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Fiphi

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Tout ce qui a été posté par Fiphi

  1. Je viens de terminer "Mémoires d'Hadrien" de Marguerite Yourcenar. Un livre admirable, éloquent, intelligible. L'académicienne s'immisce dans la peau d'Hadrien (76-138), empereur romain de 117 à sa mort, dont elle dit "Si cet homme n'avait pas maintenu la paix du monde et rénové l'économie de l'empire, ses bonheurs et ses malheurs personnels m'intéresseraient moins." Dès lors, l'auteur se confond avec l'âme de son personnage ; elle imagine les moindres pensées de cet homme presque "sage". Yourcenar écrit "Refaire du dedans ce que les archéologues du XIX siècle on fait du dehors". Le livre est rédigé après recherche et interprétations d'écrits historiques ("l'Histoire Auguste" - "Histoire Romaine" de Dion Cassius). Livre longuement mûri. Hadrien rédige un courrier à Marc Aurèle, son petit fils adoptif, de ce fait prétendant au titre d'empereur des romains ( après Antonin), et y raconte son parcours politique, militaire, son accession au trône grâce à l'entremise de Plotine, ses amours notamment sa passion pour Antinous, ses ¿uvres administratives et politiques, ses pensées philosophiques (la passion amoureuse, la mort, la destinée des peuples, l'exercice du pouvoir ...). Hadrien se révèle avoir été un homme d'une grande bonté, pacifique, soucieux de protéger et consolider l'empire romain, doué d'un esprit bâtisseur, pour l'intérêt et la pérennité de son peuple. Son règne s'inscrit dans la "dynastie des Antonins", qui débute sous le règne de Nerva (successeur de Domitien), lequel choisira Trajan. Lui succèderont Hadrien, Antonin le pieux, puis Marc Aurèle (période de 96 à 180 ap JC). Période notamment louée comme "Pax Romana" Personnellement, j'avais choisi de lire ce livre suite à la lecture du livre de Max Gallo "Les Romains - Marc Aurèle - Le martyre des Chrétiens" ; cherchant à saisir les raisons qui avaient pu faire basculer l'empire romain d'une religion polythéiste, basée sur le culte et le rituel, influencée par la civilisation grecque (transposition des divinités), à la religion chrétienne. En substance, voici un extrait de ce que dit "Hadrien" sur la religion chrétienne, alors considérée comme une secte : " Ce fut vers cette époque que Quadratus, évêque des chrétiens, m'envoya une apologie de sa foi. J'avais eu pour principe de maintenir envers cette secte la ligne de conduite strictement équitable qui avait été celle de Trajan dans ses meilleurs jours ; je venais de rappeler aux gouverneurs des provinces que la protection des lois s'étend à tous les citoyens, et que les diffamateurs des chrétiens seraient punis s'ils portaient contre eux des accusations sans preuves. Mais toute tolérance accordée aux fanatiques leur fait croire immédiatement à de la sympathie pour leur cause ; j'ai peine à m'imaginer que Quadratus espérait faire de moi un chrétien ; il tint en tout cas à me prouver l'excellence de sa doctrine et surtout son innocuité pour l'Etat. Je lus son ¿uvre ; j'eus même la curiosité de faire rassembler par Phlégon des renseignements sur la vie du jeune prophète nommé Jésus, qui fonda la secte, et mourut victime de l'intolérance juive il y a environ cent ans. Ce jeune sage semble avoir laissé des préceptes assez semblables à ceux d'Orphée, auquel ses disciples le comparent parfois. A travers la prose singulièrement plate de Quadratus, je n'étais pas sans goûter le charme attendrissant de ces vertus de gens simples, leur douceur, leur ingénuité, leur attachement les uns aux autres ; tout cela ressemblait fort aux confréries que des esclaves ou des pauvres fondent un peu partout en l'honneur de nos dieux dans les faubourgs populeux des villes ; au sein d'un monde qui malgré tous nos efforts reste dur et indifférent aux peines et aux espoirs des hommes, ces petites sociétés d'assistance mutuelle offrent à des malheureux un point d'appui et un réconfort. Mais j'étais sensible aussi à certains dangers. Cette glorification des vertus d'enfant et d'esclave se faisait aux dépens de qualités plus viriles et plus lucides ; je devinais sous cette innocence renfermée et fade la féroce intransigeance du sectaire en présence de formes de vie et de pensée qui ne sont pas les siennes, l'insolent orgueil qui le fait se préférer au reste des hommes, et sa vue volontairement encadrée d'¿illères. Je me lassai assez vite des arguments captieux de Quadratus et de ces bribes de philosophie maladroitement empruntées aux écrits de nos sages. Chabrias, toujours préoccupé du juste culte à offrir aux dieux, s'inquiétait du progrès de sectes de ce genre dans la populace des grandes villes ; il s'effrayait pour nos vieilles religions qui n'imposent à l'homme le joug d'aucun dogme, se prêtent à des interprétations aussi variées que la nature elle-même, et laissent les c¿urs austères s'inventer s'ils le veulent une morale plus haute, sans atteindre les masses à des préceptes trop stricts pour ne pas engendrer aussitôt la contrainte et l'hypocrisie. Arrien partageait ces vues. Je passai tout un soir à discuter avec lui l'injonction qui consiste à aimer autrui comme soi-même ; elle est trop contraire à la nature humaine pour être sincèrement obéie par le vulgaire, qui n'aimera jamais que soi, et ne convient nullement au sage, qui ne s'aime pas particulièrement soi-même. Sur bien des points, d'ailleurs, la pensée de nos philosophes me semblait elle aussi bornée, confuse, ou stérile. Les trois quarts de nos exercices intellectuels ne sont plus que broderies sur le vide ; je me demandais si cette vacuité croissante était due à un abaissement de l'intelligence ou à un déclin du caractère ; quoi qu'il en fût, la médiocrité de l'espoir s'accompagnait presque partout d'une étonnante bassesse d'âme." Dans son carnet de notes, Yourcenar évoque une phrase de Flaubert, trouvée dans un volume de la correspondance de cet auteur : " Les dieux n'étant plus, et le Christ n'étant pas encore, il y a eu, de Cicéron à Marc Aurèle, un moment unique où l'homme seul a été." Je fais une pause sur l'empire romain ; je m'apprête à lire "Les Misérables" ...
  2. J'ai relu "Le Feld Maréchal Von Bonaparte" de Jean Dutourd, académicien. Essai uchronique sur la grandeur et décadence de la France dont l'évènement crucial fut la révolution française, précédant la terreur, le directoire, le consulat et le premier empire. Il y a tant de choses à dire sur ce livre, riche d'anecdotes historiques, particulièrement "éclairé" sur les infortunes des peuples d'Europe, où tout s'enchaine dans une logique implacable, qui les ont conduit dans des guerres atroces. Ainsi Dutourd attribue nos infortunes, celle de l'humanité par ailleurs, a cet évènement inconcevable qu'était la décapitation de notre roi, qui mit un terme aux équilibres de notre vieille Europe et l'entraina dans un funeste sort. Je viens de lire "Les Romains - Marc Aurèle - Le Martyre des Chrétiens" de Max Gallo. C'est la première fois que je lis cet auteur. Un livre surprenant auquel je ne m'attendais pas. Il ne s'agit pas d'un récit historique au sens propre du terme décrivant une continuité d'évènements, ou proposant une analyse critique. Nous sommes plongés dans les pensées de Julius Priscus, ancien confident de Marc Aurèle. Le récit se situe au moment du règne de Commode, barbare sadique, indigne fils et successeur de l'empereur philosophe, décédé. Eloigné de la politique, Priscus doute, s'interroge sur la foi chrétienne, cette nouvelle religion qui trouve ses plus nombreux adeptes parmi la plèbe, les esclaves. Il est disputé entre la "juste raison" de Marc Aurèle, cependant persécuteur des Chrétiens parcequ'ils reniaient les dieux romains et mettaient en danger l'unité romaine, et la foi chrétienne dont il découvre les motivations, les passions, à travers le discours d'Eclectos, et son amour pour Doma. Plus qu'un enseignement historique, ce livre est "bouleversant" car il permet une profonde réflexion sur la nature humaine, où "sagesse et raison" de nos conduites sont confrontées à nos religions monothéistes, qui commandent aux hommes leurs passions et leurs conduites, par la voie d'un prophète, messager de Dieu. Mais attention, ce livre pose les bases de la reflexion et n'apporte en aucune manière une quelconque réponse. De ce fait, j'ai choisi à présent de lire "Mémoires d'Hadrien" de Marguerite Yourcenar.
  3. Remarque judicieuse. le peuple américain, tant décrié, donne au monde une remarquable leçon d'humilité, un exemple fort d'intégration, de considération, de dignité à l'égard de l'individu quelque soit la couleur de sa peau. En citant Douglass et Luther King, je voulais aussi insister, souligner qu'il y a 50 ans, l'homme noir était encore un esclave ou considéré comme tel dans la plus grande démocratie du monde. De nos jours, l'homme noir, en Afrique notamment, est encore aujourd'hui victime de brimades ou traité indignement, par ses paires ou par l'occidental. Je suis blanc. Si j'étais noir, je devine combien l'élection d'Obama constituerait pour moi un immense espoir pour la dignité d'un peuple qui me ressemble. Il est un exemple à suivre, un modèle qui s'adresse aux gens qui lui ressemblent et qui lui sont si différents (dictateurs noirs), un modèle pour aider ses paires à s'élever vers un certain humanisme (par opposition aux massacres multi-ethniques), un modèle pour tous confirmant que l'homme diffère par son caractère, son éducation et non par sa couleur. Il est le contre exemple du racisme le plus vil. Ses discours, dont ceux les plus récents, sont remarquables parce qu'ils n'engagent ni à la haine, ni à la rancoeur, ni n'exhortent la revanche (contre exemple en France où l'on ne parvient pas à "régler" notre époque colonialiste). Ils exaltent la paix. La nomination d'un prix Nobel est toujours critiquable ... Plus que la réussite, c'est l'espoir de quelques milliards d'individus qui ont enfin la possibilité de s'identifier à lui, homme noir, homme de paix, tout à fait normal et commun à tous ! Plus personnellement, j'ai en mémoire les propos que me tint un jour un ami dont la peau est noire : "L'été est la saison lors de laquelle les blancs veulent ressembler aux noirs !". Comme quoi la couleur de peau est emblématique et toujours présente à l'esprit.
  4. Le résultat importe peu .... L'espoir compte ... Obama est certainement l'homme qui incarne le plus l'espoir parmi les peuples, notamment les peuples noirs, en terme d'équité, d'égalité, de respect, de considération. Il est en quelque sorte l'aboutissement d'un grand nombre de prix déjà décernés ! Lorsqu'on évoque Obama, plus qu'à ses engagements, à une éventuelle réussite, je pense surtout à Frederick Douglass (Que signifie la fête nationale américaine pour un esclave ?) et à Marthin Luther King (Je fais un rêve ..."Je rêve que mes quatre jeunes enfants vivront un jour dans un pays où on ne les jugera pas à la couleur de leur peau mais à la nature de leur caractère"....).
  5. Fiphi

    90% de faits divers ...

    En ce qui me concerne, le "fait divers" est celui que l'on peut lire sur la page des "faits divers" dans les journaux locaux. Ils concernent diverses affaires tant criminelles que délictuelles, atteintes aux biens et aux personnes, qui interessent l'opinion publique, commis à tous moments, marqueurs de notre temps, de notre société déliquescente. Les faits divers des journaux ne sont pas un inventaire exhaustif des faits commis, mais d'une sélection parmi les plus médiatiques ayant souvent conduit à des arrestations ou dont le préjudice est élevé ou dont la manière d'opérer des auteurs est soit odieuse, soit bouleversante ou traumatisante (vols avec armes, avec violences, homicides, règlements de compte, délits routiers graves, accidents graves, faits avec interpellations ...) Enfin, considérer la délinquance au travers des seuls faits commis par les immigrés mène à une impasse (ça ne sert à rien). Est-il utile de rappeler que la population carcérale est très majoritairement française, aux origines ethniques diverses certes, mais française ! Pourquoi alors ne pas analyser la délinquance de la manière suivante : Quels sont les faits commis ? Qui les commet (sexe, âge, origines, moeurs et coutumes, religion ? Lieux de commission ? Milieu du délinquant ? Caractères des faits commis ?
  6. Fiphi

    90% de faits divers ...

    Dire que l'acte délinquant trouve sa cause dans l'habitat est pure sottise! C'est du sociologisme... Certes l'habitat collectif des banlieues crée une certaine promiscuité, encourage vers l'acte délinquant mais ce n'est pas l'élément essentiel. La cause principale, c'est bien la barrière morale qui n'existe pas ou plus chez certains individus, morale en accord avec les valeurs de la société ; c'est la présence accrue d'une population en rupture avec la communauté nationale. La promiscuité elle-même est crée par les gens qui y vivent et non par les murs qui les encadrent !
  7. Fiphi

    90% de faits divers ...

    Affirmer que les immigrés sont plus délinquants que les français n'a aucun sens .... Les immigrés proviennent de diverses régions du monde et on ne peut pas tous les assimiler à un même comportement de type délinquant. D'autre part, je ne crois pas que les français aient un comportement plus moral que les autres .... Il n'existe pas un "gêne" du délinquant qui se serait développer ailleurs que dans notre contrée ! Le chiffre avancé manque bien évidemment de précision et d'analyse. En ce qui me concerne, je parlerai de facteurs ethniques et religieux, d'intégration, d'assimilation, d'acceptation des valeurs sociales, de conditions d'accueil, d'éducation, de fréquentations. Il me semble que le comportement délinquant ou criminel trouve avant tout son origine principalement dans le savoir, l'éducation transmis par les parents, délibéré ou non ! Il s'aggrave au cours de l'adolescence, selon divers facteurs énoncés ci-dessus (l'origine ethnique en est un, comme le rejet des valeurs sociales et l'identification aux valeurs d'un groupe, d'une bande dont les règles sont aux antipodes de celles de la société). Evoquer le délinquant, est-ce parler de l'auteur du délit ou également des criminels, auteurs de crimes ? Il va de soi qu'il y a dans notre droit positif, une échelle de gravité des actes commis et qu'ils ne trouvent pas tous la même cause. Parfois même, les criminels sexuels ont été eux-mêmes victimes de faits similaires durant leur plus jeune âge ! Ajoutons à tout cela les individus qui présentent des personnalités défaillantes, dont le discernement au moment de l'acte est "aboli" ou "altéré" ...
  8. Fiphi

    A quoi se juge l'intelligence?

    Je reprends Montaigne : "Mieux vaut une tête bien faîte, qu'une tête bien pleine". L'intelligent est celui qui est capable de se remettre en question, qui dispose certes d'un savoir, de la connaissance, mais pour mieux juger du genre humain, des évènements, aller à l'essentiel, avoir la capacité de comprendre les autres, les écouter, être humble, digne, équitable, juste ...
  9. Pierre-Claude NIVELLE de LA CHAUSSéE (1692-1754) Né à Paris, le 14 février 1692. Auteur dramatique, il a laissé dix-neuf pièces en vers, dont dix-sept comédies ; il introduisit, l'un des premiers des éléments comiques dans la tragédie et créa le genre dit « comédie larmoyante ». L'école des Mères en est la pièce la plus célèbre. Il fut élu à l'académie française le 9 juin 1736 à l'unanimité, avec le patronage de Voltaire et de Destouches en remplacement de Portail, et reçu le 25 juin 1736 par Languet de Gergy. Il fut l'un des dénonciateurs de Piron et combattit Collé. Mort le 14 mars 1754 L'école des mères de M. Nivelle de La Chaussée ACTE 1 SCENE 1 La scène est à Paris, dans la maison de Monsieur et de Madame Argant. M Doligni pere , M Doligni fils. Doligni fils . Mon pere, en vérité, j' ai peine à vous comprendre. Doligni pere . Pourquoi ? Doligni fils . Madame Argant tient sa fille en couvent ; et son dessein n' est pas de se donner un gendre. Doligni pere . Projets de femme. Autant en emporte le vent. Son mari m' a promis de t' accorder sa fille ; il va la ramener au sein de sa famille : tiens ton coeur et ta main tout prêts à se donner. Doligni fils . Cet ordre rigoureux a de quoi m' étonner. Permettez que je vous remontre... Doligni pere . Doligni, laissons-là des débats importuns. Tu vas me débiter les mêmes lieux communs qu' autrefois nous avons, en pareille rencontre, chacun, de pere en fils, employés comme toi. Va, j' ai passé par-là ; tu feras comme moi. Doligni fils . Et si j' aimois ailleurs ? Doligni pere . Ma foi, tant pis pour elle. Il faudroit, en ce cas, devenir infidele. Doligni fils . Ce n' est donc pas pour moi que vous me mariez ? Doligni pere . Pour qui donc ? Doligni fils . Je le croirois presque. J' ai compté faire un choix que vous approuveriez. Doligni pere . L' amour dans un jeune homme est toujours romanesque. J' aurois été moi-même assez extravagant pour épouser aussi ma premiere amourette, si l' on n' eût retenu ma jeunesse indiscrette. Doligni fils . Mais je ne connois point Mademoiselle Argant. Doligni pere . Ni moi : mais elle aura vingt mille écus de rente. Doligni fils . Eh ! Quand elle en auroit quarante ! Doligni pere . Ce seroit encor mieux. Doligni fils . N' avez-vous pas du bien ? Doligni pere . Il le faut augmenter ; sinon, il vient à rien. Doligni fils . J' ignore comme elle est d' esprit et de figure. Elle est riche. à l' égard de l' esprit, je t' assure qu' une femme à la longue en a toujours assez. Elle est jeune, au surplus ; et tout ce que j' en sçais, c' est qu' à quinze ou seize ans on est du moins jolie. Doligni fils . Qui sçait si le rapport d' humeurs... Doligni pere . Autre folie ! En tout cas, tu feras comme les autres font. Qui s' embarque, est-il sûr de faire un bon voyage ? à quoi sert l' examen avant le mariage ? à rien. Ce n' est qu' après qu' on se connoît à fond. Las de se composer avec un soin extrême, le naturel caché prend alors le dessus ; le masque tombe de lui-même, et malheureusement on ne le reprend plus. Mais enfin le bien reste ; et cet ami fidele, sans compter quelquefois la raison qui s' en mêle, entre époux qui pourroient se brouiller sans retour, sert de médiateur, au défaut de l' amour. Doligni fils, à part . Il cessera d' être inflexible.
  10. Fiphi

    Sauvons les lettres.

    J'y suis depuis peu, et je souffre d'y être encore ....
  11. Théodore JOUFFROY (1796-1842) - Théodore Simon Jouffroy, né aux Pontets (Doubs) le 6 juillet 1796 et mort à Paris le 1er mars 1842, est un philosophe et un homme politique français. Il développe au début du XIXe siècle la question psychologique au sein de l'école éclectique française dirigée par Victor Cousin. C'est l'arrière-grand-père de l'écrivain Alain Jouffroy De la philosophie et du sens commun ... L'histoire de la philosophie présente un singulier spectacle ; un certain nombre de problèmes se reproduisent à toutes les époques ; chacun de ces problèmes inspire un certain nombre de solutions, toujours les mêmes ; les philosophes se les partagent ; la discussion s'établit ; toutes les opinions sont attaquées et défendues avec la même apparence de vérité : l'humanité écoute, n'adopte l'avis de personne, mais garde le sien qui est ce qu'on appelle le sens commun. Ainsi, pour citer des exemples, toutes les époques philosophiques ont ramené sur la scène l'opposition du matérialisme et du spiritualisme en métaphysique, celle du stoïcisme et de l'épicuréisme en morale ; aucune de ces doctrines n'a prévalu d'une manière durable ; aucune n'a péri ; toutes ont trouvé des partisans illustres et de bonne foi, toutes ont exercé à peu près la même influence ; mais, en définitive, le genre humain, témoin de leurs débats, n'est devenu ni matérialiste, ni spiritualiste, ni stoïcien, ni épicurien ; il est demeuré ce qu'il était avant la philosophie, croyant tout à la fois à la matière et à l'esprit, respectant le devoir et poursuivant le bonheur tout ensemble. Ce spectacle, qui inspire à l'observateur superficiel le mépris de la philosophie, et qui a fourni au scepticisme des armes en apparence si redoutables, est profondément instructif pour qui cherche dans les événements du monde intellectuel les lois du dévoloppement de l'espèce humaine, qui s'y révèlent d'une manière bien plus vraie et bien plus large que dans ceux du monde politique ; car les actions des hommes traduisent leurs idées comme leurs idées traduisent les lois de leur nature ; et, de ces deux traductions, la plus immédiate est aussi la plus fidèle et la plus claire. Mais ce spectacle, pour devenir instructif, a besoin d'être compris, et pour être compris, veut être étudié. Or, c'est un sujet tout neuf encore, et sur lequel la réflexion ne s'est guère arrêtée qu'en passant. Le développement actif de l'espèce humaine a d'abord attiré tous les regards, et cela devait être : nous sommes toujours frappés de ce qui est plus extérieur. On a fouillé dans tous les sens le champ des faits proprement dits ; toutes les actions, tous les événements, toutes les dates ont été minutieusement explorés : c'est ainsi qu'on a commencé l'histoire de l'humanité. Mais les faits recueillis, on a senti le besoin de les expliquer, et pénétrant plus avant, on a cherché leurs causes dans les m¿urs, les religions, les institutions politiques. Au siècle des chroniques et de l'érudition a succédé le siècle de Montesquieu et de Voltaire. La nécessité d'aller plus avant commence à se faire sentir, et appelle plus haut et plus loin les esprits éclairés. Les m¿urs, les institutions et les dogmes, qui expliquent la conduite et le sort des peuples, ne sont eux-mêmes que des faits généraux, dontl'origine et la succession ont besoin d'être expliquées. Et comme ces faits généraux ne sont que l'expression des opinions successivement admises sur les questions morales, politiques et religieuses, cette explication ne saurait se trouver que dans l'histoire du développement intellectuel de l'humanité, développement qui s'est opéré en vertu des lois mêmes de notre nature. C'est là que nous aspirons, et là que doit remonter toute explication définitive des événements historiques. L'histoire de la philosophie est donc une étude neuve, une étude importante, une étude qui appartient éminemment à notre époque ; et il est aussi curieux que pressant de l'envisager, non plus comme un catalogue d'opinions bizarres tout à fait étrangères aux affaires de ce monde, nées par hasard dans la tête de quelques hommes, dans tel ou tel temps, et dans tel ou tel pays, mais comme une suite progressive de tentatives, faites pour résoudre les questions qui touchent de plus près aux intérêts de l'humanité, par tout ce qu'elle a produit de plus illustre.
  12. Coucou Chirona,

    Passage sur le forum et visite immédiate sur ton profil ... Plein de bisous et d'amicales pensées !

  13. En Q - Philippe Quinault (1635-1688) Né à Paris, le 3 juin 1635. Fils d'un boulanger, il fut le valet et le disciple de Tristan l'Hermite, valet de chambre du Roi (1661) qui le pensionna. é 18 ans, il écrivit les Rivales et les fit présenter par Tristan qui en assumait la paternité ; les comédiens ayant appris la vérité, refusèrent de payer le prix convenu et proposèrent au jeune auteur de le faire participer aux recettes ; c'est, dit-on, l'origine des droits d'auteur. Quinault écrivit des poésies sacrées et a laissé trente pièces de théâtre, comédies, tragédies, opéras ; il créa la tragédie lyrique ; son chef-d'¿uvre est une comédie, La Mère Coquette. Il faut citer parmi ses tragédies Askate ; mais il est surtout célèbre par ses « opéras », genre nouveau : Thésée, Alceste, Roland, etc.., que lui demanda le compositeur Lulli, et Armide, mise en musique deux fois par Lulli d'abord, puis par Glück. Enfin l'on ne peut omettre la collaboration de Quinault à Psyché, avec Corneille et Molière. Il fut reçu à l'Académie, en 1670, remplaçant Salomon de Virelade ; il fut l'un des six premiers académiciens admis aux spectacles de la cour ; il prononça, lors de la mort de Colbert, son éloge en vers, et harangua Louis XIV, en 1675 et en 1677, sur le résultat de ses campagnes. Il fut loué par Perrault et décrié par Boileau qui avait été son ami, et il fit partie de l'Académie des Inscriptions. « Quinault est un poète sans fond et sans art, mais d'un beau naturel, qui touche bien les tendresses amoureuses. » (Chapelain, 1662). « La Mère Coquette, pièce à la fois de caractère et d'intrigue, et même modèle d'intrigue ; elle est de 1664 ; c'est la première comédie où l'on ait peint ceux que l'on a appelés depuis les marquis ». (Voltaire). Mort le 26 novembre 1688. Extrait : PROSERPINE PROLOGUE Le theatre represente l' antre de la discorde, on y voit la paix enchaînée : la felicité, l' abondance, les jeux et les plaisirs y accompagnent la paix, et sont enchaînez comme elle. La Paix heros, dont la valeur estonne l' univers, ah ! Quand briserez-vous nos fers ? La discorde nous tient icy sous sa puissance ; la barbare se plaist à voir couler nos pleurs ; soyez touché de nos malheurs, vous estes dans nos maux nostre unique esperance ; heros, dont la valeur estonne l' univers, ah quand briserez-vous nos fers ! La suite de la paix repete ces deux derniers vers. La haine, la rage, les chagrins, la jalousie, le dépit, le desespoir, et toute la suite de la discorde, témoignent les douceurs qu' ils trouvent dans l' esclavage où ils ont reduit la paix. La Discorde soûpirez, triste paix, malheureuse captive, gemissez, et n' esperez-pas qu' un heros que j' engage en de nouveaux combats escoute vostre voix plaintive. Plus il moissonne de lauriers, plus j' offre de matiere à ses travaux guerriers. J' anime les vaincus d' une nouvelle audace ; j' oppose à la vive chaleur de son indomptable valeur mille fleuves profonds, cent montagnes de glace. La victoire empressée à conduire ses pas se prepare à voler aux plus lointains climas ; plus il la suit, plus il la trouve belle ; il oublie aisément pour elle la paix et ses plus doux appas. La Paix et sa suite. ô rigueurs inhumaines ! Faut-il ne voir jamais finir le triste cours de nos malheurs, et de nos peines ? La Discorde et sa suite. Vos plaintes seront vaines n' esperez jamais de secours. La Paix et sa suite. Quel tourment de languir toûjours sous de cruelles chaînes ! La Discorde et sa suite. Vos plaintes seront vaines n' esperez jamais de secours. On entend un bruit de trompettes et de tymbales. La Discorde ce bruit que la victoire en ces lieux fait entendre. M' avertit qu' elle y va descendre. Quel plaisir de luy faire voir mon ennemie au desespoir ! La victoire descend, elle est accompagnée d' un grand nombre de victoires, et de heros. La Victoire venez aimable paix, le vainqueur vous appelle, la victoire devient vostre guide fidelle ; venez dans un heureux sejour. Vous, discorde affreuse et cruelle, portez ses fers à vostre tour. La Victoire et sa suite. Venez, aimable paix, le vainqueur vous appelle. La suite de la victoire deschaîne la paix et les divinitez qui l' accompagnent, et enchaîne la discorde et sa suite. La Paix et sa suite. Ah ! Quel bon-heur charmant ! La Discorde et sa suite. Ah ! Quel affreux tourment ! La Discorde enchaînée. Orgueilleuse victoire, est-ce à toy d' entreprendre de mettre la discorde aux fers ? à quels honneurs sans moy peux-tu jamais pretendre ? La Victoire ah ! Qu' il est beau de rendre la paix à l' univers. La Discorde tes soins pour le vainqueur pouvoient plus loin s' estendre ? Que ne conduisois-tu le heros que tu sers, où cent lauriers nouveaux luy sont encore offerts ? La gloire au bout du monde auroit esté l' attendre. La Victoire ah ! Qu' il est beau de rendre la paix à l' univers. Apres avoir vaincu mille peuples divers, quand on ne voit plus rien qui puisse se deffendre, ah ! Qu' il est beau de rendre la paix à l' univers. La suite de la victoire et la suite de la paix, repetent ces derniers vers. La Discorde ô ! Cruel esclavage ! Je ne verray donc plus de sang et de carnage ? Ah ! Pour mon desespoir faut-il que le vainqueur ait triomphé de son courage ? Faut-il qu' il ne laisse à ma rage rien à devorer que mon coeur ? ô ! Cruel esclavage ! La suite de la discorde repete ce dernier vers. La Victoire au fond d' un gouffre plein d' horreur, que sous des fers pesants la discorde gemisse. Partagez son supplice vous qui partagez sa fureur. Et vous triste sejour, changez, que tout ressente le pouvoir plein d' appas de la paix triomphante. La discorde et sa suite s' abisment dans des gouffres qui s' ouvrent sous leurs pas, et l' affreuse retraite de la discorde se change en un palais agreable. La Paix et sa suite. Ah quel bonheur charmant ! La Discorde et sa suite en s' abismant. Ah ! Quel affreux tourment ! La Victoire et La Paix. Le vainqueur est comblé de gloire, on doit l' admirer à jamais : il s' est servy de la victoire pour faire triompher la paix. La suite de la victoire et la suite de la paix repetent ces quatre vers. La suite de la paix témoigne sa joye en dançant et en chantant. La felicité et l' abondance chantent ensemble. Il est temps que l' amour nous enchaîne, il sçait vaincre les plus fiers vainqueurs. Rendons-nous, la fuite est vaine, ce dieu charme tous les coeurs : il n' a point de bien sans peine, mais peut-on trop payer ses douceurs. Dans les fers qu' amour veut que l' on prenne, tout est doux jusqu' aux plus tristes pleurs. Rendons-nous, la fuite est vaine, ce dieu charme tous les coeurs, etc. La Paix on a quitté les armes. Voicy le temps heureux des plaisirs pleins de charmes, voicy le temps heureux des plaisirs et des jeux. On ne versera plus de larmes, tous les coeurs seront sans allarmes ; et si l' on craint encor des tourments rigoureux ce sera seulement dans l' empire amoureux. On a quitté les armes voicy le temps heureux des plaisirs pleins de charmes, voicy le temps heureux des plaisirs et des jeux. Le choeur repete ces derniers vers. La Felicité que l' amour est doux à suivre ! Quel plaisir de s' enflammer ! Un jeune coeur ne commence de vivre que du moment qu' il commence d' aimer. Malheureux qui se delivre d' un tourment qui sçait charmer. On reconnoist que l' on cesse de vivre en mesme temps que l' on cesse d' aimer. Le Choeur on a quitté les armes voicy le temps heureux des plaisirs pleins de charmes, voicy le temps heureux des plaisirs et des jeux.
  14. Visite de courtoisie tout de même, te priant de pardonner mes absences ... Bisous, à bientôt, éternelle enchanteresse ...

  15. Tu me visites, Je te visite ... Assez rigolo, non ... Assez stupéfait de l'ancienneté et de la fidélité au forum ... Bravo.

  16. Fiphi

    Poésie

    Le Baiser Vous souvenez-vous de votre premier baiser ? Avez-vous été angoissé, au moment de rencontrer, celui ou celle à qui vous le donneriez ? Je me souviens, après l'école, de mon premier baiser. Un rendez-vous obtenu grâce à l'entremise d'un confident. Nous nous sommes retrouvés dans une cage d'escalier, dans la pénombre et le silence, craignant qu'un intrus ne vienne le rompre. A présent intimes. Après des regards échangés entre nous, jeunes amoureux, je me souviens avoir fermé les yeux. J'ai senti ses lèvres contre les miennes. L'espace d'un instant, j'ai réalisé un voyage et ressenti de vives émotions. Je m'inquiétais de la méthode. C'était bien stupide. Mon c¿ur battait. Je me souviens, âme d'homme, d'une chose accomplie, une étape dans ma vie. J'étais rassuré et serein. J'ai laissé ma muse, lui ai promis de recommencer. Elle me le promettait. Je l'ai quitté sifflotant.
  17. Fiphi

    Poésie

    L'âme capricieuse Nous prenons le temps. Nous ne bouleversons rien de nos vies. Nous fuyons les désillusions. Nous nous accordons du rêve. Nous refusons de formuler des projets, une rencontre ¿ Nous nous abandonnons à des mots affectueux. Nous évoquons tendresse, amitié. Nous partageons des désirs, de sensualité. Nous ne nous abandonnons pas l'un à l'autre. Nous voudrions juste croiser nos regards, purs et innocents. J'ai le doux rêve, charnel, d'effleurer ta peau, sentir ton parfum, caresser ta chevelure, t'enlacer et t'embrasser, t'aimer comme mille feux ardents. J'ai le doux rêve d'explorer ton corps. Mes instincts l'emportent sur la raison. Pardonne-moi. Je ne voudrais te faire aucun mal. N'être la cause d'aucun tourment. Mais tout cela est du domaine du rêve. Je me demande si j'oserai accomplir ce que j'écris ¿ Je me demande même si c'est bien moi qui écris tout cela ¿ Malgré tout, et c'est bien là le caprice de l'âme, Je cherche à ouvrir les portes du futur. Que deviendrions-nous ensemble ? Qu'adviendra t-il ?
  18. Les violences conjugales peuvent être tout à fait ponctuelles ou habituelles... Cependant, je n'ai pas le sentiment de lire un texte sur une violence conjugale, plutôt sur un viol. Il existe entre époux ! Dans le cas qui nous est proposé, le viol est commis avec une extrème violence. Il serait plutôt celui d'un inconnu, déterminé à aller même au delà du viol, voire à tuer, après l'acte accompli. Sinon, pourquoi un tel acharnement à cogner la tête contre le sol ? Un fait de ce type, réalisé au sein du couple est plutôt rare, et serait ponctuel ! Les femmes libérées et plus indépendantes sont maintenant moins soumises. Elles font valoir leur droit, et n'hésitent plus à s'adresser à la justice, quoiqu'il en coûte. La loi les protège mieux que par le passé. Elles sont écoutées ...
  19. Un rapport avec Apollon et Daphné ?
  20. Y a t-il un rapport avec Jules César (IMPERATOR¿CAIVS¿IVLIVS¿CAESAR¿DIVVS) ? Sur le cycle arthurien, j'ai lu les livres de Jean Markale ... Je pense à César parce qu'il pensait que son titre d'empereur lui assurait une certaine immunité. Il était aussi persuadé d'être encore indispensable à Rome. En tous les cas, il ne croyait pas à une conjuration allant jusqu'à un assassinat collectif publique ...
  21. Bravo Chirona. J'ai lu effectivement un certain nombre de livres sur les chevaliers de la Table Ronde ... Mais c'est assez loin ... A toi, à présent ...
  22. Jean Dutourd, académicien ... J'en suis d'autant plus fier que peu l'ont lu ou le connaisse ... Extrait : SéANCE PUBLIQUE ANNUELLE le jeudi 5 décembre 1996 L'esprit de contradiction fondement de la vertu PRONONCé PAR M. Jean DUTOURD Directeur de la séance PARIS PALAIS DE L'INSTITUT essieurs, Michelle Maurois, fille de notre éminent et regretté confrère, avait eu dans son enfance une gouvernante anglaise qu'il appelait « Little Miss No » parce qu'à chaque fois qu'on voulait lui faire faire quelque chose, qu'on lui donnait un ordre ou un avis, elle répondait « Non » et prenait une petite figure têtue qui montrait bien qu'elle n'obéirait jamais à personne. C'est d'elle que je tiens cette anecdote ; elle me la raconta un jour que je lui reprochais en riant d'être systématiquement contredisante. Elle avait alors la soixantaine. « Vous voyez, ajouta-t-elle, que ce trait-là de mon caractère ne date pas d'hier ! » Je la félicitai d'avoir été ainsi fidèle à elle-même et d'avoir appliqué tout au long de sa vie, par instinct, la maxime du fabuleux Epicharme : « Souviens-toi de te méfier », que Mérimée avait, afin qu'elle fût toujours sous ses yeux, fait graver en grec sur une bague : μεμνάσο άπιστείν. En effet, ce que les gens nous poussent ordinairement à faire, l'ardeur et les cajoleries qu'ils déploient pour nous convaincre, la persuasion qu'ils mettent dans leurs arguments doivent nous avertir que c'est à leur avantage qu'il nous convient à travailler et non au nôtre, que leur souci n'est que de nous recruter, de nous embrigader dans une cause dont nous n'avons rien à faire et qu'ils se moquent bien que nous sortions échaudés de l'aventure. Dire non, a priori, par principe, sans raison particulière, est d'une excellente hygiène intellectuelle et surtout morale. C'est la protection des forts qui ont à décourager d'innombrables solliciteurs et la sauvegarde des faibles à qui l'on veut imposer des devoirs tantôt stériles tantôt contraires à l'honneur. Car on a beau être faible, être petit, démuni, sans allié, sans protection, on n'en a pas moins de l'honneur, tout autant que les grands vainqueurs de ce monde. Il serait même recommandé d'en avoir davantage, attendu qu'on peut tout perdre par des causes extérieures, être précipité des grandeurs dans la misère et l'impuissance, mais qu'il ne dépend que de nous, que de notre âme de ne pas sacrifier dans le naufrage notre seul bien inaliénable, à savoir le respect de soi. J'entends bien que l'honneur n'est pas une chose facile et qu'y être fidèle risque de conduire à toutes sortes de mésaventures, si ce n'est à la mort. Mais enfin il n'est pas si mal de mourir pour quelque chose comme cela. On pourrait quasiment dire que mourir pour conserver son honneur intact est le principe de la vertu. Nous voici un peu loin de « Little Miss No ». Mais pas si loin peut-être qu'il y paraît. Ne nous est-il pas souvent arrivé, au cours des vingt dernières années, de regretter de ne pas pouvoir donner ce surnom aux gens qui ont gouverné la France ? Une des raisons pour lesquelles le général de Gaulle, au bout du compte, a tant plu au peuple (car il lui plaisait, c'est indéniable, et il plaisait jusqu'aux braves militants communistes qui votaient quelquefois pour lui), c'est qu'il disait « non » sans se gêner, à tout ce qui lui semblait contraire à l'honneur du pays, et cela descendait jusque dans les plus petits détails. Il existait alors une bizarre confiance politique chez les Français, qui tenait au fait qu'ils avaient le sentiment qu'une sorte de monarque républicain, logeant faubourg Saint-Honoré, ne s'inquiétait pas de plaire ou de déplaire à quiconque et n'écoutait pour sa conduite que l'honneur ou l'intérêt national (mais ces deux choses-là n'en font qu'une quand il s'agit de l'état). Il suit de cela que la vertu d'un pays, comme celle d'un homme, commence par l'esprit de contradiction. On en fait l'expérience dès l'enfance. Dans une réunion de bambins, on voit aussitôt ceux qui acceptent le monde tel que les grandes personnes veulent qu'ils le voient, qui acquiescent à leurs descriptions et à leurs doctrines, les prennent à leur compte, les propagent ingénument. Mais dans cet agglomérat de petits moutons, il y a un ou deux récalcitrants, un ou deux incorruptibles qui, à cinq ans, à dix ans, préfèrent se fier à leur instinct, à la droiture de leur raisonnement, à leurs bons yeux, plutôt que de se laisser endoctriner par la société. Celle-ci ne tarde pas à se méfier d'eux; elle le leur montre par des punitions, des mépris, des sarcasmes et surtout un refus permanent de les prendre au sérieux, alors qu'ils sont en fait les seuls esprits sérieux de leur génération. La société est infaillible là-dessus, ou plutôt elle décèle dans les enfants qui n'acceptent pas sans critique ses maximes, des ennemis qu'il importe de combattre sans attendre, en qui il faut tuer, s'il se peut, le détestable esprit qui les habite avant qu'ils ne deviennent grands. Dans la suite de leurs jours, ces enfants continuent à se heurter durement à la vie. Pour eux, tout est plus laborieux, plus ardu, plus difficile à atteindre que pour leurs contemporains, devant qui le monde se couche comme un chien, à qui les carrières s'ouvrent toutes grandes, qui accumulent les dignités et les honneurs, tant on a envie de les récompenser d'être dociles. Beaumarchais a très bien exprimé cela dans le monologue de Figaro dont on pourrait dire qu'il est le manifeste des hommes supérieurs en proie à la vertu : « Il m'a fallu déployer plus de science et de calculs pour subsister seulement qu'on n'en a mis depuis cent ans à gouverner toutes les Espagnes... » Le duc de Saint-Simon avait déjà écrit cinquante ans plus tôt dans ses Mémoires qu'il n'avait jamais été attiré que par la vérité, jusqu'à la « chérir contre lui-même ». Ces deux témoignages sont précieux, entre autres parce qu'ils montrent que toute époque est inconfortable pour les gens qui préfèrent penser par eux-mêmes plutôt que de chanter avec le ch¿ur des conformistes. Saint-Simon vivait sous Louis XIV, Beaumarchais sous Louis XV et Louis XVI, époques qui nous paraissent, par comparaison avec la nôtre, des sommets d'intelligence, de bon sens, d'audace intellectuelle, de science artistique, et pourtant, tout protégés qu'ils étaient, l'un par sa pairie et son appartement à Versailles, l'autre par ses talents et son argent, la société ne les a pas ménagés. Voir la réalité telle qu'elle est, ne pouvoir s'empêcher de la décrire, est considéré comme un attentat contre l'ordre établi. Ordre tacite au demeurant, existant depuis le fond des temps, et défendu avec un constant succès par tous les pouvoirs, y compris ceux qui se proclament révolutionnaires. La grande affaire des hommes sur cette terre est d'y faire régner un certain mensonge ou, si l'on préfère, une certaine convention dont l'objet est de persuader les générations successives que le bien se trouve obligatoirement d'un côté et le mal de l'autre, qu'il n'y a pas de couleurs intermédiaires entre le noir et le blanc, et qu'il est indispensable, si l'on veut mériter « le beau nom d'homme » , de se ranger du côté du blanc, sans examen de conscience, pour la simple raison qu'il a été décrété blanc. La vertu commence avec l'esprit de contradiction. Elle apparaît vers l'âge de cinq ans, sinon plus tôt. Cette tournure de caractère n'est nullement de nature à apporter de la tranquillité de conscience à ceux qui en sont dotés. En effet, il arrive, et même assez fréquemment, que les idées que les grandes personnes s'ingénient à mettre dans la tête des enfants soient justes. Comment refuser une idée juste sous le seul prétexte qu'elle provient de gens dont on sait qu'ils ont globalement tort ? Toute la question est là, et c'est la raison pourquoi, à sept ans, huit ans, douze ans, vingt ans, quelque force intellectuelle que procure une révolte générale contre le monde, on est, en fin de compte, peu sûr de soi. On sait qu'on est devant une grande imposture, mais comme on est honnête, comme on a de la bonne foi, on a bien de la peine à ne pas prendre, quelquefois, le parti de l'ennemi, autrement dit, à ne pas se laisser entamer. Chez les enfants radicalement réfractaires, donc fondamentalement vertueux, qui opposent un non granitique à tout ce que l'on tente de leur inculquer, il y a comme un esprit politique précoce. Un homme convaincu du bien-fondé de ce qu'il pense doit être sourd à tout argument provenant du parti adverse, même s'il est incontestable et lumineux. Il doit critiquer aveuglément toutes ses actions, fussent-elles louables ou bénéfiques, les rejeter, les contrecarrer autant qu'il est possible. Le seul but d'un politique est de faire triompher sa doctrine, qui est son âme même, en ce qu'elle suppose une philosophie différente des diverses philosophies auxquelles on veut le convertir. Il sera bien temps, après la victoire, d'examiner s'il y avait du bon dans les doctrines antagonistes, et de les reprendre sans danger pour notre intégrité spirituelle. Voler une idée quand on est dans une position de force est tout autre chose que d'y acquiescer de bonne foi avant qu'on ait établi notre supériorité. C'est une prise de guerre et non pas une soumission à un puissant, c'est un tribut levé sur le vaincu et non un de ces dégoûtants mimétismes dont les vaincus, d'ordinaire, sont coutumiers avec leurs vainqueurs. Un des enseignements sibyllins qu'apportent les années est qu'une idée juste devient fausse à partir du moment où elle est adoptée par le plus grand nombre. Quand on est jeune, c'est-à-dire ligoté par la logique, il est difficile d'admettre une aussi scandaleuse métamorphose : ce qui a été vrai une fois pour une personne et qui lui valait des persécutions ou au moins des sarcasmes, ne peut pas cesser de l'être parce que des milliers ou des millions de personnes peu à peu acceptent cette vérité, s'y convertissent, la proclament, l'érigent en dogme. Et pourtant cela se passe de la sorte. Une idée juste est un trésor. L'homme qui possède ce trésor est riche ; mais si le trésor est partagé par une foule d'héritiers, chacun de ceux-ci n'a que quelques liards. Cela ne suffit pas à changer la vie, à faire d'un pauvre un prince. .... .... J'aime aussi Baudelaire dans le Spleen de paris , les Fleurs du Mal ... "La fausse monnaie" Comme nous nous éloignions du bureau de tabac, mon ami fit un soigneux triage de sa monnaie; dans la poche gauche de son gilet il glissa de petites pièces d'or; dans la droite, de petites pièces d'argent; dans la poche gauche de sa culotte, une masse de gros sols, et enfin, dans la droite, une pièce d'argent de deux francs qu'il avait particulièrement examinée. "Singulière et minutieuse répartition!" me dis-je en moi-même. Nous fîmes la rencontre d'un pauvre qui nous tendit sa casquette en tremblant. - Je ne connais rien de plus inquiétant que l'éloquence muette de ces yeux suppliants, qui contiennent à la fois, pour l'homme sensible qui sait y lire, tant d'humilité, tant de reproches. Il y trouve quelque chose approchant cette profondeur de sentiment compliqué, dans les yeux larmoyants des chiens qu'on fouette. L'offrande de mon ami fut beaucoup plus considérable que la mienne, et je lui dis: "Vous avez raison; après le plaisir d'être étonné, il n'en est pas de plus grand que celui de causer une surprise. - C'était la pièce fausse", me répondit-il tranquillement, comme pour se justifier de sa prodigalité. Mais dans mon misérable cerveau, toujours occupé à chercher midi à quatorze heures (de quelle fatigante faculté la nature m'a fait cadeau!), entra soudainement cette idée qu'une pareille conduite, de la part de mon ami, n'était excusable que par le désir de créer un événement dans la vie de ce pauvre diable, peut-être même de connaître les conséquences diverses, funestes ou autres, que peut engendrer une pièce fausse dans la main d'un mendiant. Ne pouvait-elle pas se multiplier en pièces vraies? ne pouvait-elle pas aussi le conduire en prison? Un cabaretier, un boulanger, par exemple, allait peut-être le faire arrêter comme faux-monnayeur ou comme propagateur de fausse monnaie. Tout aussi bien la pièce fausse serait peut-être, pour un pauvre petit spéculateur, le germe d'une richesse de quelques jours. Et ainsi ma fantaisie allait son train, prêtant des ailes à l'esprit de mon ami et tirant toutes les déductions possibles de toutes les hypothèses possibles. Mais celui-ci rompit brusquement ma rêverie en reprenant mes propres paroles: "Oui, vous avez raison; il n'est pas de plaisir plus doux que de surprendre un homme en lui donnant plus qu'il n'espère." Je le regardai dans le blanc des yeux, et je fus épouvanté de voir que ses yeux brillaient d'une incontestable candeur. Je vis alors clairement qu'il avait voulu faire à la fois la charité et une bonne affaire; gagner quarante sols et le coeur de Dieu; emporter le paradis économiquement; enfin attraper gratis un brevet d'homme charitable. Je lui aurais presque pardonné le désir de la criminelle jouissance dont je le supposais tout à l'heure capable; j'aurais trouvé curieux, singulier, qu'il s'amusât à compromettre les pauvres; mais je ne lui pardonnerai jamais l'ineptie de son calcul. On n'est jamais excusable d'être méchant, mais il y a quelque mérite à savoir qu'on l'est; et le plus irréparable des vices est de faire le mal par bêtise.
  23. Une petite pensée amicale, pour toi, Chirona, rayon de lumière dans ce monde ténébreux ...

  24. En G - Edmond et Jules de Goncourt. L'écriture artiste. Ils ont écrit des livres d'histoire, des romans, des études d'art. Edmond Huot de Goncourt, né à Nancy le 26 mai 1822 et mort à Champrosay (Essonne) le 16 juillet 1896, est un écrivain français, fondateur de l'Académie Goncourt. Une partie de son ¿uvre fut écrite en collaboration avec son frère, Jules de Goncourt. Les ouvrages des frères Goncourt appartiennent au courant du réalisme Issu d'une famille originaire de Goncourt en Haute-Marne, il étudia au lycée Condorcet. Il fut l'ami de Paul Gavarni, Gustave Flaubert, Alphonse Daudet, émile Zola. Eugène Carrière (1849-1906), présenté par Gustave Geffroy à Edmond de Goncourt, fréquenta le « Grenier » de ce dernier, où se réunissaient notamment Maurice Barrès, Alphonse et Léon Daudet, Gustave Geffroy, Roger Marx, Octave Mirbeau, Auguste Rodin et émile Zola. Carrière a laissé au moins sept portraits d'Edmond, qui lui rendait visite dans son atelier des Batignolles (Pontoise, musée Tavet-Delacour). Edmond de Goncourt est le fondateur de l'Académie Goncourt qui décerne chaque année le prix homonyme. Edmond de Goncourt est inhumé au cimetière de Montmartre à Paris. Extrait de "Germinie Lacerteux" :Je n'ai pas lu ; j'ai pris ce passage qui me plait ... Le plus beau passage se trouve à la fin du roman. Les narrateurs interpellent Paris, cette ville où règne le scientisme, cette ville de lumière et de beautés, mais qui doit sa gloire et son lustre au travail misérable des petites gens. Toute l'indignation naturaliste de Zola est déjà présente dans ces lignes magnifiques. é Paris! tu es le c¿ur du monde, tu es la grande ville humaine, la grande ville charitable et fraternelle! Tu as des douceurs d'esprit, de vieilles miséricordes de m¿urs, des spectacles qui font l'aumône! Le pauvre est ton citoyen comme le riche. Tes églises parlent de Jésus-Christ; tes lois parlent d'égalité; tes journaux parlent de progrès; tous tes gouvernements parlent du peuple; et voilà où tu jettes ceux qui meurent à te servir, ceux qui se tuent à créer ton luxe, ceux qui périssent du mal de tes industries, ceux qui ont sué leur vie travailler pour toi, à te donner ton bien-être, tes plaisirs, tes splendeurs, ceux qui ont fait ton animation, ton bruit, ceux qui ont mis la chaîne de leurs existences dans ta durée de capitale, ceux qui ont été la foule de tes rues et le peuple de ta grandeur! Chacun de tes cimetières a un pareil coin honteux, caché contre un bout de mur, où tu te dépêches de les enfouir, et où tu leur jettes la terre à pelletées si avares que l'on voit passer les pieds de leurs bières! On dirait que ta charité s'arrête à leur dernier soupir, que ton seul _gratis_ est le lit où l'on souffre, et que, passé l'hôpital, toi si énorme et si superbe, tu n'as plus de place pour ces gens-là! Tu les entasses, tu les presses, tu les mêles dans la mort, comme il y a cent ans, sous les draps de tes Hôtels-Dieu, tu les mêlais dans l'agonie! Encore hier, n'avais-tu pas seulement ce prêtre en faction pour jeter un peu d'eau bénite banale tout venant: pas la moindre prière! Cette décence même manquait: Dieu ne se dérangeait pas! Mais ce que ce prêtre bénit, c'est toujours la même chose: un trou où le sapin se cogne, où les morts ne sont pas chez eux! La corruption y est commune; personne n'a la sienne, chacun a celle de tous: c'est la promiscuité du ver! Dans le sol dévorant, un Montfaucon se hâte pour les Catacombes... Car les morts n'ont pas plus ici le temps que l'espace pour pourrir: on leur reprend la terre, avant que la terre n'ait fini! avant que leurs os n'aient une couleur et comme une ancienneté de pierre, avant que les années n'aient effacé sur eux un reste d'humanité et la mémoire d'un corps! Le déblai se fait, quand cette terre est encore eux, et qu'ils sont ce terreau humide où la bêche enfonce... La terre qu'on leur prête? Mais elle n'enferme pas seulement l'odeur de la mort! L'été, le vent qui passe sur cette voirie humaine peine enterrée, en emporte, sur la ville des vivants, le miasme impie. Aux jours brûlants d'août, les gardiens empêchent d'aller jusque-là: il y a des mouches qui ont le poison des charniers, des mouches charbonneuses et qui tuent!
  25. Protagoras de Platon ... Passionnant ...
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