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« Boire un grand bol de sommeil noir... »

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satinvelours

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satinvelours Membre 3 006 messages
Forumeur vétéran‚
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Un bel arbre
Ses branches sont des ruisseaux
Sous les feuilles
Ils boivent aux sources du soleil
Leurs poissons chantent comme des perles

 

C’est le principe du regard qui explique toutes ces images, mais un regard modifié non par une contrainte, mais une libération. L’imagination du poète se laisse aller à des interprétations mystifiantes.

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Membre, Posté(e)
satinvelours Membre 3 006 messages
Forumeur vétéran‚
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On ne peut me connaître
Mieux que tu me connais

Tes yeux dans lesquels nous dormons 
Tous les deux
On fait à mes lumières d’homme
Un sort meilleur qu’aux nuits du monde

Tes yeux dans lesquels je voyage 
Ont donné aux gestes des routes 
Un sens détaché de la terre

Dans tes yeux ceux qui nous révèlent
Notre solitude infinie
Ne sont plus ce qu’ils croyaient être

On ne peut te connaître 
Mieux que je te connais.

 

La sensualité chez Eluard n'est pas égoïste, c'est la participation de deux êtres qui implique le respect. Cet amour physique c'est de veiller chez lui à exprimer ses sentiments nobles. Il voit aussi dans l'amour de la femme un sens à la vie.

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satinvelours Membre 3 006 messages
Forumeur vétéran‚
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Toi la seule et j’entends les herbes de ton rire
Toi c’est la tête qui t’enlève
Et du haut des dangers de mort
Sur les globes brouillés de pluie des vallées
Sous la lumière lourde sous le ciel de la terre
Tu enfantes la chute.

Les oiseaux ne sont plus un abri suffisant
Ni la paresse ni la fatigue
Le souvenir des bois et des ruisseaux fragiles
Au matin des caprices
Au matin des caresses visibles
Au grand matin de l’absence la chute.
Les barques de tes yeux s’égarent
Dans la dentelle des disparitions
Le gouffre est dévoilé aux autres de l’éteindre
Les ombres que tu crées n’ont pas droit à la nuit.

 

Eluard croit en la puissance émotive des rapports les plus libres. En cela il est influencé par le surréalisme.
Les barques sont des lieux intimes dans lesquelles l’homme peut voyager, explorer d’autres terres. La dentelle figure le mouvement des vagues. L’image par la comparaison permet de recréer par la figuration analogique une réalité concrète.

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satinvelours Membre 3 006 messages
Forumeur vétéran‚
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Une chanson de porcelaine bat des mains
Puis en morceaux mendie et meurt
Tu te souviendras d’elle pauvre et nue
Matin des loups et leur morsure est un tunnel
D’où tu sors en robe de sang
A rougir de la nuit.
Que de vivants à retrouver
Que de lumière à éteindre
Je t’appellerai
Visuelle
Et multiplierai ton image.

 

La création des images est une opération permanente chez Eluard, comme chez tous les surréalistes.
Les images sont très abondantes, l’une engendre l’autre, c’est une multiplication d’images libérées.

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satinvelours Membre 3 006 messages
Forumeur vétéran‚
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La courbe de tes yeux fait le tour de mon cœur,
Un rond de danse et de douceur,
Auréole du temps, berceau nocturne et sûr,
Et si je ne sais plus tout ce que j’ai vécu
C’est que tes yeux ne m’ont pas toujours vu.

Feuilles de jour et mousse de rosée,
Roseaux du vent, sourires parfumés,
Ailes couvrant le monde de lumière,
Bateaux chargés du ciel et de la mer,
Chasseurs des bruits et sources des couleurs,

Parfums éclos d’une couvée d’aurores
Qui gît toujours sur la paille des astres,
Comme le jour dépend de l’innocence
Le monde entier dépend de tes yeux purs
Et tout mon sang coule dans leurs regards.

 

Chez Eluard les substantifs dominent les verbes et les adjectifs.
Beaucoup se rapportent au corps de la femme, et un grand nombre au domaine de la nature.
La nature lui permet non seulement de peindre la femme, mais aussi d’exprimer ses sentiments.
Dans le poème ci-dessus il se découvre au travers des yeux de Gala.

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satinvelours Membre 3 006 messages
Forumeur vétéran‚
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Les corbeaux battent la campagne
La nuit s’éteint
Pour une tête qui s’éveille
Les cheveux blancs le dernier rêve
Les mains se font jour de leur sang
De leurs caresses
Une étoile nommée azur
Et dont la forme est terrestre

Folle des cris à pleine gorge
Folle des rêves
Folle aux chapeaux de sœur cyclone
Enfance brève folle aux grands vents
Comment ferais-tu la belle coquette

Ne rira plus
L’ignorance l’indifférence
Ne révèlent pas leur secret
Tu ne sais pas saluer à temps
Ni te comparer aux merveilles
Tu ne m’écoutes pas
Mais ta bouche partage l’amour
Et c’est par ta bouche
Et c’est derrière la buée de nos baisers
Que nous sommes ensemble.


Il y a chez Éluard une libération de la pensée, influence évidente du surréalisme, qui fait que les rapports sont insolites et impulsifs. Cela demande une plus grande participation du lecteur et soulève encore une fois le problème de l’arbitraire dans la poésie surréaliste d’Éluard et dans la poésie surréaliste en général.

Il assure toujours une fluidité dans la dynamique de sa poésie.

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satinvelours Membre 3 006 messages
Forumeur vétéran‚
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Le sujet ne se veut pas exhaustif. C'est une balade qui m'entraîne vers les poèmes qui m''interpellent, me séduisent, ceux qui m'émeuvent par leur puissance et me troublent sans que j'en devine véritablement la cause.

 

Elle va s’éveiller d’un rêve noir et bleu
Elle va se lever de la nuit grise et mauve
Sa jambe est lisse et son pied nu
L’audace fait son premier pas

Au son d’un chant prémédité 
Tout son corps passe en reflets en éclats
Son corps pavé de pluie armé de parfums tendres
Démêle le fuseau matinal de sa vie.

 

Les couleurs sont présentes dans sa poésie. On trouve le bleu, le noir, couleur symbolique, le blanc... mais la palette est assez restreinte.

 

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satinvelours Membre 3 006 messages
Forumeur vétéran‚
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Amoureuse au secret derrière ton sourire
Toute nue les mots d’amour
Découvrent tes seins et ton cou
Et tes hanches et tes paupières
Découvrent toutes les caresses 
Pour que les baisers dans tes yeux
Ne montrent que toi toute entière.

 

 C’est le règne du mot et des rapports spontanés reliés en profondeur. Pour explorer ce domaine du subconscient, le poète doit chercher en lui-même, rendant ainsi ses découvertes très personnelles mais aussi profondément humaines. C’est la spontanéité, l’arbitraire qui garantit la validité de ses découvertes.

Éluard parle de la femme en général plutôt que d’une femme en particulier. Cela ne veut cependant pas dire qu’il voue un amour idéalisé à la femme sans que celle-ci ait des fondements dans le réel. Cela veut tout simplement dire que son amour dépasse les frontières du réel et qu’il atteint des proportions cosmiques.
Il faut se souvenir que "l’amour de la poésie" dont est issu ce poème est exclusivement dédié à Gala.

Modifié par satinvelours
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satinvelours Membre 3 006 messages
Forumeur vétéran‚
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Ta bouche aux lèvres d’or n’est pas en moi pour rire
Et tes mots d’auréole ont un sens si parfait
Que dans mes nuits d’années, de jeunesse et de mort
J’entends vibrer ta voix dans tous les bruits du monde.

Dans cette aube de soie où végète le froid
La luxure en péril regrette le sommeil,
Dans les mains du soleil tous les corps qui s’éveillent 
Grelottent à l’idée de retrouver leur cœur.

Souvenir de bois vert, brouillard où je m’enfonce,
J’ai refermé les yeux sur moi, je suis à toi, 
Toute ma vie t’écoute et je ne peux détruire
Les terribles loisirs que ton amour me crée.


La poésie d’Éluard est une poésie de l’image. Son langage est celui de la vie, des choses, des réalités concrètes transformées par l’imagination en réalités symboliques. C’est une poésie où les rapports entre les choses naissent spontanément, se rapprochent ou se contredisent mais qui sont toujours compréhensibles au lecteur qui veut bien se donner la peine de travailler, de rafraîchir sa vision des choses, son rapport avec le monde extérieur. Liées en profondeur, ces images témoignent d’un nouvel homme, d’un homme intégral, d’un homme libéré qui exprime les rapports réels et absolus entre lui et le monde qui l’entoure.

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satinvelours Membre 3 006 messages
Forumeur vétéran‚
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Je te le dis, gracieuse et lumineuse,
Ta nudité lèche mes yeux d’enfant.
Et c’est l’extase des chasseurs heureux
D’avoir fait croître un gibier transparent
Qui se dilate en un vase sans eau
Comme une graine à l’ombre d’un caillou.

Je te vois nue, arabesques nouée,
Aiguille molle à chaque tour d’horloge,
Soleil étalé au long d’une journée,
Rayons tressés, nattes de mes plaisirs.


Le poème glorifie toujours le corps féminin. Le vocabulaire, simple et concret, centré sur la femme et la nature à la fois. Les images assimilent la femme au principe de lumière et de fluidité, c’est la femme, essence même de la fécondité qui s’identifie avec la nature dans un univers où tout est limpide. 


 

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Membre, Posté(e)
satinvelours Membre 3 006 messages
Forumeur vétéran‚
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Une prison découronnée
En plein ciel
Une fenêtre enflammée
Où la foudre montre ses seins
Une nuit toute verte
Nul ne sourit dans cette solitude
Ici le feu dort tout debout
À travers moi.

Dans ce poème il y a suppression de toute référence au terme évoqué laissant au contexte seul la fonction de déchiffrer le code. Par le mot « seins » on découvre qu’il s’agit de la femme, qui est, dans la cosmologie d’Éluard, interchangeable avec la lumière. La femme est lumière.
C’est la métaphore au sens le plus pur du terme.

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Membre, Posté(e)
satinvelours Membre 3 006 messages
Forumeur vétéran‚
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Éblouissante et nue
À la cuisse d’une abeille
Rires peur de la peur
Dans les bras d’un frisson
En plein jour le corail
Borde l’écume des forêts
Un buisson de neige s’envole
Je n’ai pas d’ombre à t’opposer
Sous ton masque de larmes
Tu n’es que plus visible 
Sur leurs plages de perles
Tes yeux sont les plus beaux

 

Et toujours règne la métaphore très recherchée, très fouillée chez Eluard et bien entendu les surréalistes dont il fait partie.

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Membre, 76ans Posté(e)
Blaquière Membre 18 852 messages
Maitre des forums‚ 76ans‚
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Le 30/07/2018 à 13:08, satinvelours a dit :

Une prison découronnée
En plein ciel
Une fenêtre enflammée
Où la foudre montre ses seins
Une nuit toute verte
Nul ne sourit dans cette solitude
Ici le feu dort tout debout
À travers moi.

Dans ce poème il y a suppression de toute référence au terme évoqué laissant au contexte seul la fonction de déchiffrer le code. Par le mot « seins » on découvre qu’il s’agit de la femme, qui est, dans la cosmologie d’Éluard, interchangeable avec la lumière. La femme est lumière.
C’est la métaphore au sens le plus pur du terme.

"C'est la métaphore aux seins les plus durs et fermes"...

(Pardon ! Mais cette poésie est enthousiasmante ! On a envie de partir dans tous les sens...) Si l'on imaginait une chronologie des sentiments, je crois que la lumière prend son intérêt d'être comme une femme. Et non le contraire. Ce n'est pas femme qui est flattée d'être lumière mais la lumière d'être femme...

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Membre, Posté(e)
satinvelours Membre 3 006 messages
Forumeur vétéran‚
Posté(e)
Il y a 23 heures, Blaquière a dit :

 Ce n'est pas femme qui est flattée d'être lumière mais la lumière d'être femme...

 Cette pensée aurait séduit Eluard !

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Membre, Posté(e)
satinvelours Membre 3 006 messages
Forumeur vétéran‚
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Toute nue, toute nue, tes seins sont plus fragiles que le parfum de l’herbe gelée et ils supportent tes épaules. Toute nue. Tu enlèves ta robe avec la plus grande simplicité. Et tu fermes les yeux et c’est la chute d’une ombre sur un corps, la chute de l’ombre tout entière sur les dernières flammes. 
Les herbes des saisons s’écoulent, tu me montres le fond de ton cœur. C’est la lumière de la vie qui profite des flammes qui s’abaissent, c’est une oasis qui profite du désert, que le désert féconde, que la désolation nourrit. La fraîcheur délicate et creuse se substitue aux foyers tournoyants qui te mettaient en tête de me désirer. Au-dessus de toi, ta chevelure glisse dans l’abîme qui justifie notre éloignement.

 

Éluard aborde aussi le poème en prose. La différence entre les deux genres d'expression ne réside pas dans la source d'inspiration mais dans la disposition formelle de la pensée. Le poème en prose est tout simplement une autre façon de traduire l'univers poétique.

Il n'est pas toujours d'accord avec tous les principes établis par André Breton. Il fait la différence entre l'écriture automatique, le récit des rêves, et la poésie.

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Membre, Posté(e)
satinvelours Membre 3 006 messages
Forumeur vétéran‚
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Je parlais du poème en prose pour Éluard.

Voici ce qu’il dit dans la préface « Les dessous d’une vie » 1926.

« Des rêves, nul ne peut les prendre pour des poèmes. Ils sont, pour un esprit préoccupé de merveilleux, la réalité vivante. Mais des poèmes, dans lesquels l’esprit tente de désensibiliser le monde, de susciter l’aventure et de subir des enchantements, il est indispensable de savoir qu’ils sont la conséquence d’une volonté assez bien définie, l’écho d’un espoir ou d’un désespoir formulé.
Inutilité de la poésie : le monde sensible est exclu des textes surréalistes et la plus sublime lumière froide éclaire les hauteurs où l’esprit jouit d’une liberté telle qu’il ne songe même pas à se vérifier ».

Mais en 1937 dans « Premières  vues anciennes »

« On ne prend pas le récit d’un rêve pour un poème. Tous deux réalité vivante, mais le premier est souvenir, tout de suite usé, transformé, une aventure, et du deuxième rien ne se perd, ni ne change. Le poème désensibilise l’univers au seul profit des facultés humaines, permet à l’homme de voir autrement, d’autres choses. Son ancienne vision est morte, ou fausse. Il découvre un nouveau monde, il devient un nouvel homme ».

« L’oubli joue dans les rêves un rôle constant ».

 

Il déclare donc la supériorité de la poésie sur les deux autres genres : textes surréalistes et le récit des rêves.
 

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Membre, Posté(e)
satinvelours Membre 3 006 messages
Forumeur vétéran‚
Posté(e)

Les bracelets d’un baiser autour d’un bras interminable
La rosace de l’ivresse à la pointe d’un sein
Les remous des regards ne me font pas peur
J’embrasse avec ferveur la chair des arbres sous leurs écorces
Je cherche dans la terre la flamme de la pluie
Les agates de la chaleur
Les plus petites graines du soleil d’hiver
A l’odeur de cendre et couleur de lys


L'union des images de l'eau et du feu est récurrent chez Eluard.

 

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Membre, Posté(e)
satinvelours Membre 3 006 messages
Forumeur vétéran‚
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Inconnue elle était ma forme préférée
Celle qui m’enlevait le souci d’être un homme
Et je la vois et je la perds et je subis
Ma douleur, comme un peu de soleil dans l’eau froide.

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Membre, Posté(e)
satinvelours Membre 3 006 messages
Forumeur vétéran‚
Posté(e)

A toutes brides toi dont le fantôme
Piaffe la nuit sur un violon
Viens régner dans les bois

Les verges de l’ouragan
Cherchent leur chemin par chez toi
Tu n’es pas de celles
Dont on invente les désirs

Tes soifs sont plus contradictoires
Que des noyées

Viens boire un baiser par ici
Cède au feu qui te désespère.

 

Par les métaphores les plus frappantes, il y a une approche de la réalité.

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