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La langue d'oc

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Blaquière

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Membre, 76ans Posté(e)
Blaquière Membre 18 866 messages
Maitre des forums‚ 76ans‚
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Hier je pensais qu'il faudrait ouvrir ce sujet... Et là ds Philo, sur la réincarnation, Prométhée-Hades a parlé des troubadours...

Je remets donc ce que je disais et un peu plus pour ne pas m'enliser là-bas dans un hors sujet!...

Il y aurait tant à dire sur les troubadours (en premier)  au sujet de la langue d'oc...

Pour moi, la musique, surtout celle des troubadours, n'est pas une mise en bouche, ou une musique de fond. Elle vaut pour elle-même. C'est de la musique. Et on n'est pas obligé d'interpréter avec un chapeau pointu ou à plume... J'y avance à tout petits pas.

C'est la seule que j'ai retrouvé sur l'ordi, là : De Marcabrun : "dirai vos senes doptansa". C'est pas mon préféré, Marcabrun, mais il a de l'énergie!...

Les paroles de mémoire (y'aura plein de fautes!) c'est

"dirai vos senes doptansa...........Je vous dirai sans hésitation

d'aquest vers la comensansa......le début de ce poème

li mots fan de ver semblansa :....Les mots ressemblent bien à la vérité

Escotatz !.......................................Écoutez !

Qui vas proessa balansa..............Celui qui (simplement) hésite sur le chemin de la vertu

Semblansa fa.................................Ressemble (déjà)

De malvatz .....................................A un mauvais (ou un méchant)

 

Et la musique comme je la comprends ou devine  (en espérant que ça passe ?:

1111RAI.MID.mp3

ça passe ! Mais la vache, c'est fort ! baissez le son !

Je continue donc puisque je ne suis plus hors sujet, ici !

 Marcabrun, c'est un des premiers troubadours, et déjà, c'est un anti-troubadour ! si les troubadours, c'est bien connu, chantent l'amour, lui, le décrie !

en témoigne le second couplet du chant du dessus :

 

Amor es com' la beluja.(1).................Amour est comme l'étincelle

Que cov'al fuec en la sueya................Qui couve dans le feu sous la suie

Art lo fust et la festuja........................Il brûle poutres et brindilles

Escotatz !...............................................Ecoutez !

E non saup vas qual part fuja............Et il ne sait pas vers où il s'enfuit

Cel que del fuec..................................Celui qui du feu

Es gastat !..........................................'Est mordu (atteint, gâté)

 

(1) on dirait plutôt "beluga", (béluque), aujourd'hui pour étincelle...

 

Je mettrai le dernier couplet qui à mon avis est assez étonnant, un peu plus tard...

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Membre, Le prendre au sérieux, nuit gravement à la santé, Posté(e)
azad2B Membre 5 932 messages
Le prendre au sérieux, nuit gravement à la santé,
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Super la musique !

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Invité
Invités, Posté(e)
Invité
Invité Invités 0 message
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Difficile de trouver des mrceaux sur le net .  :( 

 

L'initiative de ce mouvement poétique et musical prend sa source dans le midi de la France. Les premiers à s'engager dans cette voie sont les « trobadors » de Provence, puis les pays de langue d'oc (au sud de la Loire entre la mer, les Alpes et les Pyrénées). Les trouvères ou poètes-musiciens du nord continuent l'œuvre commencée par les troubadours. Cet art particulièrement florissant au XII e et XIIIe siècle, dont nous avons conservé des manuscrits, révèle environ deux cents chansons de troubadours et près de deux mille chants de trouvères (le chansonnier de st-Germain, le chansonnier du Roy et le chansonnier d'Arras).

Ces poètes des vers et des sons, inventeurs de forme nouvelles toujours écrites avec le plus grand soin, ''soupirent'' après leur dame, rendent hommage à leurs suzerains, chantent leurs terres natales ou proclament la gloire de Dieu, soit dans la langue du pays soit en latin. Ils s'accompagnent d'un instrument à corde pincée la « rote », (modifié dès le XI e siècle par le jeu avec archet, la viole) qui double la mélodie et que l'on trouve représenté sur les vitraux des cathédrales.

 

Source https://www.fun-mooc.fr/courses/bordeauxmontaigne/07002S02/session02/about

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Membre, 76ans Posté(e)
Blaquière Membre 18 866 messages
Maitre des forums‚ 76ans‚
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Il y a 2 heures, azad2B a dit :

Super la musique !

Merci ! Ça me fait plaisir ! Qu'est-ce que j'ai pu les tourner dans tous les sens les notes !

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Membre, 76ans Posté(e)
Blaquière Membre 18 866 messages
Maitre des forums‚ 76ans‚
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Donc le dernier couplet de Marcabrun. Il y en avait plein d'autres, mais je me contentais de chanter ces trois. Quand on n'est pas habitué à une musique c'est vite lassant, j'essayais de rester agréable.

Les troubadours, c'est quoi ? C'est une renaissance ! Une tentative pour sortir de l'emprise de la religion qui était (du point de vue culturel et intellectuel) une chape de plomb. Parce que les troubadours osaient chanter l'amour humain, celui de la femme (ou autre!), l'amour charnel, physique ou romantique (avant la lettre) mais humain.

Marcabrun, lui se veut anti troubadour, car pour lui, seul l'amour pour Dieu est digne d'être chanté...

Lee dernier couplet, donc (toujours de mémoire, c'est de l'occitan classique, il suffit de comprendre avec le français en face.)

 

Marcabrun, filh Marcabruna..........................Marcabrun fils de Marcabrune

Fo engendrat en tau luna.................................Fut engendré sous un telle lune

Qu'el saup d'amor cum degruna...................Qu'il sait bien comment l'amour s'égraine

Escotatz !..............................................................Écoutez !

Que anc non amet neguna............................. Car Jamais il n'en aima aucune

Ni d'autra non fo amat.....................................Ni d'aucune ne fut aimé !

 

Déjà, il se dit fils de sa mère... Et on peut imaginer une pauvre femme misérable, voire abandonnée... Et pourquoi pas victime de l'Amour?...

Mais surtout, dans son dernier vers, il est difficile de ne pas sentir un peu comme un regret de n'avoir été aimé d'aucune, même s'il semble s'en vanter...

Sa "vida" dit qu'il était redouté pour sa "mauvaise langue" ! C'était un teigneux, Marcabrun !

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Membre, 76ans Posté(e)
Blaquière Membre 18 866 messages
Maitre des forums‚ 76ans‚
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J'ai retrouvé une autre musique !

C'est toute une histoire.... "Calenda maia" (calendes de mai)

C'est de Raimbaut de Vacairas. La tradition ou la légende dit qu'il a improvisé les paroles sur la musique d'un joueur de vielle qui jouait dans la cour du château...

Si c'est vraiment une improvisation, chapeau ! il fait même rimer le milieu des vers !

 

Calenda maia ni fuelh de faia.........................Calende de mai, ni feuilles de hêtre

Ni chant d'aucel ni flor de glaia.....................Ni chant d'oiseau ni fleur de glaïeul

Non es que 'm plaia..........................................Ne me plaisent pas

Pro Domna gaia................................................Noble Dame et joyeuse

Tro qu'un isnel messagier n'aia.....................Avant que je ne reçoive un rapide messager

Del vostre bel cors que 'm retraia...............De votre beau corps qui m'esquisse

Plazer novel qu'amor m'atraia......................Les plaisirs nouveaux qu'Amour m'apporte

E jaia..................................................................Et la joie

E m' traia..........................................................Et me porte

Vas vos Domna veraia.....................................Vers vous, Dame vraie

E chaia...............................................................Et qu'il s'effondre (tombe)

De plaia.............................................................Blessé (de plaies)

L'gelos ans que 'm n'estraia.........................Le jaloux avant que je ne m'en aille

 

C'est une estampie, genre bourrée très plouc, où l'on tape des pieds par terre : la musique je l'avais rythmée  mise au propre. L'"estampida" c'est une danse "paysanne" :

3 Calenda maia.simple mid.mp3

Mais j'ai passé la musique à mon voisin, Fournier, violoncelliste (musicien professionnel) puisqu'on devait faire un concert ensemble. Il m'a dit c'est bien, mais c'est simple ! (Et l'accompagnement c'était 3 accords, Fa, do, sol !) ça fait campagne ! Vous voulez pas que je fasse une partie un peu mieux pour le violoncelle ? "Un peu que je veux"  je lui ai dit, il est revenu une heure après avec ça :

3 Calenda maia Violoncelle.mid.mp3

Punaise : on peut suivre le thème à la flûte et distinguer le violoncelle qui s'envole et fait des arabesques sur la musique ! J'adore ses idées. On l'a donc joué en introduction puis après on a enchaîné sur la bourrée ! Il m'avait mis des accords de l'autre monde pour l'accompagnement ! des augmentés, des neuvièmes... ça changeait toutes les trois notes ! des septièmes bâtardes ! Et tout cadrait parfaitement !

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tison2feu Membre 3 032 messages
Forumeur alchimiste ‚
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Le 26/08/2018 à 09:15, Blaquière a dit :

Pour moi, la musique, surtout celle des troubadours, n'est pas une mise en bouche, ou une musique de fond. Elle vaut pour elle-même. C'est de la musique. 

J'adore cette réflexion, ayant toujours dissocié la musique des paroles, par amour pour les seuls sons harmonieux et mélodieux. Les paroles m'empêchent d'apprécier la musique ! 

 

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Membre, 76ans Posté(e)
Blaquière Membre 18 866 messages
Maitre des forums‚ 76ans‚
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Il y a 3 heures, tison2feu a dit :

J'adore cette réflexion, ayant toujours dissocié la musique des paroles, par amour pour les seuls sons harmonieux et mélodieux. Les paroles m'empêchent d'apprécier la musique ! 

 

Et dans l'autre sens Victor Hugo, (je crois) disait "j'interdis à quiconque de déposer de la musique le long de mes vers" ou un truc du genre. Brassens en a fait quelques unes malgré "l'interdiction" (la légende de la nonne, Gastibeelza) que je trouve particulièrement réussies.

Person, c'est en essayant de mettre des paroles de troubadours en musique (avant d'avoir accès aux vraies musiques) que j'ai compris ce que c'était qu de chanter.... (le fait de faire vibrer la voix sur des sons)

C'était en particulier d'Arnaut Daniel le "Quand chai la fueilha"... Mon idée était que la musique doit sortir du texte d'elle-même en fonction des sonorités(!) ce qui est faux ! Mais les sonorités peuvent inspirer à chacun une certaine musique... Les textes d'Arnaut Daniel sont époustouflants comme sonorités... On y trouve une évolution tout au long d'un vers et même de plusieurs vers, de... l'ouverture de la bouche, par exemple !

"a, a, a, èï, a"  Pour la feuille du dessus... et ces évolutions sont partout, ponctuées par les consonnes... "Dels auçour èntrecim"... je reprends :

Quand chai la fuelha
Dels auçors entrecims
E’l freg s’erguelha
Dont seca’l vais e’l vims

On pourrait aussi noter les "D" "Del" et "Dont" qui se répondent et le "f" de "fueilha" et "freg" qui s'éfiloche dans les "v" de "vais " et "vim".....

Bref, C'est trop beau ! Quand on le dit ça fait plaisir dans la bouche !

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Membre, 76ans Posté(e)
Blaquière Membre 18 866 messages
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Je pense à un truc...

De même qu'en français, langue d'oil, on ne dit pas "oil" mais "oui",

en Occitan (en tout cas en provençal, c'est sûr), on ne dit pas "ok", mais "o" !   (un "o" ouvert comme dans "or" ou "os".)

s'il y en a qui prononcent encore "oc" en faisant entendre le "c", ce serait intéressant....Je l'ai retrouvé bien écrit "oc" dans des textes du XVIème. Il devaient certainement le prononcer....

............

Dans le texte de Marcabrun "ans que m' n'estraia" (avant que je vous quitte ou m'en aille)....

Le sens du verbe "estraiar" a un peu changer qui signifierait plutôt "éparpiller" maintenant. ça donne un accent amusant :mais plein de sens  "quand je vous quitte, je m'éparpille" !

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tison2feu Membre 3 032 messages
Forumeur alchimiste ‚
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Il y a 5 heures, Blaquière a dit :

Je pense à un truc...

De même qu'en français, langue d'oil, on ne dit pas "oil" mais "oui",

en Occitan (en tout cas en provençal, c'est sûr), on ne dit pas "ok", mais "o" !   (un "o" ouvert comme dans "or" ou "os".)

s'il y en a qui prononcent encore "oc" en faisant entendre le "c", ce serait intéressant....Je l'ai retrouvé bien écrit "oc" dans des textes du XVIème. Il devaient certainement le prononcer....

............

Dans le texte de Marcabrun "ans que m' n'estraia" (avant que je vous quitte ou m'en aille)....

Le sens du verbe "estraiar" a un peu changer qui signifierait plutôt "éparpiller" maintenant. ça donne un accent amusant :mais plein de sens  "quand je vous quitte, je m'éparpille" !

Oui, cela serait passionnant de connaître l'histoire de la langue provençale, l'étude de la phonétique historique, c'est-à-dire l'évolution du provençal à partir du latin vulgaire (comme cela est fait pour la langue française avec une extrême précision). L'étude étymologique du provençal permettrait en outre de mettre en évidence l'existence de mots provençaux qui, eux, ne sont pas d'origine latine, et remontent à la nuit des temps (que l'on peut recenser dans la toponymie). 

OC vient du latin HOC "cela". "C'est cela" a dû très vite signifier "oui". Mais étudier l'écrit ne permet pas toujours d'analyser l'oral. Cela serait intéressant, comme tu le signales, de savoir quand et pourquoi le son "k" en fin du mot "oc" a disparu, etc. Il va falloir déjouer les pièges de l'écrit.

Par exemple, les premiers textes provençaux ayant pris la forme de poèmes, c'est une aubaine pour le phonéticien de pouvoir se livrer à une étude détaillée des syllabes et surtout des rimes. Cela permet d'observer, au fil des siècles, l'évolution de la prononciation de certaines voyelles ou consonnes, même si ce procédé a ses limites. Les essais de codification de la langue au XIIe et XIIIe s. sont également des témoignages inestimables (Las razos de trobar, Regles de trobarDonat proensal) ; au XIVe s., le Leys d'amor dont les règles concernent pas seulement l'orthographe mais aussi la phonétique).

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tison2feu Membre 3 032 messages
Forumeur alchimiste ‚
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Il y a 23 heures, Blaquière a dit :

Je pense à un truc...

De même qu'en français, langue d'oil, on ne dit pas "oil" mais "oui",

en Occitan (en tout cas en provençal, c'est sûr), on ne dit pas "ok", mais "o" !   (un "o" ouvert comme dans "or" ou "os".)

s'il y en a qui prononcent encore "oc" en faisant entendre le "c", ce serait intéressant....Je l'ai retrouvé bien écrit "oc" dans des textes du XVIème. Il devaient certainement le prononcer....

 

En fait, la chute des consonnes finales est une caractéristique du provençal, à la différence du languedocien qui est une langue beaucoup plus conservatrice. Ainsi, en provençal : fo (Latin FOCUS, "feu"), jo (Latin JOCUS, "jeu"), (Lat BECCUS, d'origine gauloise, "bec"). Donc le son "k" de oc ne doit plus être prononcé en provençal depuis longtemps.

En parcourant le site "Lexilogos" et son abondante bibliographie consacrée aux dictionnaires et grammaires du provençal, j'ai découvert le Dictionnaire Provençal-Français (1846), en trois volumes, par Simon-Jude Honnorat (né à Allos). Par chance, les étymologies latines y sont mentionnées, ouah !, et on peut donc s'en servir comme dictionnaire étymologique. De plus, la plupart des mots sont suivis de leur prononciation figurant entre parenthèses, ce qui est aussi très appréciable. La traduction du mot "oc" est accompagnée d'une précision très intéressante : "Oc = Oui, en répondant à une personne que l'on tutoie ; autrement on dit ou oui ". Je serais curieux de savoir si cet usage sur le tutoiement, vieux d'il y a près de deux cents ans, est toujours en vigueur chez toi ?

https://books.google.fr/books?id=2nkNAAAAQAAJ&printsec=frontcover#v=onepage&q=oc&f=false

https://www.lexilogos.com/provencal_dictionnaire.htm

Rajout : Tout s'éclaire si l'on se se reporte au mot oi, dans le dictionnaire de S.-J. Honnorat, où il est précisé que l'emploi de ce mot servant à marquer le vouvoiement est, selon toute vraisemblance, moderne (emprunté au français ou dérivé de oïl) et utilisé par des "gens distingués" (c. à dire des provençaux qui connaissaient également le français et l'emploi de oïl !). Le mot oc étant bien plus ancien.

A noter que le mot oïl a été formé sur le pronom latin ILLE qui marque l'éloignement, à la différence de oc, formé sur le latin HOC qui, lui, marque la proximité ! Serait-ce à dire que les gens de langues d'oil ont opté pour un "oui" plus distant et respectueux, et les gens de langues d'oc pour un "oui" plus intime et familier ?

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Membre, 76ans Posté(e)
Blaquière Membre 18 866 messages
Maitre des forums‚ 76ans‚
Posté(e)
Il y a 2 heures, tison2feu a dit :

En fait, la chute des consonnes finales est une caractéristique du provençal, à la différence du languedocien qui est une langue beaucoup plus conservatrice. Ainsi, en provençal : fo (Latin FOCUS, "feu"), jo (Latin JOCUS, "jeu"), (Lat BECCUS, d'origine gauloise, "bec"). Donc le son "k" de oc ne doit plus être prononcé en provençal depuis longtemps.

En parcourant le site "Lexilogos" et son abondante bibliographie consacrée aux dictionnaires et grammaires du provençal, j'ai découvert le Dictionnaire Provençal-Français (1846), en trois volumes, par Simon-Jude Honnorat (né à Allos). Par chance, les étymologies latines y sont mentionnées, ouah !, et on peut donc s'en servir comme dictionnaire étymologique. De plus, la plupart des mots sont suivis de leur prononciation figurant entre parenthèses, ce qui est aussi très appréciable. La traduction du mot "oc" est accompagnée d'une précision très intéressante : "Oc = Oui, en répondant à une personne que l'on tutoie ; autrement on dit ou oui ". Je serais curieux de savoir si cet usage sur le tutoiement, vieux d'il y a près de deux cents ans, est toujours en vigueur chez toi ?

https://books.google.fr/books?id=2nkNAAAAQAAJ&printsec=frontcover#v=onepage&q=oc&f=false

https://www.lexilogos.com/provencal_dictionnaire.htm

Rajout : Tout s'éclaire si l'on se se reporte au mot oi, dans le dictionnaire de S.-J. Honnorat, où il est précisé que l'emploi de ce mot servant à marquer le vouvoiement est, selon toute vraisemblance, moderne (emprunté au français ou dérivé de oïl) et utilisé par des "gens distingués" (c. à dire des provençaux qui connaissaient également le français et l'emploi de oïl !). Le mot oc étant bien plus ancien.

A noter que le mot oïl a été formé sur le pronom latin ILLE qui marque l'éloignement, à la différence de oc, formé sur le latin HOC qui, lui, marque la proximité ! Serait-ce à dire que les gens de langues d'oil ont opté pour un "oui" plus distant et respectueux, et les gens de langues d'oc pour un "oui" plus intime et familier ?

Le regrette mon honnêteté ! J'ai eu un jour dans les mains un feuillet du XVIème siècle écrit en provençal. Un ami m'avait montré un vieille malle pleine de vieux papiers, des archives de St Maximin... j'y ai trouvé ces feuillets, tout heureux qu'ils soient écrits en provençal, je les ai déchiffrés et...  replacés dans la malle en question où je les avais pris ! le copain a été éjecté de sa place, et je sais que tout ça a disparu... Sans doute à la poubelle en plus !...

Voilà pour l'anecdote. Je me souviens d'y avoir lu dans un texte entièrement provençal (que je vais pouvoir retrouver dans mes papiers mais que j'ai pas mis au propre sur l'ordi) un étonnant "oui da!". Je ne me souviens pas comment était écrit "oui" : "oui?" "oi?".

Toi qui es linguiste, tu pourrais sans doute me dire à ce sujet : mais je ne pense pas avoir raison ! Si l'on considère qu'en français ancien aussi, (je l'ai vu dans des textes) le son "ou" était aussi parfois noté simplement "o", notre son actuel "oi" n'étant pas de règle, si l'on considère que la lettre "o" toute seule pourrait se dire "ou", le fameux "oil" de la langue d'oil, aurait pu se dire "ouil" (comme dans "œil") autrement dit très proche de notre "oui" avec un "i" final à peine un peu plus mouillé...

Mais bon quelqu'un m'avait dit que dans certain "patois" du nord, "oui"se disait encore oil (oual)...  je ne suis pas sûr que ce soit vrai. Mais si c'est vrai mon idée tombe à l'eau...

Pour ce qui est de l'emploi plus intime de "oc" par rapport à "oui" je n'en ai pas le souvenir. "o" c'était" "oui" tous azimuts ! Dans les archives du village (La Roquebrussanne, ou Néoules centre var) j'ai vu au XVIème siècle un compte d'un vote sur deux colonnes, il y avait la colonne "oc" et la colonne "non" (à mon avis prononcée"noun"!)..

Peut-être que dès le XIX siècle, le fait que le français était considéré comme la langue dominante et donc plus respectable, cela incitait à considérer le "oui" français comme plus respectueux envers une personne que l'on vouvoyait. Honnorat était de cette époque. Si l'on parle à un étranger que forcément on ne connaît pas, on sera tenté de lui parler en français ou au moins à la française?  Il faudrait vérifier si les troubadours ou d'autres textes provençaux d'avant le XIX ème l'on employé. Je ne crois pas, mais pourquoi pas ? Moi, j'avais bien vu ce "oui da" !

Mince ! qu'est-ce que je regrette ! Il y était question aussi d'un "taulier" (comptoir), d'un "escritori" (écritoire)... pour pouvoir écrire en déplacement...  Je vais rechercher... (ma transcription)

PS je crois savoir que Mistral s'était largement servi du dictionnaire d'Honnorat pour son "Grand Trésor".

 

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tison2feu Membre 3 032 messages
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Il y a 2 heures, Blaquière a dit :

Le regrette mon honnêteté ! J'ai eu un jour dans les mains un feuillet du XVIème siècle écrit en provençal. Un ami m'avait montré un vieille malle pleine de vieux papiers, des archives de St Maximin... j'y ai trouvé ces feuillets, tout heureux qu'ils soient écrits en provençal, je les ai déchiffrés et...  replacés dans la malle en question où je les avais pris ! le copain a été éjecté de sa place, et je sais que tout ça a disparu... Sans doute à la poubelle en plus !...

Voilà pour l'anecdote. Je me souviens d'y avoir lu dans un texte entièrement provençal (que je vais pouvoir retrouver dans mes papiers mais que j'ai pas mis au propre sur l'ordi) un étonnant "oui da!". Je ne me souviens pas comment était écrit "oui" : "oui?" "oi?".

Toi qui es linguiste, tu pourrais sans doute me dire à ce sujet : mais je ne pense pas avoir raison ! Si l'on considère qu'en français ancien aussi, (je l'ai vu dans des textes) le son "ou" était aussi parfois noté simplement "o", notre son actuel "oi" n'étant pas de règle, si l'on considère que la lettre "o" toute seule pourrait se dire "ou", le fameux "oil" de la langue d'oil, aurait pu se dire "ouil" (comme dans "œil") autrement dit très proche de notre "oui" avec un "i" final à peine un peu plus mouillé...

Mais bon quelqu'un m'avait dit que dans certain "patois" du nord, "oui"se disait encore oil (oual)...  je ne suis pas sûr que ce soit vrai. Mais si c'est vrai mon idée tombe à l'eau...

Pour ce qui est de l'emploi plus intime de "oc" par rapport à "oui" je n'en ai pas le souvenir. "o" c'était" "oui" tous azimuts ! Dans les archives du village (La Roquebrussanne, ou Néoules centre var) j'ai vu au XVIème siècle un compte d'un vote sur deux colonnes, il y avait la colonne "oc" et la colonne "non" (à mon avis prononcée"noun"!)..

Peut-être que dès le XIX siècle, le fait que le français était considéré comme la langue dominante et donc plus respectable, cela incitait à considérer le "oui" français comme plus respectueux envers une personne que l'on vouvoyait. Honnorat était de cette époque. Si l'on parle à un étranger que forcément on ne connaît pas, on sera tenté de lui parler en français ou au moins à la française?  Il faudrait vérifier si les troubadours ou d'autres textes provençaux d'avant le XIX ème l'on employé. Je ne crois pas, mais pourquoi pas ? Moi, j'avais bien vu ce "oui da" !

Mince ! qu'est-ce que je regrette ! Il y était question aussi d'un "taulier" (comptoir), d'un "escritori" (écritoire)... pour pouvoir écrire en déplacement...  Je vais rechercher... (ma transcription)

PS je crois savoir que Mistral s'était largement servi du dictionnaire d'Honnorat pour son "Grand Trésor".

 

Merci beaucoup car ton intervention m'a permis de découvrir la véritable étymologie de l'ancien français oïl et oïl-da ! (Bon, tu sais que je ne suis pas "linguiste" mais amateur, même si j'ai fait des études de linguistique il y a des lustres. A mes yeux, seul un professionnel mérite d'être qualifié de "linguiste". Donc, ce que je dis peut être entaché d'erreurs !).

Ton anecdote savoureuse à propos de ce oui-da semble conforter l'idée qu'il y a eu emprunt au français parlé au nord de la Loire, devenu langue dominante, et pour une simple question de prestige en effet.

Au sujet du mot oïl, Wikipedia donne les prononciations suivantes entre crochets : o-il [ɔ.il], ou-il [u.il], oui [wi], o-ille [ɔj]. Le "u" de u.il  est la transcription phonétique du son "ou" français. Cela conforte donc ton idée.

J'ai découvert l'étymologie de oïl dans le Dictionnaire historique de la langue française (Le Robert). Ce mot doit être analysé en o-ïl, c'est-à-dire comme étant composé de deux particules qui ne sont rien d'autre que les deux pronoms latins réunis hoc-ille ! Très tôt, la première particule fut réduite à o (842) et la seconde a donné il.

Au nord de la Loire, oui a été renforcé par divers éléments dont da dans oil dea (1396), ouy dea (1474). L'étymologie de da < dea < dia < diva est assez incroyable : "Composé des impératifs de dire et d'aller, di et va, diva s'est altéré, à la suite de son emploi interjectif, en dia, puis dea, da; d'abord employés seuls, dea puis da ont servi à renforcer l'affirmation et la négation." (D'après le dictionnaire du CNRTL).

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Blaquière Membre 18 866 messages
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@tison2feu

Génial ! j'ai retrouvé mes notes !

En fait c'était "oyda " ! Je me souviens que j'avais mis du temps à comprendre : j'imaginais un participe de "ouïr"... Je vais passer une bonne soirée : mettre le texte au propre !

Si ça vaut le coup, je le mets là !... C'est un "escaufestre" (une embrouille) de 1540... On peut citer les noms ? :smile2:

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tison2feu Membre 3 032 messages
Forumeur alchimiste ‚
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Il y a 7 heures, Blaquière a dit :

@tison2feu

Génial ! j'ai retrouvé mes notes !

En fait c'était "oyda " ! Je me souviens que j'avais mis du temps à comprendre : j'imaginais un participe de "ouïr"... Je vais passer une bonne soirée : mettre le texte au propre !

Si ça vaut le coup, je le mets là !... C'est un "escaufestre" (une embrouille) de 1540... On peut citer les noms ? :smile2:

Cela serait intéressant de voir le contexte. En principe, ce oyda signifie "oh oui !", "que oui !", "eh oui !".

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Membre, 76ans Posté(e)
Blaquière Membre 18 866 messages
Maitre des forums‚ 76ans‚
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Il y a 2 heures, tison2feu a dit :

Cela serait intéressant de voir le contexte. En principe, ce oyda signifie "oh oui !", "que oui !", "eh oui !".

J'ai ! Ce sont les témoignages d'un procès ou au moins d'une enquête.


La "podissa/o/e" c'est un "reçu", une "reconnaissance" pour une somme ou des fournitures dues ou versées. Je ne retrouve pas ce mot ds les dicos. (ça pourrait venir de "poder" : "pouvoir" (en tant que document) ?)

Ce que je trouve "savoureux" dans ce texte, c'est que les témoignages sont notés avec une forte influence du français... 'comme les"e" finaux du féminin. et tout le vocabulaire provençal francisé ! A la même époque, dans les villages, les textes sont exactement en provençal, mais à St Maximin, ils se la jouaient "grande ville" ! Ils fallait écrire en français, ça faisait plus classe.... " mi voles vous fayre..." !!!    Il y avait eu en 1539  donc l'année précédente l'édit de Villers-Cotterêts... A St Max, on était à la mode !

extrait :

J'avais pensé comme titre tiré du texte après ce passage :

 

"La podisse estrassade"

(la facture déchirée)

(Aquo ero l'an 1540)

 

A revelat Honnorat Sieyo :

 

«  Hiou enbe Jehan Selion

et lou tresourier Olivier Pec

ung pauc avant ou vrayament apres Calendes

salien toux ensemble foras de la gleyse

et en salient Jehan Flayol diguet :

« Olivier Pec mi voles vous fayre

aquelle podisse ? »

et ainsin Olivier Pec va dire :

« Oy da » (en fait oy et da sont séparés)

et toux dous mi digeront :

« Avet vous ung scretore ? »

et hiou aneri dire que oy

et ainsin Olivier Pec et Jehan Celion

tous ensemble aneram a mon houstal

per fayre la podisse

et Olivier Pec fes une poudisse

et quant l'aguet fache l'anet legir

laqualle podisse per l’aver de quatorze

ou verament de dix et hoict

soumades de blat

que Jehan Celion li avie donat

per la rende del molin

es veray que non mi recorde pas ben

que mileime si fousse

ni aussi de que mes

mes es ben veray que la podisse fut fache

ung pauc avant calendes

ou un pauc apres Calendas

car dou mes de septembre hiou ero a Aix

e aqui demoureri ung mes

 

 

Je mets le texte, je verrai plus tard pour le français....

 

 

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Membre, 76ans Posté(e)
Blaquière Membre 18 866 messages
Maitre des forums‚ 76ans‚
Posté(e)

Exemple d'un texte de la même année "au village" : le provençal y est parfaitement cohérent :

1540 e 9 de Febrier

 

"MAI QUE ARGENT VENGUO"

(Pourvu --à condition-- que l'argent vienne)

 

Hen aquest luoc non ha ges de blat e hes hen

Dans ce village il n'y a pas de blé et il est en

 

gros dangier que calque ung moro de fam. Per

grand danger que quelqu'un meure de faim. Pour

 

so Mosen lo Rendier n-a hencaro calque

Cela Monsieur le Rentier du moulin en a encore quelques

 

Saumado per so ha dich que si lo volen al pres

"Charges"(1), pour ça; il a dit que si nous le voulons au prix

 

que hen trobo que es 12 Fl. per Saumado, que

où on le trouve qui est de 12 Florins par charge que

 

hel hes per lo nos laissar plus tost a nos que

lui, il est prêt à nous le laisser à nous plutôt qu'à

 

autres, may que hargent venguo.

D'autres pourvu que l'argent "vienne"(!).

 

Que si parle a Mosen lo Rendier per veser que

Que l'on parle à Monsieur le Rentier pour voir quel/s

 

partit li-plasera de nos fayre.

parti (avantages) il lui plaira de nous faire.

 

(1) La charge, "la saumado" c'est ce que peut transporter une ânesse une "saumo" On pense dans les 120 litres de blé.

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tison2feu Membre 3 032 messages
Forumeur alchimiste ‚
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Un grand merci pour avoir pris la peine de recopier le texte. Sans tout comprendre, j'en ai deviné le sens général ! Toi seul peut noter ce point important : les tournures francisées de ce texte. Cette seule expression dire que oy (littéralement "dire que oui, acquiescer") ne laisse plus planer l'ombre d'un doute. C'est bien la preuve que ce oy et oy da sont des emprunts au vieux français.

Modifié par tison2feu
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Membre, 76ans Posté(e)
Blaquière Membre 18 866 messages
Maitre des forums‚ 76ans‚
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il y a 3 minutes, tison2feu a dit :

Un grand merci pour avoir pris la peine de recopier le texte. Sans tout comprendre, j'en ai deviné le sens général ! Toi seul peut noter ce point important : les tournures francisées de ce texte. Cette seule expression dire que oy (littéralement "dire que oui, acquiescer") ne laisse plus planer l'ombre d'un doute. C'est la preuve que ce oy est bien un emprunt au vieux français.

Oui ! Exactement !

Mais que ce soit un texte ou l'autre, le grand problème de 1540, c'était incontestablement le blé !!!!

 

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tison2feu Membre 3 032 messages
Forumeur alchimiste ‚
Posté(e)
il y a 5 minutes, Blaquière a dit :

Oui ! Exactement !

Mais que ce soit un texte ou l'autre, le grand problème de 1540, c'était incontestablement le blé !!!!

 

Aquot es oc ! 

(= Cela est certain)

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