Les recluses

Le reclus apparaît à la même époque que le moine. A la fin du IIIe et au début du IVe siècle, en Égypte, beaucoup d’hommes et quelques femmes suivirent l’exemple de saint Antoine (251-356). Celui qu’on a appelé le père des ermites était issu d’une famille aisée de Memphis -comme le King, oh yeah !-.

Antoine qui n'avait que 20 printemps quand il entendit l’appel du Christ: « Si tu veux être parfait [patati patata], vends ce que tu possèdes, donne-le aux pauvres [blablabla], puis viens, suis-moi. » 

Ces illuminés voulaient être seuls avec Dieu (c'est le grec monos qui a donné moine), rompre avec le monde, s’installer au désert, construire une cabane (pas au fond du jardin non) ou s’enfermer par exemple dans une grotte et vivre en ermite.

A partir du IVe siècle, toutefois, c’est la vie communautaire des monastères qui l’emporta: il faut dire que l'existence d'ermite n'était pas une sinécure. 

Néanmoins au IIe millénaire se produisit un développement spectaculaire de la réclusion, conséquence de la formidable poussée d’érémitisme qui rassembla des milliers d’hommes et de femmes derrière quelques leaders hors du commun. Parmi ces derniers, beaucoup de grands saints des XIe et XIIe siècles.

La démarche consistait à tout abandonner pour prêcher la pénitence et l’imitation des Apôtres.

Ces fols en Christ entraînaient par conséquent des foules entières et organisaient dans les clairières de nouvelles communautés très pauvres qui s’adonnaient à la prière, à l’ascèse et au travail manuel. Une sorte de fête de l'huma perpétuelle.

Derrière le phénomène social de ces conversions ardentes, un ensemble de facteurs démographiques sans précédent: un baby-boom déjà, et puis une nouvelle répartition des pouvoirs, le remodelage des terroirs agricoles, l'expansion de l’artisanat, du commerce et des villes, bref réorganisation totale de la société. Les mentalités religieuses se sont parallèlement transformées, aiguillonnées par la réflexion sur le Christ, Dieu fait homme, si pauvre qu’il ne savait où reposer sa tête et invitait les hommes à le suivre. A ceux qui étaient capables de tout abandonner ici-bas, il promettait le Royaume.

L'envers du décor c'est que tous ces grands prédicateurs itinérants ont regroupé beaucoup trop de pauvres, tous autant de victimes du capitalisme -SDF et autres- qui faisaient peur au clergé, submergé par tous ces cas sociaux !

De là, pour mieux encadrer, la création de nouveaux ordres: Chartreux, Cisterciens, Camaldules... Et puis la multiplication des reclusoirs.

Si l'ermite peut vivre d’aumônes, de cueillette, défricher un bout de clairière, tresser des paniers et aller les vendre au marché, le reclus lui, comme il ne peut pas sortir de son réduit où il est emmuré, dépend entièrement et jusqu'à sa mort de la charité publique car, son engagement est irréversible. Il a donc besoin d’un serviteur attitré, qui le ravitaille et débarrasse le local de ses ordures. Tout ce qu'on lui demande de faire en échange c'est de prier à tour de bras pour la communauté. Si on l’oublie évidemment, il meurt. 

Les recluses sont plus nombreuses, en général des pécheresses ou des prostituées repenties qui demandent elles-mêmes cette existence pour racheter leurs fautes. Il y eut également des femmes abandonnées par leur mari parce que remplacées par une concubine, veuves seules et sans ressources ni appui, ou qui conservèrent un si mauvais souvenir de leur premier mariage qu’elles préférèrent s’enfermer pour le restant de leurs jours.

Cependant se trouvait de tout parmi les postulants à la réclusion, même des hommes fortunés qui faisaient construire la logette à leurs frais , percevaient une pension personnelle et disposaient d'un domestique. 

Dans les villes, ce sont dans la plupart des cas les autorités municipales qui s’occupent d’eux. Une fois nommé, le reclus appartient à la cité: c’est elle qui le nourrit, l’habille, paie les potions s’il est malade, le suaire et les frais d’obsèques. Un vrai fonctionnaire de la foi !

C’est aux points vitaux de l’espace urbain que le reclus est le plus utile en assurant aux murailles une surveillance spirituelle: il est particulièrement présent aux articulations de la cuirasse, c’est-à-dire aux portes. Dans sa logette, matériellement impuissant mais vigilant, il peut faire des miracles et sauver la ville. Un chroniqueur de la fin du XVe siècle nous raconte que c’est grâce à la recluse de Bavay (Nord) que les « féroces capitaines » qui voulaient brûler l’église y ont renoncé. « Elle supplia tant, au nom de la passion de Jésus-Christ, leur promettant de prier chaque jour pour eux, qu’ils s’en allèrent. » Dans les sites fluviaux, la municipalité installe souvent, sur une pile du pont, un reclusoir, qui a sa place dans le système de fortification.

Mais le reclusoir est aussi associé aux églises, aux cimetières, aux hôpitaux et aux léproseries...

Un tel édifice où l'on ne pouvait entrer, d'où l'on ne pouvait sortir, était par contre muni d'une petite ouverture pour maintenir la communication avec le monde: la fenestrelle. En principe, elle était infranchissable, bien qu'une histoire nous ait rapporté qu'à Rouen une malheureuse recluse réussit à se faufiler au travers pour courir se jeter dans le four brûlant du boulanger voisin: elle n’avait plus envie de vivre.

L’aménagement intérieur est très dépouillé. Plusieurs sources précisent qu’une fosse y est creusée, celle où le reclus a pris place quand il a été mis en possession de sa dernière demeure et où on l’allongera à sa mort. Ajoutons un petit autel, un crucifix, parfois la réserve eucharistique. Le mobilier profane se réduit à un grabat, une table, un tabouret.

Son locataire devait y vivre seul bien qu'il ait existé des locaux pour une ou deux tête de pipe supplémentaires.

Enfin le reclusoir a connu ses brebis galeuses, du moins si l'on en croit l'abbé Aelred de Rievaulx:

Un jour -dit-il-, une telle trouve le moyen de faire élargir l’ouverture vers le monde, et introduit un galant. La voilà enceinte. Si elle est trop vieille, elle sert d’entremetteuse. Avare, occupée à faire fructifier son pécule, paresseuse, coquette, beaucoup plus attachée aux tentures dont elle a paré son logis qu’aux récompenses futures, hypocrite, l’oreille aux aguets, quand elle entend des pas dans la rue, elle se met à marmonner ses prières : elle veut qu’on l’admire et elle est déçue si les pas s’éloignent.

Ah les coquines ! Si toutefois ce témoignage n'est pas qu'un pur fantasme d'ecclésiastique en manque de sexe...

Or au XIVe siècle on a commencé en Europe à se plaindre de tous ceux qui ne travaillent pas, de tous ces assistés jugés inutiles au monde. Les reclus, de fonctionnaires, seront passés parasites au regard de cette nouvelle époque, des cancers déclara le seigneur Wauquiez, baron d'Auvergne-Rhône-Alpes. Un duc parlera même de pauvres qui déconnent et de gens qui ne sont rien. Dès lors d’antiques recluseries se sont reconverties en monastères, en écoles, en hôpitaux, en sacristies.

SOURCE

il y a 8 minutes, sovenka a dit :

Ces illuminés voulaient être seuls avec Dieu (c'est le grec monos qui a donné moine), rompre avec le monde, s’installer au désert, construire une cabane (pas au fond du jardin non) ou s’enfermer par exemple dans une grotte et vivre en ermite.

Ah oui mais non, ce n'est pas spécifique au christianisme, ça existe aussi dans la religion athée, ça s'appelle les écolos.

il y a 4 minutes, riad** a dit :

Ah oui mais non, ce n'est pas spécifique au christianisme, ça existe aussi dans la religion athée, ça s'appelle les écolos.

Pas des écolos comme de Rugy alors 

il y a 4 minutes, sovenka a dit :

Pas des écolos comme de Rugy alors 

c'est qui Rugy?

il y a 16 minutes, riad** a dit :

c'est qui Rugy?

Lui:

il y a 21 minutes, sovenka a dit :

Lui:

C'est un ver ? (je ne suis pas sûr de l'orthographe, je veux dire le parti des vers)

il y a 10 minutes, riad** a dit :

C'est un ver ? (je ne suis pas sûr de l'orthographe, je veux dire le parti des vers)

Ah ça pour un ver on peut dire qu'il a percé 

Il y a 7 heures, sovenka a dit :

Lui:

Ha ! ma bonne table , ça sera pas pour les sans dents

Les stylites n'étaient pas chrétiens.

au XXI  éme siécle  nous sommes en train de renouer  avec cette tradition !

tout ça grace à un virus !

Il y a 9 heures, Talon 1 a dit :

Les stylites n'étaient pas chrétiens.

Il y en a eu des stylites chrétiens.

Il y a 14 heures, sovenka a dit :

Il y en a eu des stylites chrétiens.

Ah bon ? Ils n'allaient pas à la messe ?

il y a 9 minutes, Talon 1 a dit :

Ah bon ? Ils n'allaient pas à la messe ?

A moins qu'on les descende de leur perchoir avec un treuil... ou qu'ils disposent d'une échelle... Et puis les ermites ne devaient pas aller à la messe de toute façon.

A Paris, il y avait des réclusoirs dans le quartier malfamé du cimetière des Innocents (Halles).