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Les rapports entre le Génie...

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Il semble de prime abord assez curieux qu'un recoupement ou un rapport, même lointain, puisse être opéré entre les personnalités d'exception ayant marqué l'Histoire de l'humanité telles qu'Albert Einstein, Giordano Bruno, Nicolas Copernic, Galilée, etc... et la folie, dont le premier regard nous laisserait plus volontiers penser qu'il s'agit de deux opposés inconciliables.

Pourtant, bon nombre de génies furent en réalité atteints de personnalités hors du commun et de parcours singuliers qui semblent relever de la folie.

Nous savons que Nietzsche souffrait d'un problème avec les femmes, et qu'il culpabilisait probablement de la mort de son père qu'il cherchait inconsciemment à faire ressusciter sous les traits du surhomme. Il finira ses jours dans la Folie.

Nous savons que bon nombre d'enquêteurs de génie souffrent d'une personnalité obsessionnelle qui les rend attentifs aux moindres détails (ce qui se fait au prix d'une certaine anxiété), doublée d'une certaine loyauté dans leurs relations et d'un goût excessif pour l'ordre, la précision, la propreté.

Nous savons que bon nombre d'artistes souffrent de bipolarité, c'est à dire un trouble de l'humeur, qui aurait peut-être des liens insoupçonnés avec la créativité.

Ce lien très longtemps soupçonné (depuis Aristote) semble d'ailleurs définitivement prouvé par la science.

Quel(s) sont selon vous les rapports de la Folie et du Génie? A vrai dire j'ai une théorie assez particulière qui me tarabuste à ce sujet : puisque d'une part il arrive que nous ayons raison par l'effet du hasard, et que certains preuves viennent ensuite nous donner raison, pourquoi n'envisage-t-on pas que les êtres humains, même géniaux, n'évoluent pas simplement dans une espèce de délire psychotique ou une obsession dont ils ne sortent pas, et que cela passe pour une motivation exceptionnelle, tandis que les évènements à venir (expériences scientifiques, preuves, etc...) finiraient fortuitement par leur donner raison?

Je ne sais pas comment être plus clair, mais serions-nous victimes d'une illusion? Pour un Albert Einstein, à qui certaines expériences donneront finalement raison, comment oublier que nous laissons de côté nombre de délirants/théoriciens tout aussi talentueux et tout aussi motivés, mais auxquels les évènements auront finalement donné (en toute apparence) tort? A l'image de Jules Verne dont nombreux sont ceux qui l'imaginent en précurseur héroïque, parce qu'il a imaginé qu'on irait sous les océans (20.000 lieues sous les mers) ou sur la lune (De la Terre à la Lune), pourquoi ignorons-nous les romans produits par ce même homme, mais qui sont totalement irréalistes (Voyage au Centre de la Terre).

Cela ne corroborerait-il pas certaines affirmations selon lesquelles l'imagination est plus décisive que l'expérience pour devenir un théoricien d'exception (Albert Einstein)?

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Jedino Membre 47 987 messages
32ans‚ Jedi pas oui, jedi pas no,
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Mon premier point est le suivant : nous n'ignorons pas les romans irréalistes de Jules Verne, en particulier le Voyage au Centre de la Terre. J'en veux pour preuve qu'il y a quelques années encore en a été fait un, ou peut-être des films. Mais effectivement, on le voit visionnaire, comme c'est vrai d'un Huxley. La raison ? Une conformité avec le réel qui est assez frappante pour frapper, si je peux me permettre cette phrase absurde. Il ne s'agit cependant pas d'oublier, en effet, que c'est une vision des choses imaginées et littéraires par rapport à ce qui pouvait être su à cette époque. En cela, il n'était pas absurde d'imaginer un monde plus automatisé au temps de Huxley, et il n'était pas plus idiot d'imaginer aller un jour sur la Lune du temps de Verne quand on sait que l'homme a toujours cherché à voir au-delà, dans l'espace, et ainsi à voyager.

Mon autre point est celui-ci : il faut clairement distinguer le cas d'un romancier qui imagine, même fidèlement, une histoire qui finit par ressembler à notre monde. Ce n'est jamais plus qu'une interprétation faite par le lecteur à partir d'un texte. Le scientifique, lui, n'a pas la même tâche : il est là pour élargir la connaissance à un instance t. Autrement dit, il ne cherche pas à imaginer, il cherche à démontrer ce qu'il imagine. Autrement dit, le travail de l'imagination (ou plutôt, de l'intuition pour le scientifique) paraît être le même pour les deux situations, mais il diffère totalement. Etre crédible par des mots n'a aucune robustesse scientifique à côté d'une équation qui est robuste et justifiée par rapport à tout un système, quand bien même il est nouveau. Donc effectivement, la preuve par l'observation est souvent faite après l'écriture de la théorie, ou plutôt l'interprétation de ces théories. Pour la simple raison que la démarche est hypothético-déductive.

Maintenant, tu poses la question de l'expérience. Nous avons le sentiment qu'Einstein, exemple canonique de ce que nous voyons comme illustrant le "génie", trouvait ces solutions "comme ça". C'est nier l'immense travail et investissement qu'il y a derrière ces résultats. Là où tu as raison, c'est que tout le monde n'est pas égal face à cela : certains marqueront l'Histoire, d'autres ne finiront par ne jamais rien trouver de suffisamment marquant pour que leur nom soit cité partout. D'autres, encore, l'ont fait et sont ignorés du grand public. Il n'empêche, avant toute intuition géniale, il faut un travail, une expérience conséquente, qui permet d'utiliser à bon escient cette intuition qui fait la différence sur la fin, mais non pas sur le départ.

Et, enfin, pour le rapport entre folie et génie, je ne vais pas m'étendre là-dessus, mais cela reste affaire de représentation sociale. Il n'est pas aisé de définir ce qu'est le génie, il est d'autant plus difficile de dire ce qu'est la folie. De là, donc, à faire le lien entre les deux, cela me paraît ambitieux, même si on aime se rassurer de cette manière. Comme si nous avions besoin de trouver la faille chez l'autre pour se rassurer qu'au fond, eh bien, nous sommes tous au même niveau. Ces hommes ne sont pas des êtres parfaits, loin de là. Ils avaient tous leurs problèmes, leurs vices. Que ce soit psychologique ou non. Nous aimerions trouver une cause à cette créativité, quelque chose de rationnel, alors que c'est peut-être, et tout simplement, une capacité personnelle à assembler des concepts ou des idées ensembles, là où d'autres excellent pour jouer à des sport, par exemple.

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Invité Quasi-Modo
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Mon premier point est le suivant : nous n'ignorons pas les romans irréalistes de Jules Verne, en particulier le Voyage au Centre de la Terre. J'en veux pour preuve qu'il y a quelques années encore en a été fait un, ou peut-être des films. Mais effectivement, on le voit visionnaire, comme c'est vrai d'un Huxley. La raison ? Une conformité avec le réel qui est assez frappante pour frapper, si je peux me permettre cette phrase absurde. Il ne s'agit cependant pas d'oublier, en effet, que c'est une vision des choses imaginées et littéraires par rapport à ce qui pouvait être su à cette époque. En cela, il n'était pas absurde d'imaginer un monde plus automatisé au temps de Huxley, et il n'était pas plus idiot d'imaginer aller un jour sur la Lune du temps de Verne quand on sait que l'homme a toujours cherché à voir au-delà, dans l'espace, et ainsi à voyager.

Hello Jedino,

Peut-être, dans le cas de Jules Verne, était-ce également lié à une anticipation en rapport à l'évolution des sciences. Car finalement le plus souvent, les scientifiques inventeurs ne font que recomposer entre elles différentes inventions ou différents éléments considérés un peu comme des modules (un peu comme dans l'informatique qui serait un exemple parlant pour tout le monde) dont la recombinaison forme un nouvel objet.

Mais je ne peux m'empêcher aussi de penser à Léonard de Vinci qui avait anticipé (plus ou moins) l'idée de l'hélicoptère, du deltaplane ou encore du parachute.

Mon autre point est celui-ci : il faut clairement distinguer le cas d'un romancier qui imagine, même fidèlement, une histoire qui finit par ressembler à notre monde. Ce n'est jamais plus qu'une interprétation faite par le lecteur à partir d'un texte. Le scientifique, lui, n'a pas la même tâche : il est là pour élargir la connaissance à un instance t. Autrement dit, il ne cherche pas à imaginer, il cherche à démontrer ce qu'il imagine. Autrement dit, le travail de l'imagination (ou plutôt, de l'intuition pour le scientifique) paraît être le même pour les deux situations, mais il diffère totalement. Etre crédible par des mots n'a aucune robustesse scientifique à côté d'une équation qui est robuste et justifiée par rapport à tout un système, quand bien même il est nouveau. Donc effectivement, la preuve par l'observation est souvent faite après l'écriture de la théorie, ou plutôt l'interprétation de ces théories. Pour la simple raison que la démarche est hypothético-déductive.

Le démarche qui consiste à bâtir la théorie, oui, on pourrait la décrire comme telle, mais je dirai surtout qu'il s'agit de l'ajout d'hypothèses ad hoc, ce qui est par ailleurs caractéristique du délire psychotique ou des personnalités peu ouvertes à la nouveauté. Lorsque la réalité vient démentir le psychotique délirant, celui-ci reformule le délire de telle sorte à le rendre cohérent avec les observations ou les faits qu'on lui oppose... :)

Je constate simplement que les révolutions scientifiques ont la plupart du temps été opérées en opposition avec la méthode qui avait officiellement cours : les preuves de la relativité se sont étayées bien après la popularité et la reconnaissance effective de cette théorie. En réalité, une révolution scientifique correspond toujours à un changement de paradigme, et les observations postérieures, se multipliant, ont bel et bien lieu à postériori.

Je pense ne serait-ce qu'à la sérendipité qui est une sacré épine dans le pieds pour quiconque aimerait théoriser le progrès scientifique (comme Popper ou d'autres). Je dirai même plus : la Sérendipité (le fait de tomber sur une découverte innovante par hasard) est la preuve que le progrès scientifique réel ne se théorise pas et ne le sera jamais.

Maintenant, tu poses la question de l'expérience. Nous avons le sentiment qu'Einstein, exemple canonique de ce que nous voyons comme illustrant le "génie", trouvait ces solutions "comme ça". C'est nier l'immense travail et investissement qu'il y a derrière ces résultats. Là où tu as raison, c'est que tout le monde n'est pas égal face à cela : certains marqueront l'Histoire, d'autres ne finiront par ne jamais rien trouver de suffisamment marquant pour que leur nom soit cité partout. D'autres, encore, l'ont fait et sont ignorés du grand public. Il n'empêche, avant toute intuition géniale, il faut un travail, une expérience conséquente, qui permet d'utiliser à bon escient cette intuition qui fait la différence sur la fin, mais non pas sur le départ.

C'est pas faux.

Et, enfin, pour le rapport entre folie et génie, je ne vais pas m'étendre là-dessus, mais cela reste affaire de représentation sociale. Il n'est pas aisé de définir ce qu'est le génie, il est d'autant plus difficile de dire ce qu'est la folie. De là, donc, à faire le lien entre les deux, cela me paraît ambitieux, même si on aime se rassurer de cette manière. Comme si nous avions besoin de trouver la faille chez l'autre pour se rassurer qu'au fond, eh bien, nous sommes tous au même niveau. Ces hommes ne sont pas des êtres parfaits, loin de là. Ils avaient tous leurs problèmes, leurs vices. Que ce soit psychologique ou non. Nous aimerions trouver une cause à cette créativité, quelque chose de rationnel, alors que c'est peut-être, et tout simplement, une capacité personnelle à assembler des concepts ou des idées ensembles, là où d'autres excellent pour jouer à des sport, par exemple.

Est-ce que tu veux dire que les génies seraient simplement catalogués par leurs contemporains parce que trop originaux, marginaux, hors du commun? Il s'agirait donc uniquement de perspective ou de représentation sociale, et je suis bien d'accord, cela est sans aucun conteste relié. Mais cela ne s'oppose pas frontalement à ma mini-théorie, car les conceptions de la folie dépendent elles aussi d'une représentation sociale.

Je pense ne serait-ce qu'à l'homosexualité (qui est l'exemple le plus frappant) qui aura sans aucun doute poussé certains génies dans la marginalité et finalement, la créativité qu'on leur aura connu (Arthur Rimbaud ou encore le comte de Lautréamont).

pour info, Einstein était autiste de type Asperger

Bonjour bonjour,

C'est un élément intéressant quand on part du principe qu'un autiste de type Asperger peut se montrer excessivement doué dans certains domaines liés aux mathématiques ou la musique.

Je propose, en quelque sorte, une espèce de sélection naturelle des idées ou théories "hors normes", celles qui sont sélectionnées étant l'œuvre de ceux que nous considérons alors comme des génies, et celles qui sont rejetées étant celles de ceux que nous considérons comme des fous. L'environnement permettant la pression et la sélection étant le contexte social et l'épuisement d'un paradigme ou d'un autre (cf. Kuhn).

Karl Popper aurait alors seulement commis l'erreur de considérer qu'il y avait une réelle progression (amélioration + changement) vers la réalité des faits, un peu comme certains créationnistes considèrent que l'Homme est l'aboutissement du processus de l'évolution des espèces. Et je trouve que cette vision n'est absolument pas réconfortante.

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Membre, Jedi pas oui, jedi pas no, 32ans Posté(e)
Jedino Membre 47 987 messages
32ans‚ Jedi pas oui, jedi pas no,
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Bien le bonjour, oui !

Hello Jedino,

Peut-être, dans le cas de Jules Verne, était-ce également lié à une anticipation en rapport à l'évolution des sciences. Car finalement le plus souvent, les scientifiques inventeurs ne font que recomposer entre elles différentes inventions ou différents éléments considérés un peu comme des modules (un peu comme dans l'informatique qui serait un exemple parlant pour tout le monde) dont la recombinaison forme un nouvel objet.

Mais je ne peux m'empêcher aussi de penser à Léonard de Vinci qui avait anticipé (plus ou moins) l'idée de l'hélicoptère, du deltaplane ou encore du parachute.

Pour Léonard de Vinci, il lui était possible d'imaginer qu'un jour, oui, nous pourrions voler. Peut-être l'espérait-il lui-même, à son époque, déjà. En tous les cas, le raisonnement était simple : si les oiseaux le peuvent, pourquoi pas nous ? Partant de là, il était en mesure d'imaginer des solutions. Il ne faut cependant pas oublier que nous accordons de la valeur à ces idée que a posteriori, une fois qu'elles existent, donc, nous créditons du coup leurs auteurs d'un côté visionnaire, d'une imagination géniale. Ce qui n'enlève rien au fait de l'imaginer, mais ce qui rappelle ce que c'est au départ : un dessin, aussi précis soit-il. Mais je ne cherche pas à discréditer ce qu'il a pu trouver, je n'oublie simplement pas qu'il est une chose aux capacités infinies et à la liberté tout aussi vaste chez l'homme : son imagination. Partant de là, et sachant que Vinci était aussi un scientifique, il avait une imagination qui se souciait grandement de la faisabilité.

Le démarche qui consiste à bâtir la théorie, oui, on pourrait la décrire comme telle, mais je dirai surtout qu'il s'agit de l'ajout d'hypothèses ad hoc, ce qui est par ailleurs caractéristique du délire psychotique ou des personnalités peu ouvertes à la nouveauté. Lorsque la réalité vient démentir le psychotique délirant, celui-ci reformule le délire de telle sorte à le rendre cohérent avec les observations ou les faits qu'on lui oppose... :)

Je constate simplement que les révolutions scientifiques ont la plupart du temps été opérées en opposition avec la méthode qui avait officiellement cours : les preuves de la relativité se sont étayées bien après la popularité et la reconnaissance effective de cette théorie. En réalité, une révolution scientifique correspond toujours à un changement de paradigme, et les observations postérieures, se multipliant, ont bel et bien lieu à postériori.

Je pense ne serait-ce qu'à la sérendipité qui est une sacré épine dans le pieds pour quiconque aimerait théoriser le progrès scientifique (comme Popper ou d'autres). Je dirai même plus : la Sérendipité (le fait de tomber sur une découverte innovante par hasard) est la preuve que le progrès scientifique réel ne se théorise pas et ne le sera jamais.

La relativité n'est pas une pure construction dénuée de sens et détachée des théories passées. La différence entre la preuve observée et la démonstration théorique se fait par les limites de chacune : la preuve observée dépend grandement des avancées technologiques quand la démonstration théorique (en tout cas, celle dont nous parlons ici) n'est limité que par la logique du système dans lequel il est inscrit (les mathématiques). C'est une forme d'imagination si tu le veux, dans la mesure où un chercheur trouve ce qui n'a pas encore été à partir de ce qui existe. Mais c'est une imagination bridée par la rigueur, donc ce qu'on appellerait plutôt un raisonnement.

Tu as raison, les révolutions scientifiques correspondent souvent à des changements de paradigme. Mais elles n'infirment pas toujours les paradigmes précédents. Pour continuer sur notre exemple de la relativité, la relativité n'infirme pas le travail de Newton, elle permet simplement d'élargir des résultats qui étaient en partie erronés quand ils sont pris dans un cadre précis, ici les référentiels. De même, la physique quantique n'infirme pas la relativité, elle explique simplement à une autre échelle d'autres choses.

Il n'empêche que nous gagnerions peut-être à être plus précis dans notre raisonnement, je pense, en distinguant deux périodes. La première correspondrait à une époque, plus ancienne, où la théorie dépend de l'observation. Continuons sur notre exemple : Newton décrit la gravitation en fonction de ce qu'il voit et tente de le décrire mathématiquement en cherchant à le généraliser. Einstein, lui, correspond à une période autre où les objets dont il parle ne sont pas observables (à l'époque où il y réfléchit). Bref, nous avons une période scientifique où la description précède la formalisation quand l'autre formalise avant de l'observer, ce constat étant extrême dans le cas de la mécanique quantique. En cela, oui, le rôle de l'imagination semble plus important à cette époque-ci, dans la mesure où il s'agit d'interpréter des équations, ce qui est clairement visible par le large débat qui a tourné autour de la mécanique quantique.

Autrement dit, et si je comprends bien ce que tu entends par la preuve que le progrès scientifique réel ne se théorise pas et ne le sera jamais, tout ceci annule ta preuve puisque le progrès, ou plutôt la découverte (suite, en général, à des problèmes ou des irrégularités qui font tiquer les scientifiques), dépend largement de la théorie, du formel, aujourd'hui. Actuellement, le boulot consiste d'abord à théoriser quelque chose de façon suffisamment cohérente pour justifier de chercher à le prouver par l'observation. Et c'est tout à fait logique quand tu songes au fait que tu ne peux pas trouver une preuve si tu ne sais pas ce que tu cherches et comment tu dois le faire (dans le cas, par exemple, des recherches dans les synchrotrons), mais c'est vrai aussi de l'échelle la plus grande qu'est l'univers (l'équation d'Einstein prédit l'existence d'objets de type "trou noir").

Est-ce que tu veux dire que les génies seraient simplement catalogués par leurs contemporains parce que trop originaux, marginaux, hors du commun? Il s'agirait donc uniquement de perspective ou de représentation sociale, et je suis bien d'accord, cela est sans aucun conteste relié. Mais cela ne s'oppose pas frontalement à ma mini-théorie, car les conceptions de la folie dépendent elles aussi d'une représentation sociale.

Je pense ne serait-ce qu'à l'homosexualité (qui est l'exemple le plus frappant) qui aura sans aucun doute poussé certains génies dans la marginalité et finalement, la créativité qu'on leur aura connu (Arthur Rimbaud ou encore le comte de Lautréamont).

Folie et génie sont des dérivées directes de ce que nous considérons comme étant la norme. C'est vrai aussi du marginal, de l'original, et de tous les termes qui font référence à des personnes qui sont définis comme étant "en dehors de la norme". Tu cites l'exemple de Rimbaud, et donc de Verlaine. En effet, si tu as une façon de vivre ou d'être qui n'est pas forcément "normale" et que celle-ci est refusée par les autres, il est tout à fait possible de mal le vivre. Bref, de tomber dans le mal-être.

Mais qu'en conclure, dans ce cas ? Est-ce à dire, comme le dirait Sparrow en réponse à Turner qui dit, textuellement, "ou bien c'est de la folie, ou bien c'est du génie", "que ce qui est étonnant, c'est que ces deux qualités vont bien souvent ensembles" ? Bref, folie et génie ne seraient que deux faces de la même pièce ? Peut-être. Mais cela doit faire face au problème le plus évident : pourquoi, dans ce cas, tous les "fous" ne sont pas des génies, et tous les génies ne sont pas fous ? Il est possible de s'en sortir en prétextant l'existence de différentes formes de folie, une seule menant à être génial.

Je vois plusieurs problèmes à une telle théorie. Le premier, c'est de savoir ce qu'est la folie et ce qu'est le génie, véritablement. Le deuxième, c'est de savoir si ces définitions se justifient. Le troisième, que je cite au-dessus, c'est d'en connaître les causes, et donc de savoir si elle existe "la folie" ou "des folies", ou "le génie" ou "des génies". La solution la plus classique pour sortir de ces difficultés est la notion de talent : en effet, dès lors que quelqu'un trouve quelque chose pour laquelle il est doué, ou pour laquelle il est particulièrement intéressé, il aura tendance à s'investir grandement dans cela. Plus cet intérêt est précoce, plus il aura de l'aisance. En ce cas, on peut élargir à tout le monde la notion de génie, faisant de chacun un génie en puissance. Le problème qui se pose, c'est d'expliquer pourquoi, à degré d'intérêt égal, donc en supposant un investissement égal des deux personnes, l'un se distingue de l'autre tôt ou tard. C'est là où ça devient très complexe. Pourquoi Einstein est Einstein, et surtout, pourquoi n'est-ce pas l'autre qui est Einstein ? Fausse question dans laquelle on peut se perdre que voici. La solution à tout ça réside, effectivement, dans la représentation sociale, ou plutôt, dans l'intérêt des résultats pouvant être obtenus. Pour mieux le comprendre, je te propose de sortir du cadre scientifique.

Prenons deux sportifs. L'un est footballeur, l'autre est un joueur de curling. Tous les deux très doués dans leur sportif respectif. Pourquoi l'un sera glorifié et connu quand l'autre sera un inconnu, avec un talent égal ? C'est que le football est vu comme un sport plus important, socialement parlant. La raison pour laquelle Einstein est Einstein, c'est-à-dire est connu à ce point-là et est glorifié pour le fait qu'il soit si doué, c'est qu'il a réussi à trouver non seulement des résultats qui sont d'une extrême importance dans les conséquences, mais aussi que ces résultats ne sont pas le fruit d'un simple hasard, d'une découverte hasardeuse, vu le nombre de ces résultats. Autrement dit, Einstein n'a pas forcément été plus génial que quelqu'un d'autre, il l' a peut-être seulement été dans des domaines qui étaient essentiels et il s'est montré le plus doué dans ce domaine. En plus de l'image, inédite d'ailleurs, d'un scientifique connu du grand public de façon aussi importante.

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Membre, Posté(e)
Dompteur de mots Membre 1 842 messages
Forumeur activiste‚
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Quel(s) sont selon vous les rapports de la Folie et du Génie? A vrai dire j'ai une théorie assez particulière qui me tarabuste à ce sujet : puisque d'une part il arrive que nous ayons raison par l'effet du hasard, et que certains preuves viennent ensuite nous donner raison, pourquoi n'envisage-t-on pas que les êtres humains, même géniaux, n'évoluent pas simplement dans une espèce de délire psychotique ou une obsession dont ils ne sortent pas, et que cela passe pour une motivation exceptionnelle, tandis que les évènements à venir (expériences scientifiques, preuves, etc...) finiraient fortuitement par leur donner raison?

Il y a une proximité naturelle entre le délire psychotique et le génie de ce que dans les deux cas, le sujet s'accroche à une idée dont il est, pour une raison quelconque, convaincu envers et contre tous. La différence est que dans le cas du psychotique réel, cette idée est improductive alors que dans le cas du génie, elle est productive, c'est-à-dire porteuse d'une quelconque valeur culturelle.

Mon petit doigt me dit que les études sur les caractéristiques mentales des génies sont à ce titre quelque peu biaisées. On peut reconnaître des traits propres aux psychotiques chez les génies sans qu'ils n'en aient pour autant l'aspect pathologique, ce qui fait toute la différence. La psychiatrie n'est pas une science absolue: elle est plutôt relative à une pratique clinique, donc à l'état subjectif de l'indivdu pris dans son tout.

Cela ne corroborerait-il pas certaines affirmations selon lesquelles l'imagination est plus décisive que l'expérience pour devenir un théoricien d'exception (Albert Einstein)?

Certes, et il n'est pas le seul à le dire, mais l'imagination n'est pas l'apanage de la folie, du moins pas au sens de "faculté de trouver des solutions originales à des problèmes".

***

Soit dit en passant, l'exemple de Nietzsche est ici purement spéculatif. Nietzsche n'avait pas un problème avec les femmes: seulement, il avait une vision singulière de leur devenir et secundo, il n'était pas particulièrement intéressé par la vie conjugale. Il n'eût apparemment qu'un seul grand amour, Lou Salomé, qui fut un échec. Il n'y a pas de folie là-dedans.

Idem pour son père: le lien que tu traces est purement spéculatif. De plus, la philosophie d'un homme ne se réduit pas à la seule psychologie de son auteur. De toute façon, vu le nombre d'hommes qui cherchent à faire revivre leur papa...

Quant à sa folie de fin de vie, les thèses les plus couramment admises pour l'expliquer sont les suites d'une syphillis, ou alors les suites d'une générescence cérébrale due à une maladie génétique (ou à une prédisposition pour le cancer du cerveau), la même dont aurait souffert son père et dont celui-ci serait d'ailleurs décédé.

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Membre, If you don't want, you Kant..., Posté(e)
deja-utilise Membre 5 943 messages
If you don't want, you Kant...,
Posté(e)

Ce qui est sûr, c'est que nous ne sommes pas égaux! Quelque soit le point de vue.

Si par hasard un être humain, a une caractéristique favorable et qui l'avantage dans le domaine qui le motive, alors celui-ci fera montre d'une réussite supérieure à un individu lambda, peu importe le domaine, artistique, sportif, littéraire, créatif ou scientifique. Au vu du nombre d'humain sur cette planète, il n'est donc pas rare qu'une personne cumule plusieurs traits avantageux dans sa tâche/occupation, procurant une cercle vertueux, que plus on s'y adonne et plus on y arrive facilement, décuplant les possibilités, et en dépassant de beaucoup un être ordinaire, même très intéressé! Le sport est remarquable pour défendre cette thèse.

Sans doute parallèlement, ces attributs peuvent, par une sorte de jeu d'équilibre, avoir pour conséquence "néfaste" de défavoriser d'autres composantes de l'individu, et on remarquera d'autant plus ces faiblesses que parallèlement il aura des points forts.

Personnellement, ce que j'avais remarqué chez les génies ( scientifiques ), c'est une vie en dehors de leur passion, leur vie personnelle, très perturbée, chaotique, non conventionnelle ou tragique pour la plupart.

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Membre, Posté(e)
mustard Membre 161 messages
Baby Forumeur‚
Posté(e)

Ce qui est sûr, c'est que nous ne sommes pas égaux! Quelque soit le point de vue.

Si par hasard un être humain, a une caractéristique favorable et qui l'avantage dans le domaine qui le motive, alors celui-ci fera montre d'une réussite supérieure à un individu lambda, peu importe le domaine, artistique, sportif, littéraire, créatif ou scientifique. Au vu du nombre d'humain sur cette planète, il n'est donc pas rare qu'une personne cumule plusieurs traits avantageux dans sa tâche/occupation, procurant une cercle vertueux, que plus on s'y adonne et plus on y arrive facilement, décuplant les possibilités, et en dépassant de beaucoup un être ordinaire, même très intéressé! Le sport est remarquable pour défendre cette thèse.

Sans doute parallèlement, ces attributs peuvent, par une sorte de jeu d'équilibre, avoir pour conséquence "néfaste" de défavoriser d'autres composantes de l'individu, et on remarquera d'autant plus ces faiblesses que parallèlement il aura des points forts.

Personnellement, ce que j'avais remarqué chez les génies ( scientifiques ), c'est une vie en dehors de leur passion, leur vie personnelle, très perturbée, chaotique, non conventionnelle ou tragique pour la plupart.

Quel meilleur exemple que la vie d'alan Turing qui après 50 ans d'Anonymité a été réhabilité.

http://fr.wikipedia.org/wiki/Alan_Turing

Un très beau film sur son génie.

http://www.allocine.fr/film/fichefilm_gen_cfilm=198371.html

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Membre, If you don't want, you Kant..., Posté(e)
deja-utilise Membre 5 943 messages
If you don't want, you Kant...,
Posté(e)

Quel meilleur exemple que la vie d'alan Turing qui après 50 ans d'Anonymité a été réhabilité.

Je pensais entre autre à lui en écrivant les lignes au-dessus, mais pas uniquement Gödel, Freud, Galois ou Nietzsche par exemples ont eu leur lot de tourments.

Un très beau film sur son génie.

http://www.allocine....ilm=198371.html

J'ai regardé la bande annonce, mais connaissant un peu sa vie et le projet Enigma, le moins que l'on puisse dire, c'est que le film est très édulcoré, pour ne pas dire exagéré, voire mensonger, Turing était homosexuel et relativement renfermé, à l'opposé du personnage présenté, et le cassage du code aura demandé la participation d'innombrables personnes dont Turing. Ce qui n'enlève en rien son génie, et sa supériorité cognitive, une anecdote sur lui que j'ai retenu, c'est qu'à une des rares réceptions où il est venu, une personne lui aurait lancé le défit de réciter un roman qu'il avait lu une fois 20 ans auparavant, et notre jeune homme s'est exécuté, ligne après ligne page après page, jusqu'à la 5ième où le lanceur de défi jeta l'éponge, bluffé par cette exceptionnelle mémoire, qui n'était que l'un de ses dons.

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Invité Quasi-Modo
Invités, Posté(e)
Invité Quasi-Modo
Invité Quasi-Modo Invités 0 message
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La relativité n'est pas une pure construction dénuée de sens et détachée des théories passées. La différence entre la preuve observée et la démonstration théorique se fait par les limites de chacune : la preuve observée dépend grandement des avancées technologiques quand la démonstration théorique (en tout cas, celle dont nous parlons ici) n'est limité que par la logique du système dans lequel il est inscrit (les mathématiques). C'est une forme d'imagination si tu le veux, dans la mesure où un chercheur trouve ce qui n'a pas encore été à partir de ce qui existe. Mais c'est une imagination bridée par la rigueur, donc ce qu'on appellerait plutôt un raisonnement.

Et je n'oublie pas qu'Einstein, à la fin de sa vie, était dans l'incapacité totale d'accepter les résultats de la nouvelle physique (la mécanique quantique) dont les principes fondamentaux lui semblaient violer l'évidence. Il aurait recherché une explication meilleure que la MQ jusqu'à ses derniers instants sur son lit de mort.

Tu as raison, les révolutions scientifiques correspondent souvent à des changements de paradigme. Mais elles n'infirment pas toujours les paradigmes précédents. Pour continuer sur notre exemple de la relativité, la relativité n'infirme pas le travail de Newton, elle permet simplement d'élargir des résultats qui étaient en partie erronés quand ils sont pris dans un cadre précis, ici les référentiels. De même, la physique quantique n'infirme pas la relativité, elle explique simplement à une autre échelle d'autres choses.

C'est intéressant ce que tu affirmes, mais cela n'est-il pas contradictoire avec l'idée que le progrès scientifique s'observe sur un mode hypothético-déductif qui consiste à réfuter les premières théories par les secondes? Je suis pour ma part fasciné par le succès des sciences et tiraillé entre la nécessité de sauver la raison ou la rationalité, ce qui est absolument nécessaire pour éviter de sombrer dans la barbarie, et donc conserver un esprit collectif mêlé de dialogue et de compromis, et la difficulté presque insurmontable de tenir jusqu'au bout une définition ou une vision particulière de la rationalité, en dehors de l'assentiment général qu'elle pourrait susciter auprès d'une civilisation démocratique.

L'analyse de Popper, bien que brillante, me paraît désespérément insuffisante, bien que je cautionne l'objectif qui consiste à poser clairement le problème de la démarcation, et ainsi sauvegarder le meilleur au détriment du pire. Aucun des critiques ultérieures (Putnam, Chalmers, Kuhn, Feyerabend, etc...) ne me paraît non plus arriver à une solution intellectuellement satisfaisante, bien que je ne maîtrise pas forcément tout des concepts qu'ils tentèrent de développer.

Il n'empêche que nous gagnerions peut-être à être plus précis dans notre raisonnement, je pense, en distinguant deux périodes. La première correspondrait à une époque, plus ancienne, où la théorie dépend de l'observation. Continuons sur notre exemple : Newton décrit la gravitation en fonction de ce qu'il voit et tente de le décrire mathématiquement en cherchant à le généraliser. Einstein, lui, correspond à une période autre où les objets dont il parle ne sont pas observables (à l'époque où il y réfléchit). Bref, nous avons une période scientifique où la description précède la formalisation quand l'autre formalise avant de l'observer, ce constat étant extrême dans le cas de la mécanique quantique. En cela, oui, le rôle de l'imagination semble plus important à cette époque-ci, dans la mesure où il s'agit d'interpréter des équations, ce qui est clairement visible par le large débat qui a tourné autour de la mécanique quantique.

Je ne suis pas trop sûr de ton points de vue : à vrai dire, le commencement de la science moderne se situant à l'époque supposée de Galilée, n'oublions pas que ce sont des expériences de pensée plutôt que des expériences réelles qui auront été décisives! Entre les pères de l'Eglise, qui auraient voulu sauver une vision géocentrique (conforme aux Ecritures telles qu'ils les comprenaient), et de Galilée ou Copernic qui voulaient l'Univers centré sur le soleil (héliocentrisme), aucun des deux n'avait finalement raison, ce qui me paraît être d'une grande ironie!

A quel instant situerais-tu exactement ce renversement? Pour généraliser la gravitation, il fallait l'idée théorique préalable que les cieux seraient unis avec la gravité terrestre, que les deux phénomènes de la pomme qui tombe et des mouvements des planètes obéissent aux mêmes lois. Logiquement, les deux étaient bien distincts, et c'est bien par un artifice théorique et mathématique que ces classes de phénomènes se sont retrouvées sous la même bannière théorique.

Autrement dit, et si je comprends bien ce que tu entends par la preuve que le progrès scientifique réel ne se théorise pas et ne le sera jamais, tout ceci annule ta preuve puisque le progrès, ou plutôt la découverte (suite, en général, à des problèmes ou des irrégularités qui font tiquer les scientifiques), dépend largement de la théorie, du formel, aujourd'hui. Actuellement, le boulot consiste d'abord à théoriser quelque chose de façon suffisamment cohérente pour justifier de chercher à le prouver par l'observation. Et c'est tout à fait logique quand tu songes au fait que tu ne peux pas trouver une preuve si tu ne sais pas ce que tu cherches et comment tu dois le faire (dans le cas, par exemple, des recherches dans les synchrotrons), mais c'est vrai aussi de l'échelle la plus grande qu'est l'univers (l'équation d'Einstein prédit l'existence d'objets de type "trou noir").

Effectivement pour les synchrotons ou les gravitons (à une autre époque), la théorie doit bel et bien présupposer l'existence de ces objets, sinon comment pourrait-elle les chercher, et comment saurait-elle quoi chercher? Dans le fond, que les théories scientifiques soient ou non le reflet d'une réalité externe et indépendante de notre conception du monde, l'objet est toujours présupposé de façon théorique avant de pouvoir être perçu de façon pratique et concrète : contrairement d'ailleurs aux préjugés de beaucoup de scientifiques!

Les faits ne sont peut-être pas tous construits, mais nous ne pouvons nier qu'un certain nombre de faits bel et bien scientifiques semblent relever d'une pure construction conceptuelle!

Je vois plusieurs problèmes à une telle théorie. Le premier, c'est de savoir ce qu'est la folie et ce qu'est le génie, véritablement. Le deuxième, c'est de savoir si ces définitions se justifient. Le troisième, que je cite au-dessus, c'est d'en connaître les causes, et donc de savoir si elle existe "la folie" ou "des folies", ou "le génie" ou "des génies". La solution la plus classique pour sortir de ces difficultés est la notion de talent : en effet, dès lors que quelqu'un trouve quelque chose pour laquelle il est doué, ou pour laquelle il est particulièrement intéressé, il aura tendance à s'investir grandement dans cela. Plus cet intérêt est précoce, plus il aura de l'aisance. En ce cas, on peut élargir à tout le monde la notion de génie, faisant de chacun un génie en puissance. Le problème qui se pose, c'est d'expliquer pourquoi, à degré d'intérêt égal, donc en supposant un investissement égal des deux personnes, l'un se distingue de l'autre tôt ou tard. C'est là où ça devient très complexe. Pourquoi Einstein est Einstein, et surtout, pourquoi n'est-ce pas l'autre qui est Einstein ? Fausse question dans laquelle on peut se perdre que voici. La solution à tout ça réside, effectivement, dans la représentation sociale, ou plutôt, dans l'intérêt des résultats pouvant être obtenus. Pour mieux le comprendre, je te propose de sortir du cadre scientifique.

Prenons deux sportifs. L'un est footballeur, l'autre est un joueur de curling. Tous les deux très doués dans leur sportif respectif. Pourquoi l'un sera glorifié et connu quand l'autre sera un inconnu, avec un talent égal ? C'est que le football est vu comme un sport plus important, socialement parlant. La raison pour laquelle Einstein est Einstein, c'est-à-dire est connu à ce point-là et est glorifié pour le fait qu'il soit si doué, c'est qu'il a réussi à trouver non seulement des résultats qui sont d'une extrême importance dans les conséquences, mais aussi que ces résultats ne sont pas le fruit d'un simple hasard, d'une découverte hasardeuse, vu le nombre de ces résultats. Autrement dit, Einstein n'a pas forcément été plus génial que quelqu'un d'autre, il l' a peut-être seulement été dans des domaines qui étaient essentiels et il s'est montré le plus doué dans ce domaine. En plus de l'image, inédite d'ailleurs, d'un scientifique connu du grand public de façon aussi importante.

Je cautionne totalement ton dernier paragraphe : les gens que nous considérons comme supérieurement intelligents sont simplement dotés d'une approche et une façon d'être au monde qui leur permet le plus souvent, dans des conditions optimales exclusivement, d'obtenir de meilleurs résultats dans certains domaines culturellement valorisés, et donc valorisants. Si nous étions un peuple qui valorisait plus que tout au monde la gymnastique, les surdoués seraient les contorsionnistes!

Je possède par ailleurs une définition bien particulière de la Folie et du Génie : je dirai qu'il faut raisonner au niveau le plus fondamental. La Folie c'est à mes yeux, l'exacerbation d'un trait de caractère ou d'une fonction cognitive (entraînant donc un déséquilibre), doublée de la chronicité et/ou du systématisme dans la façon de fonctionner selon une structure singulière, de sorte à causer une souffrance plus ou moins grave et/ou durable à celui qui en souffre et/ou à son entourage. Enfin, le dernier critère devra être que ce trait de caractère renvoie l'individu commun et "équilibré" (cette notion étant relative), vers un aspect inavouable de son existence.

Par exemple, le phobique est celui qui s'effraye au-delà du raisonnable et en dépit de toute raison valable (p.ex. peur des araignées ou des ascenseurs), ce qui nous renvoie à l'expression d'une peur panique que nous trouvons ridicule (simplement parce que nous avons appris qu'il ne fallait pas montrer trop ouvertement ses peurs). C'est le mécanisme de défense de la peur qui s'enraye pour se fixer sur un objet (araignée, serpents) et devenir systématique et/ou chronique.

Idem avec le psychotique dont l'imagination est tellement exacerbée que sa raison n'arrive plus à temporiser ses délires et/ou ses perceptions. Il nous renvoie (peut-être, c'est là une hypothèse) vers cet aveuglement, inavouable socialement pour beaucoup, que nous pouvons parfois avoir lorsque par mauvaise foi nous nous accrochons envers et contre tout à nos idées, bien qu'elles ne se tiennent pas. De façon générale, un individu n'aime pas qu'on lui fasse remarquer qu'il utilise un mécanisme de défense, exactement comme nous n'aimons pas qu'on nous fasse remarquer que nous sommes de mauvaise foi, que cela soit vrai ou non d'ailleurs.

Le Génie à mes yeux, c'est celui dont toutes les fonctions cognitives sont exacerbées en même temps. Même si cela reste une hypothèse, elle me semble se tenir en rapport à mes connaissances personnelles sur le sujet.

Il y a une proximité naturelle entre le délire psychotique et le génie de ce que dans les deux cas, le sujet s'accroche à une idée dont il est, pour une raison quelconque, convaincu envers et contre tous. La différence est que dans le cas du psychotique réel, cette idée est improductive alors que dans le cas du génie, elle est productive, c'est-à-dire porteuse d'une quelconque valeur culturelle.

Mon petit doigt me dit que les études sur les caractéristiques mentales des génies sont à ce titre quelque peu biaisées. On peut reconnaître des traits propres aux psychotiques chez les génies sans qu'ils n'en aient pour autant l'aspect pathologique, ce qui fait toute la différence. La psychiatrie n'est pas une science absolue: elle est plutôt relative à une pratique clinique, donc à l'état subjectif de l'indivdu pris dans son tout.

Certes, et il n'est pas le seul à le dire, mais l'imagination n'est pas l'apanage de la folie, du moins pas au sens de "faculté de trouver des solutions originales à des problèmes".

Tout à fait, mais la productivité de l'idée aura-t-elle vraiment été anticipée par le Génie en question (cf. Einstein), sachant que d'éventuelles preuves matérielles ne leur serait pas passées inaperçues? Je rappelle à toutes fins utiles qu'il était choquant d'imaginer son absence de remise en question face à l'avènement de la MQ. Lui aussi d'ailleurs (Einstein) avait principalement théorisé sa relativité générale et restreinte à partir d'expériences de pensée.

Niels Bohr et d'autres ont eu par la suite l'air de lui donner tort, un peu comme Galilée s'était vu contredit par Einstein (il n'y aurait pas de centre de l'Univers). Comment auraient-ils pu savoir qu'ils avaient raison, puisque en toute rigueur et selon toute idéologie progressistes, nous savons dorénavant qu'ils avaient eux aussi tort? Galilée et Einstein avaient tort, nous oublions trop souvent de le dire : le Soleil n'est pas le centre de l'Univers, et la violation des inégalités de Bell démontre (entre autres), qu'il n'y a pas de solutions de type EPR aux phénomènes de l'intrication quantique.

Comment auraient-ils donc pu s'auto-suggérer qu'ils avaient parfaitement raison sinon par aveuglement et fermeture d'esprit?

Soit dit en passant, l'exemple de Nietzsche est ici purement spéculatif. Nietzsche n'avait pas un problème avec les femmes: seulement, il avait une vision singulière de leur devenir et secundo, il n'était pas particulièrement intéressé par la vie conjugale. Il n'eût apparemment qu'un seul grand amour, Lou Salomé, qui fut un échec. Il n'y a pas de folie là-dedans.

Idem pour son père: le lien que tu traces est purement spéculatif. De plus, la philosophie d'un homme ne se réduit pas à la seule psychologie de son auteur. De toute façon, vu le nombre d'hommes qui cherchent à faire revivre leur papa...

Quant à sa folie de fin de vie, les thèses les plus couramment admises pour l'expliquer sont les suites d'une syphillis, ou alors les suites d'une générescence cérébrale due à une maladie génétique (ou à une prédisposition pour le cancer du cerveau), la même dont aurait souffert son père et dont celui-ci serait d'ailleurs décédé.

Tu fais bien de me parler de ces explications alternatives.

Ce qui est sûr, c'est que nous ne sommes pas égaux! Quelque soit le point de vue.

C'est vrai. Je dirai que la meilleure considération qu'on puisse se faire à ce sujet a été donnée par Jedino, c'est à dire qu'il faut comprendre la relativité de toute forme de supériorité. La supériorité est toujours isolée et locale, dépendante d'un contexte particulier. Chez les chasseurs/cueilleurs il importait peu de connaître par coeur les tables logarithmiques, et la force physique, le courage, devaient être des valeurs clés!

Dans la réalité du quotidien, nous sommes, entre les humains, bien plus proches d'une situation papier-pierre-ciseau où chaque type de personnalité peut, selon le contexte et la situation, prendre l'avantage sur l'autre. C'est une situation circulaire plutôt qu'une situation de domination. Toute qualité apporte son lot de défauts, et il en va de même avec l'intelligence!

Comme j'aime souvent à le dire, les gens les plus intelligents sont en réalité ceux qui disent les plus grosses bêtises : lorsqu'un cancre affirme une énormité comme une vérité éternelle, il y aura toujours un intello à lunettes pour lui expliquer que ce n'est pas ainsi que les choses se passent! Quand c'est Albert Einstein ou Niels Bohr qui affirment une énormité, cela met parfois des siècles avant qu'on apporte la preuve du contraire!... cool.gif

Quel meilleur exemple que la vie d'alan Turing qui après 50 ans d'Anonymité a été réhabilité.

http://fr.wikipedia....iki/Alan_Turing

Un très beau film sur son génie.

http://www.allocine....ilm=198371.html

Merci pour cette contribution. Cela donne envie d'aller le voir!

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deja-utilise Membre 5 943 messages
If you don't want, you Kant...,
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C'est vrai. Je dirai que la meilleure considération qu'on puisse se faire à ce sujet a été donnée par Jedino, c'est à dire qu'il faut comprendre la relativité de toute forme de supériorité. La supériorité est toujours isolée et locale, dépendante d'un contexte particulier. Chez les chasseurs/cueilleurs il importait peu de connaître par coeur les tables logarithmiques, et la force physique, le courage, devaient être des valeurs clés!

Je verrai plus volontiers les choses comme fonctionnant sur le principe de la sélection naturelle, où des caractères avantageux vont donner de meilleures chances dans la vie, qui dépendra d'un contexte, d'une histoire personnelle, de hasards, de rencontre, d'expériences, d'un cadre/milieu de vie, de choix, etc...

Il est indéniable qu'il existe des gens extrêmement doués, qui n'exerceront jamais leur talents, car leur parcours de vie ne leur aura pas permis de le faire!

Il ne faut pas oublier que personne n'est irremplaçable ou indispensable, ce qu'un humain peut faire, un autre pourrait le faire, certes pas avec la même aisance, facilité, le même charisme, sans doute pas tout le monde non plus, nous ne sommes pas interchangeables, mais pas absolument unique. Si Einstein n'avait pas existé, d'autres auraient fini par y parvenir, ce n'était qu'une question de temps, Poincaré pour la relativité, et Hertz et Planck pour les quantas avaient déjà bien dégagé la route, A. Einstein était là au bon endroit et au bon moment, ce qui est loin d'être négligeable.

Pour ce qui concerne la supériorité, qui ne se limite pas à l'intelligence telle qu'on l'entend habituellement, on peut facilement faire l'expérience avec des gens de notre entourage, et remarquer sans prétention, qu'on surpasse certaines personnes dans tous les domaines, on peut donc être "supérieur" de façon large et étendue. Ce que je laissais entendre, c'est qu'il semblait que les génies qui réussissent mieux que les autres dans bien des domaines, ont par une sorte de jeu d'équilibre fortuit, une vie personnelle bien plus tordues que la moyenne des gens, le paramètre temps étant certainement crucial dans ce constat, car de se consacrer "corps et âme" dans une tâche se fait au détriment du reste en général, comme pour nombre de passionnés.

Dans la réalité du quotidien, nous sommes, entre les humains, bien plus proches d'une situation papier-pierre-ciseau où chaque type de personnalité peut, selon le contexte et la situation, prendre l'avantage sur l'autre. C'est une situation circulaire plutôt qu'une situation de domination. Toute qualité apporte son lot de défauts, et il en va de même avec l'intelligence!

Oui on peut le voir comme ça, si on l'étend à toute l'humanité, chacun se spécialisant dans une branche plus qu'une autre depuis que l'homme est homme, néanmoins, certains ont un esprit plus universel que d'autres, et dans une situation de nécessité, nous ne seront pas égaux dans notre démarche et nos chances de réussite.

J'ai même plusieurs fois constaté que mêmes des experts/professionnels, n'étaient pas toujours à la hauteur de leur tâche, comme le mécanicien auto, l'électricien/plombier, le médecin, l'homme politique, le banquier, etc... et qu'un esprit curieux et critique pouvait mettre en échec ces personnes théoriquement et pratiquement, bien sûr pas tous les médecins ou mécaniciens, mais ceux rencontrés dans son entourage proche.

Même la force physique avec l'invention de l'outil, n'est plus un critère "naturel" de discrimination, sans compter la détermination lors d'un combat de rue, la force ou la technique n'étant pas toujours un gage de victoire. Quoi qu'il en soit une personne qui cumule, la force physique, la technique et la volonté sera pratiquement indétrônable, je pense au judo par exemple, mais dans le même ordre de grandeur que les autres rivaux, ce qui ne sera pas nécessairement le cas en comparaison d'un autre sport de combat et encore moins face à une arme à feu.

Comme j'aime souvent à le dire, les gens les plus intelligents sont en réalité ceux qui disent les plus grosses bêtises : lorsqu'un cancre affirme une énormité comme une vérité éternelle, il y aura toujours un intello à lunettes pour lui expliquer que ce n'est pas ainsi que les choses se passent! Quand c'est Albert Einstein ou Niels Bohr qui affirment une énormité, cela met parfois des siècles avant qu'on apporte la preuve du contraire!... cool.gif

C'est vrai que la notoriété influe, mais si l'on considère que tous nos savoirs ne sont que temporaires et perfectibles, il n'y a pas lieu à s'inquiéter outre mesure. C'est pour ça que la philosophie est intéressante, car elle habitue l'esprit à "combattre" avant d'accepter tout ce qui vient.

Tous les génies ne racontent pas des énormités, Euler, un des esprits les plus brillants qui ait existé, ne s'est pas trompé, du moins il ne prenait pas la peine de vérifier l'exactitude de ces travaux, qui se sont révélés justes à ma connaissance. Tout comme les gens ordinaires ne racontent pas que des âneries à tout bout de champ.

Tout le monde peut faire des erreurs, il faut voir où celles-ci tombent et leurs conséquences, fatales pour une carrière prometteuse parfois...moins pour une tarte aux pommes renversées!

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Dompteur de mots Membre 1 842 messages
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Je suis pour ma part fasciné par le succès des sciences et tiraillé entre la nécessité de sauver la raison ou la rationalité, ce qui est absolument nécessaire pour éviter de sombrer dans la barbarie, et donc conserver un esprit collectif mêlé de dialogue et de compromis, et la difficulté presque insurmontable de tenir jusqu'au bout une définition ou une vision particulière de la rationalité, en dehors de l'assentiment général qu'elle pourrait susciter auprès d'une civilisation démocratique.

La rationalité peut fort bien se mettre, en des temps donnés, au service de la barbarie. Il ne suffit que de penser à la 2e Guerre Mondiale, où les génies de la physique se sont employés à mettre au point des armes de destruction toutes plus puissantes les unes que les autres.

La rationalité fixe les moyens de parvenir à quelque chose qu'elle ne peut cependant pas déterminer.

Je possède par ailleurs une définition bien particulière de la Folie et du Génie : je dirai qu'il faut raisonner au niveau le plus fondamental. La Folie c'est à mes yeux, l'exacerbation d'un trait de caractère ou d'une fonction cognitive (entraînant donc un déséquilibre), doublée de la chronicité et/ou du systématisme dans la façon de fonctionner selon une structure singulière, de sorte à causer une souffrance plus ou moins grave et/ou durable à celui qui en souffre et/ou à son entourage. Enfin, le dernier critère devra être que ce trait de caractère renvoie l'individu commun et "équilibré" (cette notion étant relative), vers un aspect inavouable de son existence.

Ma foi, il y a beaucoup d'hommes qui présentent des traits de caractères exacerbés de manière chronique et qui entraînent de la souffrance dans leur entourage, mais qui ne sont pas fous pour autant. Par exemple, les hommes agressifs, violents, attardés, handicapés, anxieux, stupides, ridicules, etc. Un homme marié qui décide de se travestir, ou même de changer de sexe, devrait-il par exemple être considéré comme fou ? Non, car sa démarche, aussi singulière soit-elle, ne l'éjecte pas des normes sociales et ne l'empêche donc pas de mener sa vie et d'aspirer au bien-être de manière autonome.

Le Génie à mes yeux, c'est celui dont toutes les fonctions cognitives sont exacerbées en même temps. Même si cela reste une hypothèse, elle me semble se tenir en rapport à mes connaissances personnelles sur le sujet.

Il y a plusieurs types de génie. Les facultés cognitives du génie musical n'ont pas forcément à être toutes exacerbées.

Tout à fait, mais la productivité de l'idée aura-t-elle vraiment été anticipée par le Génie en question (cf. Einstein), sachant que d'éventuelles preuves matérielles ne leur serait pas passées inaperçues?

Comment auraient-ils donc pu s'auto-suggérer qu'ils avaient parfaitement raison sinon par aveuglement et fermeture d'esprit?

Il ne s'agit pas d'auto-suggestion. Un homme qui a des capacités supérieures au commun des mortels le sait en son fort intérieur. Moi par exemple, je sais que j'ai une aisance hors de l'ordinaire pour la philosophie (ce qui ne fait pas de moi un génie – ou suis-je trop humble pour le dire ?). C'est un sentiment de puissance tout à fait intuitif*. Ce n'est pas quelque chose que l'on construit. Ce que l'on construit, c'est son chemin au travers des structures sociales. Et encore, cela relève aussi d'un certain talent. Quoiqu'il y a bien des génies qui, dénués de talent pour le jeu social, n'en percent pas moins la culture de par la force de leur génie: pensons à un Kafka par exemple, ou à un Nietzsche, des hommes qui demeurèrent à peu près inconnus de leur vivant (cela dit, le cas de Nietzsche est particulier car l'homme était bien engagé dans les réseaux de la société: il avait un bon poste dans une bonne université. Seulement, son génie le portait à même se délester de ce talent pour la vie sociale afin de se consacrer au domaine de son génie).

Évidemment, il y a ceci de paradoxal que se reconnaître une supériorité n’exclut pas que l’on soit quelqu’un qui doute beaucoup. J’irais même jusqu’à dire que cela en est une condition. Car l’homme qui pense avec profondeur le fait précisément parce qu’il doute beaucoup, parce que son angoisse est puissante (enfin, on peut penser que la cause ultime de cette profondeur est une sensibilité singulière qui plonge l’individu dans un monde plus complexe que ses semblables et qui l’oblige donc à penser davantage pour s’en faire une compréhension). Pour cette raison, il y a ceci d’étrange que chez ces hommes, la plus grande humilité d’esprit cohabite avec une certaine arrogance : l’humilité qui vient avec le doute et l’angoisse, avec le sentiment de n’être qu’une créature insignifiante dans l’univers qui doit par conséquent observer les choses avec circonspection et patience, et l’arrogance qui vient avec le sentiment d’avoir justement une conscience plus aigüe que la moyenne des ours pour ces choses. Souvent, l’homme profond doit justement faire preuve d’une humilité supplémentaire afin d’être accepté par les autres – ne serait-ce que pour que ceux-ci lui pardonnent sa profondeur (et ne le taxent pas d’être aveuglé et fermé d’esprit – ce qui arrive toujours dans l’histoire des génies). Ce redoublement d’humilité est évidemment d’un autre type, et relève davantage du jeu social que de la posture existentielle.

* Je ne veux pas dire ici que « tout est donné » à la naissance. Au contraire, il y a nombre d’obstacles qui peuvent s’élever sur la route d’un homme, aussi prédisposé soit-il. Et ce qui aujourd’hui constitue la sève de sa confiance et de sa force pouvait fort bien n’être autrefois que la source de tous ses maux. C’est qu’un homme habité par une telle ferveur intérieure doit d’abord maîtriser cette bête endiablée qu’est son esprit.

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Invité Quasi-Modo
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La rationalité peut fort bien se mettre, en des temps donnés, au service de la barbarie. Il ne suffit que de penser à la 2e Guerre Mondiale, où les génies de la physique se sont employés à mettre au point des armes de destruction toutes plus puissantes les unes que les autres.

La rationalité fixe les moyens de parvenir à quelque chose qu'elle ne peut cependant pas déterminer.

Disons que, si ce n'en est pas une condition suffisante, la rationalité est une condition nécessaire à une société ouverte et tolérante, ce qui est tout à fait indispensable dans le contexte actuel d'une France multiculturelle. Sans rationalité, pas de dialogue, pas de compromis, pas de transparence de la part du pouvoir.

L'arme atomique aura été employée dans le cadre d'une guerre, c'est à dire que le compromis et la dialogue avaient manifestement déjà échoués.

Il faut distinguer la rationalité de la raison théorique et celle de la raison pratique. La raison théorique correspond à une rationalité-squelette, c'est celle qui part des prémisses pour en déduire mécaniquement des conclusions. La raison pratique permet d'engager une réflexion sur les fins de l'action humaine, sur la morale et les valeurs.

Ma foi, il y a beaucoup d'hommes qui présentent des traits de caractères exacerbés de manière chronique et qui entraînent de la souffrance dans leur entourage, mais qui ne sont pas fous pour autant. Par exemple, les hommes agressifs, violents, attardés, handicapés, anxieux, stupides, ridicules, etc. Un homme marié qui décide de se travestir, ou même de changer de sexe, devrait-il par exemple être considéré comme fou ? Non, car sa démarche, aussi singulière soit-elle, ne l'éjecte pas des normes sociales et ne l'empêche donc pas de mener sa vie et d'aspirer au bien-être de manière autonome.

Je pense que tu n'as pas bien saisi mon propos, et c'est en partie dû à une imprécision de ma part.

Que la folie suscite chez le vulgaire un sentiment d'inconfort, c'est bien que son attitude le renvoie vers une dimension intolérable de son existence, c'est pourquoi la folie est profondément et inextricablement liée à l'inavouable, c'est à dire encore au refus de comprendre.

C'est donc qu'elle est intimement liée au ridicule, notion subjective et fluctuante, pour ne pas dire inexistante.

Le cerveau combine et fait interagir un certain nombre de fonctions cognitives, à l'image d'une recette de cuisine (p.ex. un gâteau) dans laquelle chaque aliment se combine avec un autre, dans des proportions harmonieuses, pour permettre le rendu final. Si au lieu d'utiliser 400g de farine tu en utilises 200g, ce n'est pas un problème en soi, mais il faudra également diminuer de moitié la quantité dans laquelle sont présents les autres ingrédients.

C'est pareil pour les fonctions cognitives entre elles : le génie étant celui dont toutes les fonctions cérébrales sont suractivées, et l'idiot celui dont toutes les fonctions cérébrales sont diminuées, le tout devant rester harmonieux, comme un gâteau dans lequel les proportions des aliments sont harmonieuses, mais respectivement de quantité beaucoup plus grande (on obtient un gâteau énorme) ou de quantité beaucoup plus faible (gâteau minuscule).

J'aurai donc plutôt du parler d'atrophie et d'hypertrophie plutôt que d'exacerbation d'un trait cognitif ou d'une fonction mentale, l'individu sain d'esprit étant celui dont toutes les fonctions se compensent et interragissent harmonieusement, (Que le gâteau soit petit ou grand, donc que l'individu soit stupide ou génial, et il demeurera sain d'esprit tant que les aliments sont en proportion harmonieuse).

L'agressivité et la violence pourraient, si elles sont systématiques ou chroniques, s'expliquer par l'atrophie du Surmoi. L'anxiété par l'hypertrophie de la fonction cérébrale de l'observation, notamment des détails, et l'anticipation du danger.

Tout en restant humble, je pense que cette idée se tient.

Il y a plusieurs types de génie. Les facultés cognitives du génie musical n'ont pas forcément à être toutes exacerbées.

C'est possible effectivement que toutes les facultés ne soient pas exacerbées ou hypertrophiées à la fois. C'est pourquoi, peut-être, beaucoup ont aussi un grain de folie.

Il ne s'agit pas d'auto-suggestion. Un homme qui a des capacités supérieures au commun des mortels le sait en son fort intérieur. Moi par exemple, je sais que j'ai une aisance hors de l'ordinaire pour la philosophie (ce qui ne fait pas de moi un génie – ou suis-je trop humble pour le dire ?). C'est un sentiment de puissance tout à fait intuitif*. Ce n'est pas quelque chose que l'on construit. Ce que l'on construit, c'est son chemin au travers des structures sociales. Et encore, cela relève aussi d'un certain talent. Quoiqu'il y a bien des génies qui, dénués de talent pour le jeu social, n'en percent pas moins la culture de par la force de leur génie: pensons à un Kafka par exemple, ou à un Nietzsche, des hommes qui demeurèrent à peu près inconnus de leur vivant (cela dit, le cas de Nietzsche est particulier car l'homme était bien engagé dans les réseaux de la société: il avait un bon poste dans une bonne université. Seulement, son génie le portait à même se délester de ce talent pour la vie sociale afin de se consacrer au domaine de son génie).

Cela rappelle assez en tous cas l'auto-satisfaction ou la calamiteuse intuition. Certainement est-ce là une considération dont il ne faudrait pas abuser! Ce pourrait aussi bien être le cache-sexe d'une obstination ou d'une obsession autrement explicables!

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Membre, If you don't want, you Kant..., Posté(e)
deja-utilise Membre 5 943 messages
If you don't want, you Kant...,
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J'en reviens sur le lien que tu as créé Quasi-Modo,

je me demande dans quelle mesure le génie lui-même apparait, et si c'était à cause du manque d'un trait particulier!

Je m'explique, certains naissent beaux, d'autres forts, d'autres encore riches, choyés, etc.. comme une sorte d'avantage inné, et ceux qui n'auraient pas cette chance naturelle, développeraient une parade, un moyen de compenser, dit autrement, en augmentant substantiellement leur capacité cognitive afin de combler ce manque, qui nourrira leurs vies, qui sera la source de motivation de leur progression fulgurante, même si je n'exclue pas la part de chance/hasard dans le processus.

Et donc, ce que tu rapprocherais de la folie, ne serait que le reflet de ce "traumatisme" psychique né pendant l'enfance, et qui ne ce serait jamais résorbé parfaitement, et ayant pour conséquence de les faire passer pour des gens différents, qu'en penses tu?

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  • 1 an après...
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info.PNG
Source: Conférence sur l'adulte à haut potentiel par Aurélie Simoës-Perlant (dernière page)
Peut-être que ces facteurs évoluent d'après, la définition que l'on donne à l'intelligence (et donc aux génies), le niveau de vie, ou le conditionnement. Mais encore aujourd'hui, la science à du mal à définir l'intelligence (dont les génies).

Quant à la folie, c'est un troubles psychiques sérieux, rendant problématique la vie en société
<< Lorsque s'installent avec persistance des dysfonctionnements psychiques sérieux : perte de contact avec le réel et autrui, vision altérée de l'environnement, incohérence, impossibilité de contrôler ses actes, on peut parler d'aliénation mentale (du latin "alienus", l’étranger). Jugé inadapté à la vie en société, celui qui souffre de ces troubles peut être placé dans un "asile d'aliénés ". On utilise aujourd’hui l’expression moins péjorative d’ " établissement psychiatrique ". De même, on préfère désormais le terme " malades mentaux " à celui d’ " aliénés ".>> (source: http://www.psychologies.com)


Il n'y a pas de lien entre la folie et le génie !
C'est une idée populaire, qui déforme la définition de la folie pour rendre l'intelligence accessible !
Parce que le génie est une image stéréotype des Haut Potentiel Intellectuel (HPI). C'est un stéréotype qui se veut inaccessible pour la majorité de la population. Tandis qu'ici, la folie est synonyme d'atypique, soit d'original !
Autrement dit, il se pourrait qu'on étant original, on soit intelligent.

Cette idée n'est pas absurde, lorsqu'on constate la courbe de gausse: :D okok.png

Mais l'idée est là.

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Le 27/01/2015 à 22:50, Quasi-Modo a dit :

Nous savons que Nietzsche souffrait d'un problème avec les femmes, et qu'il culpabilisait probablement de la mort de son père qu'il cherchait inconsciemment à faire ressusciter sous les traits du surhomme. Il finira ses jours dans la Folie.

Ah bon ?

 

S'il souffrait d'un problème avec les femmes, n'était ce pas plutot parce qu'il était trop sensible et trop profond pour trouver son équivalent ?

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Maroudiji Membre 6 485 messages
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il y a 4 minutes, swam a dit :

S'il souffrait d'un problème avec les femmes, n'était ce pas plutot parce qu'il était trop sensible et trop profond pour trouver son équivalent ?

Trop de sensibilité et être trop profond n'est pas un handicap en amour, au contraire.

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il y a 14 minutes, Maroudiji a dit :

Trop de sensibilité et être trop profond n'est pas un handicap en amour, au contraire.

Je pense exactement le contraire, enfin si on est a la recherche de son ame soeur, si c'est de cet amour la qu'il s'agit.

 

D'ailleurs a prpos de Nietzsche, il est a noter que c'est apres avoir eté rejeté par Lou Andréa Salomé, qui l'a decrit plus tard comme un homme ayant une trés grande sensibilité, qu'il a écrit "ainsi parlait Zarathoustra"

La ou il fait mention du surhomme, un homme qui a surmonté l'homme, l'amour y compris sans doute.

 

 

Modifié par swam
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Membre, 69ans Posté(e)
Maroudiji Membre 6 485 messages
Forumeur expérimenté‚ 69ans‚
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Il y a 3 heures, swam a dit :

Je pense exactement le contraire, enfin si on est a la recherche de son ame soeur, si c'est de cet amour la qu'il s'agit.

D'ailleurs a prpos de Nietzsche, il est a noter que c'est apres avoir eté rejeté par Lou Andréa Salomé, qui l'a decrit plus tard comme un homme ayant une trés grande sensibilité, qu'il a écrit "ainsi parlait Zarathoustra"

La ou il fait mention du surhomme, un homme qui a surmonté l'homme, l'amour y compris sans doute.

L'âme soeur, je l'ai rencontrée depuis bien longtemps, et je sais de quoi je parle. Ce n'est sûrement pas Nietzsche qui me donnera des conseils en la matière.

C'est certainement ça son gros problème : on ne surmonte pas l'homme ! Et on ne surmonte pas l'amour en baisant à droite et gauche. À se conduire ainsi on attrape plutôt des maladies vénériennes et l'on finit comme un minable dans un asile...

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Membre, Posté(e)
zeugma Membre 670 messages
Baby Forumeur‚
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oui mais là où la morale Nietzschéenne n'as pas aboutie, c'est dans la reconfiguration de la relation à l'autre au delà de la prévalence de l'élite, sur le peuple...

ce qui est justifiable pour la masse, n'est que ruine pour ceux qui sont aux dessus...

sa définition du surhomme est assez parlante à ce sujet, et transparaît dans beaucoup de ces textes...

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