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"Sans la musique la vie serait une erreur "

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Membre, le corps sur Terre, l'esprit ailleurs , 55ans Posté(e)
pascalin Membre 15 340 messages
55ans‚ le corps sur Terre, l'esprit ailleurs ,
Posté(e)

Sinon j'ai l'impression que tu es souvent d'humeur changeante.

Je suis désolé si j'ai réagi de cette façon mais

je te renvoie ta façon de répondre qui est très changeante avant tout,

qui esquive, je suis en quelque sorte un miroir...

mais bon si tu ne l'entends pas ... et que tu ne veux pas vraiment répondre aux questions

et que tu as fais ce sujet en ayant un avis arrêté et pas du tout pour philosopher

et bien tant pis

Parfois peut-être, puisqu'elle permet de rassembler des personnes de tout horizons ...

Devrions-nous avoir pour elle un procès d'intention de ce qu'elle ne serait ne pas censée faire plus qu'elle ne le peut ?

Il me semble que le genre humain, même si il existe encore des personnes qui n'ont pas les notions des choses, qui commettent des atrocités etc...,

a mis en place sur toute la surface de la Terre, enfin en grande partie, un système qui proclame qu'aucun crime ne soit impuni et qu'il est confondu pour ce qu'il est .

Il est circonscrit, pas vaincu, mais on le pointe du doigt, ça c'est super important .

C'est la toute la différence avec des époques ou tout pouvait se faire sans aucune inquiétudes d'aucunes sortes, en toute impunité .

Même si ce système est loin d'être parfait et que malheureusement, des êtres mal intentionnés arrivent au monde, il permet une plus grande justice qu'avant ou des hommes pouvaient par ex. tuer toute une famille et qu'il n'y est aucune enquête de faite pour les retrouver , ces heures sombres ont existées ,et bien sur que comme aujourd'hui, tous les crimes ne peuvent être empêchés, il en ressort quand même que maintenant, il y a une volonté de rechercher les coupables et que par le passé ce n'était pas le cas.

Tout se faisait de façon brutale tranquillement .

Peut-être que la musique ne rend pas les gens meilleurs, mais elle ne le rends pas moins bon pour autant et que sa façon d'unir des personnes différentes, fait que ...

Il me semble que oui, non pas que la musique en soit l'instigatrice, la cause première, mais que d'une certaine façon, nous fasse comprendre que nous éprouvons des émotions, et que de fil en aiguille, nous puissions être plus à l'écoute^^ de l'autre .

C'est très intéressant ce que tu évoques la

Est-ce la vie en elle même qui est une erreur ?

Où bien son cheminement ?

Comment peut-on dire à une personne épanouie,qui accepte sa condition d'être vivant et qui en jouit pleinement, qu'elle soit mélomane ou non, que sa vie est une erreur ?

Peut-on lui dire qu'elle fait fausse route ? Où bien qu'elle ne mérite pas ce qu'elle vit ?

Qu'elle a trop de chance de ne pas vivre la vraie^^ vie(misérable,médiocre,malheureuse) ?

On pourrait même penser que la musique aurait détournée l'émotion que l'on peut avoir envers les autres, et que l'on aurait pas, voir perdu, la force emphatique naturelle par ce subterfuge musicale ;

celle-ci aurait été consumé par cette déviance, voir ce maléfisme . Que la Force aurait été perdu, volé ...

Où bien, tout est joué d'avance, et la vie n'est que désespérance, et que chaque vie doit être vécu dans la souffrance, dans la résignation que celle-ci n'est qu'erreur .

C'est très intéressant ce que tu évoques la

Est-ce la vie en elle même qui est une erreur ?

Où bien son cheminement ?

Comment peut-on dire à une personne épanouie,qui accepte sa condition d'être vivant et qui en jouit pleinement, qu'elle soit mélomane ou non, que sa vie est une erreur ?

Peut-on lui dire qu'elle fait fausse route ? Où bien qu'elle ne mérite pas ce qu'elle vit ?

Qu'elle a trop de chance de ne pas vivre la vraie^^ vie(misérable,médiocre,malheureuse) ?

On pourrait même penser que la musique aurait détournée l'émotion que l'on peut avoir envers les autres, et que l'on aurait pas, voir perdu, la force emphatique naturelle par ce subterfuge musicale ;

celle-ci aurait été consumé par cette déviance, voir ce maléfisme . Que la Force aurait été perdu, volé ...

Où bien, tout est joué d'avance, et la vie n'est que désespérance, et que chaque vie doit être vécu dans la souffrance, dans la résignation que celle-ci n'est qu'erreur .

J'aurais bien aimé que tu t'exprimes sur ces tout derniers points

et j'ai peut-être pensé, à tord?, que cela t'aurais semblé aussi important pour toi de le faire .

Je suis vraiment désolé, j'y ai mis un peu trop d'envie sur ce que je croyais important que tu répondes

Modifié par pascalin
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Membre, If you don't want, you Kant..., Posté(e)
deja-utilise Membre 5 991 messages
If you don't want, you Kant...,
Posté(e)

Primo, ce ne sont pas les explications scientifiques qui causent problèmes, mais bien la croyance sous-jacente selon laquelle ces explications devraient avoir préséance, selon laquelle ces explications sont plus importantes, plus profondes que d’autres types de discours.

Secundo, cette croyance de la toute-puissance de la science a bien un effet lénifiant sur la vie. Tout le nihilisme découle d’ailleurs de cette vision nouvelle que la science a proposé à l’homme moderne selon laquelle il n’est qu’un amas de chair perdu dans un univers trop grand pour lui et dénué de sens. Et par exemple, je t’assure que le plaisir que tu peux ressentir à assister à la mascarade de Noël n’a rien à voir avec le plaisir que tu pouvais y trouver lorsque tu étais encore enfant.

Ta réaction est " entendable "!

Même si tu n'es pas directement concerné/visé, il est somme toute, dangereux de partir sur des choses moins solides, ce que je veux dire, c'est que si en dernier recours il n'est question que d'opinions, de croyances, de dogmes, de conditionnements voire de métaphysique, la philosophie ou la façon de répondre à une question peut vite devenir du grand n'importe quoi, même chez les philosophes qui avaient l'intention de faire table rase, ils n'ont pas été exempts de fourvoiements, alors que dire, si la pensée ne s'appuie sur aucune base fiable, et ne conduit pas son cheminement sur une méthode relativement sûre !

Je ne doute pas d'une part que les meilleures volontés peuvent emmener à l'opposé du projet initial, et d'autre part, que des errements peuvent nous conduire, par chance, vers des contrées tout à fait accueillantes.

Je dirai que tout dépend avant tout, de ce que tu attends de ta pratique philosophique, et suivant ce dessein, je peux parfaitement comprendre que les moyens utilisés puissent diverger plus ou moins profondément, voire radicalement.

Il n'est pas du tout impossible, que nos aspirations premières n'étant pas équivalentes, nos outils d'investigations soient également rangés par ordre différent de valeurs. Là se trouve je pense, le point d'achoppement, dès notre appréhension respective de l'art philosophique.

( La magie ne noël me semble bien plus prégnante aujourd'hui qu'hier, dont je ne comprenais pas grand chose, je n'ai jamais vraiment aimé les mystères, ni les cachoteries, d'où certainement mon parcours scientifique, pour éclaircir toutes les zones d'ombre, ce qui me procure satisfaction in fine )

L’important c’est de prendre conscience des limites inhérentes au type de discours que nous tenons.

Oui tout à fait, et c'est aussi certainement, le point critique, crucial d'une telle entreprise de réflexions.

Je n’ai pas de problème à entendre un tel discours. Toute la question est ici de voir quelle teneur tu donnes à ce type de discours. Y vois-tu une sorte de discours-maître sur la teneur, la vérité des choses ?

Je n'ai pas cette prétention, non. Je ne peux pas me garantir de ne pas sombrer d'une manière ou d'une autre, dans les travers soit d'impressions biaisées, soit d'erreur de conduite de raisonnements, bien que je pense plus volontiers la plupart du temps, à des prémisses ou des prédicats erronés, incomplets ou trompeurs, qu'un mauvais emploi de la raison, sans oublier le pire de tous, les motivations les plus enracinées qui nous poussent à agir, et qui sont prêtes à utiliser n'importe quel stratagème pour nous faire aller dans leurs sens, quitte à nous faire prendre des vessies pour des lanternes, notre instance la plus profonde pouvant nous leurrer en toute impunité, sans laisser le moindre indice, quand le mutinerie vient de l'intérieur il est très mal aisé de la voir venir et de lutter contre elle, et c'est sans doute de nous-même que nous devrions nous méfier le plus pour tenter de comprendre le monde !

Considères-tu les affects comme une sorte de sous-produit de toute la mécanique bio-chimico-physique sous-jacente au monde ? Comme une construction plus ou moins illusoire ?

Que tout ce que nous sommes ne soit le fruit que de processus purement " mécaniques ", n'enlève en rien que pour nous-même ce soit notre réalité, il n'y a pas plus réel que ce que nous sentons, ressentons, c'est justement ce que nous appelons réalité qui est une fiction pour nous, la seule chose à laquelle nous n'aurons jamais accès, c'est à ce qui se produit dans notre corps, et qui parvient jusqu'à notre psyché consciente ou pas. Je ne suis pas le premier à renverser ce paradigme, le film " Matrix " illustre justement ce fait, de manière cinématographique il va sans dire.

Nous ne vivons à bien y regarder que pour cela, ce que nous percevons et qui nous stimule, ce n'est donc ni une illusion, ni un sous-produit, c'est ce qui nous permet de nous sentir vivre, même si on peut en donner une explication rationnelle a posteriori ou a priori.

Je pense que si l’on croit sincèrement que tous nos affects ne sont qu’une sécrétion biologique ultimement illusoire, dont la face véritable n’est que d’être le support d’un mécanisme biologique, il y a de quoi observer en soi un glissement subtil de l’amour que l’on peut éprouver pour les êtres qui nous entourent, et aussi pour les choses humaines en général. C’est d’ailleurs la situation de la plupart des hommes d’aujourd’hui. Je pense que personne ne peut s’affirmer complètement immunisé à ce mal de l’esprit. C’est notre héritage d’hommes postmodernes. Nous sommes souvent confus, repliés sur nous-mêmes, égoïstes, parce que nous sommes tourmentés par le mal du non-sens des choses, que nous tentons souvent de noyer de toutes les façons imaginables.

Cette pente savonneuse n'est pas inévitable, comme tu auras pu t'en rendre compte au-dessus, j'ai beau constaté certaines formes déterminées, causales, que cela ne retire pas l'essence même de l'existence, tout ce qui en fait le sel, le piment, nos réactions internes, qu'elles soient émotions, ressentis, impressions, sentiments, sensations, intuitions, etc, c'est avec elles exclusivement que nous vivons, et pour lesquelles nous aimons vivre, il n'y a dès lors qu'à aller dans ce sens, simple, implacable, tout en étant à l'écoute des autres soi.

La tourmente ne vient pas pour ma part de l'intérieur, mais dans la tentative d'harmonisation avec autrui, il y a comme une fracture, une anfractuosité qui n'est pas résorbable, qui n'est pas colmatable, laissant toujours béant cet espace qui nous sépare, quand bien même quelques passerelles fébriles assurent des passages.

Le sens de la vie, je l'ai trouvé dans ce qui caractérise le mieux la vie elle-même, le fruit de la reproduction: les enfants, et par extension la famille, l'amitié, ce sont les seules véritables valeurs, le noyau dur, incompressible, insécable dont tout le reste peut découler, qui a un sens intelligible... Autrement de n'est que passe temps, jubilation d'exister hédoniste ou errance !

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Invité
Invités, Posté(e)
Invité
Invité Invités 0 message
Posté(e)

Je suis désolé si j'ai réagi de cette façon mais

je te renvoie ta façon de répondre qui est très changeante avant tout,

qui esquive, je suis en quelque sorte un miroir...

mais bon si tu ne l'entends pas ... et que tu ne veux pas vraiment répondre aux questions

et que tu as fais ce sujet en ayant un avis arrêté et pas du tout pour philosopher

et bien tant pis

Je crois qu'il y a malentendu.

Je n'esquive jamais, je deteste ça, et les gens qui sont curieux me charment généralement.

J'ai peut etre le défaut d'etre un peu fainéant parfois, d'en faire le minimum, c'est surtout une question de motivation chez moi.

Je pense pourtant avoir répondu a tes questions, mais peut etre qu'il y a quelque chose qui m'a échappé.

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Invité
Invités, Posté(e)
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Il me semble que oui, non pas que la musique en soit l'instigatrice, la cause première, mais que d'une certaine façon, nous fasse comprendre que nous éprouvons des émotions, et que de fil en aiguille, nous puissions être plus à l'écoute^^ de l'autre .

Est-ce la vie en elle même qui est une erreur ?

Où bien son cheminement ?

On pourrait même penser que la musique aurait détournée l'émotion que l'on peut avoir envers les autres, et que l'on aurait pas, voir perdu, la force emphatique naturelle par ce subterfuge musicale ;

celle-ci aurait été consumé par cette déviance, voir ce maléfisme . Que la Force aurait été perdu, volé ...

Où bien, tout est joué d'avance, et la vie n'est que désespérance, et que chaque vie doit être vécu dans la souffrance, dans la résignation que celle-ci n'est qu'erreur .

Effectivement, je suis passe beaucoup trop vite sur quelque chose d'essentiel pour moi !

C'est meme trés exactement le danger que je vois dans la grande musique, celle qui nous fait lever les yeux vers les cieux, en oubliant son prochain.

" Comme la vie est belle", "comme l'existence est magnifique".

La vie n'est pas belle, c'est a nous de la rendre belle.

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Membre, Posté(e)
tison2feu Membre 3 106 messages
Forumeur alchimiste ‚
Posté(e)

Je ne suis pas sûr que les états d'âme que tu décris sont les seuls qui peuvent être suscités par l'écoute de la musique. De même que par exemple, il y a des œuvres cinématographiques qui ne nous plongent pas exactement dans le bonheur le plus pur. Me vient en tête ici l'atmosphère sombre des films de Lars Von Trier ou de Michael Haneke. Il serait par exemple assez difficile de dire qu'un film comme Amour nous plonge dans un instant de joie exceptionnelle et qu'il nous délivre de sentiment d'être mortel. Au contraire, il nous colle à la réalité dans son aspect le plus sordide. Et c'est d'ailleurs le but du cinéaste de susciter notre indignation. Or, il y a des musiques qui ne fonctionnent pas différemment: elles nous transportent vers nos affects les plus sombres afin que nous puissions les connaître d'une manière qui soit vivable.

C'est comme cela que fonctionne par exemple beaucoup de pièces de Ligeti. Je me promenais justement hier avec son Lontano dans les oreilles. Le contraste avec la magnificence de la journée était fascinant. Alors que toute la vie est ici à son apogée du printemps, je me sentais respirer avec la mort. Je voyais les arbres, pourtant beaux et gonflés de sève, sous leur aspect d'usines absurdes à emmagasiner l'énergie du soleil. Je voyais les hommes et les femmes, pourtant beaux et fiers, sous leur aspect de puddings de chair perdus dans l'univers, écartelés dans le transit énergique des choses. C'était terrible et magnifique à la fois.

La pièce se présente comme une espèce de série de moments liés par le fil d'une sorte de cri étouffé; des moments constitués tantôt par la sirène de paquebots perdus dans l'immensité, voguant sans but, tantôt par d'étranges vociférations collectives.

C'est une musique qui ne suscite pas vraiment la joie, qui ne transfigure pas la vie sous forme d'une réjouissance perpétuelle, qui ne nous met pas à l'unisson avec les choses. Mais elle suscite certainement la conscience de la fragilité des choses et de l'urgence de donner un sens au mot amour. Tout comme le film du même nom d'ailleurs.

Les états d'âme que je décrivais, sur le mode interrogatif, ne sont pas les seuls bien entendu. La musique a le pouvoir de nous transporter vers toute sorte d'affects, parfois les plus sombres. Dans la composition en question, ce qui me frappe, c'est l'absence de rythme et l'intensification d'un son continu qui contribue à nous faire suffoquer physiquement, comme si nous étions plongés sous l'eau. Nous n'avons plus de repères rythmiques ou harmoniques. Cette musique mystérieuse, déshumanisée au possible, nous sort de notre réalité normée et rassurante pour nous faire toucher du doigt un réel dépouillé de nos attentes quotidiennes, fragiles et insignifiantes, un réel sans but ni finalité qui nous fait éprouver un sentiment terriblement mystérieux, voire tragique de la vie.

Mais lorsque je fais allusion à l'unisson jubilatoire de l'être du sujet à l'être du monde, cela implique d'adhérer à ce mystère/tragique de la vie. La joie que je peux éprouver même en écoutant les pires sons noirs suppose l'accommodation paradoxale au tragique de la vie, et non pas à sa négation. La jubilation ne peut résider que dans et par cet accord avec le tragique de la vie.

Cette musique me dit dans que je suis quelque chose de perdu et d'insignifiant, mais aussi que je ne peux pas ne pas être quelque chose ; elle me dit que la vie est quelque chose de déroutant, mais aussi qu'elle ne peut pas ne pas être quelque chose. La vie m'est offerte dans la gratuité de l'instant. Tel est le secret de la joie rossétienne : "Toute l'horreur d'exister, pour Cioran, est d'être quelque chose et de compter pour rien. Le secret de la joie est dans une inversion : on ne compte pour rien, mais on est quelque chose" (Clément Rosset).

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Invités, Posté(e)
Invité
Invité Invités 0 message
Posté(e)

Les états d'âme que je décrivais, sur le mode interrogatif, ne sont pas les seuls bien entendu. La musique a le pouvoir de nous transporter vers toute sorte d'affects, parfois les plus sombres. Dans la composition en question, ce qui me frappe, c'est l'absence de rythme et l'intensification d'un son continu qui contribue à nous faire suffoquer physiquement, comme si nous étions plongés sous l'eau. Nous n'avons plus de repères rythmiques ou harmoniques. Cette musique mystérieuse, déshumanisée au possible, nous sort de notre réalité normée et rassurante pour nous faire toucher du doigt un réel dépouillé de nos attentes quotidiennes, fragiles et insignifiantes, un réel sans but ni finalité qui nous fait éprouver un sentiment terriblement mystérieux, voire tragique de la vie.

Mais lorsque je fais allusion à l'unisson jubilatoire de l'être du sujet à l'être du monde, cela implique d'adhérer à ce mystère/tragique de la vie. La joie que je peux éprouver même en écoutant les pires sons noirs suppose l'accommodation paradoxale au tragique de la vie, et non pas à sa négation. La jubilation ne peut résider que dans et par cet accord avec le tragique de la vie.

Cette musique me dit dans que je suis quelque chose de perdu et d'insignifiant, mais aussi que je ne peux pas ne pas être quelque chose ; elle me dit que la vie est quelque chose de déroutant, mais aussi qu'elle ne peut pas ne pas être quelque chose. La vie m'est offerte dans la gratuité de l'instant. Tel est le secret de la joie rossétienne : "Toute l'horreur d'exister, pour Cioran, est d'être quelque chose et de compter pour rien. Le secret de la joie est dans une inversion : on ne compte pour rien, mais on est quelque chose" (Clément Rosset).

Et de la nait le sentiment de l'absurde, de la souffrance ou de l'ennui.

"Je m'ouvrais pour la première fois à la tendre indifférence du monde. De l'éprouver si pareil à moi, si fraternel enfin, j'ai senti que j'avais été heureux, et que je l'étais encore. " l'étranger Camus

Autrement dit cet étranger au monde, toujours en retrait, réalisait qu'il avait eté heureux parce qu'il etait pareil a l'univers: indifférent a tout et absurde comme lui.

Une solidarité dans l'indifférence on fait beaucoup mieux comme optimisme !

Beaucoup voit la fin de "l'étranger" comme une note d'espoir, mais moi je trouve que c'est d'un pessimisme absolu !

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Membre, le corps sur Terre, l'esprit ailleurs , 55ans Posté(e)
pascalin Membre 15 340 messages
55ans‚ le corps sur Terre, l'esprit ailleurs ,
Posté(e)

C'est meme trés exactement le danger que je vois dans la grande musique, celle qui nous fait lever les yeux vers les cieux, en oubliant son prochain.

" Comme la vie est belle", "comme l'existence est magnifique".

La vie n'est pas belle, c'est a nous de la rendre belle.

Le terme "danger" est excessif car il n'y a pas de cause à effet dans l'écoute de la grande musique et le délaissement de son prochain.

Je perçois dans ces dires, un procès d'intention qui sous-entend ,et qui inverse la problématique de ce sujet, que justement la vie est une erreur parce que justement la musique existe ;

c'est une diabolisation absurde .

De plus, dire que la vie n'est pas belle est purement subjectif et je réitère ma question :

Est-ce la vie en elle même qui n'est qu'erreur (et qui n'est pas belle) ?

ou bien son cheminement ?

Du parcours de chaque personne ?

En fait quand j'ai posté ça:

Comment peut-on dire à une personne épanouie,qui accepte sa condition d'être vivant et qui en jouit pleinement, qu'elle soit mélomane ou non, que sa vie est une erreur ?

Peut-on lui dire qu'elle fait fausse route ? Où bien qu'elle ne mérite pas ce qu'elle vit ?

Qu'elle a trop de chance de ne pas vivre la vraie^^ vie(misérable,médiocre,malheureuse) ?

J'avais plutôt en tête une personne lambda, une personne du peuple, qui vit simplement, modestement, qui vit son petit bonhomme de chemin, qui a des enfants, une femme, une passion, qui aime la nature, qui aime la vie tout simplement même si il ne réunis pas les conditions que j'ai cité juste avant( des enfants, une femme..) , qui la trouve belle,

et non pas une personnalité comme celle que tu as cité, qui n'est pas pour moi un mètre étalon dans la qualité et l'épanouissement que l'on peut avoir dans la vie, basé sur les paillettes et la recherche de pouvoir, mais bon chacun ses critères ..

Mais après ,c'est sa vie, qui je suis pour prétendre qu'elle n'est qu'erreur ?

Pour revenir à la problématique du sujet, il y a trois termes :

_ Vie

_ Musique

_ Erreur

Il conviendrai de préciser ce que tu entends par "Vie"

Est-ce la vie des humains, de leurs parcours ? ou bien de la vie en tant qu'existence ?

Et l'on pourra essayer de voir si il y aurait une possibilité d'erreur, ce qui n'est pas beau ( qu'est-ce qui ne l'est pas? pourquoi?), notion très subjective s'il en est .

Quand tu dis:" c'est à nous de la rendre plus belle " tu penses à quoi exactement ?

à la rendre plus humaine ? la beauté de la vie n'est elle qu'humaine ?

On pourrait même être tenté de glisser sur des conclusions^^ comme celles-ci :

" sans l'homme, la vie ne serait pas une erreur "

" il n' y a qu'une erreur dans la vie, l'homme "

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Membre, Posté(e)
Dompteur de mots Membre 1 842 messages
Forumeur activiste‚
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Mais lorsque je fais allusion à l'unisson jubilatoire de l'être du sujet à l'être du monde, cela implique d'adhérer à ce mystère/tragique de la vie. La joie que je peux éprouver même en écoutant les pires sons noirs suppose l'accommodation paradoxale au tragique de la vie, et non pas à sa négation. La jubilation ne peut résider que dans et par cet accord avec le tragique de la vie.

Je me disais bien aussi que tu me reviendrais avec cette pensée !

En effet, aussi sombres que puissent être la musique de Ligeti, ou les films de Lars Von Trier ou de Haneke, ils ne renvoient pas à une morbidité aliénante, au renoncement ou au défaitisme – encore que cela doive dépendre de l’attitude du spectateur je suppose (mais on peut penser à bon droit que ce n’est pas le but recherché). Comme la tragédie grecque, ces musiques et ces films mettent en action le processus de la catharsis : ils exposent la nature tragique des choses et la magnifient du même coup. En quoi consiste cette magnification ? Revoyons ton explication :

Cette musique me dit dans que je suis quelque chose de perdu et d'insignifiant, mais aussi que je ne peux pas ne pas être quelque chose ; elle me dit que la vie est quelque chose de déroutant, mais aussi qu'elle ne peut pas ne pas être quelque chose. La vie m'est offerte dans la gratuité de l'instant. Tel est le secret de la joie rossétienne : "Toute l'horreur d'exister, pour Cioran, est d'être quelque chose et de compter pour rien. Le secret de la joie est dans une inversion : on ne compte pour rien, mais on est quelque chose" (Clément Rosset).

J’affirmerai que cette interprétation de la chose ne me satisfait pas, en notant du même coup que je ne connais pas Rosset et que, comme tu le sais déjà, je suis un piètre amateur de Cioran, ce qui fait que mon appréciation est certainement grossière. Voici donc ce que je propose :

Considérons le cas suivant où un homme est tant effrayé par une bête qu’il lui est impensable de la regarder dans les yeux. Mais voilà qu’un deuxième homme fort ingénieux a l’idée de lui tendre un miroir en le plaçant de façon à ce que le premier homme n’ait sous les yeux que le reflet de la bête, et à ce qu’il puisse donc s’en faire une idée sans pour autant devoir se plier à l’impensable. Or, il s’ensuit précisément que l’impensable en question devient soudainement pensable, que ce-dont-il-ne-faut-pas-parler entre soudainement dans l’usage du langage. Si bien que la bête, devenue moins étrange, devient soudainement au moins en partie apprivoisée et que le premier homme acquiert, dans le processus même, quelque chose qui pourrait bien s’apparenter à du courage, et que le courage a la vertu, paraît-il, de faire mieux vivre.

Voilà donc en quoi consisterait l’art tragique.

Prenons un exemple fort accessible : la chanson God de John Lennon. En 1970, Lennon est au sortir de sa carrière avec les Beatles. Il est visiblement tout à fait écœuré de son rôle d’idole et compose alors cette chanson dans laquelle il bouscule toute une série de mythes et d’idoles, de Bouddha aux Beatles, en passant par Elvis, pour affirmer que tout ce qui est vrai pour lui, c’est sa vie à lui, avec sa femme, suggérant qu’il devrait en être de même pour nous. Il y définit Dieu au passage comme « le concept par lequel nous mesurons notre douleur ». Il tendait donc à toute la légion des fans des Beatles qui l’adulaient depuis le début des années 60 – et peut-être aussi à toute la génération des années 60, abreuvée à même les illusions hippies, un miroir, dans lequel ils pouvaient apercevoir le côté factice de la chose, et qui pouvait peut-être leur donner le courage de se départir de leurs illusions afin de mesurer leur douleur et de vaquer aux vraies choses.

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  • 3 semaines après...
Membre, Posté(e)
tison2feu Membre 3 106 messages
Forumeur alchimiste ‚
Posté(e)

Je me disais bien aussi que tu me reviendrais avec cette pensée !

En effet, aussi sombres que puissent être la musique de Ligeti, ou les films de Lars Von Trier ou de Haneke, ils ne renvoient pas à une morbidité aliénante, au renoncement ou au défaitisme – encore que cela doive dépendre de l’attitude du spectateur je suppose (mais on peut penser à bon droit que ce n’est pas le but recherché). Comme la tragédie grecque, ces musiques et ces films mettent en action le processus de la catharsis : ils exposent la nature tragique des choses et la magnifient du même coup. En quoi consiste cette magnification ? Revoyons ton explication :

J'interviens une nouvelle fois, ayant souhaité prendre le temps nécessaire à réfléchir encore, et désireux de mettre en lumière pas moins de trois questions qui n'ont pas été abordées jusqu'à présent !

1. Lorsque nous parlons de musique, nous devons distinguer l'acteur (l'artiste en personne) du spectateur. L'effet de catharsis est produit sur le spectateur, mais est-ce vraiment le but recherché par l'artiste ? Si tel est le cas, n'est-ce pas attribuer à l'art une fonction morale, tout à fait compréhensible à l'époque d'un Aristote ou d'un Confucius ? Qu'en est-il de l'art non engagé ?

2. L'artiste est à mes yeux un penseur, au même titre qu'un philosophe, mais il n'utilise pas les mêmes outils pour s'exprimer. Lorsque le peintre pense la guerre, il se sert de ses pinceaux et d'un support pour décrire et exprimer, au plus profond de ses entrailles, les souffrances de la guerre (cf. Guernica par Picasso). Son tableau pourra dire mille fois plus de choses et de vérités que le concept abstrait de guerre. L'artiste est un penseur, en chair et en os, de la souffrance ou de la jouissance et il cherche à en exprimer l'essence, dans son langage et sa grammaire à lui.

3. Magnification par l'artiste ? il ne s'agit pas pour l'artiste de magnifier la souffrance ou la joie mais d'en exprimer les mille nuances, parfois bien mieux que ne saurait le faire le philosophe à l'aide du seul tranchant du concept. La croyance en cette prétendue "magnification" ne résulte-t-elle pas de la confusion entre la représentation d'une belle chose d'une part, et la belle représentation d'une chose d'autre part ? C'est la beauté de la représentation qui subjugue, non point l'objet représenté. Cette beauté réside dans l'énonciation d'une vérité dans un langage et une grammaire subtils qui échappent en partie au spectateur non averti, au point de créer en lui un tel effet subjuguant. N'en va-t-il pas de même, dans une certaine mesure, en philosophie ? Certains philosophes ne sont-ils pas, au même titre, des magiciens dans l'agencement et la grammaticalisation des concepts ? Le philosophe n'a-t-il pas un style singulier ? Est-il suspecté pour autant de "magnifier" le réel ?

J’affirmerai que cette interprétation de la chose ne me satisfait pas, en notant du même coup que je ne connais pas Rosset et que, comme tu le sais déjà, je suis un piètre amateur de Cioran, ce qui fait que mon appréciation est certainement grossière. Voici donc ce que je propose :

Considérons le cas suivant où un homme est tant effrayé par une bête qu’il lui est impensable de la regarder dans les yeux. Mais voilà qu’un deuxième homme fort ingénieux a l’idée de lui tendre un miroir en le plaçant de façon à ce que le premier homme n’ait sous les yeux que le reflet de la bête, et à ce qu’il puisse donc s’en faire une idée sans pour autant devoir se plier à l’impensable. Or, il s’ensuit précisément que l’impensable en question devient soudainement pensable, que ce-dont-il-ne-faut-pas-parler entre soudainement dans l’usage du langage. Si bien que la bête, devenue moins étrange, devient soudainement au moins en partie apprivoisée et que le premier homme acquiert, dans le processus même, quelque chose qui pourrait bien s’apparenter à du courage, et que le courage a la vertu, paraît-il, de faire mieux vivre.

Voilà donc en quoi consisterait l’art tragique.

Prenons un exemple fort accessible : la chanson God de John Lennon. En 1970, Lennon est au sortir de sa carrière avec les Beatles. Il est visiblement tout à fait écœuré de son rôle d’idole et compose alors cette chanson dans laquelle il bouscule toute une série de mythes et d’idoles, de Bouddha aux Beatles, en passant par Elvis, pour affirmer que tout ce qui est vrai pour lui, c’est sa vie à lui, avec sa femme, suggérant qu’il devrait en être de même pour nous. Il y définit Dieu au passage comme « le concept par lequel nous mesurons notre douleur ». Il tendait donc à toute la légion des fans des Beatles qui l’adulaient depuis le début des années 60 – et peut-être aussi à toute la génération des années 60, abreuvée à même les illusions hippies, un miroir, dans lequel ils pouvaient apercevoir le côté factice de la chose, et qui pouvait peut-être leur donner le courage de se départir de leurs illusions afin de mesurer leur douleur et de vaquer aux vraies choses.

Suite à mes réflexions précédentes, je vais apprécier l'adéquation de la pensée du chanteur (Lennon, et ce qu'il pense du réel et de son double illusoire) avec la qualité de sa performance vocale et acoustique. Je suis subjugué chaque fois que je considère que l'artiste a été à la hauteur dans sa capacité à exprimer l'inexprimable.

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Une quatrieme voie peut etre :

La valeur d'un homme, qui plus est d'un artiste, ne se mesure t-elle pas aussi a la qualité des gens dont il choisit de s'entourer ?

Aux femmes, aux hommes qu'il peut aimer.

Dans le cas de Lennon il y a Yoko Ono, Un plus, un moins, chacun son idée.

Je dis ça, je dis plus rien.

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  • 3 semaines après...
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1. Lorsque nous parlons de musique, nous devons distinguer l'acteur (l'artiste en personne) du spectateur. L'effet de catharsis est produit sur le spectateur, mais est-ce vraiment le but recherché par l'artiste ? Si tel est le cas, n'est-ce pas attribuer à l'art une fonction morale, tout à fait compréhensible à l'époque d'un Aristote ou d'un Confucius ? Qu'en est-il de l'art non engagé ?

Tout d’abord, je note que nous allons ici discuter de l’art comme phénomène collectif, et non comme simple production. Autrement dit, l’art en tant que mouvance culturelle, comme discussion entre des artistes-producteurs et des spectateurs. Nous sommes probablement trop souvent fétichistes dans notre appréhension de l’art.

Dans ce contexte, serait-il farfelu d’affirmer que toute œuvre d’art comprend une composante morale dans la mesure où elle prescrit ce qui doit être vu, entendu ou senti ? Il me semble qu’un artiste ne peut pas produire d’œuvre sans se demander si ce qu’il a en tête de produire ou si les résultats auxquels il a abouti sont dignes d’être montrés, s’ils devraient être montrés. Peut-être même est-ce ce questionnement qui fait la différence entre l’art et le divertissement (on pourrait dire aussi entre la philosophie et l’opinion).

On utilise souvent le mot « engagé » pour désigner un art qui, par ses représentations, se fait le véhicule d’une lutte ayant déjà une incarnation politique. Mais il y a des artistes qui sont engagés sans pour autant épouser de lutte politiquement définie. Certains se battent au sein de luttes existentielles, d’autres pour le simple droit de cité d’untel état d’esprit. Cela rejoint mon concept phénoménologique d’ « être-engagé-dans-le-monde », qui décrit la posture existentielle de celui qui considère sa vie comme un engagement, une lutte, opposé à l’ « être-dans-le-monde », qui décrit la posture de celui qui se laisse porter par les choses. L’artiste peut-il se vivre autrement que comme un être-engagé-dans-le-monde ?

Il ne faut pas non plus confondre l’engagement avec la colère, avec un ton revendicateur ou avec une certaine rigidité de sermon : la désinvolture ou la légèreté peuvent souvent cacher un engagement des plus sérieux; pour l’amour par exemple. Cela me fait penser à une chanson de McCartney (tant qu’à parler le Lennon, parlons aussi de l’autre !). Dans Silly Love Songs, celui-ci répond aux critiques qui l’accusent de ne composer que des chansons d’amour sirupeuses et quelque peu idiotes : il affirme plus ou moins qu’il en est conscient et qu’il l’assume, posant la question : qu’y a-t-il de mal à ça ? Et il en rajoute : voici une autre chanson d’amour idiote ! Autrement dit, il affirme que cela constitue son engagement, que le monde devrait être rempli de chansons d’amour idiotes. Évidemment, une telle posture est ouverte à la discussion, comme toute posture d’ailleurs, mais elle constitue un contrepoint intéressant à l’oscillation typique de McCartney entre l’art et le divertissement léger. Évidemment, il s’agit plus d’une curiosité que d’une grande œuvre musicale !

3. Magnification par l'artiste ? il ne s'agit pas pour l'artiste de magnifier la souffrance ou la joie mais d'en exprimer les mille nuances, parfois bien mieux que ne saurait le faire le philosophe à l'aide du seul tranchant du concept.

La croyance en cette prétendue "magnification" ne résulte-t-elle pas de la confusion entre la représentation d'une belle chose d'une part, et la belle représentation d'une chose d'autre part ? C'est la beauté de la représentation qui subjugue, non point l'objet représenté.

Cette beauté réside dans l'énonciation d'une vérité dans un langage et une grammaire subtils qui échappent en partie au spectateur non averti, au point de créer en lui un tel effet subjuguant. N'en va-t-il pas de même, dans une certaine mesure, en philosophie ? Certains philosophes ne sont-ils pas, au même titre, des magiciens dans l'agencement et la grammaticalisation des concepts ? Le philosophe n'a-t-il pas un style singulier ? Est-il suspecté pour autant de "magnifier" le réel ?

J'ai toujours pensé qu'un bon philosophe est avant tout un séducteur, qu'il crée autour de lui, par le moyen des concepts et des idées une sorte de jeu ou de danse dans laquelle ses lecteurs sont invités à entrer. Je vais recopier ici ce que j'ai déjà écrit à Déjà dans l'Éloge du silence (c’est un fragment qui n’est pas encore numéroté):

Platon est suprêmement inséparable d’une atmosphère, d’un style, et être aveugle au déploiement théâtral qui est mis en place par ce philosophe, c’est être aveugle à au moins la moitié de son œuvre, si ce n’est plus. Mais j’hésite à employer ce mot « théâtral » parce qu’il renvoie à l'idée d'artifice. Or, le style d’un philosophe n’est pas en soi un ensemble d’artifices – c’est plutôt une atmosphère, un climat, un espace de temps – qui certes peut être constitué par les effluves tantôt nauséabondes d’artifices grossiers : les mauvais philosophes ont un style artificiel. Il faut donc entendre l’idée de théâtre ici au sens où par exemple un type comme Artaud l’entendait : au sens d’un déploiement de moyens représentatifs visant à magnifier la vie humaine ou, en l’occurrence, à magnifier le cours de la pensée, à créer un état de conscience élevé. On peut aussi lui adjoindre la notion de jeu telle que Gadamer l’a définie : le jeu (tel que celui de l’acteur) comme espace clos, comme enclave où une rencontre transfiguratrice des participants est rendue possible – l’écriture ou la parole du philosophe pouvant alors être assimilées à une sorte de jeu dont le style et la respiration font office de contours.

On peut voir dans ce texte que je manifeste une certaine timidité à employer le mot « artifice », à assumer le côté artificiel du jeu. C’est que le mot « artifice » est très connoté, et renvoie le plus souvent à l’idée d’illusion, où il s’agit de tromper l’autre par la ruse. Mais dans le cas qui nous intéresse, l’artifice ne consiste pas à tromper, puisque le jeu est consentant. L’œuvre d’art digne de ce nom ne cache pas son artificialité, elle ne vise pas à créer une confusion avec la réalité qui nous est donnée. Au contraire, elle cherche à s’en démarquer. Cette timidité et cette retenue découlent peut-être ce que Déjà est très sensible à ces thèmes et qu’il me fallut donc y accorder une attention particulière. Mais c’est une retenue qui m’a empêché d’aller plus loin dans la description positive de mon objet.

Aux côtés d’Artaud et de Gadamer, j’aimerais ajouter le nom de Baudrillard – ce qui n’est pas sans nous donner une brochette de personnalités des plus intéressantes. Baudrillard nous donne une notion de la séduction qui n’est pas sans rappeler une idée que je caresse depuis longtemps. Cette notion éclaire encore davantage me semble-t-il l’idée de jeu philosophique que j’essaie de définir.

Que dit Baudrillard ? D'abord, il faut noter que l'idée de Baudrillard ne concerne que les relations amoureuses. Ensuite, très grossièrement, il affirme que le mouvement des Lumières, par sa manie du dévoilement, a dénudé le sexe d’une telle manière qu’il a fini par l’appauvrir. Plus précisément, les Lumières ont ramené le sexe à la « vérité » de l’orgasme, de la satisfaction de nos instincts fondamentaux. Il conviendrait alors, selon Baudrillard, de redonner notre attention à la valeur de la séduction, qui elle s’affaire plutôt à recouvrir la prétendue vérité des choses par un voile d’arbitraire, par des artifices, par un jeu de simulation qui n’a d’autre finalité qu’elle-même : la séduction pour la séduction. Cela parce qu’alors que le dévoilement du sexe nous rend centré sur nos besoins, sur la nécessité de l’orgasme, la séduction nous entraîne plutôt dans un mode dual où l’orgasme et l’acte sexuel ne sont que des conséquences, si l’on veut, du jeu de la séduction.

Je n’ai rencontré que récemment Baudrillard. Et il se trouve qu'une intuition semblable quant à la notion de séduction me tenaillait depuis très longtemps. Quelle ne fut donc pas ma joie à cette rencontre. Seulement, mon idée avait une plus grande extension. Je pense que la philosophie et que l’art sont aussi animés – ou du moins devraient l’être – par un tel jeu de séduction. Que veut l’artiste sinon avant tout de faire briller les yeux du spectateur, de la fasciner, de le toucher, de l’ébranler, de le choquer, par le moyen de ses artifices ? Pour cette raison, il me semble qu’il est impensable de parler de vérité en ce qui concerne la substance de l’œuvre d’art. Ce serait absolument contradictoire. Je ne pense pas que l’œuvre vise à dévoiler quoi que ce soit – il est manifeste qu’elle habille bien plus qu’elle dénude. En vue de quoi ? Mais peut-être parce que c’est l’essence même de l’humanité de créer du superflu, de tendre ses forces vers le plus loin, vers le plus haut, même si ça ne rime apparemment à rien. Pour enchanter le monde. Pour se donner le courage de vivre, et peut-être même de bien vivre. Pour persévérer dans sa puissance d’être, dans sa volonté de puissance et je ne sais pas quoi d’autre. La tragédie habille la cruauté des choses. Elle lui confère quelque lueur d’enchantement. Et cela nous donne du courage.

3. Magnification par l'artiste ? il ne s'agit pas pour l'artiste de magnifier la souffrance ou la joie mais d'en exprimer les mille nuances, parfois bien mieux que ne saurait le faire le philosophe à l'aide du seul tranchant du concept.

La croyance en cette prétendue "magnification" ne résulte-t-elle pas de la confusion entre la représentation d'une belle chose d'une part, et la belle représentation d'une chose d'autre part ? C'est la beauté de la représentation qui subjugue, non point l'objet représenté.

Ce n’est pas la confusion entre la représentation d’une belle chose et la belle représentation d’une chose qui donne vie à la magnification dont je parlais et dont je viens d’élaborer l’idée, mais bien plutôt le saut consentant dans le jeu de la séduction. Je le dis encore une fois : l’œuvre d’art digne de ce nom ne cache pas son aspect artificiel. La Joconde est campée dans un paysage issu d’un autre monde. Le jeu de l’Œdipe est parsemé par les interventions du coryphée et du chœur. Dans Andreï Rublev de Tarkovski, la trame narrative et temporelle est morcelée, non-linéaire. Les statues de Michel-Ange adoptent des poses musculairement intenables pour des hommes de chair. Dans le film 2001, Kubrick dépeint la vie de ses astronautes avec un réalisme presque documentaire, mais ce réalisme ne fait qu’accentuer l’impression subjuguante de la conclusion, dont l’artificialité est manifeste. Quant au réalisme de la boîte de soupe de Warhol, c’est à l’absence d’artificialité qu’elle nous renvoie immédiatement : l’art a-t-il seulement encore un sens lorsqu’il nous renvoie à la banalité même du réel ou de la reproduction industrielle ?

Peut-être que je ne devrais pas parler de magnification mais bien de vivification. L'œuvre d'art vivifie, en ce qu'elle ouvre de nouveaux espaces que l'esprit et par suite le corps peuvent aller coloniser, elle ouvre de nouveaux espaces où la volonté de puissance peut galoper et se répandre, s'ébaubir. Avec la découverte d'une nouvelle œuvre d'art vient l'avènement de tout un cortège de nouvelles sensations, et par suite de nouvelles pensées et par suite de nouvelles postures du corps.

J’ai décrit ce « processus d’ouverture de nouveaux espace de l’esprits » de manière plus pointue dans le topic de Savonarol (qui se demandait si un abruti peut être un artiste). J’y distinguais :

A) Un concept de compréhension géométrique;

B) Un concept de compréhension intuitive.

(Non-numéroté) L’idée étant que A est un processus fermé, marqué par une destination, tandis que B est un processus ouvert où la créativité et la découverte ont part. Le concept A a une saveur conventionnelle, tandis que le B a une saveur vitale – au sens où la connaissance acquise se rapporte au vécu de l’apprenant. La manière dont une œuvre d’art participerait à cette dernière connaissance résiderait dans la propension qu’elle a de mettre un état d’esprit en exergue. L’œuvre d’art fixe ce qui en soi est éphémère, insignifiant et se destine à mourir étouffé dans l’écoulement du temps. En révélant ce quelque chose, l’œuvre enseigne certainement quelque chose. Mais cet enseignement n’est pas fermé. C’est sans doute de l’ordre de la connaissance de soi. Ou de sa relation avec les choses.

J’ajoute qu’il y a nécessairement une réflexivité dans l’art. L’art, ce n’est pas seulement de restituer un ressenti : c’est le restituer tout en tendant un miroir pour que le spectateur puisse s’apercevoir en train de saisir ce ressenti. À quoi il faut sans doute (la plupart du temps) ajouter l’ingrédient du plaisir. Lorsque je regarde le Sisyphe, je ne suis pas seulement subjugué par la beauté des formes et je ne fais pas seulement ressentir une modalité de l’angoisse d’exister : je me perçois en train de ressentir. Alors qu’usuellement mon ressenti s’inscrit dans le cours même de mon engagement dans le monde (je me sens aliéné de prendre le bus chaque matin, j’ai l’impression de toujours pousser la même chose, je suis angoissé, etc.), ici il advient plutôt alors que je suis dans un mode contemplatif. De plus, le frottement de mon esprit sur ce ressenti est facilité par le plaisir des formes (alors que dans le cours du monde, je me serais bien sûr rapidement réfugié dans la réalité augmentée de Pokémon go).

L’effet de « magnification artistique » consiste donc :

A) En un saut consentant dans un jeu de séduction;

B) En l’initiation d’un processus de compréhension intuitive.

2. L'artiste est à mes yeux un penseur, au même titre qu'un philosophe, mais il n'utilise pas les mêmes outils pour s'exprimer. Lorsque le peintre pense la guerre, il se sert de ses pinceaux et d'un support pour décrire et exprimer, au plus profond de ses entrailles, les souffrances de la guerre (cf. Guernica par Picasso). Son tableau pourra dire mille fois plus de choses et de vérités que le concept abstrait de guerre. L'artiste est un penseur, en chair et en os, de la souffrance ou de la jouissance et il cherche à en exprimer l'essence, dans son langage et sa grammaire à lui.

(Non-numéroté) De manière générale, je pense que la faculté qui consiste à pouvoir se plonger en soi-même, à connaître ses sentiments et ses états de manière intuitive est bien plus importante à l’intelligence que la faculté de pensée géométrique qui permet à un homme de pouvoir travailler ces états d’une façon rationnelle. La capacité d’exprimer ses états par la conceptualisation peut être la marque d’une grande intelligence et d’une grande capacité de compréhension mais elle peut aussi n’être que la coquille vide d’une pédanterie qui se fait passer pour de l’intelligence. Je serai bien plus enclin à qualifier d’intelligente une personne qui fait preuve d’une profondeur intuitive sans nécessairement avoir de compétence conceptuelle qu’une personne qui est capable de manipuler des concepts abstraits sans la profondeur intuitive. Je pense qu’en général, le bon sens commun va aussi dans cette direction, ce qui explique entre autres raisons la méfiance qui s’est toujours exercée à l’encontre des philosophes – à tort ou à raison.

Or, il ne fait aucun doute dans mon esprit qu’un bon artiste doit posséder l’intelligence intuitive dont je parle (un bon philosophe aussi, mais ça c’est une autre histoire). Comment qualifier cette intelligence pour en rendre le concept plus concret ? Il est intéressant de noter que Bergson disait qu’on peut surtout imager la pensée intuitive plutôt que de la décrire rationnellement. « Imager » : n’est-ce pas ce que font les artistes ? Intéressant de noter aussi que le plus artiste des philosophes – Nietzsche – avait cette propension à « tout dire sans rien dire », c’est-à-dire à ne jamais aller droit vers son sujet, mais à plutôt à révolutionner autour, à l’effleurer, à l’évoquer. On revient d’une lecture de Nietzsche un peu étourdi, il y a des contradictions, des ambiguïtés, etc. On n’est pas trop certain de ce dont il est question exactement. Ou plutôt, on le sait, mais il n’est pas tout à fait possible de mettre le doigt dessus. C’est que Nietzsche nous atteint – s’il nous atteint – d’une manière intuitive. Un résumé, une synthèse de la pensée Nietzsche est toujours quelque chose de dérisoire, même lorsque cela est effectué d’une main de virtuose telle que la mienne.

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