Cultures, filiations, transmissions, guerres...

J'ai toujours négligé ma filiation culturelle. A tort. Au fur et à mesure que les années passent je me rends compte à quel point les différences culturelles engendrent des clivages et posent des failles voire des abîmes entre les individus et les populations.

Si j'analyse l'origine des conflits qui m'oppose ici aux foromeurs je tombe toujours sur des causes qui relèvent d'options culturelles fondamentales.

J'ai toujours négligé ces différences culturelles sans doute parce que je suis parti de l'idée que mon identité culturelle était universelle et partagée par tous. Que, si elles n'étaient pas partagées, alors cela résultait de la mauvaise foi des contradicteurs. 

En cela le forum est intéressant car personne n'y disposant d'un quelconque pouvoir sur l'autre, au contraire de la vie réelle, tous peuvent tout dire sans avoir à composer sauf avec les interdits propres au site (comme quoi partout règne quand même l'empire d'une Loi).

Cette expression libre révèle les fondements culturels des intervenants. Et là force est de reconnaitre que non seulement nous sommes différents mais que ces différences deviennent parfois des oppositions frontales et indépassables.

J'ai toujours pensé aussi que les différences culturelles résultaient de choix réversibles sur lesquels il serait possible de revenir. Mais non, une fois ces choix réalisés, ils engagent tellement l'individu qu'il n'est plus possible de revenir dessus. Cela me fait penser à un ouvrage de Sartre, je ne me souviens plus lequel, peut-être un ouvrage sur l'imaginaire ou l'imagination, dans lequel il écrit que les individus font des choix très tôt, dès la petite enfance. Je pense que ce qu'il a écrit là-dessus est vrai, du moins pour beaucoup de personnes.

Quand ces choix s'actualisent dans la vie réelle alors il parait inévitable qu'ils conduisent in fine, à des rapports de force, à des combats parfois même à des guerres.

C'est bien la guerre qui est le moteur de l'évolution, Héraclite l'avait certes compris très tôt, même si ces guerres aujourd'hui prennent dans nos pays développés un aspect moins sanglant que jadis.

Il y a 1 heure, aliochaverkiev a dit :

J'ai toujours pensé aussi que les différences culturelles résultaient de choix réversibles sur lesquels il serait possible de revenir.

C'est l'adaptation à l'environnement qui est le moteur des cultures. Ce n'est jamais un choix.

Patate américaine + boeuf français = hachi parmentier.

Parfois le mélange culturel a du bon et fabrique une nouvelle culture... 

La guerre est partout présente. Elle prend des formes qui varient et qui évoluent. Il y a les vieilles guerres de territoire, celles-ci débouchent sur l'ensanglantement, voire le Moyen Orient. Ces guerres de territoires finissent par engendrer ou par exhumer des valeurs destinées à tuer l'adversaire. Les religions finissent par devenir des armes de guerre au service d'un combat dont le but est la possession du sol.

Ces guerres de territoire ont toujours lieu dans nos pays développés, sauf qu'elles n'ont plus ce caractère violent. Les classes populaires sont lentement marginalisées dans des territoires excentrés, la périphérie comme on dit est exilée dans son propre pays. Les mouvements qui modifient l'état des propriétés sont incessants. Tout « bouge » tout se modifie, rien ne reste en l'état, le monde est en perpétuel devenir.

Ces mouvements incessants, ces frictions, ces guerres expriment des valeurs différentes mais pas seulement. Même entre ceux qui ont des valeurs identiques il peut y avoir conflit. Il y a la façon de penser, la façon de poser les problèmes. Il n' y pas que les valeurs qui conduisent aux conflits il y a la manière de poser les hypothèses. La manière de conceptualiser la réalité. Cette manière est d’origine culturelle c'est-à-dire qu'elle tient à des hérédités, des transmissions, des façons de voir, des pratiques, des expériences propres à une population, à une famille, à un individu. Elle tient aussi aux intentions cachées parfois même cachées à celui ou à celle qui est habité(e) par ces intentions. Les intentions conduisent à conceptualiser de manière différente la réalité.

Valeurs, habitudes, traditions, façon de penser, intentions, désirs divers, tout ce monde d'idées et de sentiments plus ou moins conscients, et surtout inconscients, détermine nos rapports sociaux. Et nos rapports sociaux déterminent l’évolution. Nous sommes toujours en friction ou en communion. Puis les frictions s'apaisent, puis les communions cessent. L'évolution de nos rapports sociaux détermine de nouvelles conditions de vie qui engendrent de nouvelles valeurs. L’évolution des sociétés humaines est considérablement compliquée, elle est, pour le moment, hors de contrôle. Nous corrigeons, nous modifions nous créons comme nous le pouvons les trajectoires. Ça marche pour l'instant. Comme ça marche, on se dit : dieu existe, ou encore, si on est athée : l'homme est intelligent malgré lui (ou l'univers est intelligent), il est né sous une bonne étoile, ça marchera toujours. Mieux vaut penser comme ça, après tout tant que le monde continue d’exister le temps de notre vie, à quoi bon se faire du souci.

Rien que de choisir de vivre plutôt que de mourir est un choix culturel. En cela l'homme transcende l'animalité sans pour autant la déprécier sauf dans les cultures qui méprisent le corps et le désir. La possibilité mentale de choisir engendre les valeurs qui transforment les instincts obligés en comportements choisis. La possibilité de choisir se déploie dans le champ de la conscience de soi. La conscience de soi, plus exactement la conscience réflexive, plus exactement encore la possibilité d'une activité mentale qui parvient à s'observer est un événement biologique capital dans l’évolution de la vie.

Pour ne pas parasiter ton sujet à l'excès, j'en ouvre un autre à côté : "Filiations ?"

Nous affirmons tous que la transmission se fait par le langage. Or je ne crois plus du tout à cette assertion. Je pense même que l'essentiel de la transmission se fait autrement : par les émotions, les gestes, les intonations, les regards, les actions, les tensions, etc. ces manières inconscientes de transmettre, inconscientes car elles ne passent pas par le langage. Ce mode de transmission occupe en fait la totalité du temps de communication pendant l'enfance. Cette communication se fait sans doute dès la conception, dès que l'enfant apparait dans le ventre de la mère, même à l'état de fœtus. Cette transmission nous n'en avons pas conscience, nous ne la voyons pas. Cette transmission assure le lien entre soi et les générations précédentes. Sans doute la notion de "race" vient de là : comment se fait-il qu'une même filiation puisse présenter de mêmes modes de comportement, de pensée à travers les générations ? Cela étonne tellement que la notion de race tente d'expliquer cela par la génétique. mais la génétique n'explique rien. Il n'empêche qu'effectivement des modes de comportement, des sensibilités spécifiques, des valeurs données traversent les générations à tel point que le mot "race" revient souvent sur les lèvres. Ce mot "race" alors détermine des traits de caractère apparemment transmis par héritage génétique. Mais ce n'est pas la génétique qui explique la récurrence de ces traits de caractère, de ces valeurs, de ces sensibilités etc. c'est la puissante transmission inconsciente qui traverse les générations.