouvelle fois un peu différemment juste au-dessus ? Synthétiquement:

La valence dans le dualisme des vertus - ou des vices - serait toujours médiate à la situation, en somme, et non directe ou immédiate !

 

Bon dimanche...

 

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Membre, 55ans Posté(e)
chekhina Membre 563 messages
Forumeur alchimiste ‚ 55ans‚
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Le 20/01/2024 à 00:03, Ambre Agorn a dit :

Bonsoir Chekhina

Est-ce que vous entendez comme moi que l'engagement semble inverse à la liberté?

L'engagement, en tant que valeur sociale, est un contrat passé avec une ou plusieurs parties. Le contrat professionnel est un exemple assez précis de l'engagement comme obligation. Mais la mise en couple n'est pas vraiment un contrat, dans le sens où la décision de départ n'est pas définie ou ne comporte aucun engagement, aucune promesse, sauf s'il est signé un contrat de mariage qui ressemble à s'y méprendre à un contrat professionnel.

Alors effectivement, il y a nombre d'engagement volontaires. N'y aurait-il pas non plus nombre d'engagement involontaires qu'on s'obstinerait à nier ou oublier?

Moi aussi j'ai remarqué une désertion qui se vulgarise (signification non péjorative ici) quant à l'engagement envers son ou sa partenaire et envers ses propres enfants. Mais aussi dans plusieurs autres domaines. Je n'ai jamais tenté de nommer ces domaines, mais je remarque une certaine mollesse/dédain pour l'engagement personnel dans des valeurs. A part dans le discours, où les valeurs et les valeureux ont des couleurs chatoyantes et infiniment grandioses.

Ce n'est pas tant que je voudrai signifier qu'il y a là une certaine décadence, j'essaye juste de cerner quelque chose qui m'est encore labile.

Si je vois du courage dans le geste d'un autre, est-ce parce que je peux constater qu'il a fait une promesse et qu'il vient de la tenir, de donner la preuve de celle-ci, de donner la preuve qu'il est engagé? Mais s'il s'est engagé, c'est qu'il avait la mesure de ce qui lui était demandé et de ce qu'il pouvait faire, il n'y a donc pas de courage: il est attendu là où il a dit qu'il fallait l'attendre, c'est la responsabilité. Si je vois du courage, est-ce que ça sous-entend que je connais la valeur de ce qui se passe parce que j'ai déjà été confronté à un chose similaire qui m'a demandé un engagement que j'aurai ou non tenu? Est-ce que je peux discerner du courage si je n'ai pas idée du renoncement de liberté qu'il a fallu pour être courageux?

 

En fait, on ne peut parler de courage qu'en parlant de l'acte d'un autre, non? Il serait mal à propos si je parlais de mon propre courage.

En fait, je vois bien mes engrenages intellectuels (rationnels) quand je "dois" faire quelque chose. Tout de suite, j'ai la vision de ce qui devrait être fait si je reste fidèle à mes propres promesses (code personnel), ce que je peux faire ou ne pas faire et qui ne semble pas avoir de grandes mauvaises conséquences (je semble que je n'ai fait aucune promesse aux autres), et aussi ce que les autres attendent de moi, et moi d'eux.

C'est là que le bât blesse, je suppose: comment je sais ce qu'on attendrait de moi, et comment en suis-je venue à définir ce que j'attendrais des autres? La réponse doit se trouver dans la culture, l'éducation et la représentation globale des rôles sociaux.

Bien sûr que je suis toujours investie dans ma communauté, mais je peux aussi partir. Pourquoi je reste? Est-ce du courage? Je ne le crois pas, parce que je vois bien que je ne pourrai plus me supporter si j'abandonnais. En fait, là où d'autres voient du courage apparaît à mes yeux la fuite d'un danger qui me semble encore plus grand. Pas aux yeux des autres, mais bien à mes propres yeux. Et je soupçonne que le courage ne soit que ça: la fuite de quelque chose qui fait encore plus peur, plus horreur, une alternative impossible qui ne laisse aucun choix.

Mais peut-être suis-je un peu trop canalisée sur une certaine vision de la chose et qu'il me faudrait élargir mon angle de vue. Difficile de quitter un point de vue, je trouve.

(Ne vous inquiétez pas: je suis susceptible, mais vous y allez vachement avec des pincettes là, tout en douceur!)

J'ai pensé que je ne parviendrais pas à vous répondre comme je le désirais. Que, entrainée par une "gravité" propre à la manière de philosopher ici, je ne pourrais que céder à cette inclination.

Je peux me dégager de cet entrainement en imaginant une autre scène. Nous ne serions pas là, séparées par un medium, mais nous serions face à face, par exemple dans un café, nous partagerions une même table.

Comment parlerions nous alors du courage ? Nous philosopherions comme il se doit ? Non. Sans doute vous entrainerais je là où je voudrais aller, je vous parlerais de mon expérience, de mon enfance, je vous dirais : tiens, là, je me souviens...Je me souviendrais d'une figure parentale, que j'aurais vu agir et qui m'aurais inspirée, suite à quoi j'aurais murmuré : quel courage ! Ma première rencontre avec le courage. Et vous m'auriez répondu de même, peut-être vous aussi un souvenir lointain, et vous vous souviendriez que vous aviez vous-même alors pensé : quel courage...En pensant à une figure d'autorité affective.

Ainsi nous parlerions de nos expériences sensibles, nous échangerions nos sensibilités, nous dirions : mais ce n'est pas pour autant que j'ai trouvé que cette autorité fut toujours courageuse ! ou bien encore : mais moi je ne me sens pas courageuse quand les autres me disent que je le suis ! 

Nous partirions pensives, rangeant nos sensibilités dans nos mémoires. Et basta la philosophie classique, nous aurions débattu en toute sincérité, ce qui est une autre façon de philosopher.

Bon, j'ai réussi à vous répondre, j'ai bien pensé que je n'y parviendrais pas.

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