La routine
Il est trop tôt.
Déjà ce cri strident retentit, toujours ponctuel mais n'arrivant jamais au bon moment. Elle reste là, étendue, n'osant ouvrir les yeux, de peur de réaliser qu'un nouveau jour commence, qu'elle doit abandonner ce doux rêve teinté de rose orangé, et revenir à la réalité. Enroulée dans la chaleur maternelle de sa couette moelleuse, elle s'éveille lentement, voulant à tout prix savourer cet instant, cet état de conscience, perdue entre deux mondes. Le son se fait de plus en plus insistant, presque cruel, devinant peut être son hésitation, il la harcèle, se répétant encore et encore. Elle décide enfin de se lever et d'éteindre son réveil. La lumière lui brûle les yeux.
Juste une minute, le temps d'ingurgiter un café tiède. Elle jette un oeil à la pendule du salon, l'aiguille poursuivait son chemin, imperturbable. Elle se prépare en hâte puis sort.
Aujourd'hui est un jour comme les autres, elle déambule dans les rues qu'elle connait par coeur, la démarche mécanique et le regard dans le vague, elle se dirige vers son lieu de travail. Là où elle passera la journée à rêvasser ou à regarder du haut de la fenêtre les allers et venues des passants, ces fourmis toujours pressées. C'est drôle comme le temps parait suspendu, dans ces moments, les autres continuent leur route, et elle est là, assise.
Elle est en retard.
Elle ne s'inquiète pourtant pas, elle a l'habitude. Il fait déjà beau et chaud, pour une fois les matinaux sourient, cela lui aurait probablement remonté le moral, si seulement elle avait pris la peine de sortir de sa bulle, mais elle ne l'a même pas remarqué. Elle traverse la rue sans même vérifier qu'aucune voiture n'arrive.
Elle aurait dû....
Le crissement suraigu des pneus sur l'asphalte la réveille enfin, les passants se retournent. La violence du choc la fait valser comme une vulgaire poupée de chiffon, cette douleur lanscinante qui l'envahit, commes des centaines de lames la lacérant de l'interieur.
Elle ne trouve pas la force de crier. Un attroupement se forme, profitant du macabre spectacle. Ce voile brumeux revient se poser sur ses yeux, la plongeant dans cette inconscience qu'elle trouve si apaisante. Elle reste là allongée, ne luttant même pas pour ouvrir les yeux, pendant que les passants s'activent enfin. La trotteuse de sa montre brisée, d'abord hésitante repart de plus belle. Elle a froid. Le bruit ambiant s'atténue, la lumière se fait plus faible. Elle s'enfonce à jamais dans ce sommeil sans rêves.
Il est trop tard.
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