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Dompteur de mots

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Tout ce qui a été posté par Dompteur de mots

  1. Mais qui parle donc de collectionner les proies ? Mon petit doigt me dit (et il a souvent raison) que Nietzsche était fort conscient que pour fonctionner, un couple doit être animé par une certaine tension. Un homme qui n'a plus à chasser sa femme s'en lasse, et une femme qui ne se fait plus chasser se lasse aussi. Le schéma prédateur-proie - qui soit dit en passant n'est pas utilisé au sens figuré, est donc fort bien compatible avec le modèle monogame. D'ailleurs, qu'est-ce que les tombeurs possèdent sinon le corps de ses proies, dans des stations éphémères ? Il est des chasses qui nous mènent beaucoup plus haut, et beaucoup plus loin. Et encore, n'est-ce pas pour le plaisir de courir après sa proie lui-même que l'on en vient finalement à chasser ? L'acte de chasser lui-même devient la source de la joie de toute l'affaire. C'est qu'on a l'impression parfois qu'on a jamais fini de se rendre jusqu'à l'autre. Et l'autre a parfois le chic de nous faire comprendre que l'on n'est pas exactement là où on croyait être. C'est une relation prédatoriale mutualiste: il s'agit de se dévorer à petites bouchées, sans menacer la survie de l'autre. On profite de la chair de l'autre, mais aussi de l'entraînement que permet la course à deux, sans compter les bénéfices supplémentaires: par exemple un bébé.
  2. Bien sûr que je vois le rapport: a) On les a confondus dans l'esprit populaire; b) Descartes est un philosophe et la philosophie requiert de la logique. Mais un esprit un tant soit peu expérimenté en matières philosophiques ne procédera jamais à cette association douteuse. L'adoration d'une divinité oui. Et c'est celle-là que vous évoquiez. Oh mais je ne mets pas Nietzsche au-dessus de tout. Je mets la réflexion au-dessus de tout, ce qui ma foi est fort approprié sur un forum de philosophie. Mon idée est que l'on ne réfléchit ici qu'à coups de préjugés. Et c'est une bonne idée. Je ne fais au fond que défendre l'intégrité du texte, sans compter l'intégrité de la logique elle-même ! :smile2:
  3. De la même façon qu'en justice pénale on peut être condamné pour négligence criminelle, je dirai que nos collègues ici, même s'ils n'ont probablement pas d'intentions malhonnêtes, n'en sont pas moins coupables de négligence intellectuelle. À ce titre, on peut à bon droit les qualifier de sophistes (du moins dans le contexte des cas particuliers que j'ai qualifiés de telle façon), tout en reconnaissant le caractère involontaire de ce crime. D'où ma peine assez clémente (remarquons que je n'ai pas usé d'insultes ni de grossièretés): des travaux de réflexion forcés.
  4. Il est exact d'affirmer que la plupart des psychiatres n'ont jamais eu d'état d'esprit psychotique. Pourtant, ils en connaissent un rayon sur la psychose et sont capables de traiter des patients qui ont de tels états.
  5. Joli sophisme, en l'occurrence par déformation. Nietzsche ne prétend pas parler au nom des femmes. Il parle des femmes, tout simplement. Et les femmes constituent certainement un sujet de connaissance autant que n'importe quel autre objet. La notion d'égalité renvoie à des paramètres précis. Par exemple, on pourra dire que deux citoyens français sont égaux en vertu des droits qui sont énoncés dans la constitution de ce pays. Mais on pourra aussi les dire inégaux en vertu de telle ou telle caractéristique, ou telle capacité particulière. Il est clair qu'aujourd'hui, en vertu des droits des personnes, les deux membres d'un couples sont égaux. Cela signifie-t-il pour autant qu'homme et femme vivent l'amour de la même façon ? Cela signifie-t-il que, bien en-dessous de la multitude des couches du vernis civilisateur, l'un ne puisse adopter une attitude prédatrice et l'autre de proie ? Est-il pour autant déshonorant d'être une proie en amour ? Car il ne s'agit pas de se faire dévorer, mais bien de se faire posséder, baiser, cajoler, ce qui ma foi est souvent souhaité. Qu'en est-il des hommes qui adoptent une attitude proie ? Comment juger de leur attitude ? Est-elle noble ? Nous inspire-t-elle l'admiration ou le dégoût ?
  6. Je n'ai nulle part laissé entendre que l'amour se réduisait à des coïts, encore moins qu'il ne pouvait y avoir d'attachement véritable entre les deux individus formant le couple, ni que l'enfant échoyait seulement à la mère. Je ne pense pas que Nietzsche ait laissé entendre de telles idées non plus. Encore cette erreur qui consiste à ramener tout l'aspect instinctivo-charnel de l'amour au sexe ! Ne voyez-vous donc pas que l'attachement dont vous parlez se tisse sur des racines qui ont une nature animale ? Que l'animalité a une partie prenante à l'attachement et à tout ce que vous ramenez au "cœur" ? Qu'il n'y a pas le corps dans son animalité d'un côté et le cœur de l'autre ? Que tout cela fonctionne en un tout organique ? Que par conséquent même l'attachement, même l'amour dans ce qu'il a de plus tendre puisse être guidé par des instincts dont la teneur est certes moins lisse que les tenants et aboutissants d'un roman arlequin ? Que cet aspect terrible, tragique, dur, fatal de l'amour ne lui enlève pas sa beauté, au contraire, mais qu'il ne le magnifie que davantage ? Qu'au fond il faut à quelque part détester secrètement la vie pour nier cet aspect de l'amour, sinon détester l'amour lui-même, pour lui préférer ce conte à l'eau de rose qu'est celui du cœur ? Ce sont des questions pertinentes, si pertinentes que la libellé même de la dernière question nous prouve que vous n’êtes pas du tout éclairée sur ces questions. L’amour n’est pas ce qui attache deux individus l’un à l’autre. Ou du moins, c’est une définition beaucoup trop large. Des individus peuvent être liés par bien d’autres choses que l’amour : l’intérêt par exemple, la haine, le hasard, la fraternité, le partage d’un sort commun, etc. Spinoza définit l’amour comme étant une joie liée à l’idée d’une cause extérieure. Ce qui est bien avec Spinoza, c’est que sous son apparente simplicité et inoffensivité, il se livre à une véritable entreprise de destruction massive des préjugés judéo-chrétiens et donne à l’égoïsme humain toute la place qui lui revient légitimement. La définition de l’amour de Spinoza est une définition très large qui englobe tous les types d’amour, incluant l’amour des objets. Jouer de la guitare m’apporte de la joie, et de cette joie j’ai l’idée de sa cause matérielle qui est ma guitare, donc j’aime ma guitare. Vivre avec cette femme m’apporte de la joie, et de cette joie j’ai l’idée de sa cause efficiente qui est cette femme, donc j’aime cette femme. Mais en disant cela, on a encore rien dit des modalités interpersonnelles qui anime les relations d’amour – ce qui précisément intéresse Nietzsche. Quant à l’idée d’abandon, je dirai que l’on peut fourrer sous ce vocable une foule de significations, ce que vous ne considérez pas. Par exemple, on peut affirmer que l’amoureux s’abandonne à son amour, voulant dire par là qu’il en jouit sans retenue, ce qui ne signifie pas le moins du monde que cette personne adopte vis-à-vis de la personne aimée une attitude d’abandon, entendu au sens de renonciation à la possession. Au contraire, il est fort possible que le premier abandon favorise le deuxième. Nietzsche ne parle pas d’un amour à sens unique. Ce qu’il affirme, c’est que l’homme et la femme aiment différemment, voilà tout. Qu’ils ne recherchent pas forcément la même chose dans l’amour et qu’ils ne le vivent pas de la même manière. Vous faites l’erreur typique de la plupart des âmes qui s’intéressent de loin à la philosophie : parce que la philosophie saisit le monde avec recul, avec distance, avec profondeur, qu’elle en extrait des maximes, des raisonnements, qu’elle écarte tout le suc des affects et des sentiments qui poussent l’homme à agir sans réfléchir, on taxe la philosophie d’être froide. Mais c’est une illusion. De la même manière que le lointain scintillement des étoiles nous donne l’impression qu’elles sont gelées, alors que ce sont évidemment d’effroyables boules de feu. De même, un philosophe, parce qu’il prend du recul pour réfléchir sur sa vie, ne devient pas pour autant une froide canaille – ou du moins on ne peut faire ce reproche à Nietzsche, qui était un être d’une passion dévorante. Une fois énoncée la maxime, aussi froide soit-elle, une fois élaguée les illusions et les choix douteux, le philosophe peut alors vivre conformément à ses principes, et il peut le faire avec passion, peut-être même une passion supérieure, puisqu’il en aimera sa vie d’autant plus. Ce pourrait être de la pitié. Ou mélangez-vous les deux ?
  7. Non. On parle aussi ici de troll et de logique. Le sophisme n'est pas la même chose que le trolling. Le trolling se dit d'un comportement qui vise volontairement à faire déraper la discussion, alors que le sophisme est involontaire. Quant à la "démarche cartésienne", je ne sais pas d'où vous tirez cela. Personne n'emploie une telle expression. D'ailleurs, l'idée de "démarche cartésienne" d'évoque pas du tout la même chose que la logique. La démarche cartésienne consiste en une philosophie précise liée à René Descartes, alors que la logique est une discipline générale de la pensée. Eh non ! Personne ne suggère que Nietzsche soit un être divin qu'il conviendrait de louer par des actes rituels et des prières. Il s'agit tout simplement de défendre la teneur d'un texte contre les élucubrations sophistiques d'esprits incompétents.
  8. Vous disiez "l'amour n'est pas de la guimauve", comme si quelqu'un avait affirmé que l'amour en général était de la guimauve alors que je disais seulement que votre vision de l'amour est de la guimauve. Évidemment, j'ai dit que c'était un quiproquo par pure politesse. Dans les faits, il s'agit d'un bon gros sophisme (par généralisation) de votre part. Vous auriez la naïveté de croire que l'aspect instinctivo-charnel de l'amour se réduit au sexe ? Et qu'est-ce que vous appelez le "coeur" au fait ? Une matrice de bon sentiments libre des démons du corps ? On peut déduire ce qu'untel entend sous un concept en analysant le contexte d'utilisation de ces concepts. Comme vous n'étudiez probablement pas ce que vous fourrez sous les concepts que vous employez, on peut penser que je vois plus clair que vous-même dans votre écriture. Je vous recommande donc de vous fier à moi. Non, c'est vrai. Après, il reste à appeler un taxi. Sophisme par ragoterie. J'aimerais ne pas avoir à vous prendre par la main à chaque coin de raisonnement. Je suis certain que vous voyez très bien que ce "je suis tout à toi" sera lancé par l'homme selon une toute autre attitude que le "prends-moi" de la femme. Ce sera plutôt un "je suis tout à toi" conquérant, qui veut en fait dire "viens t'abandonner dans mes griffes cocotte !" Évidemment, on peut jouer sur les mots et affirmer qu'autant l'homme que la femme sont abandonnés aux nécessités du couple, et de même que tous deux possèdent la présence de l'autre dans leur vie. Mais ça n'est pas de ça dont il est question ici. Cela est fascinant mais en l'occurrence, c'est aussi tout à fait inintéressant, entendu que votre point n'est pas défendu par des arguments. C'est un sophisme assez énorme ça. "Votre idée fait beaucoup de morts." J'aurais le goût de vous décerner un prix, ou du moins une récompense pour cette ineptie intellectuelle. On pourrait appeler ça un "Georges W. Bush Award" !
  9. Sophisme par réduction. Les lois de la sélection naturelle expliquent la façon dont les espèces évoluent, et expliquent que la reproduction en est un facteur déterminant. Mais en tant que tel, les hommes ne font pas l'amour pour obéir à ces lois. D'ailleurs, on ne peut dire qu'ils obéissent littéralement à ces lois. C'est plutôt qu'ils y sont soumis de facto. Il serait plus juste de dire qu'ils font l'amour pour le plaisir, pour faire des bébés, ou pour d'autres raisons farfelues dans certains cas (comme se rassurer sur son identité sexuelle).
  10. Excellent trait d'esprit ! En effet, au moment de vérité, l'homme doit voir clair sous le vernis civilisateur, et foncer sur sa proie !
  11. Tout d'abord, la possession dont Nietzsche parle et celle que vous évoquez ici sont des choses absolument équivoques: dire que "l'homme s'aperçoit qu'il est possédé lui aussi par la femme" n'évoque pas la même chose que "l'homme veut posséder la femme". Dans le premier cas, il s'agit d'un usage au figuré, voulant dire que l'homme est aux prises avec une condition qu'il n'est pas capable de surmonter, ce qui n'a pas de rapport avec la volonté de posséder. Par ailleurs, comme je l'ai dit plus haut, que l'homme affirme qu'il va s'abandonner à sa femme ne signifie pas le moins du monde qu'il a quitté sa volonté de posséder. Il a peut-être tout simplement déduit que pour parvenir à ses fins, il était nécessaire de jouer le jeu de la femme. S'il a réellement quitté cette volonté de posséder, alors c'est une mauviette, ce qui ne contredit pas le propos de Nietzsche. Ça aussi c'est de la grosse guimauve rose, bien grasse et bien épaisse. Que des mauvais sucres. Nous pourrions aussi dire qu'il s'agit d'un sophisme éhonté par généralisation à partir d'une foule de cas aux causes diverses. Du reste, les psychologues vous diront que les couples dégénèrent le plus souvent lorsque le désir n'y est plus. Je n'en doute pas. Mais il faut y penser avant dans ce cas. Chaque sophisme me heurte.
  12. Il y a quiproquo ici. Ce n'est pas l'amour qui est de la guimauve, mais bien votre vision de l'amour. Ce qui fait attardé (je ne prends pas pour acquis que c'est votre cas), c'est d'être incapable de reconnaître les aspects plus... charnels, instinctifs, les aspects plus terribles de l'amour, pour n'y voir que le lustre civilisateur. Un peu de la même façon que ceux qui se laissent duper par le jeu du discours politique et ferment les yeux sur toute la complexité sous-jacente à ce monde. Vous n'avez pas encore vraiment pénétré le problème, mais vous vous en approchez. Et vous ne l'avez pas pénétré parce que vous fourrez trop de connotations sous les idées de possession et d'abandon. Vous ne verrez pas par exemple un homme s'étendre sur un lit, faire des poses langoureuses, et lancer à sa femme: prends-moi ! Ce serait d'ailleurs laid, car contre-nature. (Je ne parlerai pas des rapports homosexuels, puisque je n'y connais rien).
  13. Donc, "je m'inhibe et j'attends d'avoir quelque chose de pertinent à écrire".
  14. Oui tu éclipses le propos et tu continues d'ailleurs de le faire en ne parlant justement pas du propos. Qui a besoin de se faire rappeler une telle banalité ?
  15. La rationalité peut fort bien se mettre, en des temps donnés, au service de la barbarie. Il ne suffit que de penser à la 2e Guerre Mondiale, où les génies de la physique se sont employés à mettre au point des armes de destruction toutes plus puissantes les unes que les autres. La rationalité fixe les moyens de parvenir à quelque chose qu'elle ne peut cependant pas déterminer. Ma foi, il y a beaucoup d'hommes qui présentent des traits de caractères exacerbés de manière chronique et qui entraînent de la souffrance dans leur entourage, mais qui ne sont pas fous pour autant. Par exemple, les hommes agressifs, violents, attardés, handicapés, anxieux, stupides, ridicules, etc. Un homme marié qui décide de se travestir, ou même de changer de sexe, devrait-il par exemple être considéré comme fou ? Non, car sa démarche, aussi singulière soit-elle, ne l'éjecte pas des normes sociales et ne l'empêche donc pas de mener sa vie et d'aspirer au bien-être de manière autonome. Il y a plusieurs types de génie. Les facultés cognitives du génie musical n'ont pas forcément à être toutes exacerbées. Il ne s'agit pas d'auto-suggestion. Un homme qui a des capacités supérieures au commun des mortels le sait en son fort intérieur. Moi par exemple, je sais que j'ai une aisance hors de l'ordinaire pour la philosophie (ce qui ne fait pas de moi un génie – ou suis-je trop humble pour le dire ?). C'est un sentiment de puissance tout à fait intuitif*. Ce n'est pas quelque chose que l'on construit. Ce que l'on construit, c'est son chemin au travers des structures sociales. Et encore, cela relève aussi d'un certain talent. Quoiqu'il y a bien des génies qui, dénués de talent pour le jeu social, n'en percent pas moins la culture de par la force de leur génie: pensons à un Kafka par exemple, ou à un Nietzsche, des hommes qui demeurèrent à peu près inconnus de leur vivant (cela dit, le cas de Nietzsche est particulier car l'homme était bien engagé dans les réseaux de la société: il avait un bon poste dans une bonne université. Seulement, son génie le portait à même se délester de ce talent pour la vie sociale afin de se consacrer au domaine de son génie). Évidemment, il y a ceci de paradoxal que se reconnaître une supériorité n’exclut pas que l’on soit quelqu’un qui doute beaucoup. J’irais même jusqu’à dire que cela en est une condition. Car l’homme qui pense avec profondeur le fait précisément parce qu’il doute beaucoup, parce que son angoisse est puissante (enfin, on peut penser que la cause ultime de cette profondeur est une sensibilité singulière qui plonge l’individu dans un monde plus complexe que ses semblables et qui l’oblige donc à penser davantage pour s’en faire une compréhension). Pour cette raison, il y a ceci d’étrange que chez ces hommes, la plus grande humilité d’esprit cohabite avec une certaine arrogance : l’humilité qui vient avec le doute et l’angoisse, avec le sentiment de n’être qu’une créature insignifiante dans l’univers qui doit par conséquent observer les choses avec circonspection et patience, et l’arrogance qui vient avec le sentiment d’avoir justement une conscience plus aigüe que la moyenne des ours pour ces choses. Souvent, l’homme profond doit justement faire preuve d’une humilité supplémentaire afin d’être accepté par les autres – ne serait-ce que pour que ceux-ci lui pardonnent sa profondeur (et ne le taxent pas d’être aveuglé et fermé d’esprit – ce qui arrive toujours dans l’histoire des génies). Ce redoublement d’humilité est évidemment d’un autre type, et relève davantage du jeu social que de la posture existentielle. * Je ne veux pas dire ici que « tout est donné » à la naissance. Au contraire, il y a nombre d’obstacles qui peuvent s’élever sur la route d’un homme, aussi prédisposé soit-il. Et ce qui aujourd’hui constitue la sève de sa confiance et de sa force pouvait fort bien n’être autrefois que la source de tous ses maux. C’est qu’un homme habité par une telle ferveur intérieure doit d’abord maîtriser cette bête endiablée qu’est son esprit.
  16. Oui parce qu'évidemment, la philosophie n'a qu'une seule définition de l'amour, laquelle est entérinée par tous les philosophes de l'histoire et de plus, ils affirment tous en choeur que rien d'autre ne peut être dit de l'amour que cette définition précise.
  17. La psychologie de l'auteur peut nous donner un angle de lecture supplémentaire mais elle devient impertinente si elle éclipse le propos. Or, c'est ce que tu fais: tu éclipses le propos sous prétexte que Nietzsche était ceci ou cela. D'ailleurs, on peut fort bien vivre de manière maladroite tout en raisonnant de manière adroite. On peut se sentir être le jouet de ses instincts tout en voyant clair quant à l'effet de ces mêmes instincts. Un autre bon exemple est celui de Heidegger, souvent balayé du revers de la main à cause de ses fréquentations nazies. Le fait qu'il ait eu ces fréquentations est sans aucun doute un fait utile à savoir, propre à susciter une méfiance justifiée, mais ce serait une erreur de fermer les yeux sur tout ce qu'a écrit Heidegger. *** Par ailleurs, il faut faire attention à la connotation que l'on donne à l'idée de possession (chez l'homme) et à l'idée d'abandon (chez la femme). On voit volontiers l'homme comme un prédateur carnassier prêt à enfoncer ses crocs dans la tendre chair de la femme, comme un être agressif, contrôlant, tyrannique. Or, la civilisation a le don de recouvrir les phénomènes instinctifs de costumes confondants. Ainsi, l'homme qui fait le pitre pour une femme, qui par exemple pose en s'attelant à une charrette conduite par cette femme, il est fort possible qu'il s'adonne à ce jeu afin de la posséder. Car il est des créatures qui ne se possèdent pas par les moyens de la virilité traditionnelle. Or, on peut supposer que c'était le cas de Lou Salomé, cette femme moderne et libre. Que la condition de sa possession requérait effectivement ce type de posture de la part de l'homme - peut-être parce qu'étant justement une femme forte, elle osait entretenir l'espoir que son homme puisse l'aimer comme aime une femme: avec abandon et foi. Mais il n'est pas exclu qu'en possédant, on se trouve libéré et qu'en désirant, on se trouve détaché. Que l'amour soit guidé par des principes généraux, cela n'exclut pas pour autant qu'il puisse se décliner en une multitude de variétés. De même que le rire a bien son principe général, mais qu'on peut tout aussi bien distinguer la façon de rire de chaque individu. Les Anciens ont surtout le chic de nous ramener à ce qu'il y a de fondamental dans les questions philosophiques. Il y a une naïveté, et une force innocente qui sont rafraîchissantes dans les écrits des philosophes de l'Antiquité. Qu'entends-tu par "progrès" ? L'amour selon Nietzsche n'est pas un choix moral, si on lit bien le texte, mais une simple fatalité liée à notre condition naturelle. Par ailleurs, qu'un homme ait un besoin si profond de posséder une femme et inversement pour la femme d'être possédé par cet homme, cela n'empêche pas que spirituellement, on puisse y voir l'effet d'une sorte de destin, et affirmer que cet amour relève d'une volonté transcendante, que cela était inscrit dans la destinée du monde, etc. Cela n'empêche pas non plus qu'un tel amour puisse être beau et grand, et qu'il manifeste de la sorte une sorte de pureté. Du reste, ce que tu racontes, c'est de la grosse guimauve rose ! :D Encore une grosse niaiserie: posséder peut se faire dans la liberté et le respect. On est pas obligé d'assomer et d'enchaîner pour posséder. On peut posséder à force de douceurs, par exemple. À vrai dire, tu la corrompts d'emblée avec ta guimauve, la pureté des sentiments. Nietzsche est devenu fou à la toute fin de sa vie, et il n'a alors plus écrit de philosophie. En outre, sa folie est, selon les thèses les plus accréditées, liée à une syphillis ou à une dégénérescence cérébrale liée à un trouble génétique.
  18. Pour répondre à la question que tu n'as pas posée, oui: ce topic est utile, et il sert essentiellement à exposer quelques notions de découpage logique. Voyons-le comme un entraînement intellectuel.
  19. Oui, on peut inclure dans le point 1 (la définition du genre) qu'il y a présence dans les deux cas de fortes composantes morales; que le jugement d'assentiment ne repose pas toujours sur une pure analyse logico-rationnelle ou sur l'analyse du ressenti individuel (encore que cela dépende des individus). La proposition "la neige est blanche" appartiendrait par exemple à un autre genre, car il ne peut y entrer de ce type de composante morale (car la couleur de la neige n'a pas de conséquences morales sur la vie collective).
  20. C'est vrai que tu es dur à suivre sur cette question Déjà. Certaines de tes tournures de phrase sont énigmatiques.
  21. 1. Il s'agit de la même démarche: dans les deux cas, il s'agit, face à une proposition donnée, d'accorder ou non son assentiment (avec les répercussions morales que cela peut avoir). De même qu'il y a une démarche commune dans le fait de penser au fromage dans mon réfrigérateur, et de penser à une licorne bleue: dans les deux cas, il s'agit de penser. 2. Il s'agit de démarches différentes car chacune des deux propositions porte sur un sujet spécifique, qui fait intervenir des raisonnements et des arguments spécifiques, et impliquent des sentiments spécifiques, des intervenants spécifiques, etc. De même pour le fromage et la licorne: les composantes affectives et rationnelles qui entrent dans ces pensées ne sont pas les mêmes. Même genre, espèce différente.
  22. Tu veux dire que notre psyché n'est pas intégralement liée aux réactions biochimiques de notre cerveau ? Qu'elle contient une partie autonome, telle que celle que les anciens appellaient "âme" ? L'amour peut fort bien être ramené au rang d'instrument du "génie de l'espèce", pour reprendre l'expression de Schopy, c'est-à-dire comme une simple forme parmi d'autres de l'instinct de reproduction. Et l'amour au sens large, l'amour du genre humain par exemple, comme une forme de l'instinct de conservation, qui est chez nous étroitement lié à la vie collective.
  23. Si tu lis bien mon intervention, je fais clairement la différence entre deux types de religiosité. Ou peut-être que je ne l'ai pas fait clairement. Du moins, je l'ai déjà fait en d'autres temps sur ce forum. Donc, une religiosité de recherche, et une religiosité d'obéissance. Une religiosité qui consiste pour l'homme dans une sorte de développement d'une relation avec tout ce qu'il contient de mystère, d'insondable, d'irréductiblement irrationnel, mais aussi d'aspiration à la grandeur d'une part, et d'autre part un simple besoin d'ériger une muraille qui sépare la conscience de tous ces aspects terribles de l'esprit humain - une muraille de dogmes moraux, de superstitions, etc. Personnellement, je me fous de la vérité. Mon dédain pour la religiosité d'obéissance vient de ce que je vois concrètement des personnes devenir sous son égide de pâles copies d'elles-mêmes d'une part (en fait, c'est un problème de pitié que j'ai à l'égard d'une amie). Et d'autre part parce que je considère que les formes religieuses actuelles ne sont plus du tout adaptées à la vie. Ce sont des institutions tout à fait désuètes. Je ne suis pas français !
  24. Si tu as bien lu mon intervention, je disais - certes de manière non-explicite - que la théorie de Thalès était une bonne théorie au regard du fait qu'elle a amené de nouveaux éléments quant à la façon dont les hommes peuvent concevoir la manière dont les choses de la nature sont structurées. Toutefois, au regard des connaissances scientifiques qui sont les nôtres aujourd'hui, il faut bien avouer qu'il s'agit d'une théorie erronée. Quant à ton commentaire sur le type d'eau dont Thalès parlait, je ne sais pas d'où proviennent tes informations, mais il me semble que les fragments les plus anciens dont nous disposons pour connaître la théorie de Thalès (Aristote, Diogène Laërce ?) ne nous permettent pas d'y aller de ce type de précision.
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