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Un monde de solipsisme


Savonarol

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Membre, Esprit de contradiction, 48ans Posté(e)
Savonarol Membre 10 346 messages
48ans‚ Esprit de contradiction,
Posté(e)

Dans un monde où tout est relatif , où la définition de chaque mot " dépend de ce que désire celui qui l'énonce" , ne mettons nous pas là en application les bases d'un monde solipsistique ?

Le solipsisme (du latin solus, seul et ipse, soi-même) est une « attitude » générale pouvant être théorisée sous une forme philosophique et non métaphysique, « […] d'après laquelle il n'y aurait pour le sujet pensant d'autre réalité que lui-même […]1 ». La question ici ne relève d'abord pas de « l'esprit », mais d'une constatation que le « moi », ou l'ego, est la seule manifestation de conscience dont nous ne puissions pas douter (voir Descartes). Seul l'ego peut donc être tenu pour assurément existant et le monde extérieur avec ses habitants n'existe dans cette optique que comme une représentation hypothétique, et ne peut donc pas être considéré, sans abus de langage, autrement que comme incertain. Il pourrait s'agir seulement d'une position épistémologique « constructiviste ». Si on l'envisage aussi sur un plan ontologique, on se rapproche alors quelque peu du « pyrrhonisme » puisque la connaissance de quoi que ce soit d'extérieur à soi-même ne reste qu'une conjecture incertaine.

http://fr.wikipedia.org/wiki/Solipsisme

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Invité Quasi-Modo
Invités, Posté(e)
Invité Quasi-Modo
Invité Quasi-Modo Invités 0 message
Posté(e)

Je vois plusieurs paradoxes dans la formulation même de ta question.

Premièrement, reconnaître l'existence du désir chez ton interlocuteur, n'est-ce pas renier le solipsisme?

Ensuite, parler de désir n'est-ce pas au contraire témoigner qu'il y aurait par là un manque, et donc qu'un instinct naturel nous pousse à postuler l'existence d'un monde extérieur?

Finalement, quel serait l'intérêt de discuter d'un tel sujet, puisque toute discussion suppose d'utiliser un langage commun?

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Invité Quasi-Modo
Invités, Posté(e)
Invité Quasi-Modo
Invité Quasi-Modo Invités 0 message
Posté(e)

Autres questions :

=> Qu'est-ce qu'un "monde solipsistique"? Comment donnerait-on un sens à cette expression sans employer un langage commun? Comment en ferait-on alors l'objet d'un débat?

=> Sachant que le langage n'est pas inné et qu'il a bien fallu l'apprendre, comment pourrait-on redéfinir chaque mot selon notre désir, sinon en utilisant d'autres mots dont le sens nous a été imposé lors de l'apprentissage de la langue?

=> Ne serait-il pas plus adéquat de parler de subjectivisme ou de relativisme plutôt que de solipsisme?

=> etc.. etc..

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Invité Helyza
Invités, Posté(e)
Invité Helyza
Invité Helyza Invités 0 message
Posté(e)

J'ai appris un nouveau mot aujourd'hui, merci beaucoup. =)

Quant à la question, je dois y réfléchir. ^^

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Membre, Posté(e)
Scénon Membre 3 629 messages
Forumeur alchimiste ‚
Posté(e)
J'ai appris un nouveau mot aujourd'hui.

(Et moi, j'ai appris aujourd'hui qu'il est possible à quelqu'un d'intervenir sur ce forum dans vingt-quatre discussions différentes, longues de bon nombre de pages, en moins de quarante minutes! Cela sent un peu la pub, non?...)

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Invité Leveilleur
Invités, Posté(e)
Invité Leveilleur
Invité Leveilleur Invités 0 message
Posté(e)

Dans un monde où tout est relatif , où la définition de chaque mot " dépend de ce que désire celui qui l'énonce" , ne mettons nous pas là en application les bases d'un monde solipsistique ?

http://fr.wikipedia.org/wiki/Solipsisme

Toutes les langues répondent au même besoin. Les variations entre les langues font quelques détails différents dans la façon dont les concepts sont construits, mais c’est vraiment de l’ordre du détail de sophistication.

Les sourds qui utilisent un langage gestuel, ne sont ni plus ni moins séparés.

Sans cette rupture, nos langages seraient bien différents, car ceux que l’on emploie dans toutes les contrées du monde, depuis des dizaines de milliers d’années, sont inadéquats de toute façon. Surtout que le langage verbal est de peu d’utilité face à l’espace des possibilités de communication qui sont à la portée de l’humain/animal. Environ quatre-vingt pour cent des informations transitent par des voies subtiles. L’humain a également cette possibilité, sans doute même plus importante, mais le premier chien ou chat venu sait l’exploiter dans des proportions bien plus grandes que l’homme.

Seul l'ego peut donc être tenu pour assurément existant et le monde extérieur avec ses habitants n'existe dans cette optique que comme une représentation hypothétique, et ne peut donc pas être considéré, sans abus de langage, autrement que comme incertain.

Quant à cette assertion, elle ne me semble pas sérieuse.

Si cette expression de l’être se maintient par le combat que je mène à exclure ce que je ne reconnais pas de mon être, donc à me couper du monde, je suis dans une définition de l’être qui n’a pas de sens. Si je suis réellement, je ne le suis que par ma conscience, or ma conscience elle-même, est étouffée par ma volonté d’être.

Il me faut donc être dans l’abandon du non-être pour être en relation et comprendre que c’est la relation qui me fait être.

""Seul l'ego peut donc..." etc, qui n'a pas d'expérience de moments vécus et qui ne concerne pas l'ego ? Les occupations, pour ne pas dire : les affaires de l'ego, sont bien moins nombreuses et essentielles qu'il n'y parait, nos cerveaux et nos corps communiquent intensément sans que l'ego n'en soit un témoin.

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Membre, Posté(e)
Dompteur de mots Membre 1 842 messages
Forumeur activiste‚
Posté(e)
Dans un monde où tout est relatif , où la définition de chaque mot " dépend de ce que désire celui qui l'énonce" , ne mettons nous pas là en application les bases d'un monde solipsistique ?

Il y a une composante subjective qui fait partie de n'importe quel concept - attention je parle bien ici de "concepts", au sens deleuzien et non de simples fonctions. Par exemple, "amour" est un concept, alors que "chien" est un fonctif. "Chien" est un signifiant qui se relie à son signifié par une série de critères strictement définis. Quant à "amour", au concept, il est une chose plus abstraite; il est, comme le dit Deleuze, "de l'ordre du cri" et "il se définit alors comme un tout fragmentaire, découpant de façon consistante et irrégulière une multiplicité finie de composantes hétérogènes, et les condesant dans une vibration intensive." Le concept est donc quelque chose qui appelle (j'ai fait le lien avec le "cri" dont parle Deleuze de manière inconsciente) la pensée vers un espace dont la définition ne relève pas d'éléments stricts, mais plutôt de zones d'intensité. Tout cela semble abstrait mais pensez à l'amour et voyez que vous n'êtes pas tant assailli par la représentation d'objets précis que par un flux d'impressions.

Bref, lorsque l'un énonce un concept, il insère certainement sous ce concept une large composante subjective, qu'il tentera de restituer par l'articulation même de son discours. D'où le fait que pour l'interlocuteur, il fait partie de sa tâche d'être à l'écoute de cette partie occulte du discours. Et, pour les débatteurs, il importe aussi de s'aménager un espace commun, où un tel concept puisse être discuté de manière cohérente.

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Invité Helyza
Invités, Posté(e)
Invité Helyza
Invité Helyza Invités 0 message
Posté(e)

Je ne pense pas qu'on mette "en application les bases d'un monde solipsistique". Le langage est très complexe, mais la société s'est mise d'accord sur un certain nombre de définitions, et c'est cela qui nous permet de vivre ensemble. Après c'est vrai que chacun peut voir un sens différent, lire ou entendre ce qu'il veut, mais nous avons assez de mots pour préciser notre pensée et nous comprendre correctement.

Dans un monde où tout est relatif , où la définition de chaque mot " dépend de ce que désire celui qui l'énonce"

D'où te vient cette impression que tout est relatif ?

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Invité Quasi-Modo
Invités, Posté(e)
Invité Quasi-Modo
Invité Quasi-Modo Invités 0 message
Posté(e)

Toutes les langues répondent au même besoin. Les variations entre les langues font quelques détails différents dans la façon dont les concepts sont construits, mais c’est vraiment de l’ordre du détail de sophistication.

Les sourds qui utilisent un langage gestuel, ne sont ni plus ni moins séparés.

Sans cette rupture, nos langages seraient bien différents, car ceux que l’on emploie dans toutes les contrées du monde, depuis des dizaines de milliers d’années, sont inadéquats de toute façon. Surtout que le langage verbal est de peu d’utilité face à l’espace des possibilités de communication qui sont à la portée de l’humain/animal. Environ quatre-vingt pour cent des informations transitent par des voies subtiles. L’humain a également cette possibilité, sans doute même plus importante, mais le premier chien ou chat venu sait l’exploiter dans des proportions bien plus grandes que l’homme.

Je me permets de signaler que c'est une erreur courante de considérer que les mots du langage ne seraient que des étiquettes qu'on collerait sur des objets ou des concepts préexistants.

Traduire ce n'est pas simplement transcrire mot pour mot depuis un dictionnaire ; il y a au contraire un fort travail d'interprétation (et non seulement de transcription mot-à-mot).

Sinon Google Traduction ferait des textes bien plus intelligibles.

Il y a une composante subjective qui fait partie de n'importe quel concept - attention je parle bien ici de "concepts", au sens deleuzien et non de simples fonctions. Par exemple, "amour" est un concept, alors que "chien" est un fonctif. "Chien" est un signifiant qui se relie à son signifié par une série de critères strictement définis. Quant à "amour", au concept, il est une chose plus abstraite; il est, comme le dit Deleuze, "de l'ordre du cri" et "il se définit alors comme un tout fragmentaire, découpant de façon consistante et irrégulière une multiplicité finie de composantes hétérogènes, et les condesant dans une vibration intensive." Le concept est donc quelque chose qui appelle (j'ai fait le lien avec le "cri" dont parle Deleuze de manière inconsciente) la pensée vers un espace dont la définition ne relève pas d'éléments stricts, mais plutôt de zones d'intensité. Tout cela semble abstrait mais pensez à l'amour et voyez que vous n'êtes pas tant assailli par la représentation d'objets précis que par un flux d'impressions.

Bref, lorsque l'un énonce un concept, il insère certainement sous ce concept une large composante subjective, qu'il tentera de restituer par l'articulation même de son discours. D'où le fait que pour l'interlocuteur, il fait partie de sa tâche d'être à l'écoute de cette partie occulte du discours. Et, pour les débatteurs, il importe aussi de s'aménager un espace commun, où un tel concept puisse être discuté de manière cohérente.

Je récuse l'absence d'ambiguïté et/ou de subjectivité dans l'emploi de ce que tu nommes des fonctions.

Premièrement, quand je dis "Ceci est un chien.", mon propos est-il vraiment dépourvu de subjectivité? Imaginons, par une expérience de pensée, un autre langage similaire en tous points au français, mais dont la différence consiste à utiliser le mot "chat" à la place du mot "chien", et vice-versa. Si face au même animal, comme Milou dans un album de Tintin, cet individu affirme "Ceci est un chat." quand j'affirme "Ceci est un chien." comment pourrai-je m'assurer qu'il aurait tort et moi raison?

Deuxièmement, si je comprends bien ton discours, rien ne permet d'assurer qu'on puisse identifier, pour ce que tu nommes les fonctions, la réalité et les apparences (p.ex. tu parlais de la fonction "chien") en supposant que tout concept serait clairement défini sans ambiguïté. Par exemple, je peux considérer qu'il est dans la nature du cygne d'être blanc, mais je sais qu'il existe en Australie des animaux similaires au plumage noir. Soit je considère donc que les cygnes ne sont pas toujours blancs, mais peuvent également être noirs, soit j'invente un nouveau mot pour définir ces "cygnes noirs".

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Membre, Posté(e)
Dompteur de mots Membre 1 842 messages
Forumeur activiste‚
Posté(e)

D'où te vient cette impression que tout est relatif ?

Je pense que Savonarol faisait référence à des difficultés rencontrées dans certains débats récents.

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Membre, Posté(e)
Dompteur de mots Membre 1 842 messages
Forumeur activiste‚
Posté(e)
Je récuse l'absence d'ambiguïté et/ou de subjectivité dans l'emploi de ce que tu nommes des fonctions.

Premièrement, quand je dis "Ceci est un chien.", mon propos est-il vraiment dépourvu de subjectivité? Imaginons, par une expérience de pensée, un autre langage similaire en tous points au français, mais dont la différence consiste à utiliser le mot "chat" à la place du mot "chien", et vice-versa. Si face au même animal, comme Milou dans un album de Tintin, cet individu affirme "Ceci est un chat." quand j'affirme "Ceci est un chien." comment pourrai-je m'assurer qu'il aurait tort et moi raison?

On dira que les fonctifs sont objectifs en ce qu'ils résultent d'une convention acceptée et entretenue par les hommes et qui, à toutes fins pratiques, n'est pas susceptible d'être contestée. Le mot-clé ici est "pratique": je me situe sur un plan d'analyse pratique, et non théorique. Dans l'absolu, rien n'est effectivement objectif et n'importe quel dément peut venir bouleverser les bases de notre langage.

Deuxièmement, si je comprends bien ton discours, rien ne permet d'assurer qu'on puisse identifier, pour ce que tu nommes les fonctions, la réalité et les apparences (p.ex. tu parlais de la fonction "chien") en supposant que tout concept serait clairement défini sans ambiguïté. Par exemple, je peux considérer qu'il est dans la nature du cygne d'être blanc, mais je sais qu'il existe en Australie des animaux similaires au plumage noir. Soit je considère donc que les cygnes ne sont pas toujours blancs, mais peuvent également être noirs, soit j'invente un nouveau mot pour définir ces "cygnes noirs".

Je ne dis pas que la réalité et les apparences se présentent sans ambiguïtés. Mais les fonctifs que nous établissons ont bien pour vocation de s’inscrire dans un réseau de symboles dénué d’ambiguïté. Ça n’empêche pas que l’ordonnancement qui préside à la formation de ces fonctifs puisse évoluer. Ainsi, si l’on découvre une nouvelle espèce d’oiseau qui doive en toute logique être rattaché à l’espèce du cygne, on modifiera forcément la définition de celle-ci, et on inventera une appellation pour cette nouvelle race particulièrement : le cygne quasimodoesque.

Par exemple, il est intéressant de constater que dans le domaine zoologique, l’ordonnancement représentatif a évolué, de l’époque classique jusqu’à l’époque moderne, d’un ordonnancement fondé sur le tableau des différences et des ressemblances (donc reposant largement sur le jeu des apparences), vers une organisation fondée sur l’organisation interne des êtres, sur le déploiement de leurs fonctions internes (où certains traits apparents tel que la couleur du plumage peuvent n’avoir qu’une importance triviale dans l’ordonnancement général des choses). De fait, les historiens de la nature de la fin de l’époque classique ont possiblement dû tomber sur le même problème que toi en ce qui concerne la classification des êtres. Et leur réponse a été de faire de la biologie au lieu de seulement faire de l'histoire naturelle.

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Membre, 37ans Posté(e)
Uki Membre 11 messages
Baby Forumeur‚ 37ans‚
Posté(e)

Le solipsisme est une forme extrême d'idéalisme qui n'a jamais vraiment été défendu par personne.

Le solipsisme ne serait rigoureusement vrai que de quelqu'un qui réussirait à constater tacitement son existence sans être rien et sans rien faire, ce qui est bien impossible, puisque exister c'est être au monde (Merleau-Ponty, Phénoménologie de la perception)

A la rigueur, en s'inspirant de Descartes, on peut dire que la connaissance du monde est un peu moins certaine que la connaissance de soi (je suis d’abord certain d’être conscient avant d’être certain des objets dont je suis conscient).

En fait, je trouve ça bizarre de mobiliser une théorie du langage pour trancher cette question. Car peu importe que le langage soit une description objective ou adéquate de la réalité - a-t-il besoin de l’être ? Se poser cette question c'est déjà dire que la réalité est plus tangible que les mots.

Comme si le monde était un ensemble de substances ou de "natures" attendant d'être définies.

Je suppose que le langage lui-même peut dériver en une grande illusion métaphysique : je pense par exemple aux liens chez Aristote entre grammaire, logique (sujet/prédicat), et métaphysique (substances/accidents).

Bref, je ne vois pas comment l'étude des langues naturelles pourrait résoudre une question d'ordre ontologique - à part dire que le moindre mot comporte une "charge ontologique", ce qui paraît plutôt évident dès lors que l'on parle pour dire quelque chose à quelqu'un :cool:

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Invité Quasi-Modo
Invités, Posté(e)
Invité Quasi-Modo
Invité Quasi-Modo Invités 0 message
Posté(e)

On dira que les fonctifs sont objectifs en ce qu'ils résultent d'une convention acceptée et entretenue par les hommes et qui, à toutes fins pratiques, n'est pas susceptible d'être contestée. Le mot-clé ici est "pratique": je me situe sur un plan d'analyse pratique, et non théorique. Dans l'absolu, rien n'est effectivement objectif et n'importe quel dément peut venir bouleverser les bases de notre langage.

Pour être sûrs de parler du même sujet (ce qui n'est pas sans ironie), pourrais-tu me fournir une définition d'un fonctif et d'une fonction en linguistique? Car je le comprends actuellement comme un signifiant dont le signifié correspond à une réalité empirique concrète.

Tu reconnais donc que le signifiant est arbitraire, et qu'il n'est objectif qu'en tant que convention acceptée et entretenue par les hommes à des fins pratiques. J'aurai alors trois remarques :

-Ce que tu affirmes me semble également vrai des concepts. Si la seule objectivité du fonctif réside dans son aspect pratique et conventionnel, en quoi ce que tu nommes des concepts seraient-ils moins objectifs que les fonctifs? Pourtant, on ne philosophe pas avec le dictionnaire.

-Comment se différenciera-t-on de la conception aristotélicienne de la vérité selon laquelle le vrai est ce qui est universellement considéré comme tel par les humains? Suffirait-il que tous les humains, sauf nous deux, pensent que le ciel est vert pour qu'il le devienne, faisant alors de nous des "déments"?

-Il est possible de faire un usage correct du langage d'un points de vue conventionnel et à toutes fins pratiques, mais d'avoir tout de même tort. Est-ce là néanmoins une forme d'objectivité? Cela apparaît fort bien dans les quiproquos. Si je définis l'adjectif "canin" comme "Relatif aux chiens", et que j'affirme que "Les concours canins sont des compétitions entre chiens." alors cette phrase sera vraie même si je considère que les chiens sont des chats, et vice-versa.

Je ne dis pas que la réalité et les apparences se présentent sans ambiguïtés. Mais les fonctifs que nous établissons ont bien pour vocation de s’inscrire dans un réseau de symboles dénué d’ambiguïté. Ça n’empêche pas que l’ordonnancement qui préside à la formation de ces fonctifs puisse évoluer. Ainsi, si l’on découvre une nouvelle espèce d’oiseau qui doive en toute logique être rattaché à l’espèce du cygne, on modifiera forcément la définition de celle-ci, et on inventera une appellation pour cette nouvelle race particulièrement : le cygne quasimodoesque.

Par exemple, il est intéressant de constater que dans le domaine zoologique, l’ordonnancement représentatif a évolué, de l’époque classique jusqu’à l’époque moderne, d’un ordonnancement fondé sur le tableau des différences et des ressemblances (donc reposant largement sur le jeu des apparences), vers une organisation fondée sur l’organisation interne des êtres, sur le déploiement de leurs fonctions internes (où certains traits apparents tel que la couleur du plumage peuvent n’avoir qu’une importance triviale dans l’ordonnancement général des choses). De fait, les historiens de la nature de la fin de l’époque classique ont possiblement dû tomber sur le même problème que toi en ce qui concerne la classification des êtres. Et leur réponse a été de faire de la biologie au lieu de seulement faire de l'histoire naturelle.

Pour le coup, je me sens pleinement en accord.

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Membre, Posté(e)
Dompteur de mots Membre 1 842 messages
Forumeur activiste‚
Posté(e)
En fait, je trouve ça bizarre de mobiliser une théorie du langage pour trancher cette question. Car peu importe que le langage soit une description objective ou adéquate de la réalité - a-t-il besoin de l’être ? Se poser cette question c'est déjà dire que la réalité est plus tangible que les mots.

Comme si le monde était un ensemble de substances ou de "natures" attendant d'être définies.

Je suppose que le langage lui-même peut dériver en une grande illusion métaphysique : je pense par exemple aux liens chez Aristote entre grammaire, logique (sujet/prédicat), et métaphysique (substances/accidents).

Bref, je ne vois pas comment l'étude des langues naturelles pourrait résoudre une question d'ordre ontologique - à part dire que le moindre mot comporte une "charge ontologique", ce qui paraît plutôt évident dès lors que l'on parle pour dire quelque chose à quelqu'un :cool:

Je mobilise une théorie du langage pour la simple et bonne raison (poil aux rognons - c'est pour Blaquière) que le problème posé par Savonarol concerne beaucoup plus le langage que le solipsisme. Le solipsisme n'était cité au fond qu'en guise d'artifice (poil aux cuisses), afin d'illustrer la problématique (poil au zygomatique). L'idée étant de faire la part des choses entre la "charge ontologique" (je n'aurais jamais employé une telle expression !) dont vous parlez (poil au périnée) et l'aspect subjectif du langage selon ses différents modes (poil aux globes).

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Membre, le corps sur Terre, l'esprit ailleurs , 55ans Posté(e)
pascalin Membre 15 340 messages
55ans‚ le corps sur Terre, l'esprit ailleurs ,
Posté(e)

Dans un monde où tout est relatif , où la définition de chaque mot " dépend de ce que désire celui qui l'énonce" , ne mettons nous pas là en application les bases d'un monde solipsistique ?

http://fr.wikipedia....wiki/Solipsisme

Oui mais comment savoir et s'en extirper ?

Si les "autres n'existent pas" pourquoi sont-ils la seule preuve de notre existence ?

Le rêve Ultime n'est pas que l'on pense et croit , il est que l'on soit .

L'existence est-elle unique ? Si oui , pourquoi est-elle multiple ?

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Membre, le corps sur Terre, l'esprit ailleurs , 55ans Posté(e)
pascalin Membre 15 340 messages
55ans‚ le corps sur Terre, l'esprit ailleurs ,
Posté(e)

Le solipsisme est une forme extrême d'idéalisme qui n'a jamais vraiment été défendu par personne.

Le solipsisme ne serait rigoureusement vrai que de quelqu'un qui réussirait à constater tacitement son existence sans être rien et sans rien faire, ce qui est bien impossible, puisque exister c'est être au monde (Merleau-Ponty, Phénoménologie de la perception)

A la rigueur, en s'inspirant de Descartes, on peut dire que la connaissance du monde est un peu moins certaine que la connaissance de soi (je suis d’abord certain d’être conscient avant d’être certain des objets dont je suis conscient).

En fait, je trouve ça bizarre de mobiliser une théorie du langage pour trancher cette question. Car peu importe que le langage soit une description objective ou adéquate de la réalité - a-t-il besoin de l’être ? Se poser cette question c'est déjà dire que la réalité est plus tangible que les mots.

Comme si le monde était un ensemble de substances ou de "natures" attendant d'être définies.

Je suppose que le langage lui-même peut dériver en une grande illusion métaphysique : je pense par exemple aux liens chez Aristote entre grammaire, logique (sujet/prédicat), et métaphysique (substances/accidents).

Bref, je ne vois pas comment l'étude des langues naturelles pourrait résoudre une question d'ordre ontologique - à part dire que le moindre mot comporte une "charge ontologique", ce qui paraît plutôt évident dès lors que l'on parle pour dire quelque chose à quelqu'un :cool:

Pour Descartes : Est-ce que ce n'est pas la conscience d'autre chose qui amène "intuitivement" "empiriquement" voir "idéologiquement" notre propre conscience ?

En d'autres termes , qu'est-ce que la réalité ? Est-elle définie ? >Ne serait-elle que mathématique ? (cf Max Tegmark) Pas pour les sciences en tout cas ;

Pour les mots , c'est beaucoup plus vague , car un mot n'exprime qu'une petite portion de l'idée que l'on s'en fait , un artefact de la pensée simulée , un idéal prétentieux et circonscrit dans sa propre finitude .

A ce propos, certaines notions scientifiques et mathématiques ne peuvent être définis avec des mots , c'est pour dire ...

Le Rêve est beau , la finition l'est moins

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Membre, If you don't want, you Kant..., Posté(e)
deja-utilise Membre 6 005 messages
If you don't want, you Kant...,
Posté(e)

Dans un monde où tout est relatif , où la définition de chaque mot " dépend de ce que désire celui qui l'énonce" , ne mettons nous pas là en application les bases d'un monde solipsistique ?

Une autre forme du sensualisme!

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Membre, Posté(e)
Dompteur de mots Membre 1 842 messages
Forumeur activiste‚
Posté(e)
Pour être sûrs de parler du même sujet (ce qui n'est pas sans ironie), pourrais-tu me fournir une définition d'un fonctif et d'une fonction en linguistique? Car je le comprends actuellement comme un signifiant dont le signifié correspond à une réalité empirique concrète.

Mon ambivalence entre la fonction et le fonctif n’est pas un hasard. J’ai pigé l’idée de fonction (ou prospect) chez Deleuze, par opposition à son idée de concept (exposée plus tôt). Pour Deleuze, la fonction est le « résultat d’un ralentissement du mouvement infini de la pensée qui procure aux sciences leur objet spécifique », elle se présente comme une proposition dans des systèmes discursifs. La fonction « renonce à la tentative qu’effectue le concept de donner consistance à l’infini. « La science ralentit le mouvement infini [de la pensée] et par ce ralentissement crée une condition de réflexivité coextensive au mouvement. »

J’ai bifurqué vers le mot « fonctif » parce que je trouvais que pour un lecteur qui n’avait pas immédiatement en tête la référence deleuzienne, ça pouvait être assez ambigu comme terme. Le mot « fonctif » évoque plus rapidement tout l’univers des problèmes langagiers.

Deleuze définit ses idées de concept et de prospect de manière phénoménologique – c’est-à-dire qu’il décrit l’expérience interne du sujet qui les éprouve directement. Plus succinctement et plus concrètement – mais aussi plus superficiellement, ta définition pourrais très bien convenir. Enfin, je crois.

Tu reconnais donc que le signifiant est arbitraire, et qu'il n'est objectif qu'en tant que convention acceptée et entretenue par les hommes à des fins pratiques. J'aurai alors trois remarques :

-Ce que tu affirmes me semble également vrai des concepts. Si la seule objectivité du fonctif réside dans son aspect pratique et conventionnel, en quoi ce que tu nommes des concepts seraient-ils moins objectifs que les fonctifs? Pourtant, on ne philosophe pas avec le dictionnaire.

Précisément : on ne philosophe pas avec le dictionnaire. Mais on scientifise avec des manuels ou du moins avec des schémas référentiels relativement fixes.

Les fonctifs déterminent des découpages au sein d’un monde immobilisé et géométriquement découpé (cette fois-ci, c’est une manière bergsonienne de le dire), alors que les concepts expriment le plan d’immanence (Deleuze) d’une intuition (Bergson) – ils survolent le réel (Deleuze), alors que le fonctif s’y insère.

Bergson nous dit qu’on ne peut pas exprimer directement une intuition, mais seulement l’imager. Le concept ne désigne pas seulement une chose, mais bien carrément une manière d’envisager un ensemble de choses. Ce qui implique des inflexions ambiguës de la pensée, des affects, des sentiments, etc.

-Comment se différenciera-t-on de la conception aristotélicienne de la vérité selon laquelle le vrai est ce qui est universellement considéré comme tel par les humains? Suffirait-il que tous les humains, sauf nous deux, pensent que le ciel est vert pour qu'il le devienne, faisant alors de nous des "déments"?

Bien entendu. Deleuze dit que la fonction s’attache à la vérité du relatif. Le scientifique travaille à partir de ce qui fait consensus : à savoir l’image du monde que nous fournissent nos sens. Le philosophe lui travaille à partir d’un monde de possibles, ce qui fait qu’aux yeux du commun, il revêt au moins partiellement l’habit suspicieux du dément (cf. mon topic sur la souffrance du philosophe).

-Il est possible de faire un usage correct du langage d'un points de vue conventionnel et à toutes fins pratiques, mais d'avoir tout de même tort. Est-ce là néanmoins une forme d'objectivité? Cela apparaît fort bien dans les quiproquos. Si je définis l'adjectif "canin" comme "Relatif aux chiens", et que j'affirme que "Les concours canins sont des compétitions entre chiens." alors cette phrase sera vraie même si je considère que les chiens sont des chats, et vice-versa.

L’objectivité (non-absolue, encore une fois), elle est dans le fait que justement, ce cas risque peu de se produire, ou que je puis m’entendre avec mes interlocuteurs pour définir le sens des mots. Mais cela n’est pas aussi simple avec les concepts.

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