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Au bord des mondes

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chekhina

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Membre, 55ans Posté(e)
chekhina Membre 558 messages
Forumeur alchimiste ‚ 55ans‚
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Comment peut-il y avoir une anthropologie d'un monde où les humains ne sont pas présents (anthropologie de la nature telle qu'en parle Descola). 

Réponse : les humains sont présents partout dans la nature et la nature elle-même est le produit d'une anthropisation. Ainsi la forêt amazonienne n'est pas une forêt vierge, elle a été transformée par des siècles de pratiques culturales.

La distinction humain/ non-humain n'entérine pas une fracture insurmontable, elle distingue deux mondes irrémédiablement intriqués.

C'est aussi d'intrication dont parle Nathalie Cabrol (l'astrobiologiste) lorsqu'elle note que la vie et l'environnement ont co-évolué. L'environnement de la vie, ou encore l'inanimé a co-évolué avec la vie, dans la mesure où la vie a engendré un nouvel inanimé (de nouveaux matériaux) tandis que l'inanimé a imposé des conditions d'évolution à la vie. L'animé et l'inanimé sont intriqués.

Meziane écrit : "L'anthropologie (version Descola) examine la nature non comme un objet séparé des humains mais comme une réalité sans cesse recomposée à travers une multiplicité d'ontologies"

Les ontologies sont donc des discours relatant des relations spécifiques entre humains et non-humains (ou entre vie et inanimé).

Ces discours sont délicats à préciser car les mots mêmes de humain, non-humain, vie, inanimé sont variables quant à leurs définitions quant aux point de vue adoptés. 

 

 

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chekhina Membre 558 messages
Forumeur alchimiste ‚ 55ans‚
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Dans sa conférence "Sur l'instabilité de la (notion de) nature" [Face à Gaïa ; huit conférences sur le nouveau régime climatique ; chez la Découverte ] Bruno Latour, qui cherche lui aussi à sortir et du dualisme nature/culture et du concept "nature" écrit : "Nous allons essayer de descendre de la "nature" vers la multiplicité du monde...Cette opération conduit à poser ces deux questions : quels existants ont été choisis et quelles formes d'existence ont été préférées".

Il note le vocabulaire afférent à ces questions : métaphysiques, ontologies, cosmologies, mais ce qui est essentiel ce sont bien ces questions : quels existants ont été CHOISIS par tel ou tel collectif (telle ou telle civilisation) et quelles relations entre ces existants ont été Préférés. Avant même donc que se développe les métaphysiques, les ontologies ou les cosmologies il y a un CHOIX et une Préférence, les collectifs choisissent les existants et les types de relation avant de développer ensuite leurs discours. Ou encore : les discours philosophiques se déroulent à l'intérieur de choix préalables.

Remonter jusqu'à ces choix est une opération  difficile car elle oblige à provincialiser sa propre culture, ce qui est sans doute difficile pour les Occidentaux mais tout aussi difficile pour les non-Occidentaux, chaque collectif croyant en la vérité (absolu) de sa philosophie, chaque collectif ne s'apercevant pas que sa vérité est d'abord une croyance ou une hypothèse. 

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  • 3 semaines après...
Membre, 55ans Posté(e)
chekhina Membre 558 messages
Forumeur alchimiste ‚ 55ans‚
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J’ai abandonné la lecture de Meziane et je n’ai pas réussi à écouter sa conférence. Il soulève pourtant des questions qui m’intéressent mais sa pensée s’enfonce dans des méandres  qui m’étouffent. 


J’ai noté que l’animisme est caractérisé par Descola non par l’âme mais par l’intériorité. Ce concept me mobilise car je pense que ce que nous appelons : la vie,  se caractérise justement par cette notion d’intériorité. Nous ne parvenons toujours pas à définir la vie. Il existe plus d’une centaine de définitions qui sont en fait des descriptions. Il manque quelque chose à toutes ces descriptions. Si j’ajoute à toutes les descriptions cette qualité là : l’intériorité, alors je pense que nous progressons. Reste à comprendre ce que cela signifie : l’intériorité. 
 

Il y a chez Meziane un discours sur le colon qui me séduit. Il dit que la colonisation certes affecte le colonisé mais qu’elle affecte aussi le colon. Le colon ne sort pas indemne de la colonisation. Sa représentation du monde en sort affectée. Le prix à payer dans notre propension à dégrader un humain dans son humanité, ce prix à payer c’est de subir à notre tour une dégradation morale.
 

Il y a enfin cette façon qu’ont les anthropologues de chercher les raisons inconscientes qui président à l’accomplissement des actes observables ( conscients). Ce recours à l’inconscient est périlleux, d’autant que l’anthropologue est doté lui même d’un inconscient dont il est probable qu’il ne sait rien.  
 

Ha il y a encore autre chose : la sécularisation, concept important chez Meziane. La sécularisation précède t elle la colonisation ? Mais il y a aussi cette autre question : la sécularisation peut elle rendre compte de l’émergence de l’esprit du capitalisme ? 

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chekhina Membre 558 messages
Forumeur alchimiste ‚ 55ans‚
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Le sentiment d'une présence est issu de la perception d'une action sur soi, une action issue d'un "extérieur". Quelque chose, issue d'un extérieur, agit sur moi au point d'alerter ma conscience.

L'immédiateté c'est de penser qu'il s'agit d'une illusion, cette immédiateté de pensée étant la conséquence de l'ambiance culturelle locale ou régionale ou civilisationnelle locale. Nous sommes tellement encombrés par ces déchets du passé, Dieu et autres Athéismes, qu'il nous devient difficile de nous sortir de cette déchèterie.

Si je parviens à m'extirper de cette déchèterie alors je constate qu'il ne s'agit pas d'une illusion. Il y a bien action de "quelque chose" issue d'un extérieur, même si cette action est transmise par un appareil mental intérieur (lequel est constamment soumis à un bombardement particulaire externe, via les sens).

Du coup cela redonne du crédit à la tentative de Jung lorsqu'il émet l'hypothèse d'un inconscient collectif. Mais le choix de ses mots, inconscient et collectif, doit être revu. Je préfère tenter d'utiliser des concepts comme réseau, au sein duquel sont localisés les existants, les étants. Cela signifie alors que tous les étants sont reliés entre eux par des "forces" agissant en réseau. Cela signifie que nous ne sommes pas séparés des autres étants de l'univers mais reliés à eux par ce réseau (ce champ dirait on en physique). En résumé nous sommes en connexion avec l'univers entier. Nous ne sommes pas isolés. Mais au point où nous en sommes dans nos connaissances nous ne savons rien des forces qui gouvernent ce réseau.

Quand je parle de "présence" probablement suis-je en train d'humaniser l'action de ces forces. 

Bon sang j'ai posté ce message dans le fil "au bord des mondes" alors que je voulais le poster dans le fil "philosophons" !

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Membre, 27ans Posté(e)
al-flamel Membre 804 messages
Forumeur expérimenté‚ 27ans‚
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Le 18/05/2024 à 23:29, chekhina a dit :

J’ai abandonné la lecture de Meziane et je n’ai pas réussi à écouter sa conférence. Il soulève pourtant des questions qui m’intéressent mais sa pensée s’enfonce dans des méandres  qui m’étouffent. 


J’ai noté que l’animisme est caractérisé par Descola non par l’âme mais par l’intériorité. Ce concept me mobilise car je pense que ce que nous appelons : la vie,  se caractérise justement par cette notion d’intériorité. Nous ne parvenons toujours pas à définir la vie. Il existe plus d’une centaine de définitions qui sont en fait des descriptions. Il manque quelque chose à toutes ces descriptions. Si j’ajoute à toutes les descriptions cette qualité là : l’intériorité, alors je pense que nous progressons. Reste à comprendre ce que cela signifie : l’intériorité. 
 

Il y a chez Meziane un discours sur le colon qui me séduit. Il dit que la colonisation certes affecte le colonisé mais qu’elle affecte aussi le colon. Le colon ne sort pas indemne de la colonisation. Sa représentation du monde en sort affectée. Le prix à payer dans notre propension à dégrader un humain dans son humanité, ce prix à payer c’est de subir à notre tour une dégradation morale.
 

Il y a enfin cette façon qu’ont les anthropologues de chercher les raisons inconscientes qui président à l’accomplissement des actes observables ( conscients). Ce recours à l’inconscient est périlleux, d’autant que l’anthropologue est doté lui même d’un inconscient dont il est probable qu’il ne sait rien.  
 

Ha il y a encore autre chose : la sécularisation, concept important chez Meziane. La sécularisation précède t elle la colonisation ? Mais il y a aussi cette autre question : la sécularisation peut elle rendre compte de l’émergence de l’esprit du capitalisme ? 

Bonjour @chekhina, j'ai mis en suspend mes lectures dont celle de Meziane.

J'en reprendrais le résumé dès que j'en aurai le temps et la force. 

De ce que j'ai compris de la lecture de Meziane, c'est effectivement que la sécularisation résulte d'un processus d'adaptation impériale faite par les Grandes découvertes et les grandes conquêtes de l'époque moderne et contemporaine. Et plus je me renseigne sur l'histoire des autres empires et des autres religions, plus je pense que cette affirmation tombe sous le sens. 

Il y a également un lien intéressant qui nécessiterait d'être approfondi entre d'un côté la sécularisation comme processus impérial et colonial chez Meziane et de l'autre ce que Pierre Musso appelle Religion Industrielle ou fétichisme industriel, cette croyance selon laquelle l'industrie serait plus ou moins l'alpha et l'oméga du salut des Hommes, et de l'arrivée de l'Homme dans son essence véritable qui renferme l'absolu. C'est je crois cela qui se joue dans l'esprit du capitalisme (mais pas que dans le capitalisme d'ailleurs...), ça et une ethique du contrat privé comme façon d'organiser l'entente entre les Hommes. 

L'ambition de dépassement de cet Esprit par un autre, plus écologique, plus social consiste à marcher sur un chemin dont on ne perçoit pas les bords ni la destination mais au delà desquels on aperçoit l'abîme. À moins que l'abîme fasse partie du chemin ? 

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chekhina Membre 558 messages
Forumeur alchimiste ‚ 55ans‚
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Finalement je vais rester sur ce fil : « au bord des mondes » et abandonner le fil « philosophons » ; je me tiens comme Meziane, moi aussi, au bord des mondes. Finalement j’éprouve une certaine tendresse pour Meziane ( mais il m’agace parfois, tant sa pensée est touffue).

Je suis en train de créer une disponibilité en moi. 
Parfois je m’allonge et je me dis : je vais mourir, et quand je me dis cela alors j’aménage en moi cette disponibilité. 

Cette disponibilité suppose que je pense qu’il existe une réalité, au delà de moi, au delà des hommes. Cette réalité apparaît quand je me prépare à mourir. Il me faut m’appuyer sur cette dramatisation pour parvenir à chasser tous les bruits de ce monde. 

C’est parce que je pense qu’il existe une réalité au delà de moi et des humains que je forme ce sentiment de présence. J’humanise quelque chose d’inconnu, il est bien possible que j’humanise ce que Meziane appelle le non-humain.

L’humain n’est pas le seul à porter une vitalité, au delà de lui, au bord des mondes, il existe une réalité qui porte en elle une vitalité dont nous ne savons rien, dont je ne sais rien. En créant cette disponibilité cette réalité  vient étendre son onde jusque dans mon esprit. Et je ressens cela comme étant une présence, même si ce mot : présence, est une humanité dont je recouvre peut être indûment  l’onde. 
 

Ainsi au bord des mondes il y a cet océan mystérieux qui porte lui aussi la Vie. Je marche sur la plage, et son eau doucement glisse sur mes chevilles. 
 

Ah tiens @al-flamelvous m’avez écrit. Je vais prendre le temps de vous lire et de vous répondre. Je vais reprendre la lecture de Meziane. En fait il me porte à réfléchir à plein de sujets que j’ai laissés en suspens. Il est très inspirant.

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chekhina Membre 558 messages
Forumeur alchimiste ‚ 55ans‚
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Il y a 2 heures, al-flamel a dit :

Bonjour @chekhina, j'ai mis en suspend mes lectures dont celle de Meziane.

J'en reprendrais le résumé dès que j'en aurai le temps et la force. 

De ce que j'ai compris de la lecture de Meziane, c'est effectivement que la sécularisation résulte d'un processus d'adaptation impériale faite par les Grandes découvertes et les grandes conquêtes de l'époque moderne et contemporaine. Et plus je me renseigne sur l'histoire des autres empires et des autres religions, plus je pense que cette affirmation tombe sous le sens. 

Il y a également un lien intéressant qui nécessiterait d'être approfondi entre d'un côté la sécularisation comme processus impérial et colonial chez Meziane et de l'autre ce que Pierre Musso appelle Religion Industrielle ou fétichisme industriel, cette croyance selon laquelle l'industrie serait plus ou moins l'alpha et l'oméga du salut des Hommes, et de l'arrivée de l'Homme dans son essence véritable qui renferme l'absolu. C'est je crois cela qui se joue dans l'esprit du capitalisme (mais pas que dans le capitalisme d'ailleurs...), ça et une ethique du contrat privé comme façon d'organiser l'entente entre les Hommes. 

L'ambition de dépassement de cet Esprit par un autre, plus écologique, plus social consiste à marcher sur un chemin dont on ne perçoit pas les bords ni la destination mais au delà desquels on aperçoit l'abîme. À moins que l'abîme fasse partie du chemin ? 

C’est en lisant Meziane que je me suis rappelé que cette origine du capitalisme était une question que je n’avais toujours pas résolue. Je n’avais pas pensé à cette idée de sécularisation. Je vais la fouiller.

Ce livre de Pierre Musso je vais le commander depuis le temps que j’en entends parler. 
Cette origine du capitalisme est importante à élucider  car elle a jeté l’humanité dans une civilisation nouvelle qui a notamment complètement modifié notre rapport avec le temps et avec l’espace. Il y a bien sûr bien d’autres conséquences. L’éthique du contrat privé semble être le fondement idéologique du néo libéralisme dont je me suis aperçu récemment qu’il avait été sciemment construit par des intellectuels juste avant la guerre de 1939. Je ne pensais pas que l’idéologie du néo libéralisme résultait à ce point là de décisions délibérées, conscientes, mises systématiquement en œuvre. 
Nous ne pourrons pas dépasser ces idéologies capitalistes et néo libérales par la volonté. Nous ne pourrons les dépasser que s’il existe réellement un monde au delà des mondes, et s’il existe, que si nous parvenons à le percevoir. Il est nécessaire que le non humain existe réellement. Sinon l’humanité disparaîtra en développant toujours plus cette mauvaiseté que nous voyons aujourd’hui croître partout et qui conduit les uns à souhaiter la destruction des autres pour x raisons qui ne sont que des prétextes pour véhiculer cette étrange mauvaiseté. C’est étrange cet effondrement actuel dans des guerres désirées. À mon avis cette mauvaiseté croissante provient d’une énergie humaine qui ne rencontre pour le moment que le néant ou l’abîme lorsqu’elle vient buter sur le bord des mondes sans rien apercevoir au delà. 

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chekhina Membre 558 messages
Forumeur alchimiste ‚ 55ans‚
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Quelque chose m’arrête…Je ne sais pas si je vais remonter la piste ouverte par Meziane. Parce que je ne sais pas si je trouverai la clé. Je crois que la piste n’arrêtera  jamais de remonter.

 
Je trouverai bien une cause au tragique de nos temps, la connaissance de la cause  rehaussera les contours de la tragédie redoutée, mais elle ne l’empêchera pas. 

Connaître la cause illuminera  les obscurités mais elle confirmera aussi l’inéluctable.

 
Je me perds dans une étude sans fin…Je cherche à éviter ce qui est déjà arrivé, je m’efforce sans cesse de trouver la cause qui puisse ruiner une réalité qui est pourtant déjà actualisée. 


Je ne pourrai jamais empêcher que les choses soient.

C’est une quête du pouvoir magique de la pensée. Mais même si je trouve in fine la pensée magique ce sera trop tard : les choses sont.

Si je trouve la pierre philosophale, la preuve ou la cause celée, alors je communierai avec les destins tous réunis et je serai  l’un de ces destins. 
 

Nous descendrons la rue dans la ville, tous vêtus de noir, nos fusils libéreront  les balles meurtrières, nous marcherons, silencieux, nous sommes la guerre, froide et calme, nous sommes la terreur au visage de glace. 
 

Ce ne sont plus les causes que je dois rechercher, je veux être ce que je suis devenu dans la forge de leur infini ressentiment, le ressentiment des puissants contre la Vie. 

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