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Des villes et des poèmes

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Sexophone

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Membre, Les hommes viennent de Tatooine, les femmes de Jakku, Posté(e)
Sexophone Membre 2 633 messages
Les hommes viennent de Tatooine, les femmes de Jakku,
Posté(e)

Quelques vers du félibre Jean-Baptiste Gaut sur la capitale de la Provence :

 

Ais, per iéu soun enfant, me semblo uno esmeraudo // Aix, pour moi son enfant, me semble une émeraude

Que subre la Prouvènço, espandis soun trelus : // Qui sur la Provence répand sa gloire :

Ai de rai sus lou front, sa clarour esbrihaudo, // Elle a des rayons sur le front, sa clarté éblouit,

Dis abeio e dóu mèu Ais es pèr iéu lou brusc. // Des abeilles et du miel Aix est pour moi la ruche.

 

Et vous, connaissez-vous (ou avez-vous composé) des poèmes pour vos villes ?

 

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Membre, Oiseau de nuit, pays Union européenne, 41ans Posté(e)
sovenka Membre 7 443 messages
41ans‚ Oiseau de nuit, pays Union européenne,
Posté(e)

LONDRES

Emile Verhaeren

Et ce Londres de fonte et de bronze, mon âme,
Où des plaques de fer claquent sous des hangars,
Où des voiles s’en vont, sans Notre-Dame
Pour étoile, s’en vont, là-bas, vers les hasards.

Gares de suie et de fumée, où du gaz pleure
Ses spleens d’argent lointain vers des chemins d’éclair,
Où des bêtes d’ennui bâillent à l’heure
Dolente immensément, qui tinte à Westminster.

Et ces quais infinis de lanternes fatales,
Parques dont les fuseaux plongent aux profondeurs,
Et ces marins noyés, sous des pétales
De fleurs de boue où la flamme met des lueurs.

Et ces châles et ces gestes de femmes soûles,
Et ces alcools en lettres d’or jusques au toit,
Et tout à coup la mort parmi ces foules,
O mon âme du soir, ce Londres noir qui traîne en toi !

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Membre, Talon 1, 78ans Posté(e)
Talon 1 Membre 22 903 messages
78ans‚ Talon 1,
Posté(e)
Il y a 13 heures, Sexophone a dit :

avez-vous composé) des poèmes pour vos villes ?

Trop de boulot pour les nomades.

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Membre, Oiseau de nuit, pays Union européenne, 41ans Posté(e)
sovenka Membre 7 443 messages
41ans‚ Oiseau de nuit, pays Union européenne,
Posté(e)

Celles-ci sont de moi (@) :

LES GOELANDS

Le Havre s'éveille sous son ciel pommelé d'automne

Et l'on entend, par-delà quelques immeubles atones,

Le hourvari criard des anges aux ailes d'argent

Qui semblent glisser sur les courants sinueux du vent.

***

Enfin, l'on aperçoit une escouade de ventres blancs :

C'est la furia des goélands qui, dans un même élan,

S'en vont raser nos toits et fronder notre société,

De leurs criaillements injurier nos insanités.

***

L'on déteste les entendre faire ainsi de l'esclandre,

Mais l'on rêve de s'envoler vers la voûte de cendre,

Et l'on envie ces anges, dans leur tumulte éolien,

Les prenant un instant pour des comédiens italiens.

 

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Membre, Oiseau de nuit, pays Union européenne, 41ans Posté(e)
sovenka Membre 7 443 messages
41ans‚ Oiseau de nuit, pays Union européenne,
Posté(e)

VENISE

J'aimerais revenir à Venise

Et m'abandonner à ses chimères,

Me noyer, m'oublier dans l'eau grise,

Loin des joies éphémères.

J'aimerais que mon dernier voyage

S'achève dans la tiède lagune,

Pour observer d'en bas les sillages

De ses gondoles brunes ;

Que les ombres du Pont des Soupirs

Soient seuls témoins de ces tristes noces,

De ma valse folle avec les spires

De la vague véloce.

À bord d'une barque vénitienne

Pareille au cygne noir et luisant,

L'on verra mon âme saturnienne

S'effacer au jusant.

Venise, ô merveille des merveilles !

Ville incomparable sous les cieux.

En toi j'ai connu des jours vermeils

Et j'ai remercié Dieu.

Tu m'apparus, sur les eaux de jade,

Voilée de grenat, parée d'ivoire.

J'avais rêvé ces quais, ces arcades

Qu'enfin je pouvais voir.

J'ai laissé, de mon cœur, une part

À Venise, à la mamma brava,

Au gai violoniste de Saint-Marc...

Pas au Casanova !

Ô ma Venise aux parfums d'Orient !

L'on se perd dans tes sombres méandres,

Avec l'écho du marché bruyant,

Des rires, des esclandres...

Et puis, au bout d'un pertuis noirci,

On est surpris par la clarté blanche

D'une place, ainsi qu'à la sortie

D'un bois au jour étanche.

Comme il faisait bon -je m'en souviens-

S'assoupir dans ta chaude moiteur,

Flâner en tes murs à l'heure où vient

L'étoile du pasteur,

Longer tes canaux avant la nuit,

S'asseoir sur une marche et rêver,

S'alanguir en écoutant la pluie

Travailler le pavé...

J'aimais aussi partir avant l'aube

Pour aller dans les rues embrumées,

Quand se révèlent des saints en aube

Par le temps élimée,

Quand Madonne apparaît çà et là,

Fée gracieuse au sourire apaisant,

Présence amène de l'au-delà

-Du Divin complaisant-.

Puis, à l'aurore, je revenais

Vers la lagune qui, sous le ciel

Coloré d'incarnat, devenait

Espace immatériel.

Je reviendrai, un jour, à Venise,

Traînant mon cœur plus lourd qu'un boulet.

Je me jetterai dans les eaux grises,

Me laisserai couler.

                        (sovenka@)

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Membre, Oiseau de nuit, pays Union européenne, 41ans Posté(e)
sovenka Membre 7 443 messages
41ans‚ Oiseau de nuit, pays Union européenne,
Posté(e)

Un troisième de moi, pour Calais

REVEILLON DE NOËL A CALAIS

Le soleil n'éclairait plus la mer grisâtre

Où sombrait, doucement, sa traîne rougeâtre,

Car l'heure était venue de sa pâmoison

Dans l'épaisseur des brumes de l'horizon.

C'est à cette heure que bon nombre d'Anglais

Débarquèrent dans la ville de Calais,

Joyeuses cohortes de la fière Albion

Venues passer en France un bon réveillon.

Ils arrivèrent en habits scintillants

De pluie, certains portant bonnet rouge et blanc,

Et leurs compagnes avaient les joues rosies,

Qui se frottaient les manches d'un air transi.

On les vit sortir un par un de la gare

Maritime avec, au fond de leur regard,

Ces étoiles qu'ont les enfants dans les yeux

Dès que s'allume le sapin merveilleux.

Deux pères Noël anglais jeunes et minces

Furent accueillis sur le quai par des princes

De Paris portant blue-jeans et veste chic ;

Une Jane sauta au cou d'un Cédric ;

Un gai luron s'écria "Bonjour le France !"

Avec tout l'entrain d'un cri de délivrance,

Sitôt repris en chœur par un groupe d'hommes

N'aspirant qu'à la licence et ses malstroms...

Un peu plus tard, on les voyait progresser

Avec leurs cheveux longs dans le vent glacé,

Flottant ainsi que des étendards de feu ;

Mais ce n'était pas même des boutefeux,

Car tous ces jeunes étaient venus en paix.

Calais serait plus anglaise que jamais,

Si richement parée d'illuminations

Pour cette nuit de liesse et de libations.

Mais, notre luron ayant atteint, enfin,

Le centre-ville, tenaillé par la faim,

Entra dans quelque auberge avec l'exigence

D'y boire du champagne et faire bombance.

La fête pouvait commencer à Calais

Où, jusqu'à l'aube, on parlerait le franglais.

Toute la nuit, les trottoirs luisant de bruine

Reflèteraient les jambes des libertines ;

Et l'on verrait des gars complètement saouls,

De fraîches blondes bras dessus, bras dessous,

Avec leur drôle de bonnet rouge et blanc,

Déambulant et pour un rien s'esclaffant ;

Et, dans les night-clubs, les boules à facettes

Tournoieraient, cribleraient le noir de paillettes

D'or, entraînant dans leurs tourbillons les masques

Clignotants de bals étranges et fantasques.

Puis, à l'aube, tout fourbus et d'un pas lourd,

Ainsi que de pauvres soldats au retour

D'une bataille, s'en iraient les Anglais,

Laissant déserte la ville de Calais.

Depuis l'ombre d'un porche, des clandestins

Transis les suivraient d'un regard enfantin

Plein de rêves, ces gens rejoignant le port,

Ces bienheureux qui seraient bientôt à bord

D'un bateau familier des falaises blanches,

En ce détroit entre mer du Nord et Manche.

Ils s'en rappelleraient longtemps, nos Anglais,

De leur réveillon endiablé à Calais.

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Sérial Banneur, `, Posté(e)
Tequila Moor Sérial Banneur 14 861 messages
`,
Posté(e)

Jolis, @sovenka ! :bo:

Petit poème de Valéry Larbaud, le dandy friqué, laudateur du progrès et des voyages.

 

L’Ancienne Gare de Cahors

Voyageuse ! ô cosmopolite à présent
Désaffectée, rangée, retirée des affaires.
Un peu en retrait de la voie,
Vieille et rose au milieu des miracles du matin,
Avec ta marquise inutile
Tu étends au soleil des collines ton quai vide
(Ce quai qu’autrefois balayait
La robe d’air tourbillonnant des grands express)
Ton quai silencieux au bord d’une prairie,
Avec les portes toujours fermées de tes salles d’attente,
Dont la chaleur de l’été craquèle les volets...
Ô gare qui as vu tant d’adieux,
Tant de départs et tant de retours,
Gare, ô double porte ouverte sur l’immensité charmante
De la Terre, où quelque part doit se trouver la joie de Dieu
Comme une chose inattendue, éblouissante ;
Désormais tu reposes et tu goûtes les saisons
Qui reviennent portant la brise ou le soleil, et tes pierres
Connaissent l’éclair froid des lézards ; et le chatouillement
Des doigts légers du vent dans l’herbe où sont les rails
Rouges et rugueux de rouille,
Est ton seul visiteur.
L’ébranlement des trains ne te caresse plus :
Ils passent loin de toi sans s’arrêter sur ta pelouse,
Et te laissent à ta paix bucolique, ô gare enfin tranquille
Au cœur frais de la France.

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Membre, 52ans Posté(e)
jmecomprends_tt_seul Membre 2 314 messages
Maitre des forums‚ 52ans‚
Posté(e)
il y a 2 minutes, sovenka a dit :

Un troisième de moi, pour Calais

REVEILLON DE NOËL A CALAIS

Le soleil n'éclairait plus la mer grisâtre

Où sombrait, doucement, sa traîne rougeâtre,

Car l'heure était venue de sa pâmoison

Dans l'épaisseur des brumes de l'horizon.

C'est à cette heure que bon nombre d'Anglais

Débarquèrent dans la ville de Calais,

Joyeuses cohortes de la fière Albion

Venues passer en France un bon réveillon.

Ils arrivèrent en habits scintillants

De pluie, certains portant bonnet rouge et blanc,

Et leurs compagnes avaient les joues rosies,

Qui se frottaient les manches d'un air transi.

On les vit sortir un par un de la gare

Maritime avec, au fond de leur regard,

Ces étoiles qu'ont les enfants dans les yeux

Dès que s'allume le sapin merveilleux.

Deux pères Noël anglais jeunes et minces

Furent accueillis sur le quai par des princes

De Paris portant blue-jeans et veste chic ;

Une Jane sauta au cou d'un Cédric ;

Un gai luron s'écria "Bonjour le France !"

Avec tout l'entrain d'un cri de délivrance,

Sitôt repris en chœur par un groupe d'hommes

N'aspirant qu'à la licence et ses malstroms...

Un peu plus tard, on les voyait progresser

Avec leurs cheveux longs dans le vent glacé,

Flottant ainsi que des étendards de feu ;

Mais ce n'était pas même des boutefeux,

Car tous ces jeunes étaient venus en paix.

Calais serait plus anglaise que jamais,

Si richement parée d'illuminations

Pour cette nuit de liesse et de libations.

Mais, notre luron ayant atteint, enfin,

Le centre-ville, tenaillé par la faim,

Entra dans quelque auberge avec l'exigence

D'y boire du champagne et faire bombance.

La fête pouvait commencer à Calais

Où, jusqu'à l'aube, on parlerait le franglais.

Toute la nuit, les trottoirs luisant de bruine

Reflèteraient les jambes des libertines ;

Et l'on verrait des gars complètement saouls,

De fraîches blondes bras dessus, bras dessous,

Avec leur drôle de bonnet rouge et blanc,

Déambulant et pour un rien s'esclaffant ;

Et, dans les night-clubs, les boules à facettes

Tournoieraient, cribleraient le noir de paillettes

D'or, entraînant dans leurs tourbillons les masques

Clignotants de bals étranges et fantasques.

Puis, à l'aube, tout fourbus et d'un pas lourd,

Ainsi que de pauvres soldats au retour

D'une bataille, s'en iraient les Anglais,

Laissant déserte la ville de Calais.

Depuis l'ombre d'un porche, des clandestins

Transis les suivraient d'un regard enfantin

Plein de rêves, ces gens rejoignant le port,

Ces bienheureux qui seraient bientôt à bord

D'un bateau familier des falaises blanches,

En ce détroit entre mer du Nord et Manche.

Ils s'en rappelleraient longtemps, nos Anglais,

De leur réveillon endiablé à Calais.

Bravo Sovenka !!! Tes poèmes sont très agréables à lire ! :clapping:

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Membre, Oiseau de nuit, pays Union européenne, 41ans Posté(e)
sovenka Membre 7 443 messages
41ans‚ Oiseau de nuit, pays Union européenne,
Posté(e)
à l’instant, jmecomprends_tt_seul a dit :

Bravo Sovenka !!! Tes poèmes sont très agréables à lire ! :clapping:

Merci :blush:

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Membre, 63ans Posté(e)
K-sos Membre 3 420 messages
Maitre des forums‚ 63ans‚
Posté(e)

Barbara

 
Rappelle-toi Barbara
Il pleuvait sans cesse sur Brest ce jour-là
Et tu marchais souriante
É panouie ravie ruisselante
Sous la pluie
Rappelle-toi Barbara
Il pleuvait sans cesse sur Brest
Et je t'ai croisée rue de Siam
Tu souriais
Et moi je souriais de même
Rappelle-toi Barbara
Toi que je ne connaissais pas
Toi qui ne me connaissais pas
Rappelle-toi
Rappelle-toi quand même ce jour-là
N'oublie pas
Un homme sous un porche s'abritait
Et il a crié ton nom
Barbara
Et tu as couru vers lui sous la pluie
Ruisselante ravie épanouie
Et tu t'es jetée dans ses bras
Rappelle-toi cela Barbara
Et ne m'en veux pas si je te tutoie
Je dis tu à tous ceux que j'aime
Même si je ne les ai vus qu'une seule fois
Je dis tu à tous ceux qui s'aiment
Même si je ne les connais pas
Rappelle-toi Barbara
N'oublie pas
Cette pluie sage et heureuse
Sur ton visage heureux
Sur cette ville heureuse
Cette pluie sur la mer
Sur l'arsenal
Sur le bateau d'Ouessant
Oh Barbara
Quelle connerie la guerre
Qu'es-tu devenue maintenant
Sous cette pluie de fer
De feu d'acier de sang
Et celui qui te serrait dans ses bras
Amoureusement
Est-il mort disparu ou bien encore vivant
Oh Barbara
Il pleut sans cesse sur Brest
Comme il pleuvait avant
Mais ce n'est plus pareil et tout est abimé
C'est une pluie de deuil terrible et désolée
Ce n'est même plus l'orage
De fer d'acier de sang
Tout simplement des nuages
Qui crèvent comme des chiens
Des chiens qui disparaissent
Au fil de l'eau sur Brest
Et vont pourrir au loin
Au loin très loin de Brest
Dont il ne reste rien.

Jacques Prévert, Paroles
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Membre, Les hommes viennent de Tatooine, les femmes de Jakku, Posté(e)
Sexophone Membre 2 633 messages
Les hommes viennent de Tatooine, les femmes de Jakku,
Posté(e)
Il y a 1 heure, Talon 1 a dit :

Trop de boulot pour les nomades.

?

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Modérateur, ©, 107ans Posté(e)
January Modérateur 59 823 messages
107ans‚ ©,
Posté(e)

Un tout p'tit, de Maurice Carême, Calvi

 

Un grand navire plein s'endort,
Sur son ancre à l'entrée du port.

La mer est d'un bleu de drapeau.
Tout le ciel a fondu dans l'eau .

La rade est soule de clarté.
Dans le lointain la citadelle,

Bien à l'aise sur son rocher,
Se sent vaguement éternelle.
Midi sonne tout est si calme
Qu'on entend le soleil rêver.

 

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Membre, 55ans Posté(e)
Auger Membre 8 665 messages
Maitre des forums‚ 55ans‚
Posté(e)
il y a 16 minutes, K-sos a dit :

Barbara

 
Rappelle-toi Barbara
Il pleuvait sans cesse sur Brest ce jour-là
Et tu marchais souriante
É panouie ravie ruisselante
Sous la pluie
Rappelle-toi Barbara
Il pleuvait sans cesse sur Brest
Et je t'ai croisée rue de Siam
Tu souriais
Et moi je souriais de même
Rappelle-toi Barbara
Toi que je ne connaissais pas
Toi qui ne me connaissais pas
Rappelle-toi
Rappelle-toi quand même ce jour-là
N'oublie pas
Un homme sous un porche s'abritait
Et il a crié ton nom
Barbara
Et tu as couru vers lui sous la pluie
Ruisselante ravie épanouie
Et tu t'es jetée dans ses bras
Rappelle-toi cela Barbara
Et ne m'en veux pas si je te tutoie
Je dis tu à tous ceux que j'aime
Même si je ne les ai vus qu'une seule fois
Je dis tu à tous ceux qui s'aiment
Même si je ne les connais pas
Rappelle-toi Barbara
N'oublie pas
Cette pluie sage et heureuse
Sur ton visage heureux
Sur cette ville heureuse
Cette pluie sur la mer
Sur l'arsenal
Sur le bateau d'Ouessant
Oh Barbara
Quelle connerie la guerre
Qu'es-tu devenue maintenant
Sous cette pluie de fer
De feu d'acier de sang
Et celui qui te serrait dans ses bras
Amoureusement
Est-il mort disparu ou bien encore vivant
Oh Barbara
Il pleut sans cesse sur Brest
Comme il pleuvait avant
Mais ce n'est plus pareil et tout est abimé
C'est une pluie de deuil terrible et désolée
Ce n'est même plus l'orage
De fer d'acier de sang
Tout simplement des nuages
Qui crèvent comme des chiens
Des chiens qui disparaissent
Au fil de l'eau sur Brest
Et vont pourrir au loin
Au loin très loin de Brest
Dont il ne reste rien.

Jacques Prévert, Paroles

Magnifique Jacques Prévert. D'un humanisme déchirant, qui parvenait à être accessible ET profond.

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Membre, 52ans Posté(e)
jmecomprends_tt_seul Membre 2 314 messages
Maitre des forums‚ 52ans‚
Posté(e)

Charleroi de Paul Verlaine


Dans l’herbe noire
Les Kobolds vont.
Le vent profond
Pleure, on veut croire.

Quoi donc se sent ?
L’avoine siffle.
Un buisson gifle
L’œil au passant.

Plutôt des bouges
Que des maisons.
Quels horizons
De forges rouges !

On sent donc quoi ?
Des gares tonnent,
Les yeux s’étonnent,
Où Charleroi ?

Parfums sinistres !
Qu’est-ce que c’est ?
Quoi bruissait
Comme des sistres ?

Sites brutaux !
Oh ! votre haleine,
Sueur humaine,
Cris des métaux !

Dans l’herbe noire
Les Kobolds vont.
Le vent profond
Pleure, on veut croire.

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Membre, 55ans Posté(e)
Auger Membre 8 665 messages
Maitre des forums‚ 55ans‚
Posté(e)

(désolé, je suis HS, sur le sujet des villes et poèmes, je trouve ce poème tellement beau, je n'ai pas pu m'en empêcher... :()

Merci @K-sos, de m'avoir fait repenser à Prévert...

Du même recueil, "Paroles" :

 

DÉJEUNER DU MATIN

Il a mis le café

Dans la tasse

Il a mis le lait

Dans la tasse de café

Il a mis le sucre

Dans le café au lait

Avec la petite cuiller

Il a tourné

Il a bu le café au lait

Et il a reposé la tasse

Sans me parler

Il a allumé

Une cigarette

Il a fait des ronds

Avec la fumée

Il a mis les cendres

Dans le cendrier

Sans me parler

Sans me regarder

Il s’est levé

Il a mis

Son chapeau sur sa tête

Il a mis

Son manteau de pluie

Parce qu’il pleuvait

Et il est parti

Sous la pluie

Sans une parole

Sans me regarder

Et moi j’ai pris

Ma tête dans ma main

Et j’ai pleuré.

 

Modifié par Auger
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Modérateur, ©, 107ans Posté(e)
January Modérateur 59 823 messages
107ans‚ ©,
Posté(e)

Un autre p'tit ?  Arles - Toulet

Dans Arles, où sont les Aliscans,
Quand l'ombre est rouge, sous les roses,
Et clair le temps,

Prends garde à la douceur des choses.
Lorsque tu sens battre sans cause
Ton cœur trop lourd 

Et que se taisent les colombes 
Parle tout bas, si c'est d'amour,
Au bord des tombes.

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Membre, Oiseau de nuit, pays Union européenne, 41ans Posté(e)
sovenka Membre 7 443 messages
41ans‚ Oiseau de nuit, pays Union européenne,
Posté(e)

PERSPECTIVE

                                         de Théophile Gautier

Sur le Guadalquivir, en sortant de Séville,
Quand l’oeil à l’horizon se tourne avec regret,
Les dômes, les clochers font comme une forêt:
A chaque tour de roue il surgit une aiguille.

D’abord la Giralda, dont l’angle d’or scintille,
Rose dans le ciel bleu darde son minaret ;
La cathédrale énorme à son tour apparaît
Par-dessus les maisons, qui vont à sa cheville.

De près, l’on n’aperçoit que des fragments d’arceaux :
Un pignon biscornu, l’angle d’un mur maussade
Cache la flèche ouvrée et la riche façade.

Grands hommes, obstrués et masqués par les sots,
Comme les hautes tours sur les toits de la ville,
De loin vos fronts grandis montent dans l’air tranquille !

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Membre, Posté(e)
Demsky Membre 9 704 messages
Maitre des forums‚
Posté(e)

 

Iles d'Aran

Surdité de la roche
enseigne érodée
un phare dans une lucarne
les sanglots de la mer en ricochets
glissent sur le silence des buveurs
une pinte, deux pintes…
molle continuité
Calfeutrée devant la cheminée
la vieille remet une tourbe
claquant sa langue à chaque crépitement
un gros nuage orphelin rejoint le troupeau
éclaircie virale
la lumière mousse drue
Les mêmes gueules d’échoués
dans le miroir éventré
l’écho de la mer jusqu’à la nausée
les filets roulés aux pieds
du sel au coin des yeux
un naufrage de mémoire

Grégory Rateau, Conspiration du réel, 2022

 

 

Il fait beau aujourd'hui

Il fait beau aujourd’hui
on grille
ça sent le hareng
ça sent le malheur
car
ça va encore augmenter
on va être
des arêtes de crocodiles
dans le désert
des figues sèches
presque carbonisées
des patates attachées
dans la casserole
on va rêver
de givre et de neige
des corbeaux noirs sur blanc
de glace au coca
Les moustiques
vont se charger de malaria
les malheurs
vont grandir partout
et ça fait pas marrer
Ils appellent ça le beau temps
Brigitte Fontaine, Fatrasie

 

 

Elle et Ile

Ni Afrique ni Jusant ni Ponant,

que le métis brise l’anneau de honte,

que notre image rencontre notre visage.

Ni noirs ni blancs ni jaunes. Ni cathédrale

ni temple ni mosquée ni pagode,

mais Saints de la même BâtardiseL' île !

Édouard J. Maunick

 

Modifié par Demsky
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Modérateur, ©, 107ans Posté(e)
January Modérateur 59 823 messages
107ans‚ ©,
Posté(e)

Marseille - Supervielle

Marseille sortie de la mer, avec ses poissons de roche, ses coquillages et l'iode,
Et ses mâts en pleine ville qui disputent les passants,
Ses tramways avec leurs pattes de crustacés sont luisants d'eau marine,
Le beau rendez-vous de vivants qui lèvent le bras comme pour se partager le ciel,
Et les cafés enfantent sur le trottoir hommes et femmes de maintenant avec leurs yeux de phosphore,
Leurs verres, leurs tasses, leurs seaux à glace et leurs alcools,
Et cela fait un bruit de pieds et de chaises frétillantes.
Ici le soleil pense tout haut, c'est une grande lumière qui se mêle à la conversation,
Et réjouit la gorge des femmes comme celle des torrents dans la montagne,
Il prend les nouveaux venus à partie, les bouscule un peu dans la rue,
Et les pousse sans un mot du côté des jolies filles.
Et la lune est un singe échappé au baluchon d'un marin
Qui vous regarde à travers les barreaux légers de la nuit.
Marseille, écoute-moi, je t'en prie, sois attentive,
Je voudrais te prendre dans un coin, te parler avec douceur,
Reste donc un peu tranquille que nous nous regardions un peu
Ô toi toujours en partance
Et qui ne peux t'en aller
A cause de toute ces ancres qui te mordillent sous la mer.

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