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Faites vous une différence entre valeurs et principes ?
Dompteur de mots a répondu à un(e) sujet de Axo lotl dans Philosophie
Deleuze devait éclaircir ses concepts dans son ouvrage. Aussi, il était plus aisé d'établir la distinction avec les sciences dures. Maintenant, je n'ai vu nulle part de notice interdisant d'élargir le tout aux sciences humaines… Et quand bien même l'eût-il interdit ! Baptiste Morizot a d'ailleurs la même audace que moi, dans son ouvrage "Manières d'être vivant". Morizot parle du "terrain" parce qu'il réfléchit philosophiquement à partir d'une expérience terrain (c'est un ouvrage de philosophie écologique). Mais vous pourriez remplacer "terrain" par "réel": "Dans les sciences sociales, le terrain est précisément celui qui appelle description empirique et élucidation par les instruments théoriques. Or, cette ambition descriptive n'est pas le sens premier de l'activité philosophique, même si elle peut y concourir. Le rapport au terrain des sciences sociales traditionnelles est alors désamorcé en philosophie. La question devient: à quoi sert-il? Que fait le terrain à la philosophie? C'est-à-dire que fait-il à l'activité philosophique dans son originalité? Je reprends ici l'approche deleuzienne suivant laquelle l'activité philosophique consiste à créer des concepts. […]" Pour ce qui est de numériser les valeurs, voici un exemple intéressant: https://www.worldvaluessurvey.org/wvs.jsp Je suppose que mon point est de sortir de cette opposition binaire de l'ouvert et du fermée afin d'explorer si la porte peut être fermerte ou ouvermée. Je n'affirmais rien mais ne faisait plutôt que poser une question, que je recolle d'ailleurs ici: notre éthique n'est-elle jamais que le produit de la société à laquelle nous appartenons ? Je ne cherche pas à vous convaincre, mais seulement à réfléchir avec vous. J'utilise votre force réflexive afin de stimuler la mienne. Je n'ai pas de problème à ce que cela se fasse sous un mode agonal, cela ajoute une couche d'amusement à la chose. Je n'ai jamais affirmé que la raison n'est qu'une construction sociale. *** J'y vais de façon pêle-mêle: À mon sens, ce qui fonde le postmodernisme, c'est la découverte que la raison n'est à l'homme qu'un instrument. La découverte est rendue patente par Freud et son "le moi n'est pas maître dans sa maison". Mais en fait, quelques siècles plus tôt, Spinoza disait essentiellement la même chose en promulguant une raison arbitre ou diplomate des affects à la place du cocher maître des passions de Platon. De là, ce n'était qu'une question de temps avant que le petit monde de notre arrière-plan social n'entre dans ce jeu diplomatique par la petite porte de l'inconscient collectif. Mais tout cela n'atteint pas à la validité de la raison. Le fait que nous soyons "habités" par toutes sortes de courants, que nous soyons en bonne partie le monde qui nous entoure ne nous empêche pas d'être nous-mêmes et de penser par nous-mêmes. La raison ne crée rien ex nihilo, c'est une évidence. Elle utilise plutôt les matériaux qui sont à sa portée, en l'occurrence ce qui nous entoure et qui s'insémine dans les circonvolutions de notre cervelle. En cela, la diversité exposée par les instruments du postmodernisme est porteuse de liberté puisqu'elle multiplie les matériaux qui nous sont accessibles. Bref, chacun est à même de se construire sa petite science éthique personnelle à l'aide de sa raison qui reste valide. L'éthique est différente de la science, je veux dire la vraie science, puisque cette dernière repose sur ce qui nous est commun. Les matériaux admissibles sont donc invariables selon les individus. Tandis qu'en éthique, nos affects et nos expériences entrent en ligne de compte. D'où le fait que nos petites sciences éthiques diffèrent - de façon minimale entre des individus à la culture apparentée et de plus en plus fondamentalement à mesure qu'augmente l'éloignement culturel. D'où le fait que l'on dira qu'il n'y a pas de vérité éthique, ce qui n'empêche pas le maintien d'un concept de "vérité opératoire", c'est-à-dire comme un idéal de recherche qui pourra éventuellement m'amener à faire des découvertes éthiques susceptibles d'avoir une influence sur ma société, voire davantage. La différence entre l'éthique et la science est conditionnée par leur objet respectif: cette dernière cherche à établir ce qui est - elle est donc affirmative, tandis que l'éthique cherche à statuer sur ce qui devrait être - elle est donc normative. Dans ce contexte, les valeurs peuvent être conçues d'une part comme des notions scientifiques qui nous permettent d'articuler nos différences et donc d'avoir des discussions éthiques, de mettre nos éthiques respectives en relation (ce qui est), et d'autre part comme des notions philosophiques qui nous permettent d'envisager les problèmes éthiques qui nous assaillent (ce qui devrait être). -
Faites vous une différence entre valeurs et principes ?
Dompteur de mots a répondu à un(e) sujet de Axo lotl dans Philosophie
Je vois que vous avez une tête sur les épaules et que discuter avec vous commande une certaine dose de précision et j'en suis ravi. Au lieu de parler de "fait", je parlerai donc de "fonctif", au sens deleuzien du terme: c'est-à-dire que la valeur est ici prise en tant qu'elle s'inscrit dans un espace de référence défini par un ensemble de pratiques scientifiques ayant pour but de décrire fidèlement le réel, par opposition au concept, qui est le propre de la philosophie, lequel exprime plutôt l'événement de la pensée lui-même, en posant un problème et en tentant de le résoudre. La force gravitationnelle est par exemple un autre exemple de fonctif: nous sentons bien qu'elle n'a pas la même teneur que le conatus de Spinoza ou que la Volonté de Schopenhauer. Partant de ces définitions, je vais affirmer que la notion de "valeur" décrit adéquatement le réel de la société et de ses individus et ce, sans que le contenu conceptuel philosophique de la valeur ne soit invoqué. Je vous préviens amicalement: si ce genre de contradiction vous fait frissonner, vous allez trouver la vie bien effrayante. Le monde est en effet rempli de contradictions qui mettent notre faculté de raisonner à l'épreuve. Évidemment, en l'occurrence, vous réduisez au ridicule ce qui constitue une contradiction ou plutôt un paradoxe stimulant pour l'esprit. Nous trouvons le même genre de paradoxe dans l'opposition entre ce que Schopenhauer appelait le "génie de l'espèce" et la liberté individuelle. Schopy utilisait notamment cette expression afin de désigner la façon qu'a la nature de dissimuler le caractère industrieux du sexe derrière le théâtre de nos amours. Évidemment, pour ce philosophe, la liberté découle de l'usage de la raison, laquelle ne peut que nous conduire à saisir la nature véritable et trompeuse de l'amour, une ligne de pensée qui finit immanquablement par le conduire en pleine crise du nihilisme. Dans ce contexte, une attitude plus prometteuse, plus saine, plus vitalisante est peut-être de considérer que notre liberté s'exprime au travers du génie de l'espèce ou en relation avec celui-ci, et non pas contre celui-ci (auquel cas l'expression du génie de l'espèce devient elle-même caduque). Il en va de même dans le cas des valeurs. La sociologie ne peut qu'admettre la relativité des mœurs éthiques, et le public avec, ce qui ne peut qu'influencer le cours de la pensée mais cela ne constitue pas pour autant une thèse philosophique (qui est différente d'une thèse scientifique). Car le problème est intact: qu'est-ce qui peut fonder une éthique ? Peut-on fonder une éthique ? Notre éthique n'est-elle jamais que le produit de la société à laquelle nous appartenons ? Toutes les questions qui touchent aux contradictions entre la modernité et la postmodernité m'intéressent beaucoup. Il est intéressant d'explorer comment nous pouvons concilier ce que nous avons perdu avec ce que nous avons gagné. C'est souvent dans ces paradoxes que que se cachent les territoires philosophiques les plus riches (et les débats les plus amusants). -
Faites vous une différence entre valeurs et principes ?
Dompteur de mots a répondu à un(e) sujet de Axo lotl dans Philosophie
Je reprends votre intervention initiale: "Le concept de valeurs est une horreur relativiste qui sous-entend que la vérité n'existe pas et que chacun valorise ce qu'il lui plaît ou ce qu'il reçoit de son environnement. Et toute valeur devient alors indéfendable rationnellement." 1) "Le concept de valeur sous-tend que la vérité n'existe pas": le concept de valeur n'est pas une thèse, c'est un fait sociologique (et psychologique ?). On peut constater que telle société ou tel individu est animé par telles valeurs, ou encore que je suis moi-même animé par telles valeurs. Le travail du sociologue est alors effectivement de lire l'audimat du collectif. 2) "Chacun valorise ce qui lui plaît": comme je disais, les valeurs s'érigent comme telles parce qu'elles sont partagées. Il n'est donc nullement question d'arbitraire individuel. 3) "Chacun valorise ce qu'il reçoit de son environnement": ça ne signifie pas pour autant que les individus sont purement passifs et qu'ils ne sont que le produit de leur environnement. Les valeurs constituent plutôt une sorte de socle autour duquel les réflexions éthiques peuvent se tisser. Parfois, les individus se définissent négativement par rapport aux valeurs ambiantes. Dans ce cas, elles n'en constituent pas moins des référents moraux. 4) "Toute valeur devient indéfendable rationnellement": les valeurs constituent donc des référents à partir desquels les individus peuvent élaborer des jugements éthiques, voire se donner des principes éthiques, qui eux peuvent très bien faire l'objet d'un débat rationnel, voire faire l'objet d'une recherche de vérité. Les valeurs pourront d'ailleurs évoluer en fonction de ce travail éthique. *** Je suis anxieux à l'idée que vous placiez l'impératif catégorique de Kant au même niveau épistémologique que la gravité. Je vous en prie, rassurez-moi ! -
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Dompteur de mots a répondu à un(e) sujet de Axo lotl dans Philosophie
Oui, moi aussi j'ai eu ma phase boycott du livre-dont-il-ne-faut-pas-prononcer-le-nom. Au final, ça reste un ouvrage fascinant, sans compter que c'est le plus influent de l'histoire. Surtout l'Ancien Testament: un condensé de mythologie, de cosmogonie, d'histoire, d'anthropologie, de morale des temps anciens. Il y a des éditions "scientifiques" qui cherchent à rendre d'abord la vérité du texte plutôt qu'une vérité dogmatique. Je vous conseille celle d'Édouard Dhorme à la Pléiade. -
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Dompteur de mots a répondu à un(e) sujet de Axo lotl dans Philosophie
Bien sûr qu'il a lu la Bible. Tout le monde a lu la Bible. Mais l'originalité de Kant est qu'alors que les religions proposent la Règle d'or comme un commandement de Dieu, il tente quant à lui de la fonder rationnellement. -
Bien le bonjour Déjà ! J'espère que tu te portes bien. Pardonne-moi d’avoir pris autant de temps à te répondre. Le temps de loisir que je peux consacrer à ce forum est limité et de plus, tu m’as forcé à me replonger en des territoires philosophiques que je n’avais pas fréquentés depuis un bon moment. Afin de les retrouver, j'ai d'aillleurs dû m'adonner à un jeûne de 5 semaines consécutives. Au moment où j'écris, je commence à peine à ne plus souffrir d'hallucinations. Pour moi, les philosophies occidentales ne "fonctionnent" pas autrement. Elles ont simplement une autre modalité, une autre musique, un autre style. Mais au bout de compte, cela reste toujours un travail de séduction de l’esprit. La vérité est le nom que nous donnons à ce qui séduit l’esprit. Mais oui, parmi les philosophies occidentales, le style d'un Montaigne détonne effectivement. Chez Montaigne, c'est un homme de chair triturée qui parle, et non je ne sais quelle conscience transcendantale. Maintenant, je pense que ce serait une erreur d’admettre n’importe quoi sous le concept de philosophie par simple égard ethnologique. La philosophie désigne un ensemble de modalités séductrices liées par un trait commun défini. C’est un autre sujet que de définir en quoi ce trait consiste mais pour faire vite, je dirai que l’accessoire de séduction privilégié du philosophe est le point d’interrogation. Mais la science ne saurait épuiser les sujets philosophiques. Elle peut les baliser, les informer, parfois les bouleverser, mais jamais les épuiser. Elle finit toujours par se briser sur la vastitude des horizons philosophiques. Ainsi, lorsque la science s’arrête, lorsque ton spectre s’épuise, sur quoi te reposes-tu? Sur la qualité des raisonnements qui te sont présentés? Mais les raisonnements ne font jamais que présenter la logique interne d’une idée. Qu’est-ce que la « qualité » d’un raisonnement dans ce contexte? Le fait pour un raisonnement de découler d’idées qui nous habitent déjà? D’ailleurs, la science n’est-elle pas le nom que nous donnons à l’extension de la logique interne d’une idée qui est philosophique a priori, soit en l’occurrence, une idée concernant la façon dont nous pouvons sécréter une connaissance du monde qui soit solide? Je vais t’aider : ce sont sur tes intuitions que tu te reposes lorsque le spectre de la science s’épuise. J’utilise le mot « intuition » mais au fond, il s’agit de quelque chose qui ultimement, reste toujours indicible. Au mieux, si je suis un penseur particulièrement pénétrant, peut-être puis-je créer un concept afin de donner une certaine consistance à cette intuition. Mais encore : un concept reste un concept, c’est-à-dire un prétexte pour écrire ou pour parler. À l’opposé de la conceptualisation, on se contentera souvent d’évoquer le côté un peu magique de l’intuition, c’est-à-dire l’intuition comme inspiration soudaine de l’esprit, ce qui ultimement ne nous avance en rien. En fait, il s’agit d’abord d’une histoire de communication infra-verbeuse, ou peut-être serait-il plus approprié de dire infra-sémantique? Infra-conceptuelle? Bref, il s’agit d’une communication se déroule dans le non-verbal du verbal. Et c’est précisément à cela que je veux être attentif. J’en profite pour mentionner que l’on peut être fort habile à débiter des faits scientifiques sans avoir une once d’idée philosophique. J’entends par « idée » quelque chose qui soit de l’ordre de la gestuelle, du non-verbal que j’invoque. Il y a un philosophe – je ne me souviens plus lequel (Cioran, Nietzsche?) - qui affirmait que la forme philosophique la plus aboutie est la maxime. Parce qu’une maxime philosophique bien frappée a le pouvoir de faire réfléchir, de mettre l’esprit en mouvement par la plus grande économie de moyens. Or, la maxime est aussi une excellente illustration de mon concept de geste philosophique : c’est que sans rien dire, elle dit tout, exploit auquel elle parvient en misant essentiellement sur un énorme travail non-conceptuel. La maxime insuffle plutôt qu’elle n’expose. Or, la philosophie a à mon sens pour rôle d’insuffler d’abord. Socrate l’avait bien compris : toute sa maïeutique (connais-toi toi-même) repose sur cette idée. Évidemment, il n’est pas interdit d’insuffler en exposant. Bref, c’est ce souffle qu’il m’importe de pressentir lorsque je lis une intervention. Si je prends ton propre exemple, Déjà, je suppose que l’on puisse dire qu’à mes yeux, tu n’es pas un intervenant facile à lire. Non pas parce que tu n’écris pas bien ou parce que tes interventions seraient trop abstruses, mais simplement, parce que le mouvement profond de ta pensée n’est pas facile à saisir. Question d’exaspérer davantage ceux qui ne me suivent pas dans mes réflexions, j’ajouterai que le mouvement, le geste philosophique requiert une dose d’impertinence pour se manifester. Les maximes philosophiques sont d’ailleurs toutes foncièrement impertinentes, précisément parce qu’elles ne disent rien, qu’elles n’apportent pas d’eau au moulin de je-ne-sais-quel débat philosophique. Or, il se trouve que tu n’es pas un intervenant très impertinent Déjà. Sans vouloir me vanter, je pense au contraire que je puis être assez impertinent, de temps à autre. Ah oui, une dernière : que fait Diogène de Sinope lorsque l’assemblée des philosophes disserte aussi sérieusement qu’improductivement sur le paradoxe de Zénon? Précisément : il philosophe par le geste et par l’impertinence : il se lève et marche en quittant l’assemblée.
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Faites vous une différence entre valeurs et principes ?
Dompteur de mots a répondu à un(e) sujet de Axo lotl dans Philosophie
Le principe entendu comme règle d'action rationnelle ne découle pas forcément d'une valeur. Par exemple, l'impératif catégorique de Kant (ne fait pas aux autres ce que tu ne voudrais pas que l'on te fasse) se veut une règle d'action autonome découlant de la nature même de l'éthique. De même, les éthiques déontologiques, utilitaristes, conséquentialistes ou des droits de la personne reposent certes sur des principes mais non sur des valeurs (ce qui n'empêche pas pour autant qu'elles puissent être influencées par des valeurs). Cela étant dit, des valeurs qui nous habitent peuvent effectivement faire l'objet de principes. Par exemple, si la générosité m'est chère, je peux adopter le principe de toujours donner un peu d'argent aux quêteurs que je croise. J'en profite pour récuser l'idée selon laquelle les valeurs constitueraient une horreur relativiste (je ne me souviens plus qui a écrit cela). En effet, je ne crois pas que quiconque ait jamais adopté de valeur de façon purement arbitraire. En excluant le groupe extrêmement sélect des individus créateurs de valeurs, celles-ci acquièrent une valeur à nos yeux précisément parce qu'elles sont partagées par d'autres - un groupe d'amis, de semblables, par notre société, etc. -
L'éthique ; une invention contrenature
Dompteur de mots a répondu à un(e) sujet de Ocean_noir dans Philosophie
Étymologiquement, le mot éthique dérive du grec ethos, qui désigne les mœurs, les habitudes des gens. En tant que branche de la philosophie, nous pourrions dire que l'éthique est le fait de réfléchir à nos mœurs ou à nos habitudes, aux principes qui guident nos actions. Il est certainement dans notre nature d'agir. L'est-il de réfléchir aux principes qui guident nos actions ? Ce n'est certes pas donné à tout le monde. Ce que Nietzsche critique, c'est le principe éthique érigé en dogme. Avoir une réflexion éthique consiste à examiner la réalité sous le prisme de principes quelconques. Lorsque ces principes sont érigés en dogmes, alors ils effacent du même coup la réalité. Ils substituent leur réalité conceptuelle simpliste (les choses doivent être faites ainsi, peu importe les circonstances !) à la réalité terrestre, inépuisablement complexe. Dans le langage nietzschéen, l'on dirait qu'ils substituent un arrière-monde à la dure réalité, celle des forts. Maintenant, est-il possible de concilier la promulgation de principes éthiques avec une appréhension de la réalité qui soit soucieuse de sa complexité ? -
Souffrir: du latin "sub", qui signifie "sous" et "fero", qui signifie "porter". Le "sub" renforce l'idée de porter et évoque donc que souffrir, c'est porter un lourd fardeau. Il faut parfois retourner à la simplicité étymologique des mots pour se libérer d'acceptations particulières qui se sont incrustées dans la culture. En l'occurrence, peut-être, d'une acceptation quelque peu romantique de la souffrance. Car, de tout ce que tu dis, la vie te semble définitivement être un lourd fardeau. Je comprends ce que tu ressens bien que de toute évidence, la sensation te soit plus aigüe, et je pense que je ne suis pas le seul. Je te recommande de te précipiter sur un exemplaire de "Le mythe de Sisyphe" d'Albert Camus. Je pense que tu pourrais y trouver un propos qui correspond bien à ta sensibilité.
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Tu assimiles le sacré au commandement moral, une conception que l'on retrouve effectivement notamment dans les religions. Mais chez un exemple qui me vient tête, soit celui de Georges Bataille, le sacré est plutôt conçu comme une sorte de sensation. En l'occurrence, c'est celle qui consiste à se perdre, à sortir de soi et à entrer en communion avec les choses. C'est une sensation que l'on peut retrouver notamment par le biais de l'art, mais aussi, toujours selon Bataille, par l'érotisme ou même le rire. Le sacré a toujours pour arrière-fond l'angoisse de l'individu en tant qu'être séparé du monde. On peut se demander si le sens du sacré diffère réellement dans les religions ou si ce n'est pas plutôt qu'il finit trop souvent par être instrumentalisé à des fins morales… En ce qui me concerne, j'ai toujours été fasciné par les atmosphères religieuses prises en dehors de leur contenu moral. Le suicidaire est-il un être qui a perdu le sens du sacré ? Qui se retrouve isolé en lui-même sans jamais trouver la sensation d'être lié à toutes choses ?
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Tu sembles affirmer que la conduite du suicidaire découle d'une quelconque thèse ou d'un quelconque raisonnement qu'il se serait formé. Mais le propre des états de détresse, c'est précisément qu'il rend impossible la pensée rationnelle. Si je suis par exemple dans une situation de danger et que j'ai très peur, je vais réagir par instinct et je n'aurai pas vraiment le temps ni la capacité de raisonner. La pensée rationnelle est le propre de l'homme au repos, de l'homme oisif. Or, sauf exceptions, l'état d'une personne suicidaire est comparable au nôtre lorsque nous avons peur (même si la tonalité émotive n'est pas la même).
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Albert Camus disait: "Il n'y a qu'un problème philosophique vraiment sérieux: c'est le suicide. Juger que la vie vaut ou ne vaut pas la peine d'être vécue, c'est répondre à la question fondamentale de la philosophie. Le reste, si le monde a trois dimensions, si l'esprit a neuf ou douze catégories, vient ensuite. Ce sont des jeux; il faut d'abord répondre." Ce qui est dingue en fait, c'est de se consacrer à un sujet qui ne nous interpelle pas vraiment, ce que la plupart font ici. Comme disait Valéry, les vrais problèmes philosophiques sont ceux qui tourmentent et gênent pour vivre. Or, forcément, une personne que le problème du suicide tourmente et gêne pour vivre vraiment ne pourra qu'émettre des réflexions à ce sujet qui comptent. Philosopher comme on parle de la pluie et du beau temps, c'est automatiquement dénaturer la philosophie. D'un certain point de vue, ce n'est pas faux, entendu que le philosophe chercher à formuler des jugements qui soient les plus justes possible sur les choses de la vie en vue d'atteindre la sagesse. Mais il faut s'entendre sur ce que signifie "juger". Dans la langue courante, on l'entend souvent au sens de "régler le cas de…". Je pense d'ailleurs que c'est en ce sens que tu l'entends: tu reproches à certains amateurs de philosophie de vouloir "régler le cas" du suicide. Or, on peut très bien se former le jugement que le cas du suicide ne se "règle" justement pas, qu'il demande à être traité au cas par cas, ou qu'il demande une bonne dose de nuances, qu'il recèle une large part d'ambiguïté.
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Il est important qu'un discours ait de la logique, qu'il manifeste des raisonnements cohérents, question que l'on puisse bien comprendre ses articulations internes mais au bout du compte, il ne s'agit que d'un ingrédient parmi d'autres dans le grand gâteau de la philosophie. Pour qu'une pensée nous séduise et s'insinue au fond des circonvolutions de notre cervelle, il faut quelque chose de plus que cela. Je me suis développé le concept de geste philosophique pour désigner tout ce par quoi, à mon sens, la philosophie procède. Le geste philosophique, c'est tout ce qui entoure la formulation d'une pensée, c'est la respiration de cette pensée. Elle se manifeste non seulement dans sa formulation, dans ses articulations logiques, mais aussi mais aussi dans la syntaxe, la couleur stylistique, le choix des mots, la ponctuation, le tempo ; bref, dans tout ce petit monde de nuances langagières sur lesquelles il est si facile de lever les yeux mais qui n’en jouent pas moins un rôle primordial. Elle se manifeste aussi dans la posture de la personne qui parle ou qui écrit. Il m'est impossible, par exemple, de considérer ce que tu racontes Déjà, sans apprécier l'ensemble de tes interventions, les bribes de ta personnalités qui transpirent sur ce forum, les fins qui semblent être les tiennes, tes aspirations en tant que penseurs ou en tant qu'intervenant sur ce forum. Je ne dis évidemment pas que je me suis adonné à une étude exhaustive de tes moindres faits et gestes, mais plutôt que cette curiosité me vient intuitivement C'est d'ailleurs ce qui rend la philosophie sur un forum de discussion si difficile: il n'y a pas beaucoup d'espace pour y déployer notre propre gestuelle philosophique. Il faut avoir l'esprit quelque peu littéraire car autrement, on manque rapidement d'ampleur et on se rabat rapidement, comme on peut si bien le constater, sur le commerce des affects bon marché (voici une pierre pour ton édifice cynico-misérabiliste Chekhina!).
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Tout à fait en désaccord avec cette affirmation. Le temps des grands systèmes philosophiques universels est passé. Il appartient à la période qui va de la Renaissance à la fin du XIXe siècle. Nous sommes à l'ère de la pensée postmoderne: du patchwork philosophique. Nous piochons à gauche et à droite les bribes de sagesse qui nous conviennent et les bricolons en un tout plus ou moins cohérent.
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J'aime la nuance syntaxique vous apportez en parlant de construire plutôt que d'aller vers ce que j'appelais la grandeur. Oui... Je vais utiliser un gros mot mais peut-être le monde d'aujourd'hui a-t-il quelque chose de plus... totalitaire ? Comme si la prégnance du système consumériste, d'une pensée narcisso-cynico-hédoniste sur les individus avait quelque chose de plus profond, de plus ancré.
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Euh... mais le sexe et le genre sont différents. Pour le savoir, il n'est nul besoin d'être woke mais simplement de ne pas être resté scotché au XIIe siècle et d'avoir suivi l'essor des sciences humaines. Nous savons que les genres, c'est-à-dire les rôles qu'adoptent généralement les hommes et les femmes sont des constructions sociales. Cela est démontré par le fait que ces rôles changent selon la culture. Nous pouvons aussi penser qu'une certaine proportion de gens ne se sentiront jamais parfaitement à l'aise dans ces rôles préconstruits qu'ils doivent adopter. Par conséquent, si on ouvre la porte à ces gens à un certain espace de construction d'une identité de genre différente, plusieurs risquent effectivement de prendre cette voie. Je note 3 éléments problématiques à ce mouvement: - L'espace médiatique, politique et académique qu'il occupe est complètement disproportionnel à l'ampleur réelle des problèmes qu'il recoupe dans la société; - Il ébranle l'identité de quelques vieux croûtons dont la confiance vacille dès que tout n'est pas uniforme autour d'eux; - La franche la plus radicale du mouvement, qui se veut de gauche, n'hésite pas à se saisir des procédés de déconstruction de l'espace social issus de l'extrême droite: censure, autodafés, révisionnisme, etc. Les 2 premiers problèmes ne sont pas très graves. En revanche, le 3e devient préoccupant lorsqu'il est mis en relation avec le 1er: en effet, la frange radicale obtient une étonnante représentativité dans les mondes politiques, académiques et médiatiques. De ce fait, elle participe à une fluidification (par voie de déracinement) de l'espace public qui est normalement l'apanage du capitalisme. Elle risque aussi de faire basculer le processus tragique de la construction de l'identité vers une sorte de bric-à-brac consumériste (ce qu'entrevoyait Baudrillard dans La société de consommation). Enfin, si on met cette combinaison en relation avec le 2e problème, on obtient la magnifique soupe aux bêtises que nous observons actuellement.
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En fait, vivre requiert toujours un acte de foi, entendu que la vie n'a aucune utilité réelle que la raison puisse établir. La différence est que le gouffre qu'il s'agit de sauter pour effectuer cet acte de foi dans le cours habituel des choses est moins grand. Nous pourrions décrire ce gouffre comme étant ce qui sépare notre monde affectif, intuitif, instinctif de notre raison. De manière générale, la raison consiste précisément en ce processus intérieur par lequel nous suspendons nos élans afin de préciser nos actes. En temps normal, nos élans ploient aisément la suspension imposée par notre raison. Nos enfants, nos parents, nos amis, nos valeurs: tout cela nous pousse à aller de l'avant malgré l'absurdité immanente des choses. La raison en est que ces choses nous poussent vers quelque chose de plus grand que nous, quelque chose que nous ne pouvons parfaitement appréhender et qui par conséquent nous tire justement de l'absurdité des choses. Les choses sont absurdes lorsqu'elles ne mènent pas à quelque chose de plus grand que nous. Une procédure bureaucratique est absurde lorsqu'elle n'a de fin qu'elle-même. Lorsque l'on remplit de la paperasse que pour remplir de la paperasse. S'il était annoncé que la fin du monde aura lieu dans 50 ans, c'est le "plus grand que nous" qui aurait l'air d'avoir soudain rapetissé. La vie s'apparenterait soudainement un peu plus à une procédure bureaucratique absurde: on ne vivrait plus que pour vivre. Le saut de la foi serait plus difficile à effectuer. Sans doute continuerions-nous de vivre pour les autres et pour les choses pour lesquelles nous vivons habituellement mais sans doute devrions-nous aussi nous en remettre à quelque d'autre, quelque chose de plus abstrait, à une grandeur cosmique. Nous nous creuserions la tête pour tenter de comprendre en quoi peut consister une telle grandeur cosmique et, précisément, ce creusage de tête ne serait autre que l'acte de la raison venant se frotter au gouffre à franchir.
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C'est le propre du scientifique de jouer des formules, tout comme le pianiste joue du piano. Pourquoi cela vous irrite-t-il ? Auriez-vous la tentation de tirer sur les messagers ? Franchement, je ne vois pas pourquoi la pensée de l'anéantissement prochain de ce pour quoi vous vivez vous laisserait indifférent(e?). Ce qui permet de sauter par-dessus la pensée scientifique de l'anéantissement, c'est précisément le fait qu'elle se situe dans un horizon temporel que nous ne pouvons même pas imaginer. Mais admettons que d'ici 50 ans les scientifiques puissent statuer que l'anéantissement de la vie sur terre dans un horizon temporel humainement appréciable est désormais inéluctable en raison de l'état de la crise écologique, je pense que nous aurions une excellente raison de devenir cinglés. Je comprends ce que vous voulez dire. Il y a un poète ici qui chante que "la fin de l'homme ne sera pas la fin du monde". Je trouve cette idée étrangement réconfortante. C'est peut-être à la pensée que nous, misérables humains, nous inscrivons au sein de quelque chose de plus grand. C'est donc une idée qui appelle une sorte de foi. Peut-être que celle de l'anéantissement de tout appelle une foi autrement plus immense.
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De même que devenir un adulte c'est en quelque sorte être capable de faire des choix par conviction et non par pure recherche égoïste de plaisir, devenir un "adulte spirituel" (désolé, c'est un peu laid), c'est peut-être agir selon une certaine foi, contre tout anéantissement (et donc sans égard pour les arrière-mondes). Pour la beauté du geste, en quelque sorte. Quand j'étais petit, mon frère et moi construisions des châteaux de sable dans la partie de la plage destinée à être engloutie par la marée haute. Il fallait alors les protéger coûte que coûte, même si nous savions que nous allions inéluctablement finir par perdre. Mais en s'en foutait, car on s'amusait bien. Il convient aussi de se rappeler que la science n'est finalement qu'un instrument à notre service, un modèle théorique et donc fictif qui nous permet de prédire les processus du monde et donc de les influer. Mais précisément, ce n'est qu'une fiction (bien qu'il soit sans doute dangereux de l'écrire de nos jours...).
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Que fait le chef de la tribu devant le péril ? Il tente d'embrasser la situation de la tribu aussi loin que porte son regard et au travers de l'ensemble de ses connaissances. Il résume la situation et en tire une résolution. Que la résolution soit présentée comme une vérité indélogeable n'est qu'une pure affaire de nécessité pratique. Je pense que ce n'est pas différent avec la philosophie: tout est une affaire de résolution et sa vocation est donc d'abord éthique. On peut penser que les anciens se livraient volontiers à l'élaboration de systèmes métaphysiques sensés régler définitivement le cas du monde parce que sur le cours de la sagesse, ils devaient concurrencer les attraits des vérités éternelles émanant de la religion. Et aussi sans doute parce que le monde changeait beaucoup moins rapidement. Les découvertes sur l'évolution du monde et l'accélération de la vie moderne ont rendu caduques toutes les prétentions à parvenir à quelque forme de résolution éternelle. Aussi me semble-t-il que plutôt que de rimer avec la recherche de la vérité, la philosophie a désormais plus à avoir avec un jeu de perspectives. Je fais une analogie avec la peinture: pendant longtemps, l'on a loué l'habileté du peintre à dessiner des contours nets et bien tracés. Tout cela a été révolutionné par Léonard de Vinci et sa technique du sfumato, qui consiste à ne plus représenter les contours que comme ils se présentent dans la nature, c'est-à-dire sans netteté définitive, mais toujours au travers de jeux de lumières et d'ombres. En effet, de Vinci avait remarqué avec raison que les lignes pures n'existent pas dans la nature. Ainsi, le sfumato crée des effets envoûtants, car bien qu'il procure aux peintures un réalisme frappant, il a aussi pour propriété de faire rêver, comme si le mystère des choses se révélait davantage dans ce réalisme flou. De mon point de vue, il en va de même pour la philosophie: les perspectives peuvent s'y mélanger avec des effets de sfumato langagiers afin d'inviter le lecteur ou l'auditeur à une méditation authentique, plutôt que de l'enfermer dans quelque construction logique.
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Le pass sanitaire respecte t-il les valeurs humanistes ?
Dompteur de mots a répondu à un sujet dans Philosophie
On peut formuler toutes les hypothèses imaginables si ça nous chante. Mais la réalité va à peu près toujours dans le sens de l'hypothèse la plus économique en terme de contorsions de l'imagination. En l'occurrence, le pass sanitaire comme mesure incitative à se faire vacciner parce que la vaccination est le seul moyen respectable de sortir de cette pandémie à la con. La mission d'un philosophe est en bonne partie d'établir ce qui vaut d'être pensé. Je veux dire que le philosophe pose des questions afin de stimuler la pensée sur un sujet donné parce qu'il estime que les hommes doivent réfléchir à ce sujet plus qu'à un autre. Or, j'estime que de s'interroger à savoir si le pass sanitaire va dans le sens de la dignité humaine est un luxe incroyable. Inadmissible au regard de toutes les saloperies qui ont cours dans le monde. -
Le pass sanitaire respecte t-il les valeurs humanistes ?
Dompteur de mots a répondu à un sujet dans Philosophie
La question se pose certainement de savoir si la mécanique temporaire du pass sanitaire concoure à la dignité des hommes ou si au contraire elle la bafoue. C'est un débat fascinant. Je serais curieux de savoir ce que les hommes du monde qui subissent les affres de la guerre, de la famine, de la dictature, de l'esclavage, ce que les femmes afghanes, ce que les gens des pays qui commencent à être défigurés par les changements climatiques en pensent: est-ce que le pass sanitaire est une atteinte à la dignité de ces pauvres occidentaux ? -
Je vous ai jadis insulté AnnaLevine, et par conséquent il est tout à fait légitime que vous cherchiez à vous venger, et cela mérite a priori mon respect. Je sens toutefois que vous avez maladroitement sauté sur la première occasion de le faire, ce qui n'est pas sans me décevoir. En l'occurrence, je vous dirai que même les actes de conquête peuvent être interprétés comme des tentatives d'aménagement du monde. Je dirais même plus: l'aménagement d'un chez-soi - ne fut-ce que la plus chétive cambuse, n'exige-t-il pas un acte de conquête ? Par ailleurs, je vous pousserai cet argument d'autorité, à savoir que mon idée, par laquelle j'interprète Heidgger, a été piochée chez Arendt. Or, je suis convaincu que vous êtes du genre à encenser Arendt.
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Je vous confirme que je l'ai lu. J'ai un recueil intitulé "Essais et conférences" (que j'ai fait purifié par un prêtre en l'achetant). Il contient un autre essai intitulé "... L'homme habite en poète..." ou la notion d'habitation connaît des développements supplémentaires. Un autre passage intéressant réside dans la conclusion du 1er texte: où Heidegger critique l'idée que les hommes de son temps se font de la crise de l'habitation - c'est-à-dire comme pénurie de logements. Heidegger maintient pour sa part, sans nier la pénurie de logements, que la véritable crise de l'habitation réside dans le fait que les hommes ne savent plus habiter.
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Je doute que vous soyez capable de me proposer une lecture de Bataille que je n'ai déjà faite. Si la philosophie ne peut traiter des concepts qui ne relèvent pas spécifiquement de sa discipline, alors elle est condamnée à n'être qu'un bavardage stérile. Qu'est-ce que cela signifie de dire que la culture est un concept anthropologique ? Voulez-vous dire que c'est quelque chose dont ne devraient parler que les anthropologues ? Quant aux liens entre la culture et le bâtiment, je vous ferai d'abord remarquer que l'art du bâtiment fait partie de la culture. Par ailleurs, même si a priori deux mots n'ont pas de lien formel, le langage nous permet parfois de tisser des connections spéciales entre ceux-ci, par le moyen d'un assemblage analogique. Nous dirons alors que l'auteur veut faire image. Par exemple, je pourrais parler de l'"édifice de la culture" afin de montrer qu'elle n'est jamais que le produit de l'activité des hommes. Heidegger mange à la gauche de Belzébuth, quelques rangs après Goebbels et Himmler. Je ne m'approche jamais d'un livre de Heidegger sans m'assurer que la pièce dans laquelle je me trouve contient un crucifix. Quant à Sartre, il dort dans l'ombre de Staline qui lui-même dort dans l'ombre d'Azraël l'ange de la mort, qui lui-même dort aux côtés de Lucifer.
