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Doïna Membre+ 19 524 messages
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Bonjour,

La fête de la Nativité du Christ fut instituée par l'Eglise au IV° siècle pour remplacer une fête païenne célébrant à la même date le dieu solaire Mithra. Originaire de Perse, le culte de Mithra s'implanta au Ier siècle avant notre ère à Rome (où l'on était friands de cultes exotiques, tel celui de la déesse égyptienne Isis).

Ce culte y était si populaire que l'empereur Aurélien, en 274 après J.C., l'instaura religion d'Etat, fixant également la fête du Sol Invictus (soleil invaincu) au 25 décembre.

Ci-dessous, un Mithra gallo-romain, visible au musée archéologique de Dijon :

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Pour imposer Noël, les Pères de l'Eglise furent amenés à reconnaître parmi d'autres dates le 25 décembre comme celle de la Nativité, alors qu'ils ne connaissaient même pas l'anniversaire exact de Jésus. La fête se résumait alors à la messe de la Nativité. Ce n'est qu'en 337 que la fête prit sa place définitive dans le calendrier occidental. 337 est de surcroît l'année du baptême de l'empereur Constantin qui unit l'Eglise et l'Etat, et fit du christianisme la religion officielle.

Il faut toutefois signaler que le folkloriste Arnold Van Gennep réfute totalement l'idée que le culte de Mithra apporté en Gaule par les légions romaines soit à l'origine de la fête de Noël : pour lui, rien ne prouve qu'elle se soit répandue jusque dans les populations rurales de la France actuelle et de certains pays rhénans.

Il apparaît que les Celtes, Germains et Scandinaves célébraient le solstice d'hiver. Donc si le mot Noël peut être une francisation du mot latin "natalis", ce pourrait tout autant être une contraction du celte Noyo Hal (le nouveau soleil) ou même de termes signifiant nouveau dans les différents dialectes : nouvel, nouvé, noué... rappelant qu'à l'origine, la nouvelle année commençait au solstice d'hiver, donc aux environs de Noël. À cette occasion, les Celtes faisaient brûler une bûche en symbole du soleil renaissant. Les Germains et Scandinaves avaient aussi leurs rituels où le feu entrait en jeu pour encourager, en quelque sorte, le soleil à reprendre le dessus sur les ténèbres et le froid de la mort gagnant du terrain sur la lumière et la chaleur bienfaisante de la vie.

La tradition de la bûche a perduré : de préférence grosse et de vieux bois provenant d'un hêtre, d'un ormeau, d'un chêne ou d'un arbre fruitier, dans certaines régions le chef de famille jetait dessus du sel ou de l'eau (qui pouvait être de l'eau bénite) avant de la placer dans les flammes. Quant à la bûche que nous mangeons au dessert, qui est un gâteau, c'est une vieille coutume attestée au Moyen-Âge : au départ gâteau de forme oblongue évoquant une bûche, et creusé de façon à y placer une effigie de l'enfant Jésus, les grands pâtissiers du XX° siècle ont mis fin à ces gâteaux rudimentaires pour en faire des pièces raffinées et personnalisées.

D'une région à l'autre, la bûche de Noël avait ses propriétés propres : en Touraine, on la promenait dans le jardin pour éloigner les insectes. En Lorraine, on prenait garde à ne pas s'asseoir dessus de crainte de contracter la gale. En Provence, où la bûche est appelée le calignaou et est un morceau de bois d'olivier, on la déposait d'abord sur la porte de la maison ; ensuite, le plus jeune et le doyen de la maisonnée se livrait par trois fois à une libation de vin en répétant "Soyons joyeux, Dieu nous rend joyeux. Le feu caché vient, tout bien vient ; si nous ne sommes pas plus, que nous ne soyons pas moins." Alors seulement la bûche pouvait aller dans l'âtre. On l'éteignait à la fin de la veillée pour la conserver jusqu'à l'an suivant. En Franche Comté, la bûche devait se consumer pendant toute la durée de la messe de minuit pour que la maison soit protégée du tonnerre. En Saône-et-Loire, un homme armé la surveillait pendant toute la durée de la messe de minuit afin qu'un démon ne profite pas de l'absence des habitants de la maison pour l'éteindre, ce qui aurait amené un grand malheur. Pour les Périgourdins, une bûche de Noël qui brûlait bien était bénie du Ciel, tandis qu'en Nivernais, le fait qu'elle fasse beaucoup d'étincelles était la promesse d'une bonne moisson. Mais il existe encore quantités de croyances liées à la bûche de Noël de par toute l'Europe...

Les charbons de cette bûche passaient pour avoir des vertus médicinales et autres bienfaits, ses cendres placées dans un linge blanc mettaient à l'abri des accidents et, posées sur le toit, refoulaient les sorciers et leurs maléfices. Ses tisons protégeaient de l'orage et de la foudre : il suffisait d'en jeter au feu au premier coup de tonnerre. On pouvait encore les mêler aux graines destinées aux récoltes à venir ou au breuvage des animaux malades.

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Parlons maintenant de l'arbre de Noël : nous devrions cette tradition aux Allemands. Saint Boniface, moine et évangélisateur né en 680, voulait convaincre les prêtres germains des environs de Geismar du caractère non-sacré du chêne. C'est pourquoi il en abattit un : en tombant, l'arbre écrasa tout ce qui se trouvait sur son passage, excepté un jeune sapin. La légende veut que Saint Boniface fit de ce pur hasard un miracle et, comme il était en train de prêcher la Nativité, il déclara que, désormais, cet arbre serait celui de l'Enfant Jésus. C'est depuis que des sapins sont plantés outre-Rhin pour célébrer la naissance du Christ. Toutefois, ceci n'est qu'une légende, et c'est un fait que le sapin est un arbre qui demeure vert toute l'année, ce qui en fait depuis toujours un symbole de vie éternelle. Ailleurs en Allemagne et aussi en Autriche, on décore depuis longtemps des sapins à Noël avec des objets lumineux et hauts en couleur appelant Dame-nature à reprendre ses couleurs et le soleil à ramener les jours longs. Les Alsaciens ont introduit dès le XVI° un sapin dans leur demeure pour Noël, donc bien avant l'ensemble des Français (qui ne s'y mirent qu'au XIX° siècle), et ce serait encore des immigrés Alsaciens qui auraient apporté cette coutume outre-Atlantique. Le sapin alsacien était autrefois décoré avec des fruits, mais suite à la grande sécheresse de 1858 un verrier mosellan eut cette géniale idée de créer des boules en verre pour remplacer les fruits que nul ne pouvait se procurer. On n'a plus pu s'en passer depuis.

Bien des spécialistes voient dans l'arbre de Noël la survivance de rites d'anciennes tribus germaniques qui, à l'entrée de l'hiver, introduisaient des branches dans les maisons et y suspendaient de la nourriture pour s'attirer les bonnes grâces des esprits en leur offrant l'hospitalité pendant les grands froids.

De leur côté, les Celtes, qui associaient un arbre à chaque mois, avaient dédié l'épicéa au 24 décembre, jour de la renaissance du soleil (le 23 décembre étant pour eux le jour de la mort de l'astre). Le houx, arbuste persistant à l'instar du sapin et de l'épicéa, et qui donne des fruits de couleur rouge en cette période de l'hiver, décore également les demeures depuis les temps païens en cette période festive.

Et la crèche dans tout ça ? Eh bien c'est à Saint François d'Assise que nous devrions cette tradition. En 1223, trois ans avant sa mort, il aurait imaginé d'installer une crèche dans une grotte. En réalité, la crèche est bien une tradition italienne du XIII° siècle, mais au départ il s'agissait de mise en scène de la Nativité où intervenaient des comédiens occasionnels. Cette tradition n'apparaît qu'au XIV° siècle en France. Rappelons qu'une crèche de Noël peut être statique (avec des figurines), vivantes (jouée par des acteurs) ou mécaniques (avec des figurines animées).

Le Père Noël : originellement, c'est Saint Nicolas qui apportait des jouets aux enfants, dont il était le patron selon l'iconographie chrétienne. Or cela n'avait pas lieu le 24 décembre, mais le 6 ! Ecarté au XVI° siècle dans une bonne partie de l'Europe par la religion réformée qui voyait en lui une superstition idolâtre, il fut remplacé par le Père Noël, comme lui de rouge vêtu et portant barbe blanche, mais pleinement laïque. Enfin, vêtu de rouge, non, pas tout à fait, puisque dans certains pays, Saint Nicolas était en vert, pas en rouge, cela dépendait. Or d'où vient-il ce Père Noël, s'il n'est pas Saint Nicolas ? Qui pourrait le dire exactement ? Des spécialistes se sont penchés sur la question, certains y ont vu des similitudes avec le dieu germano-scandinave Thor, qui était une divinité masculine joviale, robuste, barbue, débonnaire et bienveillante, protectrice des pauvres, des paysans, résidant parmi les régions arctiques et se déplaçant dans un char tiré non pas par des rennes, mais par des boucs. D'autres y ont reconnu Odin : il existait en effet une tradition de distribution de cadeaux et de friandises chez les Germains au solstice d'hiver. Un homme se dévouait à porter un déguisement et passait apporter ces surprises aux enfants, auxquels il ne manquait pas de demander s'ils avaient été sages, si tout allait bien, avant de leur donner ce qu'ils attendaient. Chez les Celtes, enfin, il y avait le dieu Gargan, fils de la vierge Bélisama (=la Très Brillante) fécondée par l'esprit du dieu solaire Bélénos (= le Brillant), qui distribuait des cadeaux dans les campagnes à l'occasion du solstice d'hiver. Mais ce ne sont que des hypothèses. Le Père Noël peut néanmoins être considéré comme plus sympathique que Saint Nicolas qui, lui, ne sort jamais sans son Père Fouettard pour châtier les petits gredins ! Le Père Noël doit aussi beaucoup sa notoriété à la marque Coca-Cola qui, en 1931, lui donna son apparence définitive de gros bonhomme au nez rubicond dans une publicité.

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Cependant, longtemps il n'a pas été question de Saint Nicolas ou même de Père Noël dans bon nombre de régions : en Franche-Comté, déposer des friandises dans les souliers des enfants était resté le travail du petit Jésus comme cela l'était un peu partout au Moyen-Âge, et dans les environs de Montbéliard, c'était celui d'une fée, tante Arie. En Italie, c'est encore une fée mais aux allures de sorcière (vieille femme sur un balai), la Befana, qui apportent ses meilleures friandises aux enfants sages, et n'offrent que du vulgaire sucre noir et du réglisse aux enfants pas sages, ce qui est tout de même mieux que rien. Dans les pays anglo-saxons, on parle de Santa Claus, déformation du néerlandais Sinterklaas, littéralement Saint Nicolas, bien que ce soit un Saint Nicolas qui n'œuvre que dans la nuit du 24 au 25 décembre.

Cette tradition des cadeaux remonterait aux Romains, qui en avaient pris l'habitude à cette occasion sans pour autant supprimer les étrennes du jour de l'An, mais l'on peut considérer plutôt qu'elle représente les offrandes des Rois Mages, et c'est pour cette dernière raison que les petits Espagnols doivent attendre le jour des Rois pour être gâtés. Les enfants russes reçoivent aussi leurs cadeaux le 6 janvier mais c'est Babouschka, une femme, qui les leur apporte. Sous l'ère soviétique, Babouschka fut cependant reléguée au profit du Grand-Père Gel et de Petite-Neige, plus conformes au communisme, et la distribution des cadeaux fut avancée au 31 décembre.

Quoi qu'il en soit, nous devons garder à l'esprit que tous ces rituels qui accompagnent cette merveilleuse fête, Noël, n'ont rien de catholique : l'arbre orné, le houx, la bûche, etc. faisaient déjà partie de la célébration du solstice d'hiver dans l'Antiquité.

(Sources principales : Le Livre des superstitions, Eloïse Mozzani, éd. Robert Laffont + Wikipédia, etc.)

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