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Nuits rouges (1)


Criterium

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Membre, nyctalope, 39ans Posté(e)
Criterium Membre 2 852 messages
39ans‚ nyctalope,
Posté(e)

Prologue: je me lance sur la même quête que @le merle, souhaitant remettre au goût du jour une petite histoire de vampires. Là aussi, format d'une mini-série improvisée au fil de l'inspiration. Pourquoi pas ? — Fond musical: x.

 

 

Le véhicule allait certainement trop vite pour cette petite route de campagne. Que disait-on, déjà, au sujet des phares ? Il fallait rouler de manière à voir tout obstacle potentiel dans la lumière. Au cas où il faudrait freiner. Oui, il faudrait faire attention ; et pourtant, le jeune homme ne ralentissait qu'à peine, le temps d'un virage, qu'il négociait avec un crissement de pneus. Il n'y avait personne sur ces routes de nuit ; elles formaient une sorte de circuit qui ne rejoignait l'autoroute que le temps de rejoindre la prochaine sortie, qui ramenait au début de la piste. Lui avait l'habitude d'y rôder ; il lui suffisait d'une musique à fort volume et il se sentait dans un monde parallèle, solitaire, en parcourant la campagne en pleine solitude. Les ombres des arbres sur le ciel assombri semblaient être la faune de cet autre univers étrange.

Une partie du circuit longeait la lisière du bois. C'était l'endroit le plus difficile pour la conduite ; non pas qu'il craignît y éviter de justesse un daim s'aventurant sur la route, mais surtout que celle-ci était par endroits un sentier de gravas plutôt qu'une piste d'asphalte. Non seulement cela faisait beaucoup de bruit et abîmait ses pneus, mais la traction n'était plus la même. — Et... un virage, et à nouveau une frayeur : le véhicule glisse de côté. — L'avait-il négocié encore un peu trop vite ?

La voiture racla sur les graviers, s'arrêta heureusement juste avant le bas-côté, et il put en reprendre le contrôle. Ç'avait été de justesse, cependant... Le cœur battant la chamade, il arrêta le véhicule, stoppa la musique. Il devait prendre quelques instants et quelques inspirations.

Il sortit.

Les bruissements nocturnes de la campagne étaient si différents que ceux du jour. Il n'y avait presque aucun son, à vrai-dire — le vent faisait bruire les arbustes et les feuillages des arbres du bois ; et l'on entendait parfois, au loin, les sons étranges de certaines grenouilles, qui venaient sûrement du lac, et dont les échos se reflétaient jusqu'ici. Selon sa propension à l'imaginaire, et son état mental, l'on s'imaginait alors soit cette nuit comme une cachette secrète, protectrice, même au beau milieu des champs ; soit comme une zone exposée, trop ouverte, trop vulnérable, observé par des centaines d'yeux invisibles...

Le ciel, lui, était magnifique. L'on y voyait toutes les étoiles. Non, il ne retournerait décidément pas en ville, après ses études... Il avait besoin de cet air frais, de ces étoiles, et de cet espace de liberté, dusse-t-il limiter ses possibles pour rester ici. — Le contour d'un panneau, un peu plus loin, restait caché par la pénombre. Il en connaissait déjà par cœur les écritures, cependant :

— Bleuforais à 10km.

— Vertgiron à 12km.

— Manoir de Rougeseule à 6km.

Il fut presque tenté de rentrer chez lui comme cela, à pieds, en coupant à travers les champs. Après tout, il n'était pas si loin, et il pourrait récupérer facilement sa voiture ici, sur le virage attenant au bois. Mais c'était quand même assez loin, et il ne tenait pas forcément à devoir refaire le chemin en sens inverse demain matin. Rapidement, une solution intermédiaire se proposa à lui : pourquoi ne pas se dégourdir les jambes le long du sentier de gravas, faire peut-être un kilomètre ou deux, puis revenir jusqu'ici et rentrer en voiture, apaisé, assagi ?

Le maigre croissant de lune éclairait à peine ses pas. Cela le forçait à ralentir la cadence, et il hésitait parfois à transférer trop rapidement le poids de son corps sur sa jambe avant. Ainsi, les crissements de ses chaussures sur le gravier prenaient un rythme lent, et tranquille. Petit à petit, ses yeux s'habituaient de plus en plus à la pénombre ; il voyait désormais tout comme dans un film en noir et blanc, très sombre, la nuit ayant ôté toutes les couleurs du chemin. À sa gauche, les grands arbres noirs, qui souvent bruissaient ; à sa droite, les vastes étendues des champs. D'ici, pas une seule lumière n'était visible ; aucune métairie dont une fenêtre serait restée allumée. Il ne voyait pas non plus la forme inquiétante du manoir griffer l'horizon, car celui-ci se trouvait derrière le bois. Le même paysage s'étendait sur des kilomètres — qui en paraissaient bien plus maintenant qu'il parcourait la route à pieds dans la nuit, plutôt qu'à grande vitesse et plein phares.

Un son le fit sursauter. Un animal, peut-être, se faufilant parmi les buissons.

Il vit sur le bas-côté une forme sombre. Une proie morte ? se dit-il... C'était impossible à dire dans l'obscurité, l'on ne voyait qu'à peine les contours sombres de la chose. La curiosité prit le dessus sur son envie de poursuivre sa promenade nocturne : il chercha son smartphone dans sa poche de jeans. Bref coup d'œil : zéro messages, zéro réseau. Cette petite chose n'était décidément utile que pour aller sur Internet, lorsqu'il se trouvait au village ! — Dans les options : lampe-torche. La LED puissante éclaira toute la scène, lui redonna ses couleurs — il fallait un instant pour se réhabituer les yeux à une lumière aussi franche.

Le petit cercle de lumière ainsi formé... tremblait...

Car sur le bas-côté, ce n'était pas un animal mort : c'était un homme. Son visage revêtant encore une expression épouvantable, la bouche béante, les yeux ouverts, les sourcils crispés, les mains semblant s'agripper dans le vide... la peau pâle, très pâle, presque diaphane.

— Et, au niveau de son cou : deux petites marques rouges et profondes.

 

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Membre, Posté(e)
le merle Membre 21 506 messages
Maitre des forums‚
Posté(e)
il y a 45 minutes, Criterium a dit :

Prologue: je me lance sur la même quête que @le merle, souhaitant remettre au goût du jour une petite histoire de vampires. Là aussi, format d'une mini-série improvisée au fil de l'inspiration. Pourquoi pas ? — Fond musical: x.

 

 

Le véhicule allait certainement trop vite pour cette petite route de campagne. Que disait-on, déjà, au sujet des phares ? Il fallait rouler de manière à voir tout obstacle potentiel dans la lumière. Au cas où il faudrait freiner. Oui, il faudrait faire attention ; et pourtant, le jeune homme ne ralentissait qu'à peine, le temps d'un virage, qu'il négociait avec un crissement de pneus. Il n'y avait personne sur ces routes de nuit ; elles formaient une sorte de circuit qui ne rejoignait l'autoroute que le temps de rejoindre la prochaine sortie, qui ramenait au début de la piste. Lui avait l'habitude d'y rôder ; il lui suffisait d'une musique à fort volume et il se sentait dans un monde parallèle, solitaire, en parcourant la campagne en pleine solitude. Les ombres des arbres sur le ciel assombri semblaient être la faune de cet autre univers étrange.

Une partie du circuit longeait la lisière du bois. C'était l'endroit le plus difficile pour la conduite ; non pas qu'il craignît y éviter de justesse un daim s'aventurant sur la route, mais surtout que celle-ci était par endroits un sentier de gravas plutôt qu'une piste d'asphalte. Non seulement cela faisait beaucoup de bruit et abîmait ses pneus, mais la traction n'était plus la même. — Et... un virage, et à nouveau une frayeur : le véhicule glisse de côté. — L'avait-il négocié encore un peu trop vite ?

La voiture racla sur les graviers, s'arrêta heureusement juste avant le bas-côté, et il put en reprendre le contrôle. Ç'avait été de justesse, cependant... Le cœur battant la chamade, il arrêta le véhicule, stoppa la musique. Il devait prendre quelques instants et quelques inspirations.

Il sortit.

Les bruissements nocturnes de la campagne étaient si différents que ceux du jour. Il n'y avait presque aucun son, à vrai-dire — le vent faisait bruire les arbustes et les feuillages des arbres du bois ; et l'on entendait parfois, au loin, les sons étranges de certaines grenouilles, qui venaient sûrement du lac, et dont les échos se reflétaient jusqu'ici. Selon sa propension à l'imaginaire, et son état mental, l'on s'imaginait alors soit cette nuit comme une cachette secrète, protectrice, même au beau milieu des champs ; soit comme une zone exposée, trop ouverte, trop vulnérable, observé par des centaines d'yeux invisibles...

Le ciel, lui, était magnifique. L'on y voyait toutes les étoiles. Non, il ne retournerait décidément pas en ville, après ses études... Il avait besoin de cet air frais, de ces étoiles, et de cet espace de liberté, dusse-t-il limiter ses possibles pour rester ici. — Le contour d'un panneau, un peu plus loin, restait caché par la pénombre. Il en connaissait déjà par cœur les écritures, cependant :

— Bleuforais à 10km.

— Vertgiron à 12km.

— Manoir de Rougeseule à 6km.

Il fut presque tenté de rentrer chez lui comme cela, à pieds, en coupant à travers les champs. Après tout, il n'était pas si loin, et il pourrait récupérer facilement sa voiture ici, sur le virage attenant au bois. Mais c'était quand même assez loin, et il ne tenait pas forcément à devoir refaire le chemin en sens inverse demain matin. Rapidement, une solution intermédiaire se proposa à lui : pourquoi ne pas se dégourdir les jambes le long du sentier de gravas, faire peut-être un kilomètre ou deux, puis revenir jusqu'ici et rentrer en voiture, apaisé, assagi ?

Le maigre croissant de lune éclairait à peine ses pas. Cela le forçait à ralentir la cadence, et il hésitait parfois à transférer trop rapidement le poids de son corps sur sa jambe avant. Ainsi, les crissements de ses chaussures sur le gravier prenaient un rythme lent, et tranquille. Petit à petit, ses yeux s'habituaient de plus en plus à la pénombre ; il voyait désormais tout comme dans un film en noir et blanc, très sombre, la nuit ayant ôté toutes les couleurs du chemin. À sa gauche, les grands arbres noirs, qui souvent bruissaient ; à sa droite, les vastes étendues des champs. D'ici, pas une seule lumière n'était visible ; aucune métairie dont une fenêtre serait restée allumée. Il ne voyait pas non plus la forme inquiétante du manoir griffer l'horizon, car celui-ci se trouvait derrière le bois. Le même paysage s'étendait sur des kilomètres — qui en paraissaient bien plus maintenant qu'il parcourait la route à pieds dans la nuit, plutôt qu'à grande vitesse et plein phares.

Un son le fit sursauter. Un animal, peut-être, se faufilant parmi les buissons.

Il vit sur le bas-côté une forme sombre. Une proie morte ? se dit-il... C'était impossible à dire dans l'obscurité, l'on ne voyait qu'à peine les contours sombres de la chose. La curiosité prit le dessus sur son envie de poursuivre sa promenade nocturne : il chercha son smartphone dans sa poche de jeans. Bref coup d'œil : zéro messages, zéro réseau. Cette petite chose n'était décidément utile que pour aller sur Internet, lorsqu'il se trouvait au village ! — Dans les options : lampe-torche. La LED puissante éclaira toute la scène, lui redonna ses couleurs — il fallait un instant pour se réhabituer les yeux à une lumière aussi franche.

Le petit cercle de lumière ainsi formé... tremblait...

Car sur le bas-côté, ce n'était pas un animal mort : c'était un homme. Son visage revêtant encore une expression épouvantable, la bouche béante, les yeux ouverts, les sourcils crispés, les mains semblant s'agripper dans le vide... la peau pâle, très pâle, presque diaphane.

— Et, au niveau de son cou : deux petites marques rouges et profondes.

 

bonsoir

pas mal du tout . l'histoire peut-être traitée de différentes façons .

j'en avais une qui était assez complexe et faisait intervenir beaucoup plus de personnages .

elle se passait dans un internat . un vampire sévit et de nombreux meurtres sème la terreur . bientôt , tout le monde soupçonne tout le monde , cherchant des signes qui trahiraient le Vampire . est-ce un professeurs ? l'un des adolescents ou quelqu'un de l'exterrieure qui s'infiltrerait la nuit dans l'internat pour sévir ?

je pense que ce thème peut-être traité à l'infini ou presque ?

bonne soirée

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Membre, 40ans Posté(e)
Crève Membre 3 353 messages
Mentor‚ 40ans‚
Posté(e)

C'est sympa, on attend la suite, la description de la panique du protagoniste. Moi aussi j'aime les histoires qui font monter l'angoisse, et les récits d'horreur.

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Membre, 55ans Posté(e)
Auger Membre 8 627 messages
Maitre des forums‚ 55ans‚
Posté(e)

Excellent texte (à mon humble avis de simple lecteur lambda)

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Membre, 40ans Posté(e)
Crève Membre 3 353 messages
Mentor‚ 40ans‚
Posté(e)

La dernière ligne de ton texte, qui représente la chute, me rappelle le poème de Rimbaud Le dormeur du Val, qui se termine par Il a deux trous rouge au côté droit.

Je ne sais pas si tu as pensé à ce poème en écrivant la fin de ton histoire.

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Membre, à crocs? accroc?, Posté(e)
Elfière Membre 494 messages
Forumeur accro‚ à crocs? accroc?,
Posté(e)

Rien que la musique donne envie de détaler illico!

C'est bien que tu aies changé de titre. Maintenant, je me doute bien que ton personnage ne va pas bêtement appeler la police, hum? Si je peux choisir, je vais à Bleuforais, c'est ce qui me fait le moins peur! Mais bon, avec toi...

Merci.

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Membre, nyctalope, 39ans Posté(e)
Criterium Membre 2 852 messages
39ans‚ nyctalope,
Posté(e)

Merci :) — Oui, nouveau titre.

Il y a 10 heures, Elfière a dit :

Maintenant, je me doute bien que ton personnage ne va pas bêtement appeler la police, hum?

Cette fois si — comme là il n'est pas capturé par mon cauchemar, mais simplement par mon incipit !

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Invité Etaine
Invités, Posté(e)
Invité Etaine
Invité Etaine Invités 0 message
Posté(e)

Toujours un style et une histoire qui donnent envie d'en lire plus.

C'est une bonne idée d'avoir proposé un court texte à suivre, un format qui me convient parfaitement

La "bête" va-t-elle faire le personnage à son image ? L'appartenance par filiation... suspens ^^

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