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Lettres à Samuel

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aliochaverkiev

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satinvelours Membre 3 006 messages
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Lettre 49-1

17 janvier 2019

Samuel,

Pour bien comprendre le rôle que tinrent les Judéens dans la période historique qui commence en 750 avec l’avènement des Abbassides et qui sera étudiée, dans cette lettre, jusqu’au début du neuvième siècle, il est nécessaire de présenter les deux Empires de cette époque : l’Empire des Abbassides et l’Empire carolingien. Des relations nouées entre ces deux empires surgira une nouvelle branche judéenne qui s’établira en Europe occidentale, centrale et orientale : les ashkénazes.

L’empire abbasside de 750 à 809

Les Omeyyades avaient fini par fonder une aristocratie arabe héréditaire fondée sur leurs armées et le paiement de tributs. Une opposition se forma progressivement. Pour partie elle était composée de malawi, nom donné aux convertis à l’islam issus de populations non arabes, qui revendiquaient l’égalité avec les seigneurs arabes, égalité promise par le Coran à tous les musulmans qui leur aurait permis de ne plus payer l’impôt. Pour une autre partie elle était composée de nombreux Persans qui supportaient mal la domination arabe et enfin pour partie par les chiites, partisans de Hussein le fils du quatrième calife Ali, qui avait réclamé le califat et avait été tué par les Omeyyades.

Une coalition de révoltés finit par lever une armée rassemblée sous le drapeau noir d’un descendant d’Abbas, un oncle de Mahomet. Cette armée massacra les Omeyyades en 749-750. Une nouvelle dynastie régna sur l’empire arabe pendant cinq siècles, la dynastie des Abbassides (nom dérivé de Abbas) dynastie dont le dernier calife fut tué par les Mongols en 1258. Cette dynastie rompit avec le principe aristocratique de descendance. La plupart des califes abbassides furent des fils de mères esclaves d’origine étrangère, seule l’origine arabe du père étant désormais prise en compte.

Un Omeyyade échappa au massacre : Abd al-Rahman. Il débarqua en Espagne en 755 et, à la tête d’une petite armée, il renversa le gouverneur qui avait prêté allégeance aux Abbassides. Il s’empara de Cordoue en 756, établissant une dynastie omeyyade d’Espagne qui dura jusqu’en 1031.

Le deuxième calife de la dynastie des Abbassides, Al-Mansour, qui régna de 754 à 775, transféra la capitale de l’Empire, de Damas en Syrie à Bagdad en Mésopotamie, ville qu’il construisit près de l’ancienne capitale de l’Empire sassanide, Ctésiphon (voir lettre 45). Dans ce choix il faut voir un déport du centre de gravité de l’Empire musulman vers l’ancienne Perse. Les Persans ayant formé l’essentiel de l’armée des révoltés c’est sur eux que les nouveaux maîtres arabes s’appuyèrent. C’est ainsi qu’influencés par la culture orientale perse les califes arabes devinrent des autocrates religieux revendiquant une origine divine. Mais l’influence sassanide se concrétisa surtout dans l’administration de l’Empire. Rompus à l’exercice du pouvoir les Persans restèrent nombreux dans l’administration impériale qu’ils dirigèrent par leur représentant : le vizir. Ils furent rejoints par une nuée de fonctionnaires recrutés chez les mawali originaires des toutes les ethnies du royaume. Depuis le début du règne des Abbassides le vizirat se transmit de père en fils dans l’illustre famille persane des Barmakides.

L’influence arabe s’estompa, le brassage des populations commença à réunir dans une même communauté arabes, demi-arabes et non arabes, les vecteurs de l’unité étant la religion et la langue arabe. Même les Arabes versés dans la pratique de la guerre furent progressivement évincés au profit d’une armée constituée de troupes payées, recrutées parmi des esclaves turcs appelés les mamelouks.

Sous ce double pouvoir, le pouvoir religieux exercé par les Arabes et le pouvoir administratif exercé d’une main de maître par le vizir, de culture persane, l’empire musulman connut un développement économique prodigieux qui rayonna dans le monde entier. Il est légitime de parler ici d’une culture arabo-persane, dont les principes unificateurs furent la religion et la langue, et dont les effets civilisationnels furent déterminants dans l’histoire de l’Europe, de l’Asie et de l’Afrique.

Ce développement économique d’envergure, agriculture, artisanat, production manufacturière, métallurgie, textiles, papeteries (la production de livres produits à moindre coût grâce au papier eut un impact intellectuel et culturel puissant sur la littérature, les sciences, la religion…) s’accompagna d’une activité commerciale intense qui dynamisa non seulement l’économie impériale mais aussi l’économie mondiale. Les marchands de l’Empire ne cessèrent de faire des opérations d’import-export avec l’Inde, la Chine, l’Empire byzantin, la Scandinavie et les peuples de la Baltique (via les Khazars et les Bulgares) l’Afrique et même mais modérément avec l’Europe de l’ouest, région restée relativement repliée sur elle-même.

Le développement des relations commerciales et des activités entrepreneuriales induisit la création d’une activité bancaire. Les changeurs qui assuraient la conversion entre les deux monnaies en circulation, le dirham d’argent d’Orient et le denier d’or d’Occident finirent par créer des établissements bancaires qui facilitèrent et accélérèrent le rythme de l’économie en créant de nouveaux modes de paiement (chèques, lettres de crédit) et en distribuant des prêts.

L’Empire connut son apogée sous le règne d’Haroun al-Rashid (786-809). Ensuite il connut d’importantes divisions politiques sur lesquelles nous reviendrons (mais l’influence de ces divisions sur l’activité économique resta d’abord limitée). Notons que le basculement géographique de l’Empire vers l’Orient provoqua des déclarations d’indépendance politique à l’ouest. L’Espagne en 756, le Maroc en 788, la Tunisie en 800 installèrent des dynasties locales qui restèrent toutefois largement assujetties économiquement à Bagdad.

Note : Haroun al-Rashid prit en affection le fils du vizir, Djaafar, d’origine persane. Celui-ci tomba amoureux de la sœur du calife, Abbassa. Il la demanda en mariage. Haroun le prit mal et accepta à condition que les amoureux n’aient pas de relation conjugale. Ils acceptèrent mais un enfant naquit quand même dans la clandestinité. Haroun finit par en être informé. Alors il fit assassiner Djaafar et tous les adultes de la famille des Barmakides. Il est probable que cette décision brutale permit à Haroun de se débarrasser d’une famille dont il commençait à craindre le pouvoir. Cette élimination provoqua des frictions entre arabes et persans, ce qui explique les divisions politiques mentionnées ci-dessus. Notons enfin que les rapports compliqués entre le calife et le vizir inspira de nombreux contes du recueil des « Mille-et-une nuits » ce qui contribua à faire de Haroun un personnage légendaire, symbole de l’Orient fabuleux.

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satinvelours Membre 3 006 messages
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Lettre 49-2

19 janvier 2019

Samuel,

En 751 les Francs régnaient sur un territoire allant de la vallée du Rhin jusqu’aux Pyrénées. Leur chef Pépin le Bref, fils de Charles Martel, l’homme qui arrêta les Arabes à Poitiers en 742 prit de force la royauté cette année-là. Avec lui une nouvelle dynastie commença d’exercer le pouvoir : celle des Carolingiens faisant suite à la précédente, celle des Mérovingiens, fondée par Clovis le premier roi franc, en 481. A sa mort en 768 son royaume fut partagé entre ses deux fils : Charles et Carloman. Ce dernier mourut en 771. Charles devint le seul maître du royaume et se fit appeler Carolus Magnus, Charlemagne.

Il entreprit aussitôt d’agrandir son territoire. Il est porté par la foi chrétienne qui lui donne pour mission d’assurer la transmission du message chrétien jusqu’aux limites de l’univers.

C’est ainsi que chaque printemps il inaugure une nouvelle campagne militaire, bataillant à l’est, au sud-ouest et au sud du territoire franc. En 805 il stoppe cette politique de conquête. Il règne alors sur un territoire qui comprend (références aux pays actuels) les trois-quarts de l’Allemagne, une partie de la Belgique, les trois-quarts de l’Italie, presque toute la France et les régions espagnoles de Pampelune et de Barcelone. Il connut une seule défaite contre les Arabes ommeyades d’Espagne. Comme ils faisaient souvent des incursions en Septimanie (le Languedoc-Roussillon actuel ) et en Provence, Charlemagne entreprit de les soumettre en conquérant l’Espagne. Mais il dut battre en retraite non sans perdre son arrière-garde commandée par Roland. Elle fut massacrée par des montagnards basques. Cet épisode malheureux est relaté dans la chanson de geste : « La chanson de Roland ».

Note : à cette époque la notion de nation, France, Allemagne, Italie, etc. n’existe pas. Seules existent les notions de lignage – origine familiale - et de fief – règne d’un maître sur un territoire. Il n’y a pas non plus de langue unifiée même si le latin continue d’être couramment parlé.

L’unité de l’Europe est portée par le christianisme occidental, le catholicisme, dont l’Église c’est-à-dire la communauté des croyants, est dirigée par le Pape établi à Rome.

Les Carolingiens veulent obtenir une consécration spirituelle. En 752, Pépin, le père de Charlemagne, reconnaît au Pape Étienne II un droit de possession sur des terres situées au nord-est de Rome, appelées Exarchat de Ravenne. En échange de cette reconnaissance le Pape sacra en 754 Pépin, roi, au nom de Dieu. En 756 Pépin conquiert les terres de l’Exarchat de Ravenne alors revendiquées par des seigneurs locaux et les donne au Pape. Ainsi naissent les États pontificaux et se noue entre les Carolingiens et les dirigeants spirituels du catholicisme une alliance politique. Charlemagne réaffirmera cette alliance et protégera les Papes contre toutes attaques territoriales.

Le 25 décembre 800 alors que Charlemagne était venu à Rome pour arbitrer un différend local, le Pape Léon III couronna Charlemagne en faisant prononcer par l’assemblée cette adresse : « A Charles, auguste, couronné par Dieu, grand et pacifique empereur des Romains, vie et victoire ! » Le titre d’empereur qui n’avait plus plus été porté en Occident depuis 476 ressuscitait ainsi en faveur de Charles. Ce nouvel Empire, fierté des Occidentaux, ne pesait toutefois pas lourd face à l’empire abbasside. L’historien anglais Richard Fletcher dans son livre : « La croix et le croissant » édité en 2010 écrit ceci : « Comparé à l’Empire de Haroun al-Rachid, l’Empire de Charlemagne faisait figure de petit poisson face à une baleine ». Rome par exemple la ville la plus peuplée de ce nouvel Empire comptait, en 800, 30 000 habitants alors que Bagdad en comptait plus d’un million.

En 800 se faisaient face, autour de la Méditerranée, au sud, l’Empire abbasside centré sur Bagdad, au nord-est et au nord l’Empire byzantin (l’Empire romain d’Orient) centré sur Constantinople, au nord l’Empire de Charlemagne (considéré par les Occidentaux comme le nouvel Empire romain d’Occident) centré sur Rome ( résidence du Pape) et sur Aix-la-Chapelle (résidence de Charlemagne) et à l’ouest l’Espagne des Omeyyades centrée sur Cordoue. Nous parlerons de l’Empire byzantin et de l’Espagne ultérieurement. Nous allons maintenant voir comment les Judéens prirent place dans ce vaste monde.

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satinvelours Membre 3 006 messages
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Lettre 49-3

22 janvier 2019

Samuel,

Comme à l’époque hellénique le judaïsme connut auprès de l’islam une révolution culturelle. La nouvelle culture judéo-arabe se distingua :

- d’abord par sa langue, l’arabe littéraire, écrit avec des caractères hébraïques ; cette langue fut adoptée avec enthousiasme par les lettrés juifs.

- ensuite par l’évolution de l’activité économique des Judéens qui passèrent de l’agriculture à l’activité commerciale et artisanale (voir lettre 48).

L’administration de la vie communautaire juive à l’intérieur du califat abbasside continua d’être organisée en Babylonie (et non en Palestine) en continuité avec l’ancienne administration sassanide (voir lettre 45) et ce d’autant plus que la capitale du nouvel empire fut Bagdad, située en Babylonie.

Cette administration continua d’être tenue par l’Exilarque (mot qui signifie : chef de l’Exil), ou Reish Galuta représentant l’autorité temporelle (pouvoir sur les corps et les biens) et le geon représentant l’autorité spirituelle et religieuse (voir lettre 45). L’Exilarque devint une sorte de calife juif traité avec déférence et attention par le calife abbasside. Les geonim (pluriel de geon) à la tête des Yechivot (maisons d’études qui disent le droit religieux) restèrent en contact avec l’ensemble des communautés juives de la diaspora par l’intermédiaire de leurs réseaux d’émissaires qui arpentaient le monde, porteurs de questions et de réponses touchant aux aspects essentiels de la vie juive. Les Yechivot babyloniennes organisaient deux fois l’an, à la veille des fêtes de Pessah et de Souccoth des réunions publiques au cours desquelles étaient débattues les questions religieuses parvenues des quatre coins du monde. A l’issue des délibérations les geonim rédigeaient et signaient solennellement leurs réponses qui avaient aussitôt force de loi dans les communautés de la diaspora y compris celles situées à l’extérieur de l’aire impériale islamique, dont les communautés installées en Europe. C’est ainsi que fut préservée l’identité des juifs malgré leur dispersion.

Cette communication incessante entre le centre juif babylonien et la diaspora fut portée par le formidable développement du commerce international initié par l’Empire abbasside. Au lieu de continuer une politique de conquête territoriale ainsi que le firent les Omeyyades, les Abbassides se lancèrent dans le commerce. Cette activité renouait avec le génie propre des bédouins arabes dont les caravanes en Arabie assuraient les échanges entre la Méditerranée et l’Orient via les ports du Yémen (sud de l’Arabie). C’est l’intensité de ce commerce qui engendra le développement économique de l’Empire suivi par son développement culturel. L’échange de marchandises induisit la production de biens propres à être échangés, production qui induisit à son tour le développement de l’activité artisanale et manufacturière. Si les Arabes ont toujours été des maîtres dans l’art du commerce ils ont été vite rejoints dans l’exercice de cet art par les Judéens partis de leurs terres pour rejoindre les centres urbains.

En Europe les Carolingiens, impressionnés par l’essor abbasside, comprirent qu’ils devaient devenir eux aussi des acteurs de cette activité commerciale mondiale s’ils voulaient développer l’économie et la puissance de leur Empire naissant. Mais sur qui s’appuyer pour intégrer ce nouveau monde ? Sur les musulmans eux-mêmes ? Les Carolingiens se méfiaient de la puissance montante des musulmans. Alors ils pensèrent aux Juifs lesquels ne présentaient aucun danger du fait de leur trop faible nombre. Rompant avec l’antijudaïsme de leurs prédécesseurs, les Mérovingiens, (chrétiens), qui avaient persécuté les Juifs (le roi Dagobert fut un des plus ardents persécuteurs) les Carolingiens décidèrent de protéger les quelques rares communautés juives résidant encore dans quelques villes du pays franc ainsi qu’en Lombardie (Nord de l’Italie) et d’aider de nouvelles communautés à s’installer en Europe afin de prendre en main les rênes du commerce international.

C’est ainsi qu’à l’initiative des rois carolingiens Pépin le Bref et de son fils Charlemagne des Juifs s’installèrent en Rhénanie (province située aujourd’hui en Allemagne, traversée par le Rhin). Deux des premières familles à s’y établir furent celles des célèbres rabbins Kalonymos de Lucques (en Italie) et Aboun l’Ancien du Mans (en pays franc). Bientôt rejoints par d’autres Juifs influents ces familles et leurs descendants devinrent l’élite dirigeante des trois grandes cités rhénanes : Mayence, Worms et Spire. Ce sont eux qui fondèrent ce que nous appelons aujourd’hui le judaïsme ashkenaze.

Laissons parler le géographe perse du IX ème siècle Ibn Khurradadhbed qui parle ainsi des Radhanites, nom donné à l’époque aux juifs commerçants :

« Ces marchands parlent arabe, persan, grec, franc, espagnol et slavon. Ils voyagent d'ouest en est et d'est en ouest, partiellement sur terre, partiellement sur mer, ils transportent depuis l'Occident des eunuques, des femmes réduites en esclavage, des garçons, des soieries, des castors, des martres et d'autres fourrures et des épées. Ils prennent le bateau en Firanja (soit la France) sur la mer occidentale (la Méditerranée) et vont jusqu'à Farama (Pelusium en Basse-Egypte, port qui donne sur la Méditerranée). Là-bas, ils chargent leurs biens à dos de chameau et vont par terre jusqu'à al-Kolzum (Suez, port d’Égypte qui donne sur la mer Rouge). Ils embarquent sur la mer Rouge et naviguent d'al-Kolzum à al-Jar (port de Médine en Arabie) ou Djeddah (port en Arabie) ensuite ils vont à Sind, en Inde, et en Chine. Sur le chemin du retour de Chine, ils emportent du musc, de l'aloès, du camphre, de la cannelle et d'autres produits des pays orientaux vers al-Kolzum et les ramènent à Farama, où ils embarquent sur la mer Occidentale. Certains naviguent vers Constantinople pour vendre leurs produits aux Grecs [On appelle alors Grecs les habitants de l’Empire romain d’Orient en raison de la langue parlée dans cet empire : le grec, langue empruntée à la Grèce, pays de l’Empire, langue aussi qui était parlée à Byzance avant que Constantin la rebaptise : Constantinople]. D’'autres vont au palais du roi des Francs pour y vendre leurs biens. Parfois ces marchands juifs, quand ils embarquent depuis le pays des Francs, sur la mer Occidentale, se dirigent vers Antioche (port de l’actuelle Turquie). De là par terre jusqu'à al-Jabia (al-Hanaya, au bord de l'Euphrate). Là-bas, ils embarquent sur l'Euphrate et atteignent Bagdad d'où ils descendent le Tigre vers al-Obolla. À partir d'al-Obolla, ils naviguent vers Oman, Sind, Hind et la Chine… Ces différents voyages peuvent aussi être faits par voie de terre. Les marchands qui partent d'Espagne ou de France vont à Sus al-Aksa (au Maroc) et ensuite à Tanger, d'où ils marchent vers Kairouan (ville du Tunisie) et la capitale d'Egypte (Alexandrie). De là, ils vont à ar-Ramla, visitent Damas, al-Kufa, Bagdad et al’Basra (Bassorah actuel), traversent Ahvaz, le Fars, Kerman (ces trois dernières ville se situant en Iran actuel), Sind (ville du Pakistan actuel), Hind, et arrivent en Chine. Parfois, aussi, ils prennent la route depuis Rome et, traversant le pays des Slaves, arrivent à Khamlidj, la capitale des Khazars (l’empire Khazar était situé entre la mer Noire et la mer Caspienne, mers qui bordent le sud de la Russie actuelle). Ils embarquent sur la mer Jorjan (mer Caspienne), arrivent à Balkhj (en Afghanistan), traversent l'Oxus, et continuent leur voyage vers Yurt, Toghuzghuz, le pays des Ouïghours (vivant en Asie centrale et en Chine) et de là vers la Chine".

Nous voyons donc combien les civilisations omeyyade puis abbasside ont transformé la vie des Judéens, ceux-ci quittant les terres et devenant des citadins versés dans des activités essentielles comme le commerce, l’artisanat mais aussi l’étude et la pratique des sciences et des arts. Ils se spécialisèrent aussi dans les activités bancaires devenant des acteurs essentiels de l’économie de l’Empire.

Concernant le développement des sciences il y eut un formidable essor dans l’Empire des califes entre 750 et 1100. Tous les savants alors sont persans, arabes, turcophones d’Asie centrale, juifs ou chrétiens. S’ils parlent chez eux leur langue maternelle tous écrivent en arabe. C’est pourquoi on utilise l’expression « civilisation arabe » de préférence à « civilisation musulmane ». Ces savants furent d’abord des intermédiaires qui transmirent la science des Grecs, des Persans, des Indiens. Puis pendant l’âge d’or entre le huitième siècle et le douzième siècle ils innovèrent dans tous les domaines du savoir : astronomie, mathématiques, physique, médecine botanique, géographie, philosophie, histoire…

 

Je pense à toi, toi dont le maître de danse a dit avec justesse que tu as l’âme slave.

Je t’embrasse,

Je t’aime,

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Blaquière Membre 18 874 messages
Maitre des forums‚ 76ans‚
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נהר גוודלקיוויר
הולך בין תפוזים וזיתים.
שני הנהרות של גרנדה
לרדת מן השלג לחיטה.

אבוי, אהבה
מי הלך ולא בא
!

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  • 2 semaines après...
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satinvelours Membre 3 006 messages
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Lettre 50

8 février 2019

Samuel,

L’enseignement et l’autorité des rabbins des yechivot babyloniennes vont être contestés par l’apparition d’un nouveau mouvement religieux : le karaïsme. Vers 830-860 Benjamin ben Moïse de Nehavend (ville située au nord-est de Bagdad) précise la doctrine karaïte fondée en 761 par Anan Ben David à Bagdad (ce dernier s’était vu refuser le titre d’exilarque au profit de son frère cadet ce qui le conduisit à contester l’ordre établi) : l’autorité de la Torah orale est rejetée (donc est rejetée l’autorité des rabbins) seule compte la lecture directe, indépendante et critique de la Torah écrite. Il est également exigé de revenir en Israël dans l’attente de la venue du Messie, celui qui doit sauver Israël et lui rendre sa gloire. Les karaïtes vont aussi être appelés « scripturalistes » car ils ne reconnaissent que l’écriture des textes bibliques.

En Israël même la conquête de la Palestine par les Arabes (voir lettre 47-2 ) a permis aux Judéens de revenir à Jérusalem. Ce qui restait de l’autorité religieuse en Palestine, la yeshiva de Tibériade en Galilée, dite yechiva d’Eretz Israël (ce qui signifie : terre d’Israël) s’installe à Jérusalem. Les Judéens abandonnent progressivement l’agriculture exercée en Galilée pour rejoindre les villes où ils peuvent développer une activité commerciale et artisanale. L’autorité d’Eretz Israël tient en ce que cette yechiva organise chaque année un pèlerinage à Jérusalem ouvert à toute la diaspora ; elle proclame aussi le calendrier des fêtes religieuses. Enfin de nombreux Juifs continuent de demander à être ensevelis au mont des Oliviers à Jérusalem dans l’attente de la résurrection. Le mouvement karaïte tend donc à redonner un rôle d’importance à la communauté juive d’Israël.

Cependant les chefs des yechivot babyloniennes vont réagir et réaffirmer leur autorité sur l’ensemble de la diaspora. L’un de leurs chefs les plus influents, Saadia ben Joseph (882-942) devenu chef de la yechiva de Soura, va attaquer la doctrine karaïte et réduire l’autorité d’Eretz Israël en transférant aux autorités religieuses babyloniennes le droit de fixer le calendrier des fêtes. Il va continuer d’affirmer son autorité en faisant un effort de diffusion mondiale de la culture juive, notamment en se lançant dans la traduction en arabe de la Torah afin que ce texte soit accessible à tous les citoyens de l’empire abbasside, juifs et non-juifs. Cette traduction est toujours récitée de nos jours par toute les communautés juives arabophones du bassin méditerranée.

La contre offensive de Saadia va casser le développement des karaïtes bien que leur doctrine aient plu à beaucoup de Juifs. Ce mouvement marquera tout de même les esprits car il préfigure, dans son exigence du retour à Sion (nom d’une colline de Jérusalem), le mouvement du même nom, le sionisme, qui se développera dans la diaspora beaucoup plus tard, à partir du 19 siècle.

En Europe Charlemagne continue de favoriser l’installation des Juifs. Un brillant savant babylonien, le rabbin Makhir va s’installer à Narbonne et diffuser dans le royaume franc la culture talmudique babylonienne, supplantant ainsi la culture juive palestinienne qui à travers le talmud de Jérusalem (les recommandations des rabbins palestiniens) continuait d’inspirer les communautés juives européennes. Son fils Louis le Pieux (814-840) va poursuivre cette politique. Des rabbins, des médecins, des marchands juifs s’installent à Aix la Chapelle, à Augsbourg (ville située dans l’actuelle Allemagne, en Bavière), à Lyon. Leur sécurité personnelle et leur liberté religieuse sont garanties, ils peuvent voyager librement dans tout l’Empire et s’installer où ils veulent. Passant outre les directives de l’Église catholique Charlemagne et Louis le Pieux autorisent les Juifs à posséder des esclaves, à employer des nourrices et des domestiques chrétiens. Ils leur accordent des avantages fiscaux. Tout cela en raison de leur caractère actif et industrieux qui contribue ainsi à l’enrichissement du Royaume. Juifs et chrétiens vont finir par nouer des relations conviviales et par créer une véritable mixité sociale. Ils partagent les mêmes quartiers et bientôt les mêmes métiers, de nombreux Juifs s’installant comme agriculteurs et comme viticulteurs par exemple à côté des métiers traditionnels de commerçants et d’artisans. Cette entente va engendrer l’hostilité de plus en plus intense du clergé catholique contre les Juifs d’autant plus que de nombreux chrétiens, dont des ecclésiastiques, finissent par se convertir au judaïsme.


Je t’embrasse,


Je t’aime et tu sais combien je pense à toi,

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satinvelours Membre 3 006 messages
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Lettre 51

10 février 2019

Samuel,

Vers la fin du X ème siècle l’Empire abbasside a créé un monde islamique uni par la religion (l’islam), la langue (l’arabe) et l’économie (les relations commerciales). Mais ce monde a perdu son unité politique. Trois monarques revendiquent le titre de calife, celui de Bagdad, celui du Caire et celui de Cordoue. 

L’Empire abbasside était trop vaste et les structures administratives et militaires trop lâches pour que le calife de Bagdad pût maintenir l’unité d’une telle étendue géographique. 

Après la mort de Haroun al-Rachid en 809 la Perse et la Mésopotamie connurent des troubles politiques constants qui finirent, en 945, par porter au pouvoir une famille perse et chiite : les Bouyides. Ils laissèrent au calife son titre mais ce fut désormais eux qui régnèrent sur la partie orientale de l’Empire.

Dans le centre de l’Empire une branche radicale des chiites, les Ismaéliens, réussit à installer en Tunisie en 908 l’imam Ubaydallahn premier calife d’une nouvelle dynastie, les Fatimides, lesquels finirent par régner sur l’ Afrique du Nord, l’Égypte, la Syrie, la Palestine et l’Arabie occidentale (le Hedjaz). La capitale de leur territoire était al-Qahira, la Triomphante (Le Caire aujourd’hui).

A l’ouest, l’Espagne, al-Andalus en arabe, sous l’impulsion d’un descendant des Omeyyades prit son indépendance vis-à-vis de Bagdad en instituant son propre califat à Cordoue.

[Note. Les chiites sont des arabes musulmans qui considèrent que le califat aurait dû revenir au fils d’Ali (le quatrième calife) lorsque mourut le cinquième calife : Muawiya, le fondateur de la dynastie omeyyade. Mais ce dernier désigna Yazid, son fils, comme successeur. Hussein le fils d’Ali refusa de se soumettre. Ce différend donna lieu à une bataille armée dans laquelle Hussein et les siens furent massacrés. Les vaincus constituèrent une dissidence musulmane : les chiites. Les autres, ceux qui gardèrent le pouvoir, furent appelés : sunnites. Au cours des années les chiites nommèrent parmi eux ceux qu’ils considéraient comme les califes légitimes : les imams. Puis ils se scindèrent en deux branches. La première arrêta la pratique de nomination au douzième imam : Mohammad. Celui-ci « disparut » en 940 et devint un personnage mythique: le Mahdi, qui réapparaîtra quand Dieu le décidera pour sauver le monde (il s’agit donc d’une variante du Messie chrétien ou juif). La deuxième s’arrêta au septième imam, Ismaël, lequel fonda une secte : les ismaéliens, politiquement actifs et violents. Cette secte finit par prendre le pouvoir avec la dynastie des Fatimides.]

En Espagne (voir lettres 46 et 47-2) Tariq ibn Zyad débarqua à Gibraltar en 711 et chassa les Wisigoths libérant du coup les Juifs des persécutions menées contre eux. L’Espagne, ou al-Andalus devint une province omeyyade. En 750 les Abbassides prirent le pouvoir en massacrant les Omeyyades. Un rescapé des massacres l’Omeyyade Abd al-Rahman s’enfuit en Espagne où il fut reconnu comme chef. En 756 il s’installa à Cordoue, se nomma émir, reconnut l’autorité religieuse de Bagdad mais affirma son indépendance politique. Bagdad était trop éloignée de Cordoue pour pouvoir intervenir. En 929 un des descendants de Abd al-Rahman, Abd al-Rahman III prit le titre de calife rompant ainsi définitivement avec Bagdad.

La population sous contrôle de Cordoue était composée d’Arabes, de Berbères, de chrétiens, de Juifs et de Wisigoths. Le pouvoir choisit la tolérance comme mode de gouvernement. Le mélange des populations et des cultures créa dans cet « extrême occident » du monde musulman un univers raffiné, avec l’édification de monuments qui forcent encore aujourd’hui notre admiration, avec le développement des arts, dont celui des jardins botaniques, celui de la poésie, celui de la musique, la recherche du plaisir de vivre et celui des relations intimes, préfigurant l’amour courtois occidental. 

Dans ce monde-là les Judéens s’intégrèrent avec bonheur. Ils créèrent de nouveaux cadres de référence culturels juifs en puisant abondamment dans les avis du babylonien Saadia mais aussi en s’inspirant des textes néo-platoniciens et des textes d’Aristote, textes diffusés et commentés par les philosophes musulmans : al-Farabi, Averroès et Avicenne. Ainsi créèrent-ils un modèle juif héritier de Babylone mais emprunt aussi de particularités propres au monde musulman dans lequel ils vivaient. A l’exemple du modèle babylonien le modèle juif d’Espagne se construisit autour d’une classe de Juifs très influents à la cour de l’émir puis à celle du calife : conseillers politiques, financiers, diplomates, dont la figure emblématique au dixième siècle fut celle de : Ibn Shaprut (905-975).

Promu par le calife Abd al-Rahman III (dont il devint le médecin) président de la communauté juive d’Andalousie il fut un grand commis du royaume musulman, fin diplomate traitant avec l’empereur byzantin Constantin VII ou l’empereur germanique Otto 1er. Il organisa la première visite en Andalousie d’un prince chrétien espagnol, il entretint avec toute la diaspora une correspondance soutenue. Il transforma Cordoue en un grand centre autonome de savoir juif, y recueillant des manuscrits philosophiques et religieux en provenance des bibliothèques juives de Babylonie, de Palestine, d’Italie et de Byzance. En cela il fut influencé par les califes arabes d’al-Andalous, lettrés, poètes, aimant s’entourer de savants et de livres. 

Ibn Shaprut introduisit la métrique arabe dans la poésie hébraïque en écrivant des poésies profanes, une première dans le monde juif dont le génie poétique était jusque là surtout lié au domaine religieux. Il favorisa le développement du commerce entre al-Andalus et le monde occidental et moyen-oriental. A son époque Cordoue était la plus grande ville d’Europe comptant entre 300 000 et 500 000 habitants alors que Paris n’en comptait que 20 000. Ainsi se constitua en al-Andalus, un deuxième centre de mémoire juive, faisant pendant à celui de Babylone, influencé par le savoir-vivre et la culture propres aux Arabes andalous.

 

J’espère que tu vas bien,

Je t’embrasse avec amour,

 

Modifié par satinvelours
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satinvelours Membre 3 006 messages
Forumeur vétéran‚
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Paris, le 12 février 2019 

 

Bon anniversaire Samuel,

Quinze ans déjà, un immense chemin parcouru depuis tes dix ans lorsque tu rencontras Nicole et moi. Tu étais alors un tel rebelle que nul ne pensait que tu aurais pu entrer en sixième. Nous avons deviné que ta marginalité de l’époque masquait un esprit original et créatif. Nous t’avons transmis nos savoirs. Tu es venu à nous et nous avons compris ce que tu attendais de nous. 

Et nous te transmettons aussi notre amour.

Aujourd’hui tu étudies à New-York, en septembre tu continueras tes études à Moscou. Tel les Radhanites tu sillonnes le monde, tu connais déjà quatre langues, le français, l’anglais, le russe et l’espagnol. Qui sait si, après Moscou, tu n’iras pas étudier ailleurs. Ton avenir reste ouvert.

Tu excelles en maths, tu excelles en tout. Cela grâce à ton tempérament actif qui te pousse à toujours progresser. Garde cette exigence elle te portera au plus haut. Tu fais des rencontres qui toujours te permettent d’aller plus loin. Tu nous a rencontrés à Paris, tu as rencontré Zak à Harlem, il t’a appris la musique comme les Noirs savent y accéder sans le secours du solfège. A Moscou tu as rencontré le maître de danse sur la place Rouge, il t’a intégré au Bolchoï pour septembre, le Bolchoï, le temple de la danse où tu vas apprendre à manier le sabre que je t’envoyais dans ton sommeil éveillé pour te permettre de vaincre les ombres.

Il existe une réalité, dont nul ne sait rien, qui te pilote. N’oublie pas que les rencontres que tu fais tu ne les décides pas. Le mystère des rencontres est un mystère piloté par un Autre.

Exploreras-tu demain les forêts de Sibérie, y rencontreras-tu la Fée ? Garderas-tu un œil sur la voûte céleste pour y vérifier que Jupiter est toujours là pour toi ?

 

Va ton chemin Samuel, les dieux, les esprits des ancêtres, veillent sur toi. 

 

Je t’aime.

 

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satinvelours Membre 3 006 messages
Forumeur vétéran‚
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Lettre 52

15 février 2019

Samuel,

XI siècle

A l’est des territoires désormais contrôlés par les Bouyides surgirent des nomades venus d’Asie centrale : les Turcs Seldjoukides, rameau de la tribu des Oghouz. Vers 1050 ils renversèrent les Bouyides, prirent le titre de sultan et conquirent un vaste territoire : la Perse, la Mésopotamie, l’Anatolie (prise à l’empire byzantin) la Syrie et la Palestine (prises aux Fatimides) et le Turkménistan actuel, situé au nord de la Perse. Les Seldjoukides se convertirent à l’islam et laissèrent le calife exercer l’autorité spirituelle en tant que Commandeur des croyants. Mais ce furent eux qui politiquement et militairement gérèrent le pays en s’appuyant sur les Persans.

Sous le règne des Bouyides puis des Turcs la communauté juive de Mésopotamie perdit son influence. Elle continua d’exercer son autorité sur la Mésopotamie mais elle n’eut plus de rôle central au sein de la diaspora. L’Exilarque continua d’administrer la communauté mais les geonim perdirent leur magistère religieux puis leur fonction disparut et les yechivot fermèrent leurs portes.

En Espagne le califat de Cordoue tombe en 1009 et al-Andalus se morcelle en petits royaumes. Les rois chrétiens établis dans le Nord de l’Espagne en profite pour reconquérir des territoires. En 1085 ils reprennent Tolède, l’ancienne capitale des Wisigoths. Pour contrer l’avancée chrétienne les Arabes andalous font appel aux Almoravides, tribus berbères musulmanes qui, venues du Sahara mauritanien, ont repris le Maghreb aux Fatimides, fondant Marrakech au Maroc, prenant ensuite Fez puis poussant leur emprise jusqu’à Alger. Les Almoravides débarquent en Espagne, stoppent l’avancée des chrétiens mais ne peuvent pas reprendre Tolède.

La chute du califat n’empêchera pas l’épanouissement du judaïsme andalou. Il atteindra son âge d’or au milieu du XI siècle avec la figure de Samuel Ibn Nagrela plus connu sous le nom de Samuel Ha-Nagid (993-1055) qui s’illustra à Grenade en dirigeant les armées du roi musulman Habbus. Ce chef de guerre, dirigeant de la communauté juive de Grenade, fut un homme de foi, auteur de traités sur la Halakha mais aussi un artiste auteur de poèmes chantant le vin, l’amour, la guerre ou la mort. D’autres poètes juifs s’inspirèrent de lui, Salomon Ibn Gabirol (1020-1057) plus connu sous le nom latin d’Avicébron, auteur d’un ouvrage philosophique rédigé en arabe, « la source de vie » ou encore Moshe Ibn Ezra (1055-1135) qui édita à la fin de sa vie « Le livre des méditations et des discussions » qui est un livre de louanges à la langue et à la poésie arabes.

Mais la guerre entre les musulmans et les chrétiens va dégrader les conditions de vie des Judéens. Les nouveaux maîtres berbères sont en outre beaucoup plus austères et ascétiques que leurs prédécesseurs arabes. Les Juifs perdent leurs responsabilités administratives, la liberté de culte est encore assurée mais leur sécurité devient précaire. Les Juifs fuient devant les Almoravides et vont se réfugier chez les chrétiens, au nord de l’Espagne, où ils seront bien accueillis.

Dans le centre de l’ancien empire abbasside les Fatimides gardèrent le pouvoir en Palestine jusqu’en 1073. Les Turcs seldjoukides les remplacèrent mais les Fatimides parvinrent à reprendre les villes côtières de Palestine en 1089 puis Jérusalem en 1098.

Le judaïsme palestinien obéit à la Yeshiva de Jérusalem. Mais au XI ème siècle la famine, des épidémies, des tremblements de terre, des mésententes entre les Judéens vont déchirer la communauté. Après l’arrivée des Seldjoukides la Yeshiva de Jérusalem va s’installer à Tyr, sur la côte de l’actuel Liban. Pour les Judéens de Palestine le XI siècle fut un temps de malheurs.

En Europe, à la mort de Louis-le-Pieux (814-840) l’Empire bâti par Charlemagne se disloqua. Le traité de Verdun en 843 le partagea entre la Francie orientale (la future Allemagne), la Francie occidentale (la future France) et une région intermédiaire entre les deux Francies que ces dernières se disputèrent ensuite. Un pouvoir fort se développa autour des rois de la Francie orientale grâce à la personnalité d’un homme, Otton-le-Grand (936-973) qui en 962 devint empereur d’un vaste territoire comprenant l’Allemagne actuelle, la Lorraine, une partie de la Belgique et le royaume d’Italie. En 1033 sous le règne de Conrad II le royaume de Bourgogne fut rattaché à l’Empire. Le christianisme est la religion officielle mais les régnants gardèrent le pouvoir sur l’Église en jouant un rôle déterminant dans la désignation des autorités religieuses.

Dans ce cadre-là les communautés juives d’Europe, toujours recherchées par les souverains pour leur apport économique purent se développer en toute liberté notamment autour du Rhin (Mayence) et dans le bassin de la Seine (Troyes).

Alors que les communautés juives espagnoles se passionnaient pour la poésie, la science et la philosophie tout en s’appuyant pour l’observance des rites religieux sur les décrets des académies babyloniennes, les communautés ashkénazes se distinguèrent par l’étude approfondie de la halakhah tout en affirmant leur autonomie quant aux rituels religieux. Chaque communauté, appelée kahal, promulguait ses propres règlements. Vivant en symbiose avec la société chrétienne tout en gardant leur différence, les Juifs ashkénazes adaptèrent leurs lois religieuses aux valeurs européennes. C’est ainsi qu’ils abolirent la polygamie et interdirent de répudier son épouse sans son consentement (pratiques acceptées dans les communautés juives vivant en territoire musulman).

Le rabbin Gershom ben Yehoudah (965-1028) connu sous le nom de « lumière de l’exil » fonda une yeshiva à Mayence dont le plus notable élève fut le rabbin Salomon ben Isaac (1040-1105) plus connu sous le nom de Rachi. En 1065 Rachi revint dans sa ville natale à Troyes où il gagna sa vie en tant que viticulteur. Son œuvre est distinguée pour ses commentaires du Talmud ainsi que pour ses responsa. Les responsa (en hébreu : téchouvoth) sont des réponses écrites rédigées par des experts du Talmud en réponse à des questions concernant la vie pratique. Aujourd’hui encore les responsa sont une source très importante d’inspiration pour les rabbins. En 1484 un éditeur imprima les commentaires de Rachi à côté du texte du Talmud. Depuis lors il n’est pas de Talmud qui ne soit publié sans les commentaires de Rachi. Ainsi a-t-il contribué à maintenir l’unité culturelle de la diaspora juive ashkenaze puis celle de toute la diaspora.

 

Je t’embrasse très fort Samuel,

Je pense à toi

Sois sûr que je t’aime,

Pour toujours,

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