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ptitepao

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Invité Savanna
Invités, Posté(e)
Invité Savanna
Invité Savanna Invités 0 message
Posté(e)

100204cwalkingman.jpg

« Quand les statues de Giacometti marchent, elles ne font pas de bruit. Il faut une ouïe très fine pour entendre des pas glisser sur du sable. Le mouvement est

à peine perceptible. Il faut s’arrêter et écouter un immense silence respirer. »

« Je ne sais pas si Giacometti a lu Cervantès, mais l’homme qui marche est un double silencieux de Don Quichotte, pour une fois livré à sa solitude et à ses méditations profondes. »

« C’est cela qui fait que face à l’œuvre de Giacometti on se sent rempli d’humilité. On est intimidé parce qu’un homme, à l’écart du monde, à l’écart de toute valeur marchande, a réussi à nous exprimer tous, en creusant la terre, en creusant le métal, et en se souvenant de la tragédie humaine, qu’elle soit immédiate – comme celle qu’il a vécue durant le nazisme – ou lointaine, et qui existe depuis que l’homme humilie l’homme. »

photograph_ob972-779e1.jpg

L’homme qui marche

Toute ma vie je veux être

Cet être qui marche

Qui marche pour être

À l’avant de lui-même

Et toujours progressant

Les yeux sur l’horizon

Vers un ailleurs sans but

Peu importe où il va

L’important est d’aller

De balancer ses bras

De soulever ses pieds

Ses pauvres pieds meurtris

Extirpés de la glaise

D’échapper à la mort

D’échapper à la nuit

De s’évader debout

Des lois et des camps concentrationnaires

Qu’on nous impose ou bien

Qu’on s’impose à soi-même

Dédaignant les banquets

Les prestidigitateurs et les artificiers

Il va

Éclaircissant les taillis

Assurant des passages

Ne faisant halte aux clairières

Que pour reprendre haleine

Et se remet à marcher

Fragile balancier

Aux mains de timbalier

Juché sur les deux branches

D’un compas d’astronome

Gracile Atlas portant le monde

Dans sa tête obstinée de forgeron

Toujours avançant sa frêle silhouette

Modelée au pouce par l‘âme de l’artiste

Vers des terres inconnues porteuses de tempêtes

À la force résolue de ses châteaux intérieurs

Alberto.Giacometti.jpg

Alberto Giacometti

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Membre, ptitevalseuse, 54ans Posté(e)
ptitepao Membre 12 807 messages
54ans‚ ptitevalseuse,
Posté(e)

Il y a des jours où elle se dit qu'avec ça aussi, elle joue. Et elle triche. Mal, comme toujours.

Des moments où elle veut croire que ce sera sa chance, celle qu'elle attendait quand elle était immobile. Mais elle l'est toujours. Suspendue dans l'air, comme ces minuscules particules qu'elle surprend parfois. Comme elles, transparente. Comme elles, en apesanteur... l'impression de flotter. Elle perd parfois le fil, souvent la boule, mais toujours lui revient cette promesse faite à rien. Il y longtemps. Celle de vivre, quoi qu'il arrive, tant que restera quelqu'un à qui elle manquerait.

Alors elle continue. Elle joue, comédienne des rires et de l'auto-dérision, celle qui triche quand elle voudrait tant être vraie, au moins un peu, au moins le temps d'un soupir. Mais comment leur dire qu'au fond de chacun de ses sourires se cachent la fatigue, la lassitude, l'envie de tout laisser en plan, de s'enfuir. Loin. Et puis, au-dessus de tout, la peur qui plane parfois, jamais plus de quelques minutes, jamais suffisamment bas pour l'anéantir.

Mais peut-être que là aussi, plus qu'ailleurs, elle triche. Elle la connait depuis si longtemps, cette fichue trouille, qu'elle lui parait familière, même à présent qu'elle a changé de visage, à présent qu'elle la porte en elle. Elle en connait les moindres dédales, elle sait ses pièges et ses mirages, mais aussi ses faiblesses et comment en tirer parti. Comment s'en tirer, elle.

Alors certains jours, elle veut y croire. Croire à cette chance qui s'offrira à elle, quand tout "ça" sera fini. Quand elle passera de la lettre K à celle qui s'envole, toute en ailes pour la transporter loin. Ailleurs. Passer de l'immobilité de l'apesanteur à l'ivresse et la liberté du vol...

tumblr_mksqejRewV1r7fsa9o1_500.jpg

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Membre, grands cils ♪ ♫ ..., Posté(e)
Cajou Membre 1 044 messages
grands cils ♪ ♫ ...,
Posté(e)

"Écrire pour donner une forme à la fois à ce qui nous tenaille et nous échappe " JB. Pontalis

ecrire.jpg

Picasso: "Après tout, les Arts ne font qu’un. On peut écrire une peinture en mot et on peut peindre des sensations dans un poème ".

Odeurs parfums diluées à fleur de peau, les couleurs jetées soufflent la vie.

Elle caresse ses pinceaux secs.. les rouges tendres…. les bruns violents … elle touche.. pétrit..... elle frémit.. une douleur l'enivre furieusement ...

visagepeinture-noire.jpg

Elle sillonne une toile immaculée vierge perdue au fond d'une solitude délaissée....

Elle la fouille lui donne une histoire…. des contours émergent …

Elle s’esquinte … à la toucher...à la deviner… à lui donner une forme …

atelier-peinture.jpg

Peindre pour extraire des maux qui nous échappent … nous tenaillent

Modifié par Cajou
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Membre, ptitevalseuse, 54ans Posté(e)
ptitepao Membre 12 807 messages
54ans‚ ptitevalseuse,
Posté(e)

Je ne savais pas trop où le poster, mais je crois que cet univers aussi a sa place ici...

A Dandypunk - The alchemy of light

Un peintre c'est quelqu'un qui essuie la vitre entre le monde et nous avec de la lumière, avec un chiffon de lumière imbibé de silence. C. Bobin - L'inespérée

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Membre, Posté(e)
lendehors Membre 372 messages
Baby Forumeur‚
Posté(e)

Cette lente démarche que nous entreprenions jour après jour pour être plus près des choses. Soudain, dans la douceur d'un matin, l'impossible bénédiction nous est donnée: la certitude que c'est notre manque même qui est à pénétrer. Et nous touchons de notre impuissance un pan de mur blanc.

6024740910120523111040801.jpg

Avec nous ....

5543700908190611168332121.jpg

.... des présences dont la grandeur tient dans la douceur mortelle de leur effacement.

http://www.youtube.c...4OomUfpu3gxu0JQ

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Invité
Invités, Posté(e)
Invité
Invité Invités 0 message
Posté(e)

Six pieds sous taire

Il est des vérités à jamais inaudibles,

Des mots cadenassés que nul ne peut soustraire ;

Il est des silences à l'écho peu crédible,

Des non-dits assaillant les esprits grabataires

D'un fantôme impoli.

J'en ai des souvenirs et autant de regrets ;

La Mort ayant porté ses mains à mes paupières,

Je ne peux déterrer mon éternel secret

Enfoui dans mon jardin jusque six pieds sous terre,

Au pied du mimosa.

J'étais froid bien avant que la Mort ne me fauche ;

Cela m'a coûté cher d'avoir un cœur trop fier

Car pour encercler d'or un annulaire gauche,

Au préalable il faut mettre un genou à terre,

Son amour propre en jeu.

Entre mes six planches, ne cesse de peser

Le poids de mon secret ; si tu voulais l'extraire,

Si ça t'intéresse, je t'indique où creuser,

Promène ta pelle pile six pieds sous taire,

Au pied des chrysanthèmes.

- Konvicted -

Ren%C3%A9-Magritte.-The-Lovers.jpgMAGRITTE

Modifié par Théia
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Membre, grands cils ♪ ♫ ..., Posté(e)
Cajou Membre 1 044 messages
grands cils ♪ ♫ ...,
Posté(e)

A dandypunk merci Pao !!! cool.gif ..j’aime beaucoup l'univers cet artiste un peupassionnémentàlafoliiiiie .."pas".. dutout !!!! ...

Le Danseur

Dans son implacable élégance

Absorbé dans son ivresse

Il danse l’inspire et l’expire

D’une étoile naissante

Il danse sur le battement d’un

Cœur secret

Le danseur danse

Au plus obscure de ses os

Il danse

Ta chute ou ton envol

Puis il cueille sur ta chair offerte

Une fleur de soleil

danseur2.jpg

Sa vitesse est si prodigieuse

Qu’il semble presque immobile

Au-delà du temps, il veille

Et si le monde vacille

Son rythme

Rétablit l’équilibre

Dans son implacable élégance

Le danseur danse

Danse…

(Arthur H)

Ici Lil Buck métamorphosé si naturellement en élégant cygne noir.. au son du cello de Yo Yo Ma ...

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Invité
Invités, Posté(e)
Invité
Invité Invités 0 message
Posté(e)

Bonjour Cajour, Théia, Pao, Lendehors...

Dors ma petite fille.

Dors ma petite fille

tandis que des couteaux ensemencent d’argent

l’horizon qu’ils meurtrissent

c’est dans si longtemps qu’il faudra mourir

la vie descend vers la mer de son sable insensible

Dors contre mon cœur fleur de mon émoi.

Laisse-moi parler de ma vie

il est tard chez moi, ma petite aube

il faudrait une horloge folle pour sonner mes heures

un jaquemart d’enfer.

C’en est fini de la jeunesse où l’amour est sans réponse ces mains qui chassent tes

cheveux contre la douceur

du vent ces lèvres de chanson et ce cœur qui t’apaise sont ceux d’un homme de la honte

Laisse-moi parler de ce pays où l’on va vêtu de fourrures où règne un froid étrange et des

gestes légendaires

Tu le vois luire comme un nord de neige grise

C’est là-bas que j’ai vécu entre le meurtre et le remords

c’est là-bas que nous irons poussés par

Dieu et par le sang et je te recevrai

parmi les autres loups comme une louve

Dors dans le soleil et dans ta chair fragile

personne encore n’attelle le traîneau

le moujik s’enivre à l’auberge des âges

et les chevaux sont encore libres au-delà de la terre

Mais je sais que le

Vieux malgré sa longue ivresse construira la voiture de ses mains ironiques et qu’il fera

pleuvoir une pluie de lassos sur le rêve de ces montures

Je vois déjà son ombre immense, je la connais

il vient pour toi, il prend mesure

comme pour ton léger cercueil

et fait claquer son fouet dans l’air illusoire

où naîtra l’attelage

Ton innocence peut dormir sur la blessure de mon

cœur les lys poussent le long des mares et leur blancheur se

retrouve sur l’eau sale devenue miroir

Hélas j’écoute dans sa prison mûrir ton sang rien ne me retiendra de délivrer son cours

quand ta pudeur dépaysée des landes épellera les brûlures de la vie

Dors petite aube, dans le murmure de mon chagrin

la vie est douce, la mort est loin

et les chemins vont sous les fleurs vers un

Dieu qui sourit aux prières des vierges

L’huile de la vie ne descend pas encore consacrer ta chair d’un sacrement maudit et je

puis te ravir de légendes en poudre plus réelles pour toi que l’histoire de demain

-

Alain Borne

jane2breece2bhave2bdrowned2bmy2bglory2bin2ba2bshallow2bcup2b2528tina2bmodotti25292b1919.jpg?w=800&h=576

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Invité
Invités, Posté(e)
Invité
Invité Invités 0 message
Posté(e)

Hello Lucy =)

Extrait des Fleurs du Mal de Baudelaire, et détail de la Porte de l'Enfer de Rodin...

Quand la pluie étalant ses immenses traînées,

D'une vaste prison imite les barreaux,

Et qu'un peuple muet d'infâmes araignées

Vient tendre ses filets au fond de nos cerveaux,

Des cloches tout à coup sautent avec furie

Et lancent vers le ciel un affreux hurlement,

Ainsi que des esprits errants et sans patrie

Qui se mettent à geindre opiniâtrement.

porte_enfer_detail.jpg

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Invité Savanna
Invités, Posté(e)
Invité Savanna
Invité Savanna Invités 0 message
Posté(e)

L'isolement

Souvent sur la montagne, à l'ombre du vieux chêne,

Au coucher du soleil, tristement je m'assieds ;

Je promène au hasard mes regards sur la plaine,

Dont le tableau changeant se déroule à mes pieds.

Ici, gronde le fleuve aux vagues écumantes ;

Il serpente, et s'enfonce en un lointain obscur ;

Là, le lac immobile étend ses eaux dormantes

Où l'étoile du soir se lève dans l'azur.

Au sommet de ces monts couronnés de bois sombres,

Le crépuscule encor jette un dernier rayon,

Et le char vaporeux de la reine des ombres

Monte, et blanchit déjà les bords de l'horizon.

Cependant, s'élançant de la flèche gothique,

Un son religieux se répand dans les airs,

Le voyageur s'arrête, et la cloche rustique

Aux derniers bruits du jour mêle de saints concerts.

Mais à ces doux tableaux mon âme indifférente

N'éprouve devant eux ni charme ni transports,

Je contemple la terre ainsi qu'une ombre errante :

Le soleil des vivants n'échauffe plus les morts.

De colline en colline en vain portant ma vue,

Du sud à l'aquilon, de l'aurore au couchant,

Je parcours tous les points de l'immense étendue,

Et je dis : « Nulle part le bonheur ne m'attend. »

Que me font ces vallons, ces palais, ces chaumières,

Vains objets dont pour moi le charme est envolé ?

Fleuves, rochers, forêts, solitudes si chères,

Un seul être vous manque, et tout est dépeuplé.

Que le tour du soleil ou commence ou s'achève,

D'un oeil indifférent je le suis dans son cours ;

En un ciel sombre ou pur qu'il se couche ou se lève,

Qu'importe le soleil ? je n'attends rien des jours.

Quand je pourrais le suivre en sa vaste carrière,

Mes yeux verraient partout le vide et les déserts ;

Je ne désire rien de tout ce qu'il éclaire,

Je ne demande rien à l'immense univers.

Mais peut-être au-delà des bornes de sa sphère,

Lieux où le vrai soleil éclaire d'autres cieux,

Si je pouvais laisser ma dépouille à la terre,

Ce que j'ai tant rêvé paraîtrait à mes yeux !

Là, je m'enivrerais à la source où j'aspire ;

Là, je retrouverais et l'espoir et l'amour,

Et ce bien idéal que toute âme désire,

Et qui n'a pas de nom au terrestre séjour !

Que ne puis-je, porté sur le char de l'Aurore,

Vague objet de mes voeux, m'élancer jusqu'à toi !

Sur la terre d'exil pourquoi restè-je encore ?

Il n'est rien de commun entre la terre et moi.

Quand la feuille des bois tombe dans la prairie,

Le vent du soir s'élève et l'arrache aux vallons ;

Et moi, je suis semblable à la feuille flétrie :

Emportez-moi comme elle, orageux aquilons !

Lamartine

Photographie de Kasia-Derwinska

kasiaderwinskaartphoto5.jpeg

Modifié par Savanna
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Membre, Too old to die young, 51ans Posté(e)
Rob Gordon Membre 4 731 messages
51ans‚ Too old to die young,
Posté(e)

Texte de Robert Wyatt

You look different every time you come

from the foam-crested brine

It's your skin shining softly in the moonlight

Partly fish, parly porpoise, partly baby sperm whale

Am I yours? Are you mine to play with?

Joking apart when you're drunk

You're terrific when you're drunk

I like you mostly late at night - you're quite all right

But I can't understand the different you

In the morning when it's time to play

at being human for a while

Please smile!

You'll be different in the spring, I know

You're a seasonal beast

Like the starfish that drifted with the tide, with the tide

So until your blood runs to meet the next full moon

Your madness fits in nicely with my own, with my own

Your lunacy fits neatly with my own - my very own

We're not alone...

Pissaro Les falaises

Pissaro-Les-falaises.jpg

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Membre, ptitevalseuse, 54ans Posté(e)
ptitepao Membre 12 807 messages
54ans‚ ptitevalseuse,
Posté(e)

BONNARD-5.jpg

Bonnard - La salle à manger à la campagne

Encore une fois elle est tombée dans le piège, telle une rombière oisive parfumée de Guerlain, et colle avec Bonnard son œil à la serrure. Elle frôle, elle se vautre aux douces tavelures, elle est de Marthe le ventre et de Bonnard la main, la bouche languissante dessinant les marbrures, l’obsession de ce corps sans cesse réinventé. Mais elle pourrait aussi n’être que cette fracture, ce fragment de carreaux à l’angle des baignoires, le radiateur en fonte, le miroir embué. Elle connaît tous les instants du regard indiscret, et elle les confond tous ; partout elle a voulu à même son épaisseur sentir le frémissement qui habitait le peintre, dérober ses points de vue, être de son espace.

Muriel Daumal - La paix d'Izri

BONNARD-6.jpg

Bonnard - L'atelier au mimosa

Paralèlles...

85981558_p.jpg

82537317_p.jpg

(créations Clothogancho )

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Membre, ptitevalseuse, 54ans Posté(e)
ptitepao Membre 12 807 messages
54ans‚ ptitevalseuse,
Posté(e)

tumblr_moqtctw3kM1s2fflqo6_250.jpg

Mais alors ils s’en allaient, dansant dans les rues comme des clochedingues, et je traînais derrière eux comme je l’ai fait toute ma vie derrière les gens qui m’intéressent, parce que les seules gens qui existent pour moi sont les déments, ceux qui ont la démence de vivre, la démence de discourir, la démence d’être sauvés, qui veulent jouir de tout dans un seul instant, ceux qui ne savent pas bâiller ni sortir un lieu commun mais qui brûlent, qui brûlent, pareils aux fabuleux feux jaunes des chandelles romaines explosant comme des poêles à frire à travers les étoiles et, au milieu, on voit éclater le bleu du pétard central et chacun fait : "Aaaah !"

tumblr_lnh6tlGaKj1qijsuuo1_500_large.jpg

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Invité
Invités, Posté(e)
Invité
Invité Invités 0 message
Posté(e)

Bonjour...

L'orthographe Non content de sortir d'une serre

tu as aussi troublé mon orthographe.

Tu m'as surprise plusieurs fois dis-tu

à écrire aparier au lieu d'apparier

ce qui veut dire former une paire

et rien à voir avec le pari

encore que.

Ce n'est pas une faute, l'ami.

Juste un aveu prématuré d'impuissance.

Montre-nous une seule terre

qui ait jamais su correctement nous unir.

Tout plein d'appariements mais combien parmi nous

ont connu un redoublement de l'être ?

L'orthographe, question de point de vue.

Regarde par exemple

comment bouge le mentir :

quand avec lui tu vises l'autre

tu l'écris en toi comme il faut, bravement.

Mais c'est toi qu'il fusille

tu l'écris tire à la fin.

Tu me demandes depuis quand

je termine la clémence comme la chance.

Comment savoir c'est sans doute la faute à la souffrance

à la constance la distance l'errance

l'espérance la doléance

et à la poétesse croyance

qu'il est possible de réécrire le monde.

D'ailleurs je te rappelle que la clémence

c'est Dieu le premier qui l'a écrit faux.

Kiki Dimoula, Je te salue Jamais

ACCORDEON-Stanko-Abadzik--2-.jpg

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Invité
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Invité
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Posté(e)

9pjm.jpg

L'Autre

« Je est un autre. » Arthur R.

À force de m’écrire

Je me découvre un peu

Je recherche l’Autre

J’aperçois au loin

La femme que j’ai été

Je discerne ses gestes

Je glisse sur ses défauts

Je pénètre à l’intérieur

D’une conscience évanouie

J’explore son regard

Comme ses nuits

Je dépiste et dénude un ciel

Sans réponse et sans voix

Je parcours d’autres domaines

J’invente mon langage

Et m’évade en Poésie

Retombée sur ma Terre

J’y répète à voix basse

Inventions et souvenirs

À force de m’écrire

Je me découvre un peu

Et je retrouve l’Autre.

Andrée Chedid

Modifié par Lucy Van Pelt
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Invité Savanna
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Invité Savanna
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Posté(e)

:hi:

La plume de Satan

La plume, seul débris qui restât des deux ailes

De l'archange englouti dans les nuits éternelles,

Était toujours au bord du gouffre ténébreux.

Les morts laissent,ainsi quelquefois derrière eux

Quelque chose d'eux-même au seuil de la nuit triste,

Sorte de lueur vague et sombre, qui persiste.

Cette plume avait-elle une âme ? qui le sait ?

Elle avait un aspect étrange ; elle gisait

Et rayonnait ; c'était de la clarté tombée.

Les anges la venaient voir à la dérobée.

Elle leur rappelait le grand Porte-Flambeau ;

Ils l'admiraient, pensant à cet être si beau

Plus hideux maintenant que l'hydre et le crotale ;

Ils songeaient à Satan dont la blancheur fatale,

D'abord ravissement, puis terreur du ciel bleu,

Fut monstrueuse au point de s'égaler à Dieu.

Cette plume faisait revivre l'envergure

De l'Ange, colossale et hautaine figure ;

Elle couvrait d'éclairs splendides le rocher ;

Parfois les séraphins, effarés d'approcher

De ces bas-fonds où l'âme en dragon se transforme,

Reculaient, aveuglés par sa lumière énorme ;

Une flamme semblait flotter dans son duvet ;

On sentait, à la voir frissonner, qu'elle avait

Fait partie autrefois d'une aile révoltée ;

Le jour, la nuit, la foi tendre, l'audace athée,

La curiosité des gouffres, les essors

Démesurés, bravant les hasards et les sorts,

L'onde et l'air, la sagesse auguste, la démence,

Palpitaient vaguement dans cette plume immense ;

Mais dans son ineffable et sourd frémissement,

Au souffle de l'abîme, au vent du firmament,

On sentait plus d'amour encor que de tempête.

Et sans cesse, tandis que sur l'éternel faîte

Celui qui songe à tous pensait dans sa bonté,

La plume du plus grand des anges, rejeté

Hors de la conscience et hors de l'harmonie,

Frissonnait, près du puits de la chute infinie,

Entre l'abîme plein de noirceur et les cieux.

Tout à coup un rayon de l'oeil prodigieux

Qui fit le monde avec du jour, tomba sur elle.

Sous ce rayon, lueur douce et surnaturelle,

La plume tressaillit, brilla, vibra, grandit,

Prit une forme et fut vivante, et l'on eût dit

Un éblouissement qui devient une femme.

Avec le glissement mystérieux d'une âme,

Elle se souleva debout, et, se dressant,

Éclaira l'infini d'un sourire innocent.

Et les anges tremblants d'amour la regardèrent.

Les chérubins jumeaux qui l'un à l'autre adhèrent,

Les groupes constellés du matin et du soir,

Les Vertus, les Esprits, se penchèrent pour voir

Cette soeur de l'enfer et du paradis naître.

Jamais le ciel sacré n'avait contemplé d'être

Plus sublime au milieu des souffles et des voix.

En la voyant si fière et si pure à la fois,

La pensée hésitait entre l'aigle et la vierge;

Sa face, défiant le gouffre qui submerge,

Mêlant l'embrasement et le rayonnement,

Flamboyait, et c'était, sous, un sourcil charmant,

Le regard de la foudre avec l'oeil de l'aurore.

L'archange du soleil, qu'un feu céleste dore,

Dit : - De quel nom faut-il nommer cet ange, ô Dieu ?

Alors, dans l'absolu que l'Être a pour milieu,

On entendit sortir des profondeurs du Verbe

Ce mot qui, sur le front du jeune ange superbe

Encor vague et flottant dans la vaste clarté,

Fit tout à coup éclore un astre : - Liberté !

Victor Hugo

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Oriol Jolonch

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Membre, ...... Phoenix ..... Une cendre déterminée, 53ans Posté(e)
Amazones Membre 13 439 messages
53ans‚ ...... Phoenix ..... Une cendre déterminée,
Posté(e)

« Surréalisme : automatisme psychique pur par lequel on se propose d’exprimer, soit verbalement, soit par écrit, soit de toute autre manière, le fonctionnement réel de la pensée. Dictée de la pensée, en l’absence de tout contrôle exercé par la raison, en dehors de toute préoccupation esthétique ou morale. »

---

La seconde nature .... écrit par Paul Eluard dont l'inconscient et de ses pouvoirs s'en fait exprimer.

"Les oiseaux maintenant volent de leurs propres ombres

Les regards n’ont pas ce pouvoir

Et les découvertes ont beau jeu

L’oeil fermé brûlé dans toutes les têtes

L’homme est entre les images

Entre les hommes

Tous les hommes entre les hommes."

Où l'écoute de la composition d'Erik Satis - Gnossienne N°3 enveloppe cette raison ..... L'inconscient prend le pouvoir de l'esprit conscient et le rêve commence.

Sans omettre le regard posé sur Un grand tableau qui représente un paysage en 1927 ... de Yves Tanguy qui donnent seulement les points de départ ou la spéculation imaginative et laissent l'observateur devenir aussi surréaliste .... rêve ou cauchemar.

large-painting-representing-a-landscape-1927.jpg!Blog.jpg

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Membre, ...... Phoenix ..... Une cendre déterminée, 53ans Posté(e)
Amazones Membre 13 439 messages
53ans‚ ...... Phoenix ..... Une cendre déterminée,
Posté(e)

"Sut le premier, dans ces siècles grossiers, Débrouiller l'art confus de nos vieux romanciers".

---

"Le poète est réputé fou. il écrit ce qui ne devrait pas être exprimé et il navigue exprès "loin des sécurités permises". D'instinct, il côtoie toues les mers d'Iroise. Son rôle est de déranger, d'inquiéter, et de faire, de face ou de dos, provocant ou pervers, les mauvais signes. Il est le berger des rétifs, des désemparés et des illuminés. L'étoile à son front est, à la fois, l'orifice qui permet la communication avec l'intérieur des choses, "le trou noir", des astronautes, et le stigmate de la malédiction qui, inexorablement, le guette. Il lui est réservé de mourir "au seuil des splendides villes" avec l'opprobre de braves gens. Dans les campagnes de notre littérature, le poète a destin de vagabond." - de Marcel Jullian

---

VictorHugo.jpg

Une salade dans un crâne .... C’était un soir. Le ciel était sombre, nuageux et triste. La lune laissait seulement arriver jusqu’à nous, à travers des échappées de nuages semblables aux blessures d’un ciel meurtri, quelques pâles rayons d’une lumière blafarde et lugubre. La tempête sévissait sur l’Océan en tordant les mâts de vaisseau comme des brins de paille ; les vagues rugissaient, ardentes à saisir leur proie. On entendait çà et là des clameurs étranges qui navraient le cœur ; c’était comme le cri suprême d’un équipage en détresse. La pluie tombait par torrents, et les vents déchaînes emportaient des trombes d’eau en violentes rafales. De temps à autre retentissait, dans le creux des rochers et au faîte des vieilles tours féodales en ruines, le cri lugubre des orfraies que la fureur des éléments empêchait d’aller chercher leur proie, et les hurlements des loups répondaient dans le lointain à cette harmonie sinistre.

Le vulgaire disait que la nuit était épouvantable ; les poëtes diront que c’était une nuit romantique.

Dans un élégant cottage de l’île de Jersey, Victor Hugo veillait. Il méditait le plan d’un nouvel ouvrage qui devait mettre le sceau à sa renommée, et au bas duquel sa main écrirait l’opus exegi d’Horace.

C’était une épopée monumentale sur les misères du siècle. Déjà les personnages qui devaient jouer un rôle dans cette épopée se pressaient sur le seuil de son imagination et heurtaient à l’huis de son poème. C’étaient des jeunes filles éplorées comme les vierges de Verdun chantées jadis par le poëte, des enfants malheureux et plaintifs dont l’enfant-roi, Louis XVII, mort vieux de douleur avant d’avoir douze ans, conduisait le chœur gémissant, des destinées brisées, des jeunesses fanées dans leur fleur, des génies incompris, des vertus méconnues et calomniées; en un mot, la grande armée des affligés traversant la vallée des larmes en jetant un cri de souffrance vers la terre, un cri d’espoir vers Dieu. Le christianisme, ce vieil ami de l’enfance et de la jeunesse du poëte, lui apparaissait comme le consolateur de toutes les afflictions, le soutien de toutes les épreuves, le dernier espoir des désespérés, le père des orphelins, le compagnon des abandonnés, l’immortel médecin de toutes les maladies de l’âme et du corps. Les croyances qu’il avait reçues d’une mère chrétienne se réchauffaient dans son cœur; il allait peut-être écrire un livre sublime, et son ange gardien n’attendait plus que la prière prête à sortir de ses lèvres pour la porter au pied du trône de Dieu, qui donne à la terre le soleil et la rosée et l’inspiration au poëte.

L’ange attendit en vain. Le poëte ne pria pas. L’orgueil, l’amour de la popularité, la confiance présomptueuse du génie dans ses propres forces, l’esprit de révolte et de haine, arrêtèrent sur ses lèvres entr’ouvertes la prière prête à commencer. Peu à peu la rêverie de Victor Hugo se changea en rêve, il tomba dans une espèce de sommeil magnétique, et, les yeux ouverts quoique endormi, il continua, la tête appuyée sur sa main, su méditation somnambulique sur le sujet et le plan de son poëme.

Or vous saurez que, dans cette nuit néfaste, Méphistophélès cheminait dans les airs, porté sur ses ailes de chauve-souris, dans la compagnie d’Astaroth, son camarade de chute et de peine. Les deux esprits malfaisants allaient à la chasse des âmes, et ils espéraient rapporter de leur course un riche butin. En passant devant l’île de Jersey, Astaroth, qui venait de faire une rafle d’âmes en planant sur les vagues, où s’étaient engloutis plusieurs pêcheurs dont les deux dernières paroles avaient été une malédiction et un blasphème, dit à Méphistophélès :

— Maître, vous qui voyez tout, voyez-vous cette lumière qui brille là-bas au milieu de cette effroyable nuit ?

— Je la vois.

— Maître, vous qui savez tout, savez-vous ce qui se passe [?] dans ce chalet solitaire ?

— Je le sais. Un homme y est assis, il est en proie à un sommeil sans repos qui lient de la méditation et du rêve.

— Quel est cet homme ?

— Un poëte, autrefois notre ennemi, maintenant un de mes féaux, et à qui je dois de nombreuses recrues. C’est lui qui, dans l’avant-dernier de ses poèmes, fait embrasser Bélial et Jésus-Christ, et qui, dans le dernier, n’a pas craint de mettre un pourceau en face de Dieu lui-même :

Le pourceau misérable et Dieu se regardèrent.

— Victor Hugo !

— C’est toi, diablotin, qui l’as nommé.

— Maître, une idée.

— Et laquelle ?

— Nous faisons un métier de dupes. Nous sommes là à glaner des âmes depuis le commencement de la nuit, quand il y a peut-être à faire dans ce chalet un coup de partie. Vous savez que c’est toujours par les écrivains que nous avons réussi à gagner nos plus fructueuses batailles. Le meilleur de nos auxiliaires, c’est un mauvais livre.

— Entrons, répondit Méphistophélès qui devinait avant de comprendre.

Ils volèrent à tire-d’aile vers le chalet, et, sur leur passage, les croassements des oiseaux de la nuit devinrent plus lugubres, et les nuages, aussi noirs que des taches d’encre, mirent le ciel en deuil. La lune, comme un œil solitaire ouvert au milieu du ciel, les regardait tristement passer.

Portes et fenêtres, tout était clos hermétiquement. Cependant les deux esprits malfaisants entrèrent avec autant de facilité que si les portes et les croisées étaient grandes ouvertes.

— Ah ! ah ! s’écria en ricanant Méphistophélès après avoir jeté un rapide regard sur le poëte endormi, je m’aperçois que nous sommes ici chez nous. Voilà un front qui ne s’est pas armé contre nos entreprises nocturnes du signe de la croix. Allons, Astaroth, vite à la besogne ! Ouvre-moi ce crâne et lève-moi le couvercle prestement, pour que je voie mieux ce qui s’y passe.

A ces mots, Astaroth traça avec son doigt une ligne de feu autour du front du poëte, qui rêvait dans ce moment que M. Viennet était descendu sur les bords du Styx pour aller quérir main forte, qu’il en avait ramené M. de Jouy, et que les deux poëtes classiques essayaient de le scalper. C’était une torture atroce, inouïe, insupportable. Cependant l’opération avait été aussi rapide que la pensée. Dupuytren lui-même, dont la main trépanait avec une dextérité que les chirurgiens appelaient de la grâce, aurait eu quelque chose à apprendre en voyant faire Astaroth.

— Bien ! bien ! murmura Méphistophélès, nous sommes arrivés au bon moment, le cerveau est en travail, la marmite autoclave est à l’état d’ébullition, et notre visite n’aura pas été inutile. Astaroth, passe-moi ta fourche.

Il n’y a pas de diable en voyage qui n’ait un bout de fourche sur lui. C’est l’outil du métier. Astaroth passa donc sa fourche à Méphistophélès, qui se mit gravement à la tailler, ainsi que la sienne.

— Et que voulez-vous faire de ces deux fourches ? demanda Astaroth.

— Ne le devines-tu pas ?

— Non, maître.

— Eh bien, j’en veux faire une fourchette et une cuiller.

— Et à quoi vous serviront-elles ?

— A faire une salade dans un crâne ! s’écria Méphistophélès avec un affreux éclat de rire.

En cet instant même Méphistophélès commençait sa salade diabolique. Armé de ses deux tronçons de fourches, dont il se servait en guise de couvert de buis, il tournait et retournait, d’une main infatigable, dans le crâne du poète les idées, les sentiments, les images, les métaphores, les caractères qui s’y trouvaient en fusion, de manière à produire dans son cerveau la macédoine la plus étrange, le plus épouvantable gâchis.

Le forçat coiffé du bonnet du bagne et traînant son boulet se trouvait nez à nez avec l’évêque coiffé de sa calotte et tenant des chandeliers d’argent qu’il lui offrait; un pain de quatre livres flottait dans l’air et venait se mettre sous la dent... sous une dent nouvellement arrachée ! un Cupidon classique voltigeant au-dessus d’un cœur percé d’une flèche mythologique couronnait le forçat, dont il célébrait l’apothéose drolatique, tandis qu’un sergent de ville à l’air rogue et au tricorne menaçant, un Javert quelconque, cherchait à l’appréhender au collet ; un hanneton sorti des Mystères de Paris de M. Sue venait inces­samment heurter en bourdonnant les parois endolories du crâne du poète, tandis que la mouche du coche de la Fontaine prenait son vol à côté d’une bouteille de vin de Champagne dont le bouchon sautait, symbole d’une joyeuse orgie.

— Si nous y mettions encore le cygne du Luxembourg ? disait Astaroth.

— Mettons-y le cygne du Luxembourg.

— Et la bataille de Waterloo, sans oublier le gros mot de Cambronne ?

— Va pour Waterloo et pour le gros mot.

— Et un dithyrambe contre les couvents ?

— Va pour le dithyrambe.

— Et une dissertation sur les égouts de Paris ?

— Mettons les égouts.

— Et un gamin de Paris en guise de piment ?

— Va pour le gamin de Paris.

Méphistophélès ne cessait de tourner et de retourner sa salade. Sa redoutable cuiller ramassait d’un côté une grisette éplorée et les mains jointes, —vraisemblablement l’infortunée Fantine, — tandis que sa fourchette rencontrait de l’autre un enfant nouveau-né, — très probablement l’innocente Cosette, — qu’il accommodait avec le chapeau galonné de Cambronne, sur les lèvres duquel, — ai-je dit les lèvres ? — un gamin de Paris, enjambant le crâne de Victor Hugo comme s’il s’agissait de la balustrade de la Porte-Saint-Martin, prenait un mot célèbre qu’il semblait jeter au public avec un pied de nez. Ce qui gênait le plus le poëte dans ce va-et-vient de toutes choses, c’était un étudiant qui, accoudé sur son orbite frontal, —qui sait ? Enjolras ou Lesgle de Meaux, dit Bossuet, — fumait philosophiquement sa pipe en tournant le dos à une barricade, tandis qu’un plongeur, peut-être Javert, déterminé au suicide, piquait une tète dans l’intérieur du cerveau du poëte, et qu’à l’autre extrémité un cygne semblait parler à l’oreille d’un juge penché lui-même vers l’oreille du poëte, sur laquelle Méphistophélès s’était perché pour suivre les progrès de son assaisonnement. Au-dessus de cette mayonnaise intellectuelle, l’argot et le style, représentant le vinaigre et l’huile, se donnaient le baiser Lamourette et fraternisaient.

C’était bien le plus épouvantable galimatias qui, de mémoire d’homme, eût eu un crâne humain pour saladier.

Le chaudron des sorcières de Macbeth n’était que de la Saint-Jean à côté.

Le chaos pouvait passer pour distinct, clair, plein de cohérence et de régularité.

Les arlequins de la place Maubert, où, selon les Mystères de Paris de M. Sue, on trouvait de tout, depuis des débris de truffes et de homards jusqu’à de vieux souliers, étaient un plat presque classique.

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Le thé de Mme Gibou avec le sucre, l’huile, le poivre, la crème, le sel, le vin, le miel, le bouillon, et la cassonade, une boisson simple et élémentaire.

L’œil railleur et la bouche plissée par un sourire méchant et diabolique, Méphistophélès suivait, avec un amour-propre d’auteur qu’il ne prenait pas la peine de cacher, les progrès de son œuvre. Quant à Astaroth, il cherchait à apercevoir de côté ce qui se passait dans l’intérieur de la tête du poëte, et, si ses deux mains n’avaient pas été occupées à retenir le couvercle du saladier, pardon, je veux dire la calotte du crâne, il se serait tenu les côtes, tant il riait du bon tour qu’il jouait à Victor Hugo et à ses lecteurs.

La nuit s’écoula dans ce labeur infernal. Au premier rayon du jour, Méphistophélès et son compagnon disparurent.

Le poëte, qui avait passé la nuit la tête appuyée sur sa main, se réveilla à demi : — C’est étrange, dit-il, il me semble que pendant mon sommeil mes idées se sont arrangées d’elles-mêmes dans ma tête. C’est cela ! un forçat, un évêque, un boulet, une mitre, Cambronne, un gamin de Paris, le cygne du Luxembourg, les barricades de juin, Cupidon, l’idylle, le mélodrame, le pain de Jean Valjean, les dents de Fantine, le vin de Champagne, le style, l’argot, Waterloo, une enseigne de cabaret, le policier Javert. Écrivons le titre : les Misérables !

Deux éclats de rire stridents retentirent à l’une et à l’autre oreille du poète, et il lui sembla qu’il entendait ce mot retentir dans le lointain, peut-être comme le jugement de la postérité :

P. S. Cette légende a été racontée à ma plume par l’ingénieux et spirituel crayon de Bertall. Plus habile qu’elle, il a résumé pour les lecteurs de la Semaine des Familles le livre des Misérables, qu’elle n’aurait pas osé leur raconter. C’est pourquoi je ne fais que contresigner, ne varietur, son poème traduit en vile prose par son dévoué collaborateur. - de Félix-Henri

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lendehors Membre 372 messages
Baby Forumeur‚
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Découvert sur l'excellent site Cleptafire, le photographe Yougo Jeberg ...

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25 ans c’est le bel âge, celui de toutes les odyssées, toutes les expériences. A 25 ans on s’accoquine avec la foudre, les éclairs, faut que ça aille vite, on fraye un temps avec la fureur, on songe toujours à partir, la semelle décollée, peu importe où, l’horizon comme seul empêchement. A 25 ans on a l’innocence cousue au tripe, à 25 ans on ne sait pas la mort, mieux : on lui propose d’aller se faire foutre -et on s’amuse qu’elle n’y puisse pas grand chose… 25 ans c’est aussi l’âge de Yougo Jeberg, un photographe français qui passe son temps entre Paris, New York et Los Angeles. Son travail est à l’image de ses jeunes années : plein de vie, de musique, de liqueur et de route… « Ce que j’aimerais qu’on dise de mon travail ? Que la photographie est pour moi un prétexte à des rencontres, que cela doit encourager ceux qui regardent mes images à venir me proposer des choses encore plus folles » : à Cleptafire on a dit : « Banco ! »

Yougo donc -c’est ainsi qu’on le surnomme, nous fredonne une chanson connue : « Smell like teen spirit », ce riff de toute une génération, vous l’entendez dans vos oreilles ? Bon bah comme dans le refrain, ouvrez grandes les narines alors : ça pue-t-il pas notre jeunesse ? Enfin, celle qu’on aurait tous voulu avoir… Parce que, le moins qu’on puisse dire, c’est qu’on en prend plein les poumons, on en prend plein les regrets aussi, peut-être, ceux de n’avoir jamais osé faire ça, là ce qu’on voit, « partir », « errer », se défoncer au kilomètre, se vider la jeunesse sur la route, vomir le plus longtemps possible, appuyer sur la pédale, pas le frein mais l’accélérateur : avant que l’ennui et le sérieux ne nous rattrapent.

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Mais Yougo en plus de tracer la route droit devant, mine de rien, nous donne une leçon… Laquelle ?! Brûler ses vingt ans par les deux bouts, ok : puis après ?

Aujourd’hui, vous faîtes quoi, vous êtes où ? Vous avez deux gosses, avec derrière la virgule la moitié d’un troisième à venir ? Et métro ça rime toujours avec « bouleau » au fait ? Oui, oui vous m’avez bien compris, « bouleau » je parle de l’arbre, parce qu’après la dernière rame, au bout de la correspondance forestière, il y aura le poinçonneur des « sapins » : ça ne sentira plus le jeun’s vous verrez, mais le bonbon la vosgienne.

Pulsions de vie, Bacchanales, pampres de chairs, du bitumes et de la poussières, de la vitesse, toujours de la vitesse, le pied qui appuie à fond, pour que la mort ne puisse tenir la distance, pour que l’ennui et le sérieux jamais ne viennent. Ha si seulement on pouvait tenir la distance…Rien que pour ça, les images de Yougo sont nécessaires : se rappeler d’où on vient et surtout où on va… Sur la route donc, à défaut de savoir pour où, pour qui, pour quoi, avec ces gamins on roule encore et toujours et c’est là bien l’essentiel : » Our little group has always been and always will until the end « , il disait ça aussi Kurt.

« Chacun traduira mes images comme il veut bien l’entendre, il s’identifiera peut-être, moi je mets juste des images sur internet, pour avoir des souvenirs et pour que les gens dont j’ai pris un moment de vie aient une trace de nos escapades. »

« Avec quoi je travaille ? Plusieurs appareils en fait, la majorité sont des reliques trouvées sur des brocantes. Des références ? Robert Frank, mais je pense qu’on s’inspire surtout entre copains. »

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http://www.cleptafire.fr/ ( à partager sans modération .... )

www.yougojeberg.com

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Membre, ...... Phoenix ..... Une cendre déterminée, 53ans Posté(e)
Amazones Membre 13 439 messages
53ans‚ ...... Phoenix ..... Une cendre déterminée,
Posté(e)

Bonjour :blush:

---

"De chaque côté s’élevaient en pentes

escarpées des masses énormes de roches

calcaires, rugueuses, lépreuses, effritées,

fendillées, pulvérulentes, en pleine

décomposition sous l’implacable soleil. Ces

roches ressemblaient à des ossements de mort

calcinés au bûcher, bâillaient l’ennui de l’éternité

par leurs lézardes profondes, et imploraient par

leurs mille gerçures la goutte d’eau qui ne tombe

jamais. Leurs parois montaient presque

verticalement à une grande hauteur et déchiraient

leurs crêtes irrégulières d’un blanc grisâtre sur un

fond de ciel indigo presque noir, comme les

créneaux ébréchés d’une gigantesque forteresse

en ruine.

Les rayons du soleil chauffaient à blanc l’un

des côtés de la vallée funèbre, dont l’autre était

baigné de cette teinte crue et bleue des pays

torrides, qui parait invraisemblable dans les pays

du Nord lorsque les peintres la reproduisent, et

qui se découpe aussi nettement que les ombres

portées d’un plan d’architecture"

Le roman de la Momie de Théophile Gauthier

Livre

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AlbertAliReiss_zps9be0432c.jpg

Albert Ali Reiss - Ailleurs en 1977

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Sous l'Ancien Empire, les opérations d'embaumement se déroulent sous une tente installée à proximité des nécropoles. Puis, des constructions en brique, appelées ouabet, la 'place pure" ou la "belle maison" se substituent aux tentes.

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"Les embaumeurs ouvrent le flanc gauche du défunt avec une lame tranchante afin d'en retirer les viscères : intestins, poumons, foie estomac sont placés dans des urnes appelées vases canopes et déposés, pour les tombes les plus riches, dans un coffre-chappelle à côté du sarcophage. L'abdomen est nettoyé, purifié avec un vin de palme et des aromates broyés. Le cerveau est extait à l'aide d'un crochet en bronze introduit par les narines. Le coeur est laissé en place ou remplacé par un scarabée sacré. Le corps du défunt est enduit d'un produit antiseptique, les incisions refermées avec de la résine et les narines bouchées avec des grains de poivre. On laisse le corps se dessécher pendant soixante-dix jours, avant de le laver, puis de le rembourrer de toile de lin imbibé de résine, de lichen, de sciure afin de lui redonner une apparence humaine. Après l'onction de parfums et le bain de natron (carbone de sodium naturel) destiné à dessécher le corps, le prêtre embaumeur récite des litanies, tandis que le mort est enroulé dans des bandelettes selon un rituel précis: d'abord les doigts, les uns après les autres, puis les bras, les jambes, le corps, enveloppé dans un grand linceul découpé en fines lanières, enfin la tête. Entre les bandelettes sont déposées des amulettes, destinées à protéger le défunt dans son voyage." - du livre les momies et leurs fascinants secrets

Momie2_zpsa4d0cf75.jpg

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