Dans une société traditionnelle, tous les aspects de la vie - économiques, politiques, religieux, artistiques, etc. - sont étroitement imbriqués. La religion assure l'unité d'une existence totalement intégrée et dont le sens n'est pas problématique. La différenciation des institutions est au contraire la caractéristique essentielle du monde moderne (depuis le XVIe siècle en Europe).
La conséquence de ce mouvement de rationalisation et de différenciation des institutions est la suivante : la religion se trouve progressivement refoulée et n'apparaît plus que comme une dimension particulière de la vie sociale, avec ses propres organes, séparés et spécialisés. Max Weber a montré que la tradition judéo-chrétienne - la Réforme en particulier - a joué un rôle décisif dans ce processus, lié au progrès de l'individualisme et du rationalisme européen.
La sécularisation (du mot anglais secular, "temporel") - c'est-à-dire la dissociation du religieux et du politique, du sacré et du profane - est, donc, le produit d'une histoire longue et chaotique qui conduit à la séparation de l'Eglise et de l'Etat en 1905.
Mais la laïcité ne se résume pas à cette évolution institutionnelle. C'est également une morale et un idéal, celui de la liberté absolue des consciences. La laïcité républicaine est d'abord, selon Jules Ferry, une difficile ascèse individuelle, fondée sur le premier des devoirs républicains : s'instruire. L'humanisme, le rationalisme et le respect de la libre pensée sont les composantes essentielles de cette philosophie que certains jugent désuète. Le débat actuel sur la laïcité tourne essentiellement autour de deux questions :
1. Faut-il redéfinir la laïcité en prenant en compte les nouvelles réalités ?
2. Le modèle laïc (français) est-il nécessairement exportable ?
Mais on ne peut prendre position sur de telles questions sans s'interroger également sur la légitimité d'une culture et d'un ensemble de valeurs (pluralisme, tolérance...), dont la portée universelle est souvent contestée.
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