Plouf
Boum. Ma tête a explosé. Non, ce n'est que ma passivité, un mélange de langueur et d'animosité. Hier encore, je me tenais debout, la corde au cou. Hier encore, je cherchais les raisons qui me feraient tanguer du haut de mes réussites. Je ne les ai toujours pas trouvés. Peut-être devrais-je jouer ma vie au dé? Car il est plus facile de mourir par impartialité que par fidélité à une idée : la première ne fait pas dans les sentiments. Et je réessaie, je réessaie désespérément, incapable de justifier la mort. Etre souffrant, être égaré, voilà de quoi nourrir le désir de finir étouffé. Mais leur absence? Qui irait, sérieusement, se suicider parce que son humeur n'est pas poignardée, massacré par la puissance de son émoi? Se détruire par manque d'absurdité, c'est là tout mon problème. J'étais pourtant bien parti, plus jeune : une inconstance cachée, une dépendance à tout ce qui me nuisait, et une velléité aussi assurée que semblait l'être mon apathie en quelque sorte innée. Et voilà que maintenant je me sens bien, aussi bien que peut l'être celui qui n'a jamais connu que douleurs et échecs répétés. Le comprenez-vous?
J'espérais presque y arriver ou, à défaut, glisser. Parfois, le hasard sait se faire juste. Il n'en a jamais été ainsi dans ma chambrée. Peut-être devrais-je payer quelqu'un pour m'y aider? Il existe bon nombre d'hommes de bonne volonté après quelques billets échangés. Nos amis les plus assurés sont sûrement ceux qui veulent que notre tête balance deux pieds au-dessus du parquet. Je verrai. De toute façon, rien n'est pressé, et il est heureux que je me sois dégonflé. Cela me laisse le temps de mieux m'organiser. Les gens ne se rendent pas compte : la mort, c'est tout un métier. Un métier où il faut chaque jour innover pour ne pas être privé de notre entière liberté. Vraiment, où allons-nous, si nous ne pouvons même plus choisir dignement et tranquillement d'en terminer? Ce n'est cependant pas aussi facile. Cela suppose de l'expérience, cela suppose des moyens. Nous voyons en ces êtres de la lâcheté, alors même que nous patientions ici, anxieusement, craignant d'un jour se faire priver d'un nouveau tour en nos vies ratées. Où est le courage? Où est la réalité?
J'avais coutume de simuler ma pendaison tous les matins afin de bien me lever. J'ignorais quand j'aurai à me lancer, mais je tenais à être prêt lorsque cela arriverait. Non, sincèrement, vous devriez vous y préparer. La mort n'est pas une mince affaire : cela ne s'improvise pas. Mais, vous le verrez.
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