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La pathologie du sacrifice


existence

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A partir du moment où l'on considère qu'il y a une punition à appliquer, mais que le destinataire n'est pas défini, il se passe en ensemble de phénomènes qui mènent au sacrifice. La peur d'être la cible de la punition entraine le rejet de cette punition vers d'autres personnes, d'autres cibles, si possible qui ne peuvent pas nous renvoyer la punition. Les interactions sociales entrainent facilement une convergence vers un individu ou un groupe d'individu. C'est le phénomène de bouc émissaire. Comme la peur réduit la capacité à penser, rend stupide, on a vite fait de conclure que le bouc émissaire désigné est effectivement responsable de tous les maux, même si les arguments ou preuves avancés ne sont pas convaincants du tout. On confond alors le soulagement à ne pas être la cible avec la satisfaction d'avoir trouvé l'explication des problèmes. Ma foi pour l'humanité s'arrête là où la peur commence.

L'utilisation de différentes cibles de substitution apparait comme des phénomènes différents :

- redirection vers un individu : il s'agit de faire d'un individu le responsable de tout

- redirection vers un groupe d'individu : il s'agit par exemple de racisme

- redirection vers un objet : le désir de destruction

- redirection vers un animal : le sacrifice animal (par exemple l'Aïd-el-Kebir chez les musulmans) ou bien le désir de manger de la viande

- redirection vers un être imaginaire : par exemple la croyance en Jésus-Christ, ce qui est explicite (la messe est appelée le Saint-Sacrifice, Jésus est censé expier pour les péchés de l'humanité, etc.)

Notez que si le sacrifice animal est beaucoup utilisé, c'est qu'on considère que d'une certaine façon, les animaux souffrent comme nous, alors que cela peut paraitre être de l'insensibilité.

Remarquer la ressemblance entre l'Islam, où la fête la plus importante est l'Aïd el-Kebir, où l'on sacrifie un mouton, et le christianisme, qui célèbre le sacrifice de Jésus, appelé aussi l'agneau de Dieu. Ce sont des références aux sacrifices d'animaux dans la religion juive, notamment à l'épisode où Dieu demande à un père de sacrifier son propre enfant, et le substitue au dernier moment par un mouton.

Tout ceci est basé sur la notion de punition, d'où l'importance dans la religion de considérer que nous sommes tous des pécheurs, puisque c'est à partir de cette punition généralisée qu'on arrive au sacrifice imaginaire de Jésus ou bien à la fête du sacrifice musulmane. Il apparait clairement que ce principe punitif ne suit pas des lois bien précises quant au destinataire, puisqu'on peut visiblement substituer la cible. Chaque tradition religieuse affirmant une substitution différente.

Le seul vrai remède à cette pathologie du sacrifice est de remettre en question la notion de punition et de faute fondamentale.

Le principe de péché originel n'est pas un point métaphysique anodin mais bien la source d'un ensemble de comportement religieux : la crainte et la soumission, les actions obligatoires pour obtenir la rédemption, c'est-à-dire de ne pas être puni. Les règles et coutumes religieuses se basent très précisément sur la peur du sacrifice humain, menace explicitée par la notion d'Enfer (et de Paradis pour ceux qui ont été épargnés). C'est-à-dire que le pardon religieux est en fait la substitution de la cible de la punition. Ce n'est donc pas un véritable pardon. Le christianisme dit : soit vous acceptez Jésus comme votre sauveur, et c'est lui qui prendra pour vous, ou bien vous prendrez sur vous, c'est-à-dire que vous irez en Enfer. C'est le principe du poison et du remède en même temps : on vous fait comprendre que vous êtes irrémédiablement punissable, et on vous dit qu'il n'y a qu'un seul bouclier pour ne pas être puni qui est l'obéissance à des normes religieuses (normes de comportement et/ou normes de pensée).

Un des pire péché selon le christianisme est la remise en question du Saint-Esprit. En d'autres termes, si un croyant vient vers vous, vous pouvez lui dire que vous ne croyez pas en Dieu, que vous ne croyez pas en Jésus, mais vous ne pouvez pas lui dire que vous ne croyez pas au Saint-Esprit, parce qu'alors le croyant pensera que vous avez pris votre billet pour l'Enfer. Notez que si vous pouvez lui dire, au prix d'être considéré dans ses yeux comme une future victime de la punition divine. Plus précisément, le Saint-Esprit est la motivation religieuse des croyants. Pour un croyant, cette interdiction de questionner cette motivation est une façon de l'empêcher de se demander : "Mais au fait, ce que je suis en train de faire et de penser du fait de mon conditionnement religieux, est-ce que cela ne serait pas complètement absurde ?"

Le rempart qui protège la pathologie du sacrifice, c'est l'interdiction de penser, l'interdiction de questionner ce principe de faute universelle et irrémédiable.

2 Commentaires


Commentaires recommandés

Si j'ai bien saisi, tu appelles "pathologie du sacrifice" le fait de penser que Jésus s'est sacrifié pour nous, et une sorte de conséquence inéluctable issue du pêché originel?

Ce que je trouve curieux, c'est le terme de pathologie, comme si croire en cela, c'est être malade. Ou alors, c'est un effet de style, je ne sais pas. Je crois que j'ai pas tout saisi parfaitement.

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Ben ce qui est pathologique, c'est l'envahissement de toute la vie psychique par le sacrifice. Pas spécifiquement de croire en Jésus. Si on se contente de manger des hosties, cela n'a pas de conséquences. Ou bien égorger un mouton une fois par an, pas trop non plus (à part pour le mouton en question qui ne passe pas un très bon moment).

Croire qu'un homme ou une femme a dit de belles paroles ou avoir des théories surnaturelles autour de personnes ou d'objets, ce n'est pas la pathologie du sacrifice. Alors si quelqu'un croit en l'existence de Jésus, en soi, ce n'est pas le sujet. Si il a besoin d'un Jésus sacrifié pour se sentir bien, là par contre, c'est pathologique dans ce sens-là. Comme dit, manger Jésus n'a pas de conséquences puisqu'en fait ce sont des hosties et du vin, alors c'est plutôt une pirouette. Tant que les chrétiens en restent là, il restent de fait dans la légalité et le respect élémentaire de la vie d'autrui, quand bien même ils se croient cannibales puisqu'ils croient qu'ils mangent un être humain appelé Jésus.

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