La Provence sous la neige (poème)

(Un poème tiré d'un recueil que j'ai écrit et essaie de faire publier. Inspiré par un de ces rares hivers où la Provence se vêt d'un manteau blanc).

LA PROVENCE SOUS LA NEIGE

 

La douce Provence grelotte sous la neige

Qui tombe à gros flocons du ciel si sombre et bas.

C'est l'aube, mais le soleil semble pris au piège

Dans les épais nuages, là-bas.

*

Les senteurs des garrigues et des forêts claires

Ont faibli, peu à peu, puis se sont tues soudain.

Le vieux Ventoux a des aspects de mont lunaire

Et ne reconnaît plus ses jardins.

*

Les olivaies sont des bataillons de vieillards

Se tordant avec horreur, vaincus cette fois

Dans ce pays où les neiges sont fléau rare,

Où même janvier n'est pas si froid.

*

Figuiers près des maisons, palmiers le long des plages,

Stoïques soldats cyprès autour des vergers

Et platanes géants des places de villages...

Tous ces arbres souffrent sans bouger.

*

Les mas anciens, comme les chevaux de Camargue,

Sont regroupés dans le froid vif et se réchauffent,

Car les flocons sont autant de pointes qui narguent,

Et pas un mur, pas un flanc n'est sauf.

*

Dans les pinèdes, les branches sont bien chargées,

Telles celles des sapins, l'hiver, en montagne.

Tout est silencieux dans la Provence enneigée,

Pas le moindre bruit dans la campagne.

*

La Durance a l'air d'une couleuvre de plomb,

Presque endormie entre ses rives boursouflées ;

Elle glisse, lentement, au fond des vallons,

Se perd dans les champs immaculés.

*

Les calanques non plus ne sont pas épargnées ;

La Méditerranée, seule, arrête la neige

Que son sel, jusqu'en haut des rochers, vient rogner,

Ennemi de ce blanc sortilège.

*

Mais le soleil parvient à percer les nuages

Et la Provence, enfin, s'éveille et lui sourit,

Vierge radieuse dans sa robe de mariage,

Si claire et pure sous le ciel gris.

*

Les oiseaux de la mer, en survolant Martigues,

Découvrent d'un œil surpris de gros calissons

Flottant sur l'eau lisse, le long des quais, des digues,

Au lieu de barques pour le poisson.

*

Partout, les volets s'ouvrent, comme autant de fleurs,

Et, dans les rues, alors privées de leur écho,

Se fait entendre une gaieté tout en couleurs,

Petit ruisseau de mots amicaux.

*

Puis se sont les enfants, tout ronds d'habits bien chauds,

Qui sortent en courant, poussant des cris de joie,

Qui s'en vont façonner en bonshommes manchots

La divine croqueuse de doigts.

*

Aujourd'hui, leurs parents n'iront pas travailler,

Et l'on verra des grands lancer des boulets blancs,

Comme en ce temps béni où, voyous d'écoliers,

La neige les rendait turbulents.

*

Tant qu'elle gardera son lourd manteau d'hermine,

La Provence aura plutôt le cœur à la fête,

Flattée par cette visiteuse qui domine

Plus volontiers l'hiver aux Helvètes.

***************

(sovenka)

 

 

Quel jolie poème ! 

Le thème tombe à pique avec la période neigeuse !

 

Merci  

Quelle bonne idée de nous parler de la  Provence sous la neige !

Par la fenêtre de la cuisine, on voyait ça :

La nature était en panique !

Devant le magasin, l'olivier dont tu as bien parlé pliait "l'esquine" :

J'ai pensé au fameux mot de Frédéric Mistral :

"Tant qué sus l'ooulivier cantara la cigalo

Prouvènçaous parlarèn la lèngo prouvènçalo !"

(Et j'ai pensé : "peuchère, la cigale !")

 

Merci pour les photos : la Provence c'est aussi tellement joli sous la neige !

Le poème je l'avais écrit un jour d'hiver 2009 (il avait énormément neigé en Provence, où je vivais à l'époque).

il y a 28 minutes, sovenka a dit :

Merci pour les photos : la Provence c'est aussi tellement joli sous la neige !

Le poème je l'avais écrit un jour d'hiver 2009 (il avait énormément neigé en Provence, où je vivais à l'époque).

Mais où tu es allée te perdre depuis ? C'est pourtant bien ici le centre du monde !!!

Pas loin de la frontière suisse. Pour la neige on est servis  

Citation

 

Vos photos sont très jolies.

La neige n'a pas tenue ici...

Sovenka !! J'adore ton poème !! j'adore !

Merci  

Zou-maï la névo !

(Et encore la neige !)

 

Zou maï la névo a-dé-matin !........................Et encore la neige ce matin !

Fara quatré cooups aquest-an !..................C'est la quatrième fois cette année !

V'avèm jamaïs vist, 'quo !.............;...............On n'a jamais vu, ça !

Pèr naoutré, gés dé proublémo :.................Pour nous, pas de problème

Restarèm a l'houstaou !................................Nous resterons à la maison

Bèn oou caoud !.............................................Bien au chaud !

Mémé lou magasin,.......................................Même le magasin

Crèsi qué........................................................Je ne l'ouvrirai pas

Lou douarbiraï pas, éncuèï..........................Aujourd'hui, je crois....

L'aura dégun sus la routo............................Il n'y aura personne sur la route.

Noun, es per les aoucélouns........................Non, c'est pour les petits oiseaux

Qué mi faou dé marrit sang !.......................Que je m'inquiète :

Pécaïré !..........................................................Les pauvres !

Lei pitchouns sarraïlhers blus.....................Les petites mésanges bleues

Avièn coumensat de nisar.............................Avaient commencé de nicher

Dins sa gargouléto........................................Dans leur gargoulette...

Sabi pas coumo van faïré.............................Je ne sais pas comment elles vont faire

Mounté van trouvar dé-qué ?......................Où c'est qu'elles vont trouver "de quoi" ?

Como qué siégué après dinar......................Quoi qu'il en soit, cet après-midi

Duourié rémountar a doudgé dégrats :.....Ça devrait remonter à 12 degrés :

Tèndra pas !.....................................;.............Ça tiendra pas !

Et l'olivier, c'est encore pire !

 

 

Très beau ce poème en langue provençale @Blaquière  

Il y a 1 heure, sovenka a dit :

Très beau ce poème en langue provençale @Blaquière  

C'est gentil ! Il faudrait que je me décide à enregistrer des trucs comme ça pour donner une idées des sonorités... c'est beau comme de l'espagnol, mais en plus doux.... C'est comment dire ?... une langue d'intimité ! Je suis vraiment fainéant !

C'est de l'occitan ? Mais de l'occitan provençal, différent de celui que j'ai eu l'occasion d'entendre à Carcassonne et dans sa région.

c'est beau! le poème et le paysage! bravossimo!

Le 3/23/2018 à 21:05, sovenka a dit :

C'est de l'occitan ? Mais de l'occitan provençal, différent de celui que j'ai eu l'occasion d'entendre à Carcassonne et dans sa région.

C'est du provençal dans son dernier état de langue vivante et parlée. Comme le parlaient nos grands parents. Ce qu'on entend de partout maintenant c'est du néo-provençal ou du néo-occitan : une langue restituée, recomposée qui (à mon avis) n'a jamais existé... Un langue constituée "contre" le français. La langue parlée, elle est restée des siècles, poreuse aux apports français mais en restant dans l'esprit une langue d'oc, maintenant les éléments français dans les langues reconstitués ont totalement disparu, mais c'est l'esprit général de la langue qui est devenu français. Je sais pas si je me fais comprendre....

En somme, c'est du Provençal ou de l'Occitan mais administrés en terrain conquis. Ce ne sont plus des langues libres de leurs mouvements.

 

Le 30/03/2018 à 14:43, sovenka a dit :

En somme, c'est du Provençal ou de l'Occitan mais administrés en terrain conquis. Ce ne sont plus des langues libres de leurs mouvements.

Ça mériterait une réponse que je me garderai bien de faire !...