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Avoir bon goût


sirielle

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Membre, 35ans Posté(e)
Loufiat Membre 2 589 messages
Mentor‚ 35ans‚
Posté(e)
Il y a 8 heures, Quasi-Modo a dit :

Il n'y a rien de confus dans mon propos qui est tout à fait limpide au contraire @Loufiat.

Les jugements de goût sont sociaux comme l'a montré Bourdieu en son temps.

Le bon goût est donc bien le fruit d'une forme de conformisme.

Un véritable artiste a rarement bon goût. Il est plutôt dans la disruption.

L'emoticone car je suis surpris que tu te contentes de cet argument mais je passe mon tour pour cette fois ! A + 

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Membre, 38ans Posté(e)
sirielle Membre 9 751 messages
Maitre des forums‚ 38ans‚
Posté(e)
Le 11/08/2022 à 14:50, Loufiat a dit :

Bonjour Sirielle,

Sommairement, le bon goût fait intervenir deux éléments : l'individu et la règle. Il suppose une règle, un ensemble de canons établis mais aussi que l'individu soit appelé à, et capable de, jouer avec ces règles, sinon la question du bon ou du mauvais goût ne peut pas se poser. Ce ne sont donc pas des règles fixées et qui s'appliqueraient à tous nécessairement et définitivement.

Le bon goût signale, à mon sens, une individualité affirmée et cohérente, conséquente. L'individu est allé plus loin que la simple soumission à son environnement social, culturel... Il maîtrise les règles et constitue à partir de sa personne, un ensemble propre, singulier et remarquable par sa cohérence et sa continuité. Le bon goût s'affirme dans tous les aspects de la vie, dans tous les "choix de vie" que l'individu invente et compose au fur et à mesure de ses apprentissages et des situations où il se trouve. Ce critère ne définit pas d'abord un contenu particulier mais un cheminement, ce jeu entre l'individu et la règle où l'individu trouve à s'affirmer comme tel. Tel choix vestimentaire convient parfaitement à telle personne, et pas du tout à telle autre. Il signale l'intervention chez cette personne d'un jugement personnel, adéquat au tout de sa personne. Donc finalement, le bon goût relève de la formation de l'individu - "qui n'est pas divisé", qui est "un". C'est un mouvement de rassemblement des éléments de la vie, disparates, incohérents, absurdes dans une synthèse, non pas fixe, mais dynamique et sensée où s'incarne l'aspiration à l'individualité.

Bonjour Loufiat,

Et donc pour toi un individu est-il capable de juger à juste titre du bon ou mauvais goût d'autrui également?

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Membre, 35ans Posté(e)
Loufiat Membre 2 589 messages
Mentor‚ 35ans‚
Posté(e)
Il y a 1 heure, sirielle a dit :

Bonjour Loufiat,

Et donc pour toi un individu est-il capable de juger à juste titre du bon ou mauvais goût d'autrui également?

Bien sûr, suivant des appréciations relatives et ponctuelles, éventuellement répétées. 

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Membre, Posté(e)
Dompteur de mots Membre 1 842 messages
Forumeur activiste‚
Posté(e)
Le 20/07/2022 à 12:10, Elisa* a dit :

Tu veux peut-être parler de subjectivité ?

Je rejoins @Sittelle : "les goûts et les couleurs ne se discutent pas" concernant l'esthétisme, les choix amoureux entre autres mais par contre, je trouve perso que la vulgarité est par essence de mauvais goût, de pas bon goût quoi.

Pourquoi les goûts ne se discuteraient pas ? J'ai souvent été amené à mieux apprécier certaines œuvres artistiques suite à des discussions avec d'autres personnes ou suite à la lecture de ce que d'autres personnes en ont dit. Nos goûts esthétiques vont aussi souvent de pair avec nos idées. Or, nos idées se discutent. Donc en un certain sens, nous discutons par le fait même de nos goûts. D'ailleurs, ne sommes-nous pas souvent plutôt attachés à nos idées par goût plutôt que par conviction profonde et éprouvée ?

Par ailleurs, je vous signale que dire que la vulgarité est par essence de mauvais goût, c'est un peu comme dire que le mal est par essence éthiquement mauvais.

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Membre, 50ans Posté(e)
Elisa* Membre 15 524 messages
Maitre des forums‚ 50ans‚
Posté(e)
il y a 19 minutes, Dompteur de mots a dit :

Pourquoi les goûts ne se discuteraient pas ?

:D Oui tout, absolument, peut évidemment prêter à discussion !

Il faut interpréter la phrase ainsi « on n’a pas à juger du bon goût ou pas de certains domaines comme l’esthétisme, les relations amoureuses, etc… qui sont de l’ordre du subjectif » d’où « les goûts et les couleurs ne se discutent pas ». 
A la suite de cette phrase, je donne un exemple de domaine qu’il me semble être plus consensuel comme la vulgarité que bcp de personnes vont trouver de mauvais goût même si tu considères que c’est une lapalissade de ma part. 
 

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Membre, 132ans Posté(e)
soisig Membre 30 391 messages
132ans‚
Posté(e)
il y a 27 minutes, Dompteur de mots a dit :

Par ailleurs, je vous signale que dire que la vulgarité est par essence de mauvais goût, c'est un peu comme dire que le mal est par essence éthiquement mauvais.

et c'est le cas. 

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Membre, If you don't want, you Kant..., Posté(e)
deja-utilise Membre 6 039 messages
If you don't want, you Kant...,
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Bien le bonjour cher Dompteur_de_mots,

 

Le 17/08/2022 à 16:42, Dompteur de mots a dit :

D'ailleurs, ne sommes-nous pas souvent plutôt attachés à nos idées par goût plutôt que par conviction profonde et éprouvée ?

 

La Rochefoucauld, maximes et réflexions diverses, numéro 390:

 " On renonce plus aisément à son intérêt qu'à son goût. "

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Membre, Posté(e)
Dompteur de mots Membre 1 842 messages
Forumeur activiste‚
Posté(e)
Il y a 5 heures, deja-utilise a dit :

La Rochefoucauld, maximes et réflexions diverses, numéro 390:

 " On renonce plus aisément à son intérêt qu'à son goût. "

Bien le bonjour Déjà !

Nous parlons de goût mais nous aurions pu aussi parler de "récits". Nous sommes attachés aux récits que nous nous faisons de notre existence, probablement parce qu'ils lui donne du sens.

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Membre, If you don't want, you Kant..., Posté(e)
deja-utilise Membre 6 039 messages
If you don't want, you Kant...,
Posté(e)

Bonjour DdM,

Il y a 11 heures, Dompteur de mots a dit :

Nous parlons de goût mais nous aurions pu aussi parler de "récits". Nous sommes attachés aux récits que nous nous faisons de notre existence, probablement parce qu'ils lui donne du sens.

Tout-à-fait, c'est d'ailleurs la tendance actuelle dans la compréhension de l'esprit humain, que l'on retrouve chez plusieurs auteurs scientifiques qui nous font part de leurs recherches, en particulier avec Lionel Naccache - neuroscientifique - et son livre culte " Le cinéma intérieur ".

J'avais moi-même donné un nom, néologique, à ce phénomène avant même d'en prendre plus pleinement connaissance dans des ouvrages: la " logologie ", faisant le trait d'union avec une technique thérapeutique en herbe récente la " logothérapie ". Cette inclination de notre esprit à donner du sens à tout et n'importe quoi de manière irrépressible et automatique, se retrouve dans le phénomène très connu de la paréidolie !

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Membre, If you don't want, you Kant..., Posté(e)
deja-utilise Membre 6 039 messages
If you don't want, you Kant...,
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Bonjour @sirielle

 

Je fais un complément à ce que je t'ai déjà écrit à ce sujet, en m'appuyant sur une ancienne étude qui fait encore " autorité " en la matière - en psychosociologie, émanant du célèbre psychologue M. Sherif turco-américain:

 

" Whatever society we take, no matter how primitive or developed, simple or complicated, we find standards, norms, conventions, customs, and values regulating to a great extent the conduct, and shaping the mentalities, likes and dislikes of its members along economic, aesthetic, social, moral, political and other lines.

The individual acquires a certain set of norms from childhood on, no matter whether he wishes to do so or not, and whether he is conscious of the fact or not. Sapir has given a subtle analysis of this point in a recent symposium. These norms determine to a : considerable extent the individual’s ideas of good or bad, right or wrong, beautiful or ugly, and likewise his perceptual tendencies; e.g., which aspects of a field of stimulation he will accentuate and which he will ignore. "

A STUDY OF SOME SOCIAL FACTORS IN PERCEPTION, Muzafer Sherif, New York 1935.

 

C'est la version introductive originale de son étude, donc en anglais, mais un petit coup de " Google translate " peut aider si besoin.

 

:bienvenue:

 

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Membre, Posté(e)
Dompteur de mots Membre 1 842 messages
Forumeur activiste‚
Posté(e)
Le 17/08/2022 à 11:01, Elisa* a dit :

:D Oui tout, absolument, peut évidemment prêter à discussion !

Il faut interpréter la phrase ainsi « on n’a pas à juger du bon goût ou pas de certains domaines comme l’esthétisme, les relations amoureuses, etc… qui sont de l’ordre du subjectif » d’où « les goûts et les couleurs ne se discutent pas ». 
A la suite de cette phrase, je donne un exemple de domaine qu’il me semble être plus consensuel comme la vulgarité que bcp de personnes vont trouver de mauvais goût même si tu considères que c’est une lapalissade de ma part. 
 

Le goût est subjectif mais il est toujours possible d'en objectiver certains pans. C'est par exemple toute l'utilité de la psychologie. Si vous avez tendance à toujours vous précipiter dans des relations amoureuses dysfonctionnelles, un psychologue pourra vous aider à déceler à quels patterns nuisibles vous répondez. Ce n'est pas si différent dans les arts: les gens accordent souvent fort mal les aspirations qui les animent et les œuvres auxquelles ils se soumettent.

Le 17/08/2022 à 11:10, soisig a dit :

et c'est le cas. 

Je dois reconnaître que vous avez une certaine perspicacité.

Le 19/08/2022 à 04:18, deja-utilise a dit :

Tout-à-fait, c'est d'ailleurs la tendance actuelle dans la compréhension de l'esprit humain, que l'on retrouve chez plusieurs auteurs scientifiques qui nous font part de leurs recherches, en particulier avec Lionel Naccache - neuroscientifique - et son livre culte " Le cinéma intérieur ".

J'avais moi-même donné un nom, néologique, à ce phénomène avant même d'en prendre plus pleinement connaissance dans des ouvrages: la " logologie ", faisant le trait d'union avec une technique thérapeutique en herbe récente la " logothérapie ". Cette inclination de notre esprit à donner du sens à tout et n'importe quoi de manière irrépressible et automatique, se retrouve dans le phénomène très connu de la paréidolie !

C'est un sujet tout à fait intéressant ! D'autant plus que l'un des écueils de notre temps est sans doute que nous ne sommes plus capable d'admettre le mystère en notre existence. Il y a ce grand paradoxe que nous avons tué Dieu et avons fait s'écrouler tous les grandes idoles mais que le mystère ne semble jamais avoir été aussi éloigné du monde. Et pourtant !

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Membre, 38ans Posté(e)
sirielle Membre 9 751 messages
Maitre des forums‚ 38ans‚
Posté(e)
Le 11/08/2022 à 17:19, deja-utilise a dit :

Effectivement et c'était tout l'intérêt de ce texte, il remet chronologiquement les choses à leurs places, à savoir qu'initialement, le bon goût ou le mauvais est le jugement d'une classe sociale se trouvant plus raffinée que la populace, ils se créent eux-mêmes des normes esthétiques et sensorielles, qui non seulement flattent leurs âmes mais également, leur permettent de se distinguer des autres dépréciés. Cela l'a toujours été, et le sera encore demain, dans une expérience in vivo, il a été montré que même quand les étudiants doivent porter le même uniforme à l'effigie de l'école ( essentiellement au R.U. ), ils trouvent toujours un moyen de se démarquer de ceux qu'ils jugent " inférieurs " ou simplement péjorativement différents, une coiffure, un accessoire, un bijou, une façon de parler, de se mouvoir, de se tenir, etc... autant de marqueurs identitaires, permettant de différencier le bon du mauvais goût soit-disant.

Bonjour deja-utilise,

A mes yeux ces principes communautaires élitistes, sont seulement un aspect parmi d'autres du concept de "bon goût". Mais l'orgueil culturel dont ils peuvent faire preuve n'est aucunement inévitable dans l'absolu, au contraire, il est plutôt grossier intellectuellement. Or il me paraîtrait réducteur de ne saisir le concept de bon goût que sous le prisme de son emploi abusif ou simpliste. 

Le 11/08/2022 à 17:19, deja-utilise a dit :

L'un n'empêche pas l'autre, à l'instar de l'appréciation des mathématiques, il faut d'abord en avoir pris un minimum connaissance, pour savoir les trouver " belles " par la suite, ce n'est pas instinctif mais plutôt intuitif dirais-je, tout comme la·e tennis·wo·man commence difficilement et laborieusement par apprendre ce que d'autres savent avant de pouvoir jouer au " feeling " ! Il y a donc un pré-apprentissage, que l'on s'en souvienne ou non, qu'on l'ait vu attentivement se produire ou pas - inconsciemment - n'y change rien. Sans base, sans référence, il n'y a aucune mesure possible, quelle qu'elle soit ! Même le goût gustatif aussi primaire soit-il est affaire d'abord d'un cadre culturel, ne serait-ce que par ce que la mère mange quand elle est enceinte et qui finit dans le liquide amniotique, l'enfant à naitre n'arrive donc pas vierge au monde sur les saveurs, de même que pour les sons ou les sonorités, tout comme la langue - naturelle - de son environnement, etc... Il a été montré qu'un bébé lambda préférait une personne s'exprimant dans sa langue maternelle que dans une autre langue par exemple. Qui peut se souvenir consciemment de tous ces petits apprentissages de ses premiers mois de vie y compris intra-utérins et qui pourtant ont déjà creusés des sillons dans nos préférences !?

L'apprentissage s'inspire de la sensibilité naturelle et sa gestion. Et la sensibilité est analysable.

Le 11/08/2022 à 17:19, deja-utilise a dit :

L'expression " ex nihilo " signifie justement que la préférence ne peut pas advenir à partir de rien, mais qu'il en existe une par défaut, et bien souvent elle est donnée par le milieu culturel ou social de vie.

 

Je peux te donner 4 exemples saillants qui illustreront que l'on ne part pas de zéro, quand une préférence doit se faire, il y a toujours un substrat, mais tellement omniprésent que nous n'y prêtons même pas attention, mais il est pourtant bien là, tout comme nous ne prêtons plus d'attention à l'odeur qui est présente de notre maison, alors qu'une personne extérieure s'en apercevra plus volontiers, du moins au début, jusqu'à ce que le phénomène d'habituation lui fasse à elle aussi ne plus sentir l'odeur du début, il en va de même pour les " préférences " sociales, elles sont tellement omniprésentes qu'on ne les " voit " plus du tout ! Les trois premiers exemples sont historiques, ils ne sont sans doute plus autant valables actuellement qu'ils l'ont été il y a encore une poignée de décennies, contrairement au dernier :

• Les femmes dites girafes, qui ont un cou allongé à cause d'anneaux rajoutés régulièrement, dans cette peuplade, les hommes choisiront nécessairement une femme qui aura une telle excroissance, et si on leur présentaient une femme " sans cou " ils la trouveraient sans doute pour la plupart hideuse, car trop éloignée de leur standard culturel.

• Les pieds bandés des japonaises, où il était coutume dès le plus jeune âge des filles de leur bander les pieds pour qu'ils soient le plus " petits " possibles, en réalité le pied ne poussait pas moins qu'un autre non bandé, mais que les os poussaient en se recroquevillant sur eux-mêmes ! Il n'en demeure pas moins qu'une femme qui n'aurait pas répondu à ce dictat aurait été jugée disgracieuse, elle aurait été de très mauvais goût.

• De même, les tatouages masculins sur les îles Samoa étaient là aussi une donnée générale, dont les femmes ne pouvaient pas ne pas tenir compte, chaque homme était tatoué, la seule chose qu'une d'elle pouvait faire, c'était de " choisir " tel type de tatouage plutôt que tel autre, mais pas un homme sans tatouage, que si il avait existé aurait certainement signifié quelque chose " d'impropre " pour une union de toute façon.

• De nos jours, la pilosité masculine, hormis la barbe, est devenue rebutante, dès lors, il est rarissime de voir un homme particulièrement poilu montrer ses jambes hirsutes comme une femme le fait avec un mini-short par exemple, ou d'aller torse-nu ou avec un débardeur minimaliste sur le dos, c'est tellement " évident " que personne - aucun mâle - ne le fait, du coup on oublie que ce " choix " existe pourtant, qui serait ainsi à n'en pas douter, de très mauvais goût la aussi... Ce goût ou ce dégoût plutôt est dicté par un désir collectif, non individuel, et ressenti comme tel par la gent masculine qui sait s'en préserver par ailleurs, c'est alors de l'ordre du non-choix, il ne reste dès lors en lice que les hommes imberbes - naturellement ou artificiellement - ou ceux qui se couvrent, car l'un des autres choix évincé a été fait par la société toute entière. 

 

 

Les déviances de la mode ne sont pas non plus forcément représentatives de bon goût. Si "le bon goût" vise l'originalité et l'esthétique par exemple, qui sont deux valeurs critères parmi d'autres, les tentatives d'approches sont plus ou moins réussies, et possiblement viciées entre autres par le suivisme. Car un biais cognitif courant consiste à adopter une opinion, non pour ce qu'elle est, mais par estime pour ceux qui la soutiennent. (Cela dit pour ma part je connais bien des hommes n'ayant aucune honte à assumer leur pilosité des jambes, bras, aisselles ou torse en public si leur tenue, estivale par exemple, l'implique.) Mais quoi qu'il en soit, le goût commun, s'il n'est cependant pas infaillible, loin de là, peut aussi être doté de bon sens.

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Membre, If you don't want, you Kant..., Posté(e)
deja-utilise Membre 6 039 messages
If you don't want, you Kant...,
Posté(e)

Bonjour Sirielle,

 

Il y a 13 heures, sirielle a dit :

A mes yeux ces principes communautaires élitistes, sont seulement un aspect parmi d'autres du concept de "bon goût". Mais l'orgueil culturel dont ils peuvent faire preuve n'est aucunement inévitable dans l'absolu, au contraire, il est plutôt grossier intellectuellement. Or il me paraîtrait réducteur de ne saisir le concept de bon goût que sous le prisme de son emploi abusif ou simpliste. 

Tu as raison, cette vision historique que je t'ai présentée ne tient aujourd'hui plus, il n'y a plus cette mainmise du " bon goût " par une classe sociale en particulier, néanmoins le processus est toujours à l'œuvre, la " lutte des classes " s'est en quelque sorte muée en lutte culturelle et en particulier du paraitre identitaire, ce n'est plus l'aristocratie ou la bourgeoisie qui donnent le " la " - des convoitises de chacun - mais les individus les plus riches de la planète, c'est eux qui donnent envie de ceci ou de cela pour le mouvement de masse général, mais il y a bien sûr des disparités dû à des idoles, comme les artistes de la chanson ou des sportifs de " haut niveau ", il y a donc à l'intérieur de ce mouvement populaire global, des fluctuations, en revanche qu'il y ait un mouvement moutonnier local ou global, cela n'est plus connecté avec un goût dit légitime, sauf à l'intérieur des clans ou communautés formelles ( e.g. cercles d'amis ) ou informelles ( e.g. effet de mode ).

On peut facilement le voir avec actuellement la " tendance " du port de baskets de marque par certains individus, qui veulent se faire voir et être perçus avec cet indicateur, bien que celle-ci, passé l'aspect visuel, ne mène à rien, ce n'est qu'un emballage travaillé et soigné mais vide, et en effet, ces personnes appartiennent à des strates sociales différentes, cela leur permet seulement de se démarquer des autres sans autres intentions plus profondes que l'apparat, bien qu'il puisse il y avoir d'autres artifices qui l'accompagne, il n'en demeure pas moins que c'est vide de sens, il n'y a rien d'autre que la recherche de la distinction en elle-même, elle semble se suffire à elle-même, à l'inverse de son versant historique, où les apparences étaient surtout des indices visuels vers autre chose, un statut, des valeurs, un mode de vie, etc..

 

Je te rejoindrais plus volontiers si au lieu de " bon goût " tu parlais d'exigence, car cela renverrait en ce cas à un trait de caractère - qui n'est pas donné à tout le monde, il a une constance dans le temps contrairement au " bon " goût plus volage et volatile. En effet, si chacun peut reconnaitre un haut niveau d'exigence y compris dans un domaine qui ne l'intéresse pas, qui ne le motive pas voire même qui le rebute ou dont il est lui-même peu exigent ou compétent, il n'en va pas de même du " bon goût " toujours relatif au groupe qui l'exprime et qui croit en détenir le monopole ! Ou de l'individu inconscient de l'influence sociale qui lui a dicté ses propres goûts, ce qui revient au même, car il a été mainte fois montré que si il y a bien une chose qui passe facilement sous le radar de la conscience et de la prise de conscience ou de la prise en compte, c'est bien justement l'influence sociale, qui est systématiquement niée par tout un chacun si on le questionne à ce sujet - l'expression de l'ego sans doute, chacun croyant être " maitre " de ses inclinations à bord de son vaisseau corporel, mais pourtant concrètement la plupart du temps l'individu agit en fonction d'un milieu, d'un contexte, d'une situation, d'une intériorisation de normes, de valeurs, de préférences, etc...

 

Il y a 13 heures, sirielle a dit :

L'apprentissage s'inspire de la sensibilité naturelle et sa gestion. Et la sensibilité est analysable.

Tout le monde est plus ou moins réceptif ou " sensible " certes, mais cette sensibilité se développe, se renforce ou s'atrophie selon un plan éducatif ou pendant des expériences de vie antérieures. Le goût est grandement déterminé par nos contingences de vie, comme nos autres facultés ou compétences, qu'elles soient perceptives, cognitives ou esthétiques ou " gustatives " et même morales, le contexte d'évolution est donc prépondérant dans l'apparition ou non de ces " accidents " pouvant stimuler ou non nos compétences en devenir.

Par exemple, il a été malheureusement montré sur des chats, que si le chaton était privé de l'usage d'un œil pendant plus de six mois avec un bandage opaque, celui-ci une fois retiré ne conduisait pas le chat à recouvrer la vue de œil masqué, quand bien même il n'y avait aucune dégénérescence physiologique, il sera aveugle à vie, alors que si la bandage est posé moins longtemps, le retard de développement synaptique est rattrapé assez rapidement. De même, si de jeunes bébés sont capables de reconnaitre tous les sons langagiers, jusqu'à leur six mois, ils perdent cette faculté assez rapidement par la suite si ils ne reçoivent pas de stimulations pour certains phonèmes, une fois adulte ils n'entendent tout bonnement pas de différence entre deux phonèmes proches, pourtant parfaitement discriminables par n'importe qui dans la culture langagière où cette distinction est opérée. Encore une fois, les goûts culinaires sont dictés par notre milieu de vie, on le voit nettement avec le dégoût que nous inspire par exemple de manger des insectes vivants ou cuits dans certains pays. Mais il en va quelque part de même avec notre attirance sexuelle, nous n'avons pas décidé d'être hétérosexuel, homo ou bi, et c'est encore plus flagrant avec les pratiques sexuelles elles-mêmes, là à proprement parler tous les goûts sont dans la nature, et il est manifeste que les goûts les plus éloignés des nôtres seront ceux que nous qualifieront facilement de " mauvais " et ceux qui s'en approchent le plus de " bons ", mais nos propres préférences ne sortent pas de n'importe où, ils ont été promus par ce que notre environnement et le hasard à bien pu produire sur nous, et donc les occasions rencontrées d'y être " sensibilisés " ou en être affectés d'une manière ou d'une autre, par le langage, par l'éducation, explicitement ou implicitement, par le partage d'expériences virtuelles avec autrui ou au contraire par la pratique, par visionnage, par espionnage ou découverte fortuite, etc...

 

Il y a 13 heures, sirielle a dit :

Les déviances de la mode ne sont pas non plus forcément représentatives de bon goût. Si "le bon goût" vise l'originalité et l'esthétique par exemple, qui sont deux valeurs critères parmi d'autres, les tentatives d'approches sont plus ou moins réussies, et possiblement viciées entre autres par le suivisme. Car un biais cognitif courant consiste à adopter une opinion, non pour ce qu'elle est, mais par estime pour ceux qui la soutiennent. (Cela dit pour ma part je connais bien des hommes n'ayant aucune honte à assumer leur pilosité des jambes, bras, aisselles ou torse en public si leur tenue, estivale par exemple, l'implique.) Mais quoi qu'il en soit, le goût commun, s'il n'est cependant pas infaillible, loin de là, peut aussi être doté de bon sens.

Je comprends, c'est pourquoi si tu penses que c'est une chose que l'on décide, alors le " bon goût " est une pure construction, très certainement à composante sociale pour la plus grande part, sauf si tu me rejoins en passant que le niveau d'exigence participe à cette sélection, bien que cela n'enlèvera pas que sa génération initiale prend racine dans une culture locale ou globale, seule l'intensité et l'extensivité seront à rattacher à l'individu qui en fait preuve et qui pourront représenter cette fois-ci la part la plus importante. Par exemples, je sais très bien d'où me viennent mes goûts musicaux, ils sont en lien direct avec mes rencontres et mon vécu de jeunesse, de même mon attirance libidinale singulière s'inscrit dans une culture où j'ai été - involontairement - " initié " par les médias et à laquelle ( l'attirance ) je ne peux échapper dorénavant ( telle une empreinte au sens de K. Lorenz ), c'est bien au-delà ou en-deçà de ma volonté, dit autrement, je n'ai pas plus que les autres choisi mes goûts, ils se sont imposés à moi, bien que je reconnaisse que par la force de l'habitude on puisse en acquérir d'autres, ce qu'un intellectuel dont je ne me souviens plus le nom avait signalé par écrit, il s'était forcé à écouter de la musique dissonante jugée désagréable en première instance, puis après s'être infligé cette " torture " pendant assez longtemps, il a fini de son aveu par en venir à l'apprécier !

Le goût en lui-même est relatif à un individu, et le jugement de valeur qui lui est associé est quant à lui, relatif au collectif où se situe cet individu ou au(x) groupe(s) au(x)quel(s) il s'identifie, car nous avons aujourd'hui plusieurs identités parallèles, qui une bonne partie du temps se présentent les unes après/sans les autres, mais parfois il se peut que deux identités arrivent ou soient convoquées en même temps, pouvant conduire à des dissonances, à ce moment là on prend gravement conscience que ce qui semblait couler de source n'est pas si évident que cela ou naturel ou encore inné comme on se plaisait à le croire, soudainement deux visions du monde au sein d'un même individu s'entrechoquent violemment... y compris donc ses " bons goûts " de ses deux univers parallèles en collision, par exemples son cercle d'amis qui se retrouve dans le cercle familial, ou dans son monde professionnel, ou encore dans le groupe fermé de son club untel ou dans la communauté religieuse à laquelle il appartient, et inversement ou réciproquement, etc...

 

 

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