Lettre au père noël

Petite nouvelle écrite pour un concours... Bonne lecture

Cher Père Noël,

Je crois que l'on commence les lettres comme ça. Cela fait bien longtemps que je ne t'en ai pas envoyé une¿plus de 40 ans.

Il est 2h15. Je n'arrivais pas à trouver le sommeil alors, je suis descendu dans le salon. Un bloc notes traînait sur la table et quand j'ai vu le sapin que Muriel, ma femme, a installé dans un coin, ça m'a rappelé mes souvenirs d'enfance. J'ai donc prit un crayon et me voila en train de te rédiger une lettre.

Si je t'écris, ce n'est pas parce que j'ai quelque chose à te demander, j'ai juste besoin de parler à quelqu'un. Muriel dort depuis plusieurs heures et je n'ai pas envie de la réveiller. Et puis, je ne veux pas encore la tourmenter avec mes problèmes...pas encore une fois.

Je ne sais pas trop pourquoi ça me prend ce soir, mais ça m'arrive de temps en temps. J'ai rêvé la nuit dernière de mon fils, mon p'tit gars. Beaucoup de souvenirs me sont revenus¿ tous ces moments que l'on a passé ensemble quand il était encore haut comme trois pommes¿

Il va bientôt y avoir 3 ans que je ne l'ai pas vu.

La première séparation avec lui a eu lieu lorsqu'il venait d'avoir son bac. Il est parti étudié à Lyon¿c'est pas très loin d'ici, à peine 100 kilomètres. On le voyait souvent les week-ends. Il aimait bien revenir ici, loin de tous ses tracas de la vie quotidienne. A l'époque, on pouvait encore le protéger, le rassurer. Et puis, les études se sont finies, il s'est trouvé du boulot à la capitale et s'est marié peu de temps après. Ce qu'on a pu être heureux avec Muriel¿mais on ne savait pas qu'on venait de le perdre définitivement. Je l'ai revu deux fois depuis son mariage. Il est passé nous voir en coup de vent et il est reparti. Depuis, on l'a de temps en temps au téléphone mais on ne l'a plus revu. Entre sa femme et son nouveau travail de directeur de la communication, il ne trouve plus de temps à consacrer à ses parents¿

Et ce soir, mon p'tit gars me manque. J'aimerais tant qu'il soit encore à côté de moi, en train de courir dans tous les sens dans l'impatience que tu viennes lui amener quelques cadeaux, mais, ce temps est bien révolu. On est plus que deux dans cette baraque, décidément bien vide.

Peut être que cette lettre me m'aidera à enlever ces épines affûtées qui me lacèrent le c¿ur¿que mes souvenirs suffisent à combler ma solitude¿

Je viens de me relire. Tu vois, je me suis bien pris au jeu. J'avais presque oublié que tu étais imaginaire, que tu n'étais que là pour faire rêver quelques gamins.

En tout cas, tu as beau être qu'un phantasme, je te remercie de tous ces moments que tu m'as fait partager avec mon p'tit gars. Continue, tu fais du bon boulot¿et puis, tous les p'tits gars de la terre le valent bien.

Bien à toi,

Walter Tarquois

A mes parents, le 13/12/2003

C'est triste...

C'est mignon

C'est une histoire vrai? Si oui, c'est triste

Non, je te rassure c'est pas une histoire vraie

Ah ouf.

La réalité dépasse la fiction : je vous assure qu'il y a beaucoup de telles lettres envoyées au Père Noël. Et j'ai travaillé à la poste des lutins à Rovaniemi, je sais ce que je dis. Pourquoi se demander si cette histoire est vraie ou si elle n'est pas vraie? é coup sûr, si elle est vraie, elle est arrivée au moins une fois, elle est donc vraisemblable, véridique. Si elle n'est pas vraie, ne peut-on pas se poser la question de sa vraisemblance? Il m'apparaît évident qu'ainsi, quoiqu'il en soit quant à cette histoire précisément, la vraisemblance reste, et reste la plus forte. Cette histoire, et tant d'histoires qui n'en diffèrent que d'un mot — un nom de ville seulement, probablement — n'en sont toutes que trop vraies. Tous ceux qui ne sont pas orphelins devraient y penser : que vous ayiez 20 ans ou, et surtout, 40 ans.

Bien des Noëls n'ont que les épines du sapin.