Pépé raconte-nous (les mouchoirs japonais)

Ils sont fous ces japonais !

Ce matin un bruit a couru au collège... 
"Il paraît que les japonais se mouchent dans des mouchoirs en papiers qu'ils jettent après usage !"
(Comme nous faisons nous avec le papier toilette !)
Qui a bien pu être à l'origine de cette rumeur loufoque ?

C'était en effet totalement absurde : Nous avions tous nos mouchoirs en tissus à carreaux bien pliés en quatre au fond de nos poches...
Un mouchoir, ça se lave, ça se jette pas ! Ou alors, il faudrait en avoir des dizaines pour les jeter à chaque fois : totalement invraisemblable !

Mais c’est des bouses que je voulais parler, pas des mouchoirs !

La blouse obligatoire. La blouse grise, une institution ! La « blouse de fromager » ! Qui au fur et à mesure des lavages s’éclaircissait... Bien sûr, toute boutonnée sur le devant, (comme sur la photo), on ressemblait un peu à des saucissons ! Mais on avait l’habitude. Et puis il y avait un façon très classe de porter la blouse : entièrement ouverte sur le devant. Ça vous faisait deux pans ballants, battant sur les côtés comme une longue cape ou des ailes. Certain savaient la porter comme ça.  Jouer au pitchat, la blouse ouverte avec des souliers pointu de ville (surtout pas des baskets ni des tennis), ça te vous avait un de ces allures !
Ça mériterait un croquis ! Tiens, j'y vas !
Le copain, Villecroze :  La beauté absolue du shoot en blouse ouverte !

Le garçons, blouse grises, les filles blouses beiges. Mais c’était pas tout, pour elles, les pauvres filles : elles étaient (les internes au moins) carrément en uniforme ! Chemisier blanc et jupe bleu marine plissée ! C’était les deux seules couleurs autorisées pour leur trousseau d’internat !  Souliers bas vernis (sans talons)  et  soquettes blanches On a de la peine à l’imaginer… Mais ce principe d’un uniforme pour les filles, montrait bien que l’on projetait plus, encore à cette époque d’en faire --en dépit de l’instruction donnée-- de parfaites femmes au foyer bien stéréotypées que des femmes personnellement épanouies.

C’est sans doute la mixité qui allait envoyer un grand coup de pied dans cette fourmilière…

Une semaine entière « enfermé », c’était long ! Et ma mère le savait. Qu’est-ce qu’elle n’aurait pas fait pour ses petits ?! Alors, le jeudi, après midi, dès qu’elle le pouvait (après toute sa matinée au magasin de la boulangerie) elle prenait le car pour venir nous faire sortir du collège à Brignoles ! Ça nous faisait un petite demie journée de liberté.  Il lui est même arrivé de venir à Brignoles en vélomoteur ! Vingt kilomètres plus encore vingt pour le retour !
Quand c’était un jeudi de promenade aux Adrets, c’était trop génial : nous, nous allions EN VILLE, et presque toujours au cinéma ! Mais voilà,  quand les copains du lycée qui n’étaient pas sortis allaient eux aussi au cinéma, le jeudi après midi, en rang bien sûr, mais au cinéma, tout de même… Nous qui étions « sortis » pouvions nous faire moins ? Certainement pas ! Nous allions donc voir (avec ma sœur et ma mère), le même film ! Mais nous nous placions dans un autre rangée dans la salle. Une rangé à part. Une rangée pour des spectateurs libres ! (C’est comme ça que j’avais pu me mettre pour Alamo, du côté des filles… Passons !)
Le même film n’avait pas du tout le même goût quand on le voyait du côté libre ! C’était un autre film. Car nous savions qu’à la sortie du cinéma, nous aurions (si le film n’était pas trop long) peut-être un quart d’heure ou une demie-heure  pour aller acheter librement un cahier, un stylo ou un livre à la papeterie de la rue du Docteur Barbaroux.

D’où nous pourrions voir les autres descendre la même rue, pour rentrer au collège, mais en rangs… COMME DES PRISONNIERS !

Même si on était obligés de rentrer à la course avant  les cinq heures fatidiques, je peux vous garantir qu’un jeudi après midi de sortie n’avait absolument rien à voir avec un jeudi où l’on serait allé au cinéma, avec le collège !

Il y avait aussi le Ciné-Club parfois ! Un soir ordinaire de semaine qui en devenait donc exceptionnel ! La fête ! Il fallait qu’il y ait un film intéressant, original… plus ou moins à résonance culturelle, historique… Nous montions en ville en rang pour le film de neuf heures. C’était toujours le même cinéma, sur la Place Caramy, le REX, d’Aime Félix…  Mon père le connaissait bien, Félix. C’était un peu un artiste, il chantait…
« Car je suis né, en plein cœur de la Provence….
Car je suis né, sur les bords du Caramy !
Sous les grands pins les oliviers de ce beau coin de France... »
Un artiste : je l’ai dit…
 Mais le Ciné-Club, C’était surtout pour les profs originaux l'occasion de faire leur numéro devant les élèves ! Ils nous apprenaient aussi à être un peu plus critiques. Nous, les films, on gobait tout ! Eux non, c’était pas pareil. Et à la fin du film, ceux qui avaient quelque chose à dire, montaient sur la scène devant l’écran. Les élèves, même les plus grands, n'y allaient presque jamais. On n'avait rien à dire ! Les profs et les pions, eux, oui. Et l’on avait rapidement l’impression qu’on n’avait pas vu le même film qu'eux !
Kik Douglas venait de nous jouer Van Gogh… Comme je l’ai dit, nous, on avait tout gobé… on avait vaguement  suivi l’histoire… 
Mais Beaudière, lui, un prof d’histoire-géo, un type très très cool, hyper décontracté c’était tout autre chose qu'il avait vu. Une vraie critique que je peux comprendre maintenant. Il nous avait expliqué en quoi Kirk Douglas, jouait plus Kirk Douglas que Van Gogh ! Et que c’était pour ça qu’on l’aimait !
« Vous avez vu Douglas, qui se coiffe devant le miroir ? Le miroir  devant lequel il va plus tard se trancher une oreille ? Vous avez vu qu’il trempait sa brosse dans le bocal du poisson rouge ? Ça c’est du Kirk Douglas, C'est pas du Van Gogh ! »

On restait admiratifs...  Il était vraiment balèze ce Beaudière !

"Mais c’est des bouses que je voulais parler, pas des mouchoirs !"

Vous aurez rectifié de vous même : c'est "blouses" que je voulais dire !

(Après avoir parlé de papier toilette, le lapsus était inévitable !)

Il faut que je précise :

Citation

Et l’on avait rapidement l’impression qu’on n’avait pas vu le même film qu'eux !

Pour nous un film c'était comme la vie et chaque image effaçait la précédente ! L'histoire avançait,  inéluctable, et personne n'y pouvait rien. Pour eux, le film, c'était comme une peinture ils le gardaient tout sous les yeux et la dernière  image, ils pouvaient dire si la toute première --que nous, nous avions parfaitement oubliée!-- l'avait préparée ou pas et pourquoi !... Pour un peu, on aurait cru que c'était eux qui l'avaient fait le film !

Citation

Kik Douglas venait de nous jouer Van Gogh… Comme je l’ai dit, nous, on avait tout gobé… on avait vaguement  suivi l’histoire… etc.

Ces blouses grises ont permis un jeu bien stupide : arracher la petite poche de poitrine en disant : Dewachter habille mieux ! Quelle pub.

il y a 6 minutes, Talon 1 a dit :

Ces blouses grises ont permis un jeu bien stupide : arracher la petite poche de poitrine en disant : Dewachter habille mieux ! Quelle pub.

La vache ! C'est aux Baumettes que t'allais au collège ?

Il y a 1 heure, Blaquière a dit :

La vache ! C'est aux Baumettes que t'allais au collège ?

Non, à La Candélie. Ma commune va créer une annexe de cet asile. Vrai. Il faut dire qu'avec le Center Parc, la clientèle peut en avoir nécessité.

Je réalise que j'ai écrit qu' "on ressemblait à des saucissons comme sur la photo" mais que je l'avais mise que pour le livre des petits, la photo !...

 Alors la voici !

Effectivement, la blouse grise c'était plutôt moche ! mais on était habitués !

La photo est en noir et blanc, mais c'était exactement ce gris-là, les blouses !

C'était une partie de notre identité aussi !...

Ça doit correspondre à la troisième... 1961 je dirais ? Puisque sur la photo de classe de troisième, on y est tous les quatre...

On n'était plus des petits.... la mode était aux petites pipes avec de longs tuyaux... On fumait du Clan. Je ne sais pas si ça existe encore ! Parfois un copain se débrouillait un paquet d'Amsterdamer (hollandais) de contrebande... Ça c'était la grande classe ! Il méritait notre respect à tous !

Lol!

J'ai vécu dans un "école" (maternel au bac!), bien paumée dans tout les sens du terme, qui utilise encore la blouse (sauf qu'elle était bleue pour nous) et l'uniforme exactement comme tu le décris pour les filles! Je ne sais pas pour vous, mais nous (et je parle de ma vie d'internat dans cette école de 1995 à 2003), nous montions les couleurs deux fois par semaine, en rang et avec l'uniforme des pensionnaires de l'armée!

Je suis mittigée encore aujourd'hui sur l'expérience que m'a apporté cette vie bien à part sur tout les points!

Un jour je retrouverai des photos...

Il y a 9 heures, Ambre Agorn a dit :

Lol!

J'ai vécu dans un "école" (maternel au bac!), bien paumée dans tout les sens du terme, qui utilise encore la blouse (sauf qu'elle était bleue pour nous) et l'uniforme exactement comme tu le décris pour les filles! Je ne sais pas pour vous, mais nous (et je parle de ma vie d'internat dans cette école de 1995 à 2003), nous montions les couleurs deux fois par semaine, en rang et avec l'uniforme des pensionnaires de l'armée!

Je suis mittigée encore aujourd'hui sur l'expérience que m'a apporté cette vie bien à part sur tout les points!

Un jour je retrouverai des photos...

Merci de témoigner ! A part les quelques copains qui se manifestent, j'ai moins l'impression de parler dans le vide !

Je vois que tu te poses la question de savoir si ça t'a apporté qq chose ou pas cette vie aujourd'hui considérée presque comme inhumaine de l'internat ! Un esprit de groupe, appartenir à un groupe. Un façon de dépasser un égoïsme primaire ? on pourrait dire... peut-être. C'était pas forcément tout négatif... Il me semble....

Il y a 20 heures, Blaquière a dit :

Je réalise que j'ai écrit qu' "on ressemblait à des saucissons comme sur la photo" mais que je l'avais mise que pour le livre des petits, la photo !...

 Alors la voici !

Effectivement, la blouse grise c'était plutôt moche ! mais on était habitués !

La photo est en noir et blanc, mais c'était exactement ce gris-là, les blouses !

C'était une partie de notre identité aussi !...

Ça doit correspondre à la troisième... 1961 je dirais ? Puisque sur la photo de classe de troisième, on y est tous les quatre...

On n'était plus des petits.... la mode était aux petites pipes avec de longs tuyaux... On fumait du Clan. Je ne sais pas si ça existe encore ! Parfois un copain se débrouillait un paquet d'Amsterdamer (hollandais) de contrebande... Ça c'était la grande classe ! Il méritait notre respect à tous !

 

Tu es où ? À gauche ? 

à l’instant, Ines Presso a dit :

Tu es où ? À gauche ? 

Yes !

il y a 12 minutes, Ines Presso a dit :

Tu es où ? À gauche ? 

Oui !

('Si t'as pas vu )

Là tu descends un peu et au bas de la page tu as tout la classe !

il y a 21 minutes, Blaquière a dit :

Merci de témoigner ! A part les quelques copains qui se manifestent, j'ai moins l'impression de parler dans le vide !

Je vois que tu te poses la question de savoir si ça t'a apporté qq chose ou pas cette vie aujourd'hui considérée presque comme inhumaine de l'internat ! Un esprit de groupe, appartenir à un groupe. Un façon de dépasser un égoïsme primaire ? on pourrait dire... peut-être. C'était pas forcément tout négatif... Il me semble....

Oui, mais toi tu as vécu ça dans les années 60, non? Moi je l'ai vécu hier presque, et cette école vit encore aujourd'hui.

C'est pour ça que je dis que je suis mittigée: je sais qu'il y a beaucoup de choses que je haïssais, des choses terribles, des choses innavouables, mais aussi de tellement de moments marquants pour des enfants, des choses que je n'aurai jamais apprise ailleurs ou dans un autre contexte.

Cela dit, là où j'étais avait l'air bien plus stricte que ce que tu décris!

Alors oui il y a eu du bon et du mauvais. Parfois j'y pense et suivant mon état du moment je penche d'un sens ou d'un autre.

Par contre ce dont je suis sûre, c'est que jamais je ne mettrai mes enfants là-bas: j'ai quand même trouvé mieux comme apprentissage de la vie...et je ne parle pas de l'école publique ou privée d'aujourd'hui, cela va de soi!

Je ´ai connu la blouse qu’en sixième dans un établissement qui accueillait 2000 élèves de la sixième au BTS. Je n’y suis restée qu’une année, c’était horrible pour moi, l’impression d’une usine, même si l’établissement était équipé comme aucun autre établissement, avec un stade sans les gradins, une piscine couverte, une salle de danse et de gym avec parquets et miroirs sur un mur, plus une salle de sport pour le hand et le basket etc. La blouse était à carreaux vichy, une semaine rose et blanche, une semaine bleu et blanche. Je te laisse imaginer la marée humaine dans ces couleurs. Et bien sûr il n’y avait pas de garçons, la mixité est arrivée 2 ans après. 

il y a 2 minutes, Ines Presso a dit :

Je ´ai connu la blouse qu’en sixième dans un établissement qui accueillait 2000 élèves de la sixième au BTS. Je n’y suis restée qu’une année, c’était horrible pour moi, l’impression d’une usine, même si l’établissement était équipé comme aucun autre établissement, avec un stade sans les gradins, une piscine couverte, une salle de danse et de gym avec parquets et miroirs sur un mur, plus une salle de sport pour le hand et le basket etc. La blouse était à carreaux vichy, une semaine rose et blanche, une semaine bleu et blanche. Je te laisse imaginer la marée humaine dans ces couleurs. Et bien sûr il n’y avait pas de garçons, la mixité est arrivée 2 ans après. 

"La blouse était à carreaux vichy, une semaine rose et blanche, une semaine bleu et blanche. Je te laisse imaginer la marée humaine dans ces couleurs"

Une marée de Brigitte Bardot dans les couloirs : effectivement, ça laisse rêveur....

Oh, j'imagine ! j'imagine !....

il y a 33 minutes, Blaquière a dit :

"La blouse était à carreaux vichy, une semaine rose et blanche, une semaine bleu et blanche. Je te laisse imaginer la marée humaine dans ces couleurs"

Une marée de Brigitte Bardot dans les couloirs : effectivement, ça laisse rêveur....

Oh, j'imagine ! j'imagine !....

À mon avis , tu aurais craqué, tu en aurais perdu les yeux et la tête. Par contre je n’ai pas aimé du tout, l’année suivante, je suis partie dans un petit établissement privé où étonnamment nous n’avions pas de blouse. En seconde je suis allée au Lycée de garçons, C’était la référence, le Lycée Théophile Gautier qui était devenu mixte depuis peu, et où les filles étaient en minorité. En plein centre de Tarbes à deux pas de la place principale avec tous ses cafés, et bien sûr, les sorties libres entre deux cours.