Aller au contenu

Lettres à Samuel

Noter ce sujet


aliochaverkiev

Messages recommandés

Annonces
Maintenant
Membre, Le prendre au sérieux, nuit gravement à la santé, Posté(e)
azad2B Membre 5 932 messages
Le prendre au sérieux, nuit gravement à la santé,
Posté(e)

Tiens il devient prudent notre goy errant ou notre Antépénultième* des Justes c'est selon !

Il ne se risque plus à des affirmations du genre "calculer le résultat d' un nombre négatif sous un radical est interdit"  A présent il se contente de poser des questions.C'est moins risqué.

* Parce que être le dernier, c'est tout de même assez honorifique tous comptes faits.  :crazy:

Lien à poster
Partager sur d’autres sites

Membre, Posté(e)
aliochaverkiev Membre 1 978 messages
Baby Forumeur‚
Posté(e)

Lettre 41

 

2 novembre 2018

 

Samuel,

 

Jérusalem était ceinte de trois murailles là où elle n’était pas protégée par des ravins infranchissables. La plus ancienne, construite et fortifiée par David et Salomon, était difficile à prendre. La seconde muraille ne défendait que le quartier nord de la ville. La troisième muraille protégeait une partie de la ville construite récemment. Elle n’était pas encore achevée lors de l’attaque.

Au milieu de la ville était érigé le Temple. Voici comment Flavius Josèphe le décrit dans le livre V de la guerre des Juifs: « Recouvert de tous côtés d’épaisses plaques d’or, aux premiers rayons de soleil il reflétait un éclat tout plein de feu. Il apparaissait semblable à une montagne couverte de neige car sur les parties où il n’était pas couvert d’or il était parfaitement blanc ».

Titus lance l’attaque en avril 70. Le 25 il s’empare du troisième rempart. Fin mai il s’empare de la deuxième muraille. Il offre la vie sauve aux défenseurs de la ville s’ils acceptent de se rendre. Ils refusent.

Encerclés les Juifs ne disposent d’aucune voie de ravitaillement. Ils commencent à mourir de faim et de maladies. Ceux qui tentent de s’enfuir sont capturés par les Romains qui les crucifient ou par les Nabatéens qui les éventrent pour chercher dans leurs entrailles l’or qu’ils auraient pu avaler.

A la fin du mois de juillet lors d’une ultime attaque Titus enfonce les dernières positions tenues par les assiégés. Le 30 août 70, soit le neuvième jour du mois d’Ab du calendrier hébraïque, le Temple est incendié.

Les Zélotes continuent de se battre et meurent jusqu’au dernier.

 

Voici le récit de Flavius Josèphe :

 

« Pendant que le temple brûlait, les Romains pillaient tout ce qui tombait entre leurs mains et massacraient enfants, vieillards, laïcs, prêtres. Le ronflement des flammes se mêlait aux gémissements de ceux qui tombaient. Toute la ville était en feu. Rien de plus fort et de plus terrifiant ne pourrait être imaginé que la clameur qui s’élevait : il y avait le cri de guerre des légions romaines réunies, les hurlements des rebelles encerclés par le feu et par le fer, la ruée du peuple qui, dans son épouvante, allait se jeter sur les ennemis en poussant des gémissements quand arrivait l’issue fatale. Les souffrances étaient plus terribles encore que le bruit. Le sang était encore plus abondant que les flammes et les tués plus nombreux que ceux qui tuaient. A aucun endroit la terre n’apparaissait entre les cadavres et les soldats devaient escalader des monceaux de corps pour poursuivre les fuyards».

 

Titus pilla le Temple et en rapporta les trésors à Rome.

Le 28 septembre 70 les Romains rasent Jérusalem. Ne restent debouts qu’une tour et un pan du mur occidental entourant le Temple. C’est lui que nous appelons aujourd’hui le mur des Lamentations.

Johanan de Giscala est torturé puis condamné aux travaux forcés. Simon Bar Giora est exhibé en 71 à Rome puis exécuté.

En Judée même quelques mois après la destruction de Jérusalem les forteresses de l’Hérodion et de Machéronte se rendent au nouveau gouverneur de la Palestine : Lucilius Bassus.

La forteresse de Massada où se sont réfugiés un millier de Zélotes dirigés par Eléazar Ben Jaïr résistera pendant trois ans. Quinze mille Romains vont en faire le siège sous la conduite de Lucius Flavius Silva. Quand les Romains pénètrent enfin dans la forteresse en avril 74 ils découvrent que tous les Zélotes ont choisi de se suicider plutôt que de se rendre. Seuls survivants : deux femmes et cinq enfants.

Dans la diaspora, révoltés par la destruction du Temple, les Juifs se soulèvent. La répression est implacable. Des milliers de Juifs sont massacrés. La grande communauté juive d’Alexandrie est anéantie signifiant la rupture définitive du lien jadis tissé entre judaïsme et hellénisme.

 

 

Ta présentation de l’histoire des Juifs dans l’atelier de ton lycée est un succès. Bravo pour ta maestria dans la défense de tes positions, bravo pour ton éloquence déployée désormais face à un public devenu nombreux.

 

Je t’aime,

 

Je pense à toi

 

Toujours.

 

 

 

Modifié par aliochaverkiev
Lien à poster
Partager sur d’autres sites

Membre, Posté(e)
aliochaverkiev Membre 1 978 messages
Baby Forumeur‚
Posté(e)

Lettre 42

4 novembre 2018

Samuel,

 

La destruction du Temple, l’extermination par les Romains d’un quart de la population juive de Palestine, l’anéantissement des classes dirigeantes plongent le pays dans le chaos. De vastes zones agricoles sont abandonnées, des villes entières sont rasées, des nomades rentrent dans le pays et l’occupent durablement.

Le désespoir s’empare des survivants. Nul ne sait plus comment assurer la permanence de l’ancienne vie culturelle et religieuse. Tous se mortifient voyant dans cette catastrophe l’œuvre de Dieu, rendu furieux en raison de leurs péchés. Car pour les Hébreux nul doute que cette catastrophe procède de la volonté de Dieu dont ils n’ont pas su respecter la Volonté. Les Romains n’ont jamais été que les instruments de la colère de l’Éternel.

C’est la troisième fois que la mémoire juive risque de disparaître. La première fois ce fut à l’issue de la chute du royaume de Juda quand les lettrés Judéens furent déportés à Babylone. Un homme parut, Esdras, qui sut rétablir la mémoire et la religion juives. La deuxième fois ce fut lorsque Antiochus IV tenta de détruire le judaïsme. Une famille parut, les Maccabées, qui reprit le Temple aux Grecs pour y restaurer le culte de Yahvé. Cet évènement est désormais fêtée chaque année lors de la fête de Hanoukka. Cette année Hanoukka est fêtée de la soirée du dimanche 2 décembre 2018 à la soirée du lundi 10 décembre 2018. Je te rappelle qu’après leur victoire, les Maccabées se rendirent dans le Temple de Jérusalem pour le purifier et allumèrent la ménorah (le chandelier à sept branches) avec la seule fiole d’huile consacrée qui restait. Elle n’aurait dû durer qu’un seul jour, mais elle maintint le chandelier allumé pendant huit jours, le temps de fabriquer une nouvelle huile sacrée. C’est ce miracle qui place cette fête sous le signe de la lumière.

Cette fois-ci encore un homme va paraître et rendre aux Juifs leur mémoire, leur histoire et leur religion : Yohanan Ben Zakkaï, le pharisien qui s’était replié à Yavné pour y fonder son académie talmudique. Épargné par les Romains il va jeter les fondements d’un judaïsme renouvelé : le judaïsme synagogal en remplacement du judaïsme sacerdotal.

Le judaïsme synagogal apparut en fait dès le deuxième siècle avant l’E.C. avec l’édification des premières synagogues dans la diaspora juive et en Judée. Le Temple était certes le lieu central de la pratique du judaïsme mais comme les Juifs étaient désormais pour certains dispersés ou ne pouvaient pas toujours se rendre au Temple la synagogue devint un lieu de rassemblement où se réunir et prier ensemble.

Le judaïsme sacerdotal était centré sur le sacerdoce des prêtres (sacerdoce : fonction du prêtre en tant que ministre de Dieu, c’est-à-dire exécutant de la volonté de Dieu). Ces prêtres avaient fini par transmettre leur fonction par hérédité contribuant à créer une aristocratie, les Sadducéens, qui se singularisèrent par leur indifférence au peuple. Ces prêtres fixaient le calendrier des fêtes juives, ils fixaient aussi la liturgie c’est-à-dire la manière de conduire les cérémonies religieuses dans le Temple. Enfin ils étaient les seuls à avoir le droit de pratiquer, toujours dans le Temple, les sacrifices propitiatoires d’animaux. Sacrifice propitiatoire : qui a pour but de rendre la divinité (l’Éternel) propice, propice c’est-à dire bien disposée, favorable. En revanche concernant la vie religieuse même du judaïsme, notamment la fixation de la Halakha ils étaient supplantés par les Pharisiens et les scribes qui contrôlaient la loi écrite et renouvelaient sans cesse la loi orale. Les Sadducéens se contentaient eux de la loi écrite dans la Torah, ils se s’embarrassaient pas trop avec les contraintes de la vie religieuse quotidienne. Ils payèrent leur indifférence au peuple et leur sympathie pour l’occupant romain chèrement : ils furent exterminés par les Zélotes avant que ceux-ci à leur tour tombent sous les coups de la barbarie romaine.

Yohanan Ben Zakkaï recentra le judaïsme sur la synagogue. Il épura le judaïsme de sa dimension politique (renoncement à l’indépendance de la Judée), renonça à l’idée de la reconstruction d’un Temple et instaura l’étude de la Torah et de la Halakha à l’intérieur même des synagogues. Il nomma un nouveau Sanhédrin qui devint le seul habilité à fixer un nouveau calendrier des fêtes religieuses. Il introduisit la commémoration chaque 9 Ab de la destruction du Temple. Il inséra le verset «Si je t’oublie ô Jérusalem » dans les bénédictions du mariage ainsi que le vœu « L’an prochain à Jérusalem » à la fin du dîner pascal.

Les actions et les fêtes religieuses sont célébrées désormais dans les synagogues qui reprennent la liturgie jadis assurée par les prêtres. Seuls les sacrifices ne sont plus assurés puisque cette fonction ne pouvait être pratiquée que par les prêtres au sein même du Temple. La fonction centrale des synagogues va permettre l’émergence de nouveaux religieux : les rabbins qui désormais vont diriger le culte juif. Une nouvelle élite, plus ouverte et plus démocratique que l’élite des cohanim et des lévites (les Sadducéens) prend ainsi la direction des affaires religieuses. Elle se recrute dans toute les classes de la société. Son statut ne repose plus sur le principe héréditaire mais sur l’érudition. La société juive ainsi se démocratise.

Dans ce nouveau judaïsme il n’ y a plus de place pour les mouvements d’hier, plus de place pour les Zélotes, les Esséniens, les Sadducéens, les Nazaréens (les premiers chrétiens) ni même pour les chrétiens considérés désormais comme des hérétiques.

Cet effort de reconstruction est couronné de succès. Les Juifs qui continuent de former la majorité de la population palestinienne parviennent à améliorer leur relation avec Rome.

Mais une nouvelle guerre allait surgir entre les Juifs et Rome, et cette ultime guerre signa définitivement la fin de toute présence juive dans le petit royaume de Juda (la Judée). Des lors c’est hors de Palestine, dans la diaspora, que va battre le cœur du monde juif (mais il resta une présence juive significative en Galilée).

 

 

P.S. La ménorah est le chandelier (ou candélabre) à sept branches des Hébreux. Depuis 1949 la ménorah forme les armoiries de l’État d’Israël et apparaît sur tous ses documents officiels. Au chapitre 25 de l’Exode Dieu demande à Moïse de réaliser un chandelier d’or pur devant être placé dans la Tente du Rendez-vous, aussi appelée Tente de Rencontre ou encore Tabernacle. Ce chandelier doit témoigner de la relation permanente et réciproque entre Dieu et son peuple. Le Tabernacle abritait aussi les tables de la Loi logées dans l’Arche d’Alliance.

 

Il ne se passe pas de jour sans que je ne pense à toi,

 

Je t’aime,

 

 

Modifié par aliochaverkiev
Lien à poster
Partager sur d’autres sites

Membre, Posté(e)
aliochaverkiev Membre 1 978 messages
Baby Forumeur‚
Posté(e)

Lettre 43

 

9 novembre 2018

 

Samuel,

 

Hadrien, empereur romain qui régna de 117 à 138 rêva de créer une civilisation universelle dans lequel le judaïsme tiendrait une place de choix. Malgré les persécutions menées contre les Judéens, le judaïsme continuait de séduire nombre de Romains qui parfois se convertissaient. Il s’entretint avec les rabbins qui succédèrent à Ben Zakkaï, Josué Ben Hanania et surtout Rabbi Aqiba, homme très respecté par la communauté juive. Il envisagea avec eux de rebâtir le Temple. Il reconstruisit bien un Temple mais il le dédia au culte de Jupiter après avoir renoncé, sous l’influence de son entourage resté hostile aux Juifs, à le dédier au culte de l’Éternel. Il alla même jusqu’à interdire la circoncision considérée par les Romains comme un rite barbare.

Alors en 132 les Juifs à nouveau se soulevèrent dirigés par Simon Bar-Cokhba, le Fils de l’Étoile. Il fut soutenu par les chefs spirituels du pays notamment Rabbi Aqiba.

Hadrien réagit en envoyant ses meilleurs généraux écraser cette nouvelle révolte. La guerre dura trois ans jusqu’en septembre 135. Les Romains vainquirent les insurgés. La répression dépassa en horreur tout ce que les Juifs avaient jusque là subi : massacres, déportations, esclavage, destruction de villages, exécution des rabbins dont rabbi Aqiba qui fut brûlé vif, un rouleau de la Torah dans les bras. Il fut interdit aux Juifs d’habiter Jérusalem, la Judée fut elle-même déjudaïsée par suppression de toute pratique religieuse : interdiction de la circoncision, de l’étude de la Torah, de l’observance du shabbat, de la célébration des fêtes, etc. Une majorité de survivants dut émigrer vers la diaspora ou la Galilée. Jérusalem fut désormais appelée Aelia Capitolina et définitivement romanisée. La Judée fut désormais appelée Syrie-Palestine.

C’est en effet seulement à ce moment-là que fut introduit le mot Palestine, même si je l’ai jusque là utilisé par commodité (comme j’ai employé le mot juif par commodité au lieu du mot judéen, alors que le mot « juif » a été introduit bien plus tard, voir lettre 15). Le mot Palestine est dérivé du mot Philistin, les anciens ennemis des Hébreux. L’intention d’Hadrien était, en choisissant ce mot, Palestine, d’humilier les Judéens.

Quant au fils de l’Étoile il mourut dans les combats. Son action est aujourd’hui controversée. Certains dénoncent son extrémisme et le nomme Fils du Mensonge. D’autres honorent sa mémoire et continuent de l’appeler Fils de l’Étoile (voir la lettre 19 : actuellement, en Israël, lors de la fête Lag Ba’Omer, la mémoire du fils de l’Etoile est célébrée par les Sionistes).

Cette nouvelle épreuve ouvrit sur une nouvelle histoire pour les Judéens. En effet les voici chassés du berceau de leur civilisation : la Judée. Ils doivent renoncer aux mythes fondateurs : la Terre Promise, la venue du Messie et l’imminence du Jugement dernier, événements ressentis jusque là comme signes du retour aux temps glorieux de l’ancien royaume de David.

Cette épreuve entraîna la déterritorialisation de l’identité judéenne. Il n’ y aura plus de Judéens, il n’y aura plus que des Juifs. Être juif ce n’est plus référer, entre autres, à un territoire, à une terre, ce n’est plus qu’adhérer à la religion juive. Mais cette religion étant fondée sur des fêtes à caractère historique, la mémoire de l’histoire du peuple juif fut sauvegardée.

La judéité va prendre un nouvel essor à travers l’histoire de la diaspora. La continuité de l’exercice de la spiritualité juive ne sera pas cassée par Hadrien. Selon la légende c’est le jour même où mourut rabbi Aqiba que naquit Rabbi Yehouda HaNassi, nom qui, traduit, signifie, Rabbi Juda Le Prince. Cet homme sauva le patrimoine du peuple juif : la Torah écrite qu’il devait enrichir par la rédaction de la Torah orale : la Michna, véritable somme historique de tous les actes quotidiens de la vie sociale des Juifs.

Ainsi toujours le peuple juif renaît de ses cendres, tel le Sphinx. Les efforts conjugués de leurs ennemis, au travers des siècles, pour détruire leur identité, se heurte sans cesse à l'irréfragable Volonté de vivre du peuple des Origines.

L’histoire de Yehouda Hanassi (135-217) est le point de départ de la deuxième partie de l’histoire des Juifs. Ici s’achève la première partie de leur histoire.

Modifié par aliochaverkiev
Lien à poster
Partager sur d’autres sites

Membre, Posté(e)
aliochaverkiev Membre 1 978 messages
Baby Forumeur‚
Posté(e)

Lettre 44

17 novembre 2018

Samuel,

Vers 200 Juda Hanassi installé en Galilée écrit avec une équipe de collaborateurs la Mishna (mot qui signifie : enseignement), recueil écrit en Hébreu rassemblant et unifiant toutes les lois religieuses contenues dans le Pentateuque et la loi orale.

La Mishna comprend six livres :

1) Zeraïm (plantations) traite les lois agricoles et le paiement des taxes afférentes à la production

2) Moèd (les saisons) traite les lois afférentes au Shabbat et aux fêtes religieuses

3) Nachim (les femmes) traite les lois du mariage

4) Nezikine (les dommages) traite les crimes et autres dommages civils

5) Kodachim (objets sacrés) traite les différentes sortes de sacrifice

6) Taharot (purifications) traite les différentes formes d’impureté et de purification.

La Mishna suscita de nombreux commentaires, appelés « Gemara » (mot qui signifie complément, mot parfois écrit sous cette forme : Guemara), issus de centres d’études de Galilée et de Babylone. Ces commentaires furent joints à la Mishna et l’ensemble donna le Talmud (plus exactement le Talmud Torah ce qui signifie : enseignement de la Torah). On distingue le Talmud palestinien (ou Talmud de Jérusalem) qui intègre les commentaires des Galiléens et le Talmud de Babylone qui intègre les commentaires des Babyloniens.

Des récits relatant la vie quotidienne des Juifs de la diaspora furent intégrés au Talmud. L’ensemble de ces récits forment la Aggadah (au pluriel : Aggadoth).

On distingue deux parties dans le Talmud : la partie juridique soit la Halakhah, la Loi, qui indique le chemin à suivre dans la voie de la Torah et la partie narrative qui consiste en récits et anecdotes relatant la vie courante des Juifs de la diaspora. La partie juridique comprend la Mishna et la partie de la Gemara qui commente la Mishna. La partie narrative comprend les Aggadoth.

Le Talmud enseigne qu’il y a 613 commandements ou mitzvot dans la Torah. La Halakhah traite de la mise en œuvre des mitzvot dans la vie quotidienne. Cette mise en œuvre requiert discussions et débats : la Loi orale.

La Halakhah régule et codifie tous les aspects de la vie du juif. Elle permit aux Juifs de la diaspora, désormais privés de tout port d’attache depuis leur expulsion de Judée, de faire bloc, de garder leur identité tout le temps que s’exerça sur eux la violence des chrétiens dont la seule obsession, dès lors qu’ils conquirent le pouvoir temporel lors de la conversion de Constantin fut de convertir le monde entier de gré ou de force. La Halakhah perdit de son importance lorsque le christianisme perdit de son influence au siècle des Lumières. L’avènement de ce siècle changea l’esprit des dominants politiques qui affranchirent les Juifs et les émancipèrent. Aujourd’hui la Halakhah n’est plus suivie à la lettre que par les orthodoxes. Elle fut respectée plus longtemps chez les séfarades car ils furent soumis à la pression de l’Islam, religion, qui, comme le christianisme, tend à convertir tout le monde. C’est pourquoi ta tante, issue du Maghreb, respecte plus que toi, qui est issu de l’Europe, la Halakhah. Quand elle se sentira libérée de toute pression visant à détruire son identité nul doute qu’elle deviendra plus souple.

Les relations entre les Romains et les Juifs désormais installés en Galilée furent assurées par le chef du Sanhédrin, le Nassi, ou encore le Patriarche. Les Romains autorisèrent le Patriarche à collecter des taxes pour les institutions juives, à nommer des juges pour les tribunaux juifs et à envoyer des émissaires dans les communautés de la diaspora. La cohabitation avec les Romains se stabilisa. Les Juifs restaient libres de pratiquer leur religion.

Tout changea avec la conversion de l’empereur Constantin le Grand au christianisme. On date en général la conversion de Constantin en 313 mais il ne fut baptisé qu’en 337, juste avant sa mort. (Le baptême est une cérémonie religieuse qui acte l’intégration du sujet baptisé dans la communauté des chrétiens). Cette conversion entraîna dans les années qui suivirent sa mort la première politique antijuive de l’histoire.

La Rome préchrétienne était rentrée certes en opposition contre les Judéens, mais ce ne fut pas pour des raisons religieuses, ce fut pour des raisons politiques. C’est la volonté d’accéder à l’indépendance politique qui entraîna les Juifs dans les guerres de 66-70 et de 132-135. Concernant le judaïsme lui-même Rome accepta toujours cette religion. Dans l’empire les Juifs jouissaient de l’égalité des droits. Ils pouvaient être exécuteurs testamentaires, contracter avec des Romains ou des Romaines des mariages légaux, exercer des fonctions de tutelle, occuper des fonctions publiques.

Disposant maintenant de la puissance civile l’Église chrétienne mit en œuvre son projet : convertir tous les hommes. Ainsi pour la première fois dans l’histoire s’installa une idéologie totalitaire visant à contraindre les esprits. Pour les chrétiens donc tous devaient se convertirent ou bien accepter les conséquences de leur refus : marginalisation sociale puis persécutions. Mais pour les Juifs Dieu est un et indivisible : Jésus ne peut pas être le fils de Dieu. Aussi résistèrent-ils à la conversion. Ils devaient payer chèrement le prix de leur résistance.

Tu peux parfois te sentir affecté quand tu constates la soumission des Juifs européens à la détermination glacée des Allemands dans leur volonté d’exterminer les Juifs. Mais le seul fait que les Juifs soient restés juifs malgré les persécutions est en soi un exploit, un acte de vaillance dont tu peux être fier.

Les chrétiens maintenant dominants s’en prirent aussitôt aux Juifs. Leur position par rapport aux Judéens est en effet incommode. Leur religion s’inspire dans son fondement et sa raison d’être du monothéisme juif. Si ceux qui ont pensé l’esprit même de la foi chrétienne ne se rallient pas au christianisme alors c’est qu’ils sont des hérétiques, indigne de leur propre histoire. Mais aussi dans la mythologie chrétienne le retour sur terre du Christ-Roi est l’avènement final attendu avant la fin des temps (et le jugement dernier). La conversion des Juifs doit être le signe annonciateur de ce retour. D’où le zèle des chrétiens à convertir les Juifs, d’abord par la persuasion avant d’employer finalement la persécution.

Pour saint Augustin (350-433) et les Pères de l’Église la destruction du Temple et la dispersion des Juifs sont la preuve que Dieu a choisi les chrétiens contre les Juifs. Marqués au front du signe de Caïn pour leur meurtre du Christ, ils ne doivent toutefois pas être tués car les Juifs doivent être présents partout où se trouvent les chrétiens afin de témoigner de la réalité de la Passion de Jésus et de témoigner de la réalité des textes sacrés. L’évêque d’Hippone (saint Augustin) écrira : « les juifs sont nos libraires. Ils ressemblent à ces serviteurs qui portent des livres derrière leurs maîtres : ceux-ci les lisent à leur profit, ceux-là les portent sans autre bénéfice que la fatigue d’en être chargés. Tel est l’opprobre infligé aux Juifs » Il s’agit de dégrader moralement les Juifs et de les déposséder de leur patrimoine (l’ancien testament).

Immédiatement après la conversion de Constantin la Palestine va être le théâtre d’affrontements entre Juifs et chrétiens. Pour ces derniers la Palestine est maintenant la Terre Sainte, ils enterrent ainsi le mythe de la Terre Promise cher aux Hébreux. Ils vont entreprendre d’occuper la Judée. Dès 326 la reine Hélène, la mère de Constantin, aidée par Macaire, évêque d’Aelia Capitolina (ancienne Jérusalem) va identifier le Saint-Sépulcre (endroit présumé de l’ensevelissement de Jésus) où elle fait construire une basilique. Puis elle fait bâtir l’église de l’Ascension sur le mont des Oliviers, la basilique de la nativité à Bethléem et l’église de Mamré à Hébron à l’endroit supposé où Abraham a enterré Sarah. Elle couvre la Palestine de monastères, d’églises et d’auberges pour pèlerins chrétiens. Les Juifs sont relégués en Galilée mais ils sont autorisés à venir une fois par an, le 9 Ab, au pied du mur des Lamentations pour commémorer la destruction du Temple. Occasion pour les chrétiens, comme l’explique un haut dignitaire, de constater de leurs propres yeux combien par son apparence pitoyable « cet assemblage de femelles décrépites et de vieillards ployant sous le poids des ans et des haillons démontre toute la colère du Seigneur contre ceux qui autrefois achetèrent le sang du Christ et achètent désormais leurs propres pleurs alors que le joug du Seigneur resplendit, que sa Résurrection brille, et que du mont des Oliviers l’étendard de Sa Croix étincelle »

Pendant ce temps l’Empire romain se délite. Constantin est le dernier souverain à avoir réussi à en maintenir l’unité. En 395 l’Empire se scinde définitivement en deux parties, l’Empire romain d’Occident centré sur Rome et sur Milan, l’Empire romain d’Orient centré sur Constantinople. En 410 les Wisigoths, tribu germanique, mettent à sac Rome. En 476 le dernier empereur d’Occident, Romulus, est déposé. Les tribus germaniques sont désormais maîtres de l’Occident. Seul l’Empire d’Orient va perdurer et même accroître sa puissance. La Palestine est désormais placée sous l’autorité de l’Empereur romain d’Orient.

La fonction du Patriarcat (le Nassi) s’affaiblit. Lorsque le patriarche Gamaliel VI meurt en 425 l’Empereur d’Orient Théodose II (408-450) refuse que soit nommé un successeur. C’est la fin du patriarcat. Ainsi la communauté juive de Palestine, installée en Galilée, ne va plus avoir qu’une importance secondaire. Le devenir des Juifs sera désormais celui des Juifs des communautés de la diaspora situées hors Palestine.Les chrétiens vont devenir majoritaires en Palestine.

En 438 Théodose II promulgue un code qui fixe la condition des Juifs. Ils sont assimilés aux hérétiques et aux païens mais ils gardent le droit de pratiquer leur religion. Ce code jette les premières bases légales du statut d’infériorité des Juifs par rapport aux chrétiens. Le patriarcat est aboli, il est interdit aux Juifs de se marier avec une chrétienne, ils ne peuvent pas construire de nouvelles synagogues et ils ne peuvent remplir aucune fonction d’autorité sur les chrétiens.

 

Modifié par aliochaverkiev
Lien à poster
Partager sur d’autres sites

Membre, Posté(e)
aliochaverkiev Membre 1 978 messages
Baby Forumeur‚
Posté(e)

Lettre 45

23 novembre 2018

Samuel,

La perte d’influence de la communauté juive de Palestine fut compensée par le dynamisme de celle de Babylone. Cette communauté apparut lors de la prise de Jérusalem en 586 avant l’E.C., par le chaldéen Nabuchodonosor II qui déporta à Babylone un quart de la population judéenne choisie parmi les individus les plus cultivés. [Les Chaldéens étaient une tribu sémite qui vivait au sud-ouest de Babylone]. La communauté s’adapta si bien aux conditions de son exil qu’après une seule génération elle faisait partie des classes dirigeantes du royaume (voir lettre 23).

Il fallut attendre la conquête de Babylone par les Perses en 539 avant l’E.C. pour que les déportés soient autorisés à revenir en Israël. Zorobabel partit avec Josué dans un premier convoi suivi plus tard par Esdras et Néhémie (voir lettres 24 et 25). Une grande partie des exilés choisit de rester à Babylone. Ils y vécurent en bonne intelligence avec les Perses puis avec les Grecs (les Séleucides) suite aux conquêtes d’Alexandre le Grand.

Au deuxième siècle avant l’E.C. Babylone fut conquise par les Parthes menés par Mithridate I, de la dynastie Arsacide. Les Parthes sont issus de tribus Scythes. Les Scythes étaient des nomades et des guerriers d’origine indo-européenne qui vivaient dans les steppes de l’Asie centrale.

La communauté fit alliance avec les Parthes pour repousser les Romains. Elle développa une culture propre qui enrichit celle des Judéens. C’est ainsi qu’Hillel l’Ancien (ou Hillel le Sage), le plus respecté des docteurs de la Loi, naquit à Babylone en 70 avant l’E.C. Inspiré par la culture de sa communauté il partit à 40 ans à Jérusalem (où il mourut en 10 après l’E.C.). Il institua des règles d’herméneutique pour l’exposition de la Torah et pour la détermination de la Halakha (herméneutique : science de l’interprétation des textes). Il établit une dynastie de pharisiens qui inspira le judaïsme pendant près de 400 ans.

Suites aux répressions menées en Judée par Titus en 70 puis par Hadrien en 135 beaucoup de Judéens s’exilèrent en Babylonie ce qui accrut l’importance de la communauté. Un disciple de Yehouda Hanassi, Abba (175-247) surnommé Abba Arikha (Abba le Grand) créa une académie rabbinique, une Yechivah. Il assura le passage du flambeau rabbinique de Palestine en Babylonie. Un autre rabbin, Samuel, fonda une autre Yechivah. Grâce à eux les aspirants à la fonction de rabbin n’eurent plus à aller en Palestine pour leur semikhah (intronisation dans la fonction de rabbin) tant ces académies surent trouver une légitimité auprès de tous les Juifs.

Les Arsanides furent renversés par les Sassanides, une dynastie perse puissante qui régna sur la région de 226 à 636. Les Sassanides rétablirent l’antique puissance de la Perse, récupérant à l’est les terres de la Bactriane puis en avançant à l’ouest. Mais là ils rencontrèrent l’opposition des Empereurs romains d’Orient. Les deux empires se firent face pendant des siècles sans que l’un puisse prendre le pas sur l’autre, les Sassanides ne parvenant pas à passer durablement au-delà de l’Euphrate (la Bactriane est une région à cheval sur les états actuels de l’Afghanistan, du Tadjikistan et de l’Ouzbékistan).

La capitale du royaume fut désormais Ctésiphon, ville fondée par les Parthes, située à 70 kilomètres au nord de Babylone. Les Sassanides étaient unis en une religion solide : le mazdéisme. Cette religion s’appuie sur ce mythe : la lutte incessante entre Ohrmazd ou Ahura-Mazda, la lumière d’en haut contre Ahriman la lumière du bas. Ahura-Mazda créa le monde matériel en 6 étapes, le ciel, l’eau, la terre, les plantes, le bœuf et enfin Guyomart, le premier homme. Ahriman livra alors assaut à la création. Conséquence néfaste de cet assaut : l’homme devint mortel. Après la mort l’âme va au ciel ou en enfer selon que l’homme a accompli de bonnes ou de mauvaises actions. A la fin des temps les hommes seront jugés et la résurrection est promise à ceux qui auront réalisé de bonnes actions. Le culte voué à cette religion est le culte du feu pratiqué dans des sanctuaires dédiés.

Sous le règne des Sassanides la communauté juive de Babylone se trouva au cœur d’un vaste réseau de communautés juives installées en Mésopotamie, en Perse, en Arménie, en Asie centrale, en Turquie (actuelle) et en Arabie. Une zone immense habitée par peu de chrétiens, d’où pour les Juifs, une condition beaucoup plus favorable que dans l’Empire romain. Le judaïsme ne posait pas de problèmes théologiques au mazdéisme. Signalons tout de même un bref raidissement d’un souverain sassanide en 468. Le représentant des Juifs fut exécuté, leur religion fut empêchée et les académies furent fermées. Cette politique provoqua une résistance des Juifs qui proclamèrent une éphémère indépendance juive en Babylonie. Cette autonomie ne dura que 7 ans de 513 à 520. Puis les rapports entre les communautés juives et perses se normalisèrent à nouveau.

D’une manière générale les Juifs bénéficièrent d’une grande autonomie sociale et religieuse. Ils eurent le droit de nommer à la tête de leur communauté un chef, appelé : exilarque (ou Reish Galuta) qui siégeait à Babylone et qui disposait de grands pouvoirs de représentation. L’exilarque était responsable de la bonne marche des œuvres sociales de la communauté et du bon fonctionnement de ses écoles religieuses et de ses tribunaux. Il devait néanmoins compter avec les grands maîtres ou geonim (au singulier gaon) qui dirigeaient les Yechivot (pluriel de Yechivah). Ce sont eux avec leurs disciples qui vont rédiger le Talmud babylonien, œuvre magistrale d’une tout autre envergure que le Talmud de Jérusalem. Ce Talmud aborde tous les aspects de la vie intérieure juive et répertorie l’ensemble des interrogations, des points de vue contradictoires et des discussions historiques, juridiques, théologiques et philosophiques accumulées pendant des siècles par les grands sages de Palestine et de la diaspora. Cette œuvre va fixer les cadres de l'existence juive jusqu'aux temps actuels.

Dans leur lutte contre l’Empire romain d’Orient les Sassanides, aidés par les Juifs, vont temporairement parvenir à conquérir des territoires de l’Empire romain, notamment la Palestine, en 614. Les Juifs vont être autorisés par les Perses à gouverner Jérusalem de 614 à 617. Mais les Romains vont repousser les Sassanides et les Juifs durent rentrer à Babylone.

En 636 un nouveau peuple récemment entré en action sur la scène de l’Europe et du Moyen orient, les Arabes, portés par leur nouvelle religion, l’Islam, vont renverser les Sassanides et rentrer à Ctésiphon. Une nouvelle ère s’annonce pour les Hébreux. Ce sera l’objet de prochaines lettres. Quant aux Perses, ils reculent vers l’est, résistent encore 15 ans aux Arabes, puis ils finirent par être définitivement vaincus. La Perse, empire millénaire, disparaît.

 

Modifié par aliochaverkiev
Lien à poster
Partager sur d’autres sites

  • 2 semaines après...
Membre, Posté(e)
satinvelours Membre 3 006 messages
Forumeur vétéran‚
Posté(e)

Lettre 46

4 décembre 2018

Samuel,

La communauté juive d’Espagne (les Séfarades) des origines jusqu’en 711

Sous la domination de l’Empire romain une communauté judéenne s’était intégrée à la population de la Province romaine d’Hispania. (L’origine de l’implantation des Juifs en Espagne reste controversée). Il s’agissait surtout d’agriculteurs installés dans la région de Tolède, en Catalogne et en Andalousie. Jules César avait autorisé les Judéens à pratiquer librement leur religion et à entretenir des liens étroits avec la Judée. Profitant de la décomposition de l’Empire romain d’Occident les Wisigoths, tribu germanique, envahirent l’Espagne au début du 5 ème siècle de notre ère. Ils étaient convertis à l’arianisme, branche hérétique du christianisme : ils ne croyaient pas au caractère divin de Jésus. Cela les rapprochait des Juifs et les éloignait des chrétiens orthodoxes (orthodoxe au sens : qui suit la doctrine officielle de l’Église).

Mais, en 589, le roi wisigoth de l’époque Récarède I abjure l’arianisme et se convertit au catholicisme romain. L’Église catholique installe ses dignitaires dans la capitale des Wisigoths, Tolède, et commence à persécuter les Juifs en demandant l’application du code de Théodose II (voir lettre 44). Les rois wisigoths continuèrent tout de même à protéger les Juifs malgré quelques persécutions sporadiques. Cependant au cours du temps la situation des Juifs s’aggrave. En 694 le roi wisigoth Egica décide de réduire en esclavage tous les Juifs et il les dépossèdent de tous leurs biens ( notamment les terres). La situation devient catastrophique, nombre de Juifs doivent s’enfuir, les rois s’orientent vers leur expulsion voire leur extermination. Mais les armées arabes de la dynastie des Omeyyades dirigées par le berbère Tariq ibn Ziyad, venues d’Afrique et rejointes par tous les Juifs bannis, rentrent en Espagne et remportent une victoire décisive en juillet 711 à Guadalete où Rodéric, dernier roi des Wisigoths meurt. Les Arabes victorieux conquièrent l’Espagne. Les Juifs les accueillent en libérateurs. Une culture judéo-arabe va s’épanouir en Espagne. Les Juifs d’Espagne sont appelés : séfarades.

Les communautés juives d’Égypte et d’Afrique du Nord (Maroc, Algérie, Tunisie, Libye)

En Afrique du Nord la présence juive remonte à l’époque des rois lagides d’Égypte (appelés encore les Ptolémées, voir lettre 27). Ceux-ci au IV siècle avant l’E.C. firent appel à des mercenaires juifs installés à Alexandrie pour défendre les villes qu’ils avaient conquises en Cyrénaïque (région de la Libye actuelle) et à Chypre. Des communautés juives s’installèrent ainsi en Cyrénaïque.

En Égypte au moment de la chute du royaume d’Israël puis de celle du royaume de Juda (en 586 avant l’E.C.) une petite communauté juive se développa dans l’île Éléphantine située au milieu du Nil en face d’Assouan. Les Juifs servaient comme soldats au service des pharaons. Au début du IV siècle avant notre ère cette communauté disparut et les Juifs se retrouvèrent à Alexandrie sous la domination des Lagides qui désormais régnaient sur l’Égypte. Ils s’hellénisèrent considérablement ce qui les distingua des autres Juifs de la communauté mondiale. C’est à cette époque que sera rédigée la Bible des Septante (voir lettre 27). Quand l’Égypte passa sous la domination des Romains en 30 avant notre ère la communauté s’adapta. Elle produisit ses propres penseurs, notamment Philon d’Alexandrie (20 avant notre ère, 45 après notre ère), contemporain de Jésus et de Paul. Philon respecte les rites du judaïsme mais comme Paul il prend ses distances avec la Loi, conscient que celle-ci est un obstacle à la conversion des non-juifs au judaïsme (à l’époque ne pas oublier que les Hébreux pratiquent un prosélytisme actif). Il réinterprète la Bible et tente de l’enrichir de la culture platonicienne. Comme Paul il tente de présenter le judaïsme sous une forme nouvelle susceptible de séduire les Gentils. Mais le triomphe du christianisme plongea sa philosophie dans l’oubli.

En 115-117 dans le sillage de la révolte des Judéens contre l’occupation romaine en Palestine, les communautés d’Alexandrie et de Cyrénaïque se révoltent à leur tour contre les Romains. Ceux-ci réagissent violemment. Les Juifs fuient vers l’Est, trouvent asile à Carthage (près de Tunis) puis près des berbères de Tunisie et d’Algérie. De petites communautés se constituent en Tunisie, Hamman-Lif près de Tunis; Utique près de Carthage, Chemtou (nord-ouest de la Tunisie), en Tripolitaine (région de Tripoli, ouest de la Libye), en Numidie (Algérie actuelle), à Hippone (Annaba actuelle, Algérie), à Cirta (Algérie), en Maurétanie césarienne (à Sétif, à Auzia, à Cherchell), en Maurétanie Tingitane (Maroc) notamment à Volubilis. [La Maurétanie césarienne correspond à l’Algérie centrale et occidentale. La Maurétanie Tingitane correspond au Maroc. Les deux Maurétanies étaient peuplées de Maures autre nom des Berbères].

La cohabitation avec les chrétiens est difficile et elle s’aggrave nettement lorsque Constantin se convertit. La pression s’atténue lorsque la région est occupée à la fin du V ème siècle par une tribu germanique qui chasse les Romains christianisés : les Vandales convertis à l’arianisme. Mais là encore c’est la conquête de la région par les Arabes au VII siècle qui va soulager les Juifs de la persécution des chrétiens.

La communauté juive d’Italie jusqu’à la chute de l’Empire romain d’Occident (476)

Une communauté juive, probablement originaire d’Alexandrie était établie à Rome depuis le II siècle avant l’E.C. Les relations cordiales entretenues entre Rome et les Maccabées venus négocier une alliance contre les Séleucides consolide l’intégration de la communauté. Celle-ci soutint la lutte de Jules César dans sa conquête du pouvoir. Ce soutien lui valut en retour la bienveillance de ce dernier. Les Juifs possèdent l’autonomie administrative, pratiquent librement leur culte et sont exemptés d’impôts. Auguste, le premier Empereur romain (la République s’efface devant l’Empire à la mort de César assassiné en 44) leur accorda la citoyenneté romaine. La communauté se développe sensiblement sur le plan démographique. Selon Flavius Josèphe il y aurait à Rome entre 30 000 et 40 000 Juifs au premier siècle après l’E.C. Ceux-ci pratiquent un prosélytisme actif qui rencontre un certain succès (mais qui leur vaut aussi une certaine hostilité de la part de Romains soucieux de protéger leur identité). Après la révolte des Judéens en 70 en Palestine, l’empereur Vespasien (il règne de 69 à 96) se montra moins favorable. Il impose à la communauté le paiement d’un impôt destiné à financer la reconstruction future à Jérusalem d’un Temple dédié à Jupiter. Sous l’empereur Hadrien (voir lettre 43) la circoncision est interdite dans tout l’Empire aux Juifs comme aux non-Juifs ce qui inspira la révolte de Simon Bar-Cokhba. Rappelons que les Romains n’interdirent pas la circoncision pour des raisons religieuses mais pour des raisons philosophiques. Ils voyaient dans la circoncision un acte humiliant, symbole de la castration. La circoncision sera de nouveau autorisée par l’empereur Antonin-le-Pieux (il règne de 138 à 161) mais il la maintiendra interdite pour les convertis.

Sous Constantin le christianisme devient religion d’État. A Rome la liberté religieuse est encore respectée. La scission entre l’Empire d’Occident et l’Empire d’Orient en 395 freine le développement des mesures anti-juives prises par l’Empire d’Orient. Mais la situation des Juifs finit tout de même par se dégrader. Ils sont progressivement exclus des charges publiques, les mariages mixtes sont interdits, les Juifs sont progressivement marginalisés. Rome tombe en 476. Le roi Ostrogoth Théodoric qui règne sur Rome de 493 à 526 rétablit la liberté religieuse et contient l’hostilité des catholiques contre les Juifs. Théodoric est issu des tribus germaniques et il pratique lui aussi l’arianisme, il ne voit donc pas chez les Juifs des déicides.

Considérations générales

Après la perte de leur terre les Judéens vont poursuivre lentement leur dispersion à travers le monde malgré leur baisse numérique consécutive aux persécutions et aux guerres. Ils atteignent des contrées aussi éloignées que l’Inde et la Chine. Ils s’établissent en Sicile, en Sardaigne, aux Baléares, sur les bords du Rhin (Cologne) autour du Bosphore, en Macédoine (Salonique), en Chypre, en Arménie (Van), au Kurdistan. Contrairement à d’autres communautés ils ne cherchent pas à se regrouper sur un seul territoire ni une seule ville. Ils forment ainsi un chapelet de petites communautés rassemblées autour de la synagogue, partout dispersées dans le monde.

Il est nécessaire de parler maintenant de la communauté juive établie en Arabie. Là va naître un nouveau conquérant, à l’instar de César, d’Alexandre le Grand ou de Paul : Mahomet. Celui qui fonda l’Islam posa aussi les fondations d’un nouvel Empire. Les Hébreux assistèrent à l’émergence de ce nouvel acteur de l’Histoire qui façonna autant que ses prédécesseurs les civilisations issues de Mésopotamie.

J’espère que tu vas bien

Je t’aime

Lien à poster
Partager sur d’autres sites

  • 2 semaines après...
Membre, Posté(e)
satinvelours Membre 3 006 messages
Forumeur vétéran‚
Posté(e)

Lettre 47-1

30 décembre 2018

Samuel,

La communauté juive en Arabie et la naissance de l’Islam

Les Hébreux se sont implantés très tôt en Arabie, probablement au moment de l’exil à Babylone soit au sixième siècle avant l’E.C. Après la destruction du Temple en 70 après l’E.C. d’autres israélites se réfugièrent en Arabie.

Ils s’installèrent principalement dans la région du Hedjaz autour des oasis de Yathrib et de Khaybar. Le Hedjaz est une région de l’Arabie qui longe la mer Rouge. C’était une voie de communication très fréquentée entre la Méditerranée et l’Orient, via les ports du Yémen, région du sud de l’Arabie. Ce sont les Arabes qui assuraient les échanges par le biais de leurs caravanes de chameaux qui transportaient les produits échangés.

Les Hébreux introduisirent dans les oasis l’irrigation, la culture des dattes, de la vigne, la production du miel, le tissage, l’orfèvrerie et la métallurgie. 

Les Arabes sont d’origine sémite comme les Hébreux. La tradition biblique hébraïque les fait descendre d’Ismaël, fils d’Abraham et de Agar, une esclave d’origine égyptienne au service de Sara, la femme d’Abraham. Comme Sara se révéla stérile, elle proposa à son mari de se rapprocher de son esclave afin d’avoir une descendance. Ainsi naquit Ismaël. Mais Sara finit par tomber enceinte et donna à Abraham un fils : Isaac. Du coup Sara exigea de son mari qu’il renvoie Agar et Ismaël car dit-elle : «  Le fils de cette esclave n’héritera point avec mon fils Isaac ». Abraham s’exécuta non sans que Dieu n’intervint pour le réconforter et lui assurer qu’Ismaël « engendrera douze princes [douze tribus] et je le ferai devenir une grande nation ». Mais l’Alliance de Dieu avec Abraham sera confirmée avec Isaac et non avec Ismaël. « Je [Dieu] maintiendrai mon pacte avec lui [Isaac] comme pacte perpétuel à l’égard de sa descendance [les Hébreux] »

Les Arabes étaient principalement des bédouins c’est-à-dire des nomades vivant de l’élevage de caprins (chèvres), d’ovins et de camélidés (chameaux et dromadaires) et de commerce caravanier. Cette spécialisation dérivait de la nature du territoire qu’ils occupaient, essentiellement des terres désertiques avec quelques points d’eau (oasis). Cette géographie difficile ne favorisait pas le développement de l’agriculture ni celui de la sédentarité. 

Leur société s’organisa autour de la vie nomade. L’unité sociale était la tribu. Pas de propriété privée, droits collectifs sur les pâturages, les sources et les troupeaux. A la tête de la tribu : le sheikh, chef élu. La vie de la tribu était réglée par la coutume : la sunna. Ils étaient polydémonistes c’est-à-dire qu’ils croyaient dans plusieurs divinités qui vivaient dans les arbres, près des sources ou dans des bétyles (pierres sacrées). Leur culture était orale et reposait sur la mémoire.

Seules exceptions à la vie nomade : les oasis. L’oasis la plus importante était la Mecque également située dans le Hedjaz. Là des Arabes sédentarisés avaient créé une économie développée, assise sur l’agriculture. L’organisation sociale s’était construite autour de petites royautés.

Les Hébreux et les chrétiens avaient largement diffusé leurs mythes dans la population arabe grâce aux brassages commerciaux. Beaucoup d’Arabes connaissaient le monothéisme hébraïque et le messianisme chrétien. Leur culture orale les rendaient perméables à l’écrit. La culture écrite les impressionnait. Tant et si bien que certains finirent par faire leurs tous ces mythes allant jusqu’à se les approprier.

C’est ainsi qu’ils associèrent Abraham au culte païen de la Mecque, Ismaël selon eux ayant indiqué à son père le lieu de pèlerinage où était conservée un bétyle (demeure d’un dieu) appelée la pierre noire, déposée au sein d’une construction cubique : la Kaaba.

Mahomet (ou Muhammad, ou Mohammed), le père de l’islam, naquit à la Mecque en 570 ou 571 après l’E.C. Islam signifie : soumission, en l’occurrence soumission à Dieu. Il était issu d’une branche pauvre de la puissante tribu des Qurayshites qui régnait sur la ville. Enfant il perd son père et sa mère et il échappe à la misère grâce à la protection de son grand-père puis de son oncle Abu Talib. Il apprend le métier de marchand en accompagnant les grandes caravanes chamelières qui parcourent le désert. A 25 ans il entre au service d’une riche veuve commerçante, Khadija, de 15 ans son aînée, avec laquelle il se mariera.

Mahomet sait à peine lire et écrire, il est influencé par le discours oral, principalement celui des Hébreux. Les maîtres judéens vont le captiver avec leurs récits bibliques et les principes de leur foi, le monothéisme. Mahomet y voit la possibilité de fédérer sous un seul Dieu toutes les divinités des tribus nomades. Il a une ambition de chef : réunir sous son autorité toutes les tribus bédouines. Il ne cherche pas à prendre le pouvoir sur les branches régnantes des Qurayshites de la Mecque. Ceux-là sont trop sûrs d’eux, riches entrepreneurs, dirigeants du commerce international. Il va viser les bédouins, nomades prolétarisés vivant au service des riches Qurayshites.

En 610 commence la prédication de Mahomet. Selon lui, alors qu’il méditait dans une grotte, l’ange Gabriel (Djibril) lui apparut et lui annonça qu’il allait lui transmettre la parole de Dieu. C’est le début de la Révélation coranique [Coran signifie : la récitation].

Au début le discours est simple : affirmation de l’unicité de Dieu (principe hébraïque) et annonce de la fin prochaine du monde (principe messianique chrétien). Puis le message se radicalise : nécessité d’aider les pauvres et les déshérités, refus de l’ordre social existant. Comme Mahomet ne sait pas écrire il répète les mots de la révélation à Khadija et à ses amis qui les mémorisent ou qui les écrivent sur divers matériaux. Le message diffusé par Mahomet finit par déplaire aux maîtres de la Mecque qui y voient une contestation de leur autorité. Après la mort de Khadija puis d’Abu Talib Mahomet perd ses protections et doit partir en 622 à Yathrib, à 400 km au nord de la Mecque. La-bas des tribus se font la guerre et cherchent un arbitre. Elles s’en remettront à Mahomet dont le discours novateur, en opposition avec celui des dominants de la Mecque, plaît aux bédouins.

Le départ de la Mecque est appelé hégire (qui signifie immigration, exil). Le calendrier musulman commence au moment de ce départ, soit le 16 juillet 622. Ce départ symbolise la rupture de Mahomet avec les logiques claniques de la Mecque. A Yathrib il commence une autre vie, celle d’un chef qui va se placer au-dessus des clans et des tribus, créant une communauté ouverte à tous : l’umma. Yathrib changera de nom et s’appellera Médine « medinat al-nabi » ce qui signifie : la ville du Prophète.

 

Lien à poster
Partager sur d’autres sites

  • 2 semaines après...
Membre, Posté(e)
satinvelours Membre 3 006 messages
Forumeur vétéran‚
Posté(e)

Lettre 47-2

7 janvier 2019

Samuel,

A Médine la révélation va devenir plus concrète, adaptée à la résolution des questions sociales et politiques. Comment organiser la justice, la vie en commun, l’héritage, etc. Le Prophète devient un chef d’État qui doit régler tous les problèmes qui se posent à un État, si petit soit-il. Il réunit sous l’autorité d’un seul Dieu, Allah (dieu qui faisait déjà partie des divinités préislamiques) toutes les tribus de Médine, lui-même se posant donc comme le messager d’ Allah. Il tente de réunir aussi sous son autorité les trois tribus juives de Médine : les Qaynuqa, les Banu Nadir et les Banu Qurayza. Pour cela il prend beaucoup au judaïsme : le monothéisme bien sûr, mais aussi des traditions judéennes : le shabbat, le carême du Kippour par exemple et il fait ses prières en se tournant vers Jérusalem.

En tant que chef de la cité de Médine il se doit d’assurer la subsistance de ses administrés. L’économie locale n’est pas assez productive. Aussi Mahomet va se lancer dans une guerre de conquête pour s’emparer des biens de consommation dont il a besoin. Sa cible va être la riche cité de la Mecque. Mais les Judéens ne vont pas le suivre dans cette politique de conquête. D’abord ils ne supportent pas vraiment que Mahomet tente de leur imposer son autorité, mais ensuite ils préfèrent entretenir des relations d’échange commercial avec les maîtres de la Mecque.

Mahomet ne peut pas accepter que dans la cité qu’il dirige des tribus lui fassent défaut. Aussi, en 624 il va obliger la tribu de Qaynuqa à quitter Médine. Elle émigrera dans l’actuelle Transjordanie. Puis en 625 il expulse la tribu des Banu Nadir qui se réfugiera à Khaybar, une oasis peuplée de Juifs et située à 150 kilomètres au nord de Médine. Quand la troisième tribu, celle des Banu Qurayza, prit parti contre lui dans sa lutte contre la Mecque il sera radical : il tuera les hommes et il vendra comme esclaves les femmes et les enfants.

Du coup la révélation va changer. Mahomet fait maintenant les prières en se tournant vers la Mecque, il avance le shabbat au vendredi, il remplace le carême du Kippour par le ramadan mais surtout il va donner un autre sens à la nouvelle religion qu’il est en train de bâtir. Par la Révélation qui se déroule sur 20 ans et qui s’enrichit ou change dans ses attendus en fonction des événements, il va construire cette audacieuse vision : Allah est le seul Dieu depuis toujours et la Révélation est la seule parole vraie d’Allah, parole qui a toujours été et qui est maintenant révélée par le Prophète ; Abraham est le fondateur de l’islam, il est le premier musulman, en tant qu’il est le premier à avoir annoncé le monothéisme. Tous ceux qui sont nés après lui sont musulmans tandis que les Juifs et les chrétiens n’auront pas compris ou auront déformé la parole d’Allah.Mahomet est donc celui par lequel advient la seule vérité. Il établit l’antériorité de l’islam sur le judaïsme et le christianisme.

Il continue sa politique de conquête territoriale. Ne parvenant pas à s’emparer de la Mecque il va s’attaquer en 628 à l’oasis de Khaybar. Les Hébreux résistent mais sont vaincus. Mahomet va inaugurer une politique qui sera plus tard institutionnalisée par ses successeurs : il offre aux Hébreux sa dhimma c’est-à-dire sa protection en échange de quoi ils doivent lui livrer la moitié de leur production agricole.

Il poursuit sa marche vers le Nord, il occupe le sud de la Palestine. En 630 il soumet enfin la Mecque. Impressionnées par cette victoire même les tribus nomades les plus éloignées de Médine commencent à lui faire allégeance. Il meurt en 632.

Son successeur, le Calife Abu Bakr (Calife signifie député, député du Prophète) qui régna de 632 à 634 poursuit l’œuvre de Mahomet en soumettant toute l’Arabie et en remportant des premières victoires contre les Perses et les Byzantins [l’Empire byzantin est l’autre nom donné à l’Empire romain d’Orient, par référence à Byzance qui était l’ancien nom de Constantinople].

De 634 à 644 Omar ibn al-Khattab succède en tant que deuxième Calife à Abu Bakr. Il s’attribue le titre de Commandeur des Croyants. C’est sous son règne que commence réellement l’épopée de l’islam avec les premières grandes conquêtes et la conversion de peuples entiers à la nouvelle religion. Il conquiert sur les Byzantins l’Égypte, la Palestine et la Syrie, sur les Perses la Mésopotamie et une large partie Est de la Perse.

Omar va interdire l’Arabie aux non-musulmans. Les Hébreux doivent partir d’Arabie notamment la colonie juive de Khaybar. Mais il permet aux Juifs de revenir à Jérusalem (qu’il conquiert en 637-638) et il installera d’autres Juifs expulsés dans l’ancienne région de Babylone. Il va institutionnaliser la pratique de la dhimma. Moyennant le paiement de l’impôt les Juifs (et toutes les minorités non musulmanes) appelés les dhimmi peuvent garder leurs terres et pratiquer leur culte dans tous les territoires conquis par les Arabes (hors Arabie d’où tous les non-musulmans sont expulsés). Les deux Califes qui suivent, Othman ibn Affan (644-656) puis Ali ibn Abou Taleb (656-661) continuent la politique de conquêtes avec la prise de l’Arménie, de l’Azerbaïdjan, de la Perse orientale, de la Tripolitaine, de Chypre et de Rhodes. 

En 661 le nouveau Calife Mu’awiya fonde la dynastie des Omeyyades qui régnera juqu’en 750. Il transporte le siège du pouvoir de Médine à Damas. En moins d’un siècle les Omeyyades vont édifier un pouvoir sans précédent dans l’Histoire. A l’Est ils vont conquérir tous les territoires jusqu’à la vallée de l’Indus et décident de s’arrêter aux confins de la Chine. A l’Ouest ils partent à l’assaut du Maghreb. En 670 le chef de guerre Uqba ibn Nafi part de l’oasis de Ghadamès en Libye. A la tête de 10 000 cavaliers il prend la Tunisie et fonde la ville de Kairouan. Puis il atteint l’Atlantique traversant l’Algérie et le Maroc actuels. Mais les Berbères qui habitent ces pays, menés par la reine des Aurès, Cahina (surnommée la Juive) résistent. Puis ils cèdent. Les Arabes les traitent avec tact et les assimilent. Tant et si bien que c’est un berbère, Tariq ibn Ziyad qui est chargé, en 709, d’organiser l’expédition d’Espagne. Il traverse le détroit en 711, débarque à Gibraltar et en octobre il occupe Tolède. En 714 il s’empare de Saragosse. Puis il occupe l’Andalousie et remonte vers la France. Charles Martel arrête sa progression à Poitiers en 732.

A cette date l’Empire omeyyade s’étend des Pyrénées aux rives de l’Indus, du Sahara à la mer d’Aral. Jamais un empire aussi vaste n’avait encore été constitué. Toute la rive sud de la Méditerranée est désormais occupée par les Arabes musulmans. Ils ont un pied en Europe avec l’occupation de l’Espagne. Leur territoire s’étend largement à l’Est jusqu’aux confins de la Chine. En revanche ils ne parviennent pas à prendre Constantinople. Le noyau de l’Empire romain d’Orient résistera. La rive nord de la Méditerranée, l’Europe, ne sera pas non plus occupée.

 

 

 

 

Lien à poster
Partager sur d’autres sites

Membre, 64ans Posté(e)
pila Membre 18 571 messages
Baby Forumeur‚ 64ans‚
Posté(e)

Un sujet très intelligent.

Maintenant, si nous parlions de la Religion anglicane; chose créée de toute pièce par un roi barbu pour n'en faire qu'à sa tête (et couper celles de plusieurs de ses femmes).

Pas con le Henri VIII ! "C'est moi le chef de l'Eglise d'Angleterre !" :hum:

Lien à poster
Partager sur d’autres sites

Membre, Posté(e)
satinvelours Membre 3 006 messages
Forumeur vétéran‚
Posté(e)

Lettre 48

9 janvier 2019

Samuel,

Sous la domination des quatre premiers califes et de la dynastie des Omeyyades la condition des Juifs des territoires conquis par les Arabes va s’améliorer. En échange de leur sujétion politique et militaire qui implique certaines obligations : ne pas porter assistance aux ennemis de la vraie foi, payer tribut et aider à l’effort de guerre, les communautés juives se voient offrir la sécurité physique, la liberté religieuse et économique, et l’autonomie communautaire.

Les communautés juives de Perse, de Palestine, d’Afrique du Nord et d’Espagne accueillent donc les Arabes favorablement car ceux-ci les délivrent des persécutions récurrentes exercées par le monde chrétien. En Espagne surtout, là où le pouvoir wisigothique interdisait toute manifestation du judaïsme et séparait les enfants de leurs familles pour les confier à des familles chrétiennes, les Juifs accueillent les Arabes en libérateurs. Mieux ils collaborent activement avec l’envahisseur qui va jusqu’à leur confier la garde des villes conquises. Autre changement significatif : la levée de l’interdit, païen aussi bien que chrétien qui fermait aux Juifs les portes de Jérusalem. Plusieurs dizaines de familles peuvent désormais s’y installer (voir lettre 47-2). Le calife Mu’awiya premier de la dynastie ommeyade installera aussi des Juifs en Syrie où il s’est établi, les considérant comme des alliés. Les Omeyyades favorisent aussi le retour des Juifs à Alexandrie.

La conquête musulmane va bouleverser les structures économiques des communautés juives. Au moment de la conquête l’économie juive aussi bien en Palestine que dans l’ensemble de l’Orient était fondée pour l’essentiel sur l’agriculture. Le tribut foncier (tribut sur la terre et la production agricole) imposé aux Juifs va éloigner ceux-ci du travail de la terre et les inciter à se tourner vers les professions commerciales ou artisanales.

Les Omeyyades tiennent à marquer la supériorité de l’islam sur le judaïsme. Ainsi, en 691, ils construisent sur l’esplanade de l’ancien Temple de Jérusalem le Dôme du Rocher et la mosquée al-Aqsa. En 716 ils fondent une ville arabe en Palestine, à l’ouest de Jérusalem, Ramleh mais ils réservent tout un quartier de la ville aux Juifs qui y pratiqueront le métier de teinturiers. En 750 les Omeyyades seront renversés par une nouvelle dynastie arabe : les Abbassides. Ceux-ci mettront en place une nouvelle culture musulmane sur les territoires conquis par les Omeyyades.

 

Bon courage pour la reprise au lycée.

Je te souhaite une belle année avec la perspective d’un départ conquérant en Russie !

Je t’aime

Lien à poster
Partager sur d’autres sites

Annonces
Maintenant

Rejoindre la conversation

Vous pouvez publier maintenant et vous inscrire plus tard. Si vous avez un compte, connectez-vous maintenant pour publier avec votre compte.

Invité
Répondre à ce sujet…

×   Collé en tant que texte enrichi.   Coller en tant que texte brut à la place

  Seulement 75 émoticônes maximum sont autorisées.

×   Votre lien a été automatiquement intégré.   Afficher plutôt comme un lien

×   Votre contenu précédent a été rétabli.   Vider l’éditeur

×   Vous ne pouvez pas directement coller des images. Envoyez-les depuis votre ordinateur ou insérez-les depuis une URL.

Chargement

×