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"L'espoir fait vivre" ?

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Invité Simplicius
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Invité Simplicius
Invité Simplicius Invités 0 message
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Je ne vois pas comment on pourrait les dissocier en effet. C'est d'ailleurs l'objet de la question initiale de ce topic : ce que j'appelle "le présent maudit" renvoie précisément à l'impuissance de l'homme, et par extension à son inexorable mort.

Il n'y a d'espoir que dans l'impuissance.

Bien évidemment ! Et qu'y a-t-il d'étonnant à cela, dans la mesure même où la vie croît à partir de l'impuissance ? Un nourrisson ne peut, pour la majorité des espèces animales, vivre sans le secours initial de quelqu'un qui le dépasse. Nous faisons immédiatement l'apprentissage de nos fragilités et l'espérance du Père structure l'Humanité depuis qu'elle a conscience d'elle-même. Déjà, à Atapuerca, les ancêtres de Neandertal déposent un biface comme offrande funèbre à ceux des leurs qui ne sont plus. Qu'Est-ce, sinon une espérance qu'ils seront secourus dans la mort ?

L'espoir peut évidemment consister à prolonger la vie de ceux qui nous sont chers, afin qu'ils profitent le plus longtemps possible des bienfaits de l'existence physique et, de manière égoïste, ne nous privent pas de leur compagnie dans cette vallée de larmes. Mais le plus grand et le plus ancien est évidemment que la conscience se prolonge après la destruction physique.

Donc, oui, l'espoir a immanquablement une connotation religieuse, du moins dans son acception de préservation de l'avenir. La temporalité oblige à Dieu.

Vivre pleinement = ne pas vivre désuni ou coupé de soi.

Une définition ne peut être simplement négative, surtout lorsqu'elle concerne un adverbe aussi fort que pleinement.

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Membre, 55ans Posté(e)
ping Membre 6 305 messages
Baby Forumeur‚ 55ans‚
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??? Je ne sais pas, chacun fait ce qu'il veut, je donne ma définition qui n'engage modestement que moi. On ne peut vivre pleinement qu'à condition d'etre soi, et non pas qu'un demi-etre identifié à son moi. C'est mon dernier mot Jean-Pierre, :)

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Membre, Posté(e)
Dompteur de mots Membre 1 841 messages
Forumeur activiste‚
Posté(e)

L’espoir pourrait être cette chose qui oscille entre crainte et confiance ?

Plus on a confiance, moins on espère

Plus on craint, plus on espère

Et toujours on désire ?

C'est ce que je pense aussi.

Spinoza disait que c’était une impuissance de l’âme, par quel retournement des choses ça pourrait être aussi ce qui fait tenir ? C’est ça que j’essaie de comprendre.

C'est fort simple: Spinoza réfléchit comme un éthicien, et non comme un psychologue. L'Éthique établit un idéal de vie, mais ce n'est certainement pas une étude de moeurs. De même, on peut dire qu'un homme qui ne prend pas le temps de se questionner sur le sens de sa vie traduit un certain aveuglement intérieur, mais quand on considère qu'il y a des hommes qui ne font que lutter pour survivre, alors cette idée devient quelque peu relative.

Pour ce qui est de s’accrocher à l’espoir religieux, c’est passer d’un nihilisme à l’autre, l’éternelle béquille…Mais si elle permet de sortir d’une spirale autodestructrice….

Dans certains cas, c'est un "mieux que rien" en quelque sorte.

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Membre, If you don't want, you Kant..., Posté(e)
deja-utilise Membre 5 749 messages
If you don't want, you Kant...,
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Ah ! Les jongleries/cabrioles conceptuelles/abstraites de Déjà-utilisé ! :p

Pour vous servir très cher! :hi:

Nous sommes comme dans un écosystème ici même, où chacun cherche une place, un micro-environnement qui lui soit profitable, une forme d'émancipation.

J'espère au moins que tu apprécies mon style, hors norme, toi qui ait sensible à cette caractéristique!?

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Membre, If you don't want, you Kant..., Posté(e)
deja-utilise Membre 5 749 messages
If you don't want, you Kant...,
Posté(e)

Quelle perspicacité, pertinence...mais sera-ce suffisant? Ah oui, ça sonne pas terrible hein! :| En tout cas merci pour ta persévérance...

Nos désirs sont beaucoup plus modestes la plupart du temps.

Si là tu es assis devant ton ordinateur, c’est parce que tu le désirais et si tu restes assis, c’est parce que tu désires rester assis, pas parce que tu l’espères. Tu manges parce que tu désires manger, etc…

Le désir dans le présent ne s’accompagne jamais d’espoir et il n’est pas sans raison d’être ni sans énergie.

Oui, tu as raison, nos vies sont plus modestes en général.

Le désir dans le présent? Qu'est-ce donc? N'est ce pas plutôt la consommation, l'acte final de ce que le désir m'a poussé à faire, dit autrement si le désir peut se traduire par ce qu'une instance psychique de moi veut obtenir, une fois qu'elle l'a, elle ne le veut plus, on en use, on en jouit, on peut en revanche souhaiter/désirer que le plaisir dure, continue, ne s'arrête pas, de ne pas le perdre, nous sommes passés d'un vouloir, à un je le garde, j'en profite, ou dit autrement d'un désir, à une jouissance/plaisir/apaisement, accompagnée d'une peur de perte ou pas.

Il faut prendre un exemple où le désir s'oriente vers une sustentation rapide, pour bien mettre en évidence la transformation de celui-ci en une autre énergie psychique, un repas ou un acte amoureux étant trop "long", pour saisir l'évolution. Prenons donc, juste d'obtenir le numéro de téléphone de la personne que l'on désire, une fois que le stratagème/la ruse, ou autre, a fonctionné, on ne désirera plus cette chose, mais une autre par exemple, tout en étant cette fois après obtention dans un autre état que le désir initial, un contentement, une joie, une ivresse, un plaisir espéré... Le sentiment de désir a cédé la place, à un autre sentiment ou le même mais sur un autre objet, ou à une émotion.

Si tu sors crevé du boulot après une rude journée, tu vas désirer rentrer chez toi, prendre une bonne douche et te détendre. Que vas-tu craindre ? Que vas-tu espérer ?

Ce désir, tu vas l’avoir pendant tout ton trajet de retour et à moins d’être pathologiquement anxieux, tu ne vas pas craindre que ta baignoire ait disparu ni espérer que ton divan soit toujours là.

(enfin j’espère, sinon ça craint^^)

Quand j'ai parlé d'espérance, précédemment avec l'exemple du levé de soleil, il fallait surtout le voir d'un point de vue logique ou formel, où tant que le fait n'est pas accompli, on ne peut pas être certain qu'il le soit, c'est donc une forme de croyance, qui renvoie à une espérance si c'est ce que l'on attend. On ne peut pas objecter la dessus, les seuls choses sûres, sont celles que l'on constate, ou les tautologies, les autres sont potentielles, révisables, incertaines, douteuses, probables, etc..

J'ai également fait le rapprochement entre le désir, en tant que aptitude particulière, et ses formes d'application comme souhaiter-imaginer-espérer-vouloir, qui comme un outil particulier telle une perceuse-visseuse où le moteur ( la force d'action ) se manifeste sous la forme d'une perceuse ( à bois, à métal ), d'une visseuse, d'une dévisseuse ou d'une perceuse à percussion ( pour le béton ), voire d'une carotteuse ( scie cloche ), ces différentes fonctions sont indissociables de la force motrice, c'est un tout, et dans l'exemple que tu donnes, tu utilises la fonction vouloir, plus que la fonction espérer, qui s'appuient pourtant sur le même moteur du désir, alors effectivement, on ne voit pas l'espoir pointer son nez dans l'expectative d'un repos/délassement mérité.

Nous ne jouons pas exactement avec la même forme de désir, néanmoins, je pourrais toujours dire que tant que vouloir ne s'est pas accompli en acte réel, il reste du domaine de l'attente probable, et donc soumis au bon espoir de sa réalisation, car nous ne savons pas si nous ne serons pas dérangés par un coup de fil, une panne de plomberie, une rencontre amicale en chemin, empêchant l'accomplissement de notre volonté première, et même si tu n'y penses pas consciemment, c'est une réalité possible, que tes projets ne se réalisent pas comme escomptés, tu y places sans le vouloir, tacitement, un espoir, une des formes de l'espoir que j'ai défini:

L'espoir comme attente logique de ce qui adviendra théoriquement, si aucun incident ne vient perturber le bon déroulement. ( Pragmatique/Empiriste )

L'espoir comme une croyance plus ou moins mystique, sans fondement expérimental ou rationnel. ( Théologique/Ésotérique )

L'espoir comme une espérance que la chance nous sourira enfin, que les évènements s'inverseront, que le hasard rétablira une sorte d'équilibre. ( Statistique )

L'espoir que nos rencontres, notre entourage pourra rectifier ou nous aider à mener à bien notre existence, qu'une instance humaine agisse. ( Philanthropique/Éthique )

L’espoir est lié à la crainte et se fonde sur le désir, et quand le désir se transforme en vouloir, l’espoir devient un mélange de crainte et de confiance et tout ça roule ensemble pour essayer d’atteindre ce qu’on désire. Si tu ne désires rien, ça te fait une belle jambe que l’espoir soit un désir puisqu’il serait sans objet, donc inexistant.

Je dirai plus volontiers, que l'espoir est partie prenante du doute en ce qui concerne un avenir, un devenir.

Encore une fois, espoir et désir sont inséparables, tout comme la fonction visseuse n'est pas séparable de l'outil, la force motrice de le perceuse-visseuse, la force sans la fonction ne sert à rien, la fonction sans la force d'action est tout aussi inutile, c'est pour cela qu'il n'y a pas primauté de l'un sur l'autre, ce sont des dimensions différentes d'un même objet global!

Le désir nait souvent après la découverte, tel l'enfant qui ne connait pas encore les sucreries, une fois cette expérience souvent heureuse faite, il pourra nourrir son désir, son espoir d'en obtenir d'autres, et si il voulait y goûter de lui-même, c'est la curiosité qu'il l'aura poussé à franchir le pas, non le désir, puisqu'il ne savait pas encore ce que cela pouvait procurer comme sensation, le plaisir, le dégoût ou aucun effet spécial. ( on ne désire pas ce qui nous rebute! )

On peut espérer sans craindre, tu l'as dit toi même, puisque crainte et peur sont synonymes:

La peur est également un sentiment humain omniprésent, même si bien entendu il varie en intensité en fonction des situations.

L'espoir de gagner au loto sera inspirée par la peur de manquer d'argent, ou le désir d'argent, ce qui revient je pense au même. Ce sont des mots différents qui décrivent la même réalité psychique.

J’ai joué deux ou trois fois au loto dans ma vie, à chaque fois parce que je me suis laissée influencer par la pub sur le comptoir en rentrant dans la librairie pour autre chose. Je n'ai pourtant pas peur de manquer d'argent, j’ai même oublié, une fois, de vérifier si j’avais gagné quelque chose. Alors peut-être que la peur sous-tend toujours le désir mais ce serait inconscient dans ce cas, donc, difficile à affirmer et encore plus à généraliser.

Ce qui corrobore les divers sens que j'ai retenu de l'espoir juste au-dessus, la peur n'est pas systématique dans l'espoir, même si je suis le premier à la reconnaitre comme un levier puissant de nos comportements.

L'espoir n'est pas toujours lié à un manque ou une peur, il peut être positif, vu comme un surplus, un trop plein.

L’espoir pourrait être cette chose qui oscille entre crainte et confiance ?

Plus on a confiance, moins on espère

Plus on craint, plus on espère

Et toujours on désire ?

L'espoir est en lien avec le doute d'une réalisation effective!

Plus on a confiance, plus on a des chances, plus les espoirs peuvent être grands, comme ses probabilités de succès à sortir avec l'être tant convoité

Plus on a confiance, plus on a de possibilités et plus on veut également

Tout dépend de la crainte/peur en question, si c'est un placement financier risqué, plus il l'est, moins je vais tenter ma chance, et donc moins espérer, placer d'espérances la-dedans. Plus je crains que je ne vais pas réussir à plaire à l'être désiré, moins je vais espérer me retrouver en sa compagnie, en relation intime.

Par contre désirer, vu sous le spectre que j'ai donné, à savoir la force motrice de toutes nos expectatives matérialisées par la volonté, le souhait, l'imagination et l'espoir, oui.

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Membre, If you don't want, you Kant..., Posté(e)
deja-utilise Membre 5 749 messages
If you don't want, you Kant...,
Posté(e)

Est-ce qu'à présent j'ai su être plus claire ?

J'ai bien peur que non, hélas, car même si j'ai bien noté, ce qui se passe lorsque l'on est seul, cela ne change rien à ce qui va se produire en moi, les mêmes espoirs vont naitre, et rien de plus.

C'est comme si nous étions sur des îles différentes, et que je ne trouvais pas d'accès facile pour te mener jusqu'à la mienne, alors que je perçois bien à quoi ressemble la tienne.

Un exemple légèrement différent du tien, te permettra peut-être de mieux voir comment je fonctionne, puisque c'est bien de cela qu'il s'agit, imaginons donc une horloge familiale transmises de génération en génération, d'une valeur inestimable pour les membres de la famille, c'est à dire que l'on y place beaucoup de sentiments, certes pas autant qu'une vie humaine, et un beau jour, cette horlogerie ne fonctionne plus correctement, des sentiments profonds/animaux vont apparaitre, mais au-delà de ceux-ci, il y a la partie purement mécanique, comme je l'envisage pour un être vivant, une mécanique biologique, je peux la confier à un expert, ou tenter de regarder par moi-même, et espérer résoudre/résorber le problème, pour que tout rentre dans l'ordre qu'était le sien avant cette découverte bouleversante. Ce qui se passe dans ma tête sera du même genre que ce qui se passerait pour un être cher, un mélange de sentiments indomptables, et de raisonnements dont je sais pertinemment que je n'aurais pas tous les tenants et les aboutissants, je serai sans doute en partie impuissant à ce constat, je ressasserai tout ce que je sais, ce que je comprends dans tous les sens, jusqu'à l'épuisement, luttant contre les émotions débordantes et les réflexions partielles. Mais je n'envisage pas autre chose, qu'une usure, une défaillance qui bien qu'elle m'échappe n'en demeure pas moins dû à une chaine de causalités, de déterminisme quoique je ne puisse pas en faire de prévision à rebours puisque non dépositaire de toutes les informations sur le système.

Pour un être humain, c'est pareil, les sentiments et émotions violentes s'en mêlant bien évidemment en plus, mais mes espoirs n'auront pas d'autres vocations à comprendre, à rassurer, à faire au mieux et à digérer ce qui se passe. Je ne ferai que constater que je ne peux pas aider comme je le voudrai, que les choses sont indépendantes de ma volonté, que les informations m'échappent, la situation est hors contrôle, que tout s'embrouille, de la colère, de la tristesse, du désespoir, de l'énervement amplifiant outre mesure, ce qui ressemble déjà à un casse-tête insoluble, où il n'y a pratiquement aucun choix à faire, presque exclusivement à subir les aléas qui nous échappent complètement, à l'opposé des vies que l'on cherche à avoir, à tout maitriser, à vouloir ceci ou cela, sans toujours de conséquences néfastes, là ce sont des vies qui risques de basculer, et l'espoir est donc que cela n'arrive pas, mais un espoir "opportuniste"/statistique, comme je l'avais nommé au-début du topic.

J'ai volontairement proposé un exemple précis de situation où tu es seul face à ton impuissance, où tes actes et ta volonté ne peuvent rien sur le résultat souhaité. J'ai choisi cet exemple pour qu'il ne reste que l'espoir, parce que je suis curieuse de savoir de quelle façon chacun le vit.

C'est pourtant ce à quoi je me suis appliqué!?

Le but est "d'isoler" l'espoir (de l'action par exemple) pour mieux en identifier le mécanisme.

J'avais le sentiment ( tu vois je ne suis pas prétentieux -_o ) d'avoir isolé au mieux l'espoir vécu selon moi, et non ceux que je vois se manifester ailleurs.

Je crois que tu te focalises sur une définition "religieuse" biaisée de la transcendance alors que je te parle de ce vers quoi la conscience se projette... d'une définition phénoménologique. Je me demande si tu m'as lue ?

Oui je t'ai lu avec toute mon attention, et je ne pense pas pouvoir faire mieux que de décrire comment j'aurais réagi dans ma tête, le déroulement de mes pensées, que ma compagne soit présente ou pas ne change pas son mode d'expression!

Mon espoir ne s'adresse à personne, ni à rien, uniquement que l'équilibre qui était en oeuvre avant revienne, tout comme il s'était rompu il peut se rétablir, par un mécanisme qui m'échappe, mais qui est pourtant purement matériel, ou biochimique si tu préfères.

Voilà, j'espère t'avoir à défaut de pleinement satisfaite, au moins sustentée! :D

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Invité
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Pour un être humain, c'est pareil, les sentiments et émotions violentes s'en mêlant bien évidemment en plus, mais mes espoirs n'auront pas d'autres vocations à comprendre, à rassurer, à faire au mieux et à digérer ce qui se passe. Je ne ferai que constater que je ne peux pas aider comme je le voudrai, que les choses sont indépendantes de ma volonté, que les informations m'échappent, la situation est hors contrôle, que tout s'embrouille, de la colère, de la tristesse, du désespoir, de l'énervement amplifiant outre mesure, ce qui ressemble déjà à un casse-tête insoluble, où il n'y a pratiquement aucun choix à faire, presque exclusivement à subir les aléas qui nous échappent complètement, à l'opposé des vies que l'on cherche à avoir, à tout maitriser, à vouloir ceci ou cela, sans toujours de conséquences néfastes, là ce sont des vies qui risques de basculer, et l'espoir est donc que cela n'arrive pas, mais un espoir "opportuniste"/statistique, comme je l'avais nommé au-début du topic.

Je te rappelle que tu es dans l'attente d'un résultat médical, que tu ne sais strictement rien de ce qu'on t'annoncera, que la nouvelle peut encore être optimiste, que rien n'est joué. Je suppose que dans ce moment là tu nourris encore l'espoir que le médecin t'annoncera une bonne nouvelle !

Si ta réponse est "oui bien sûr que j'espérerai", tout ce que je te demande c'est de te concentrer sur ce moment, aussi furtif soit-il, où tu espères. Que signifie espérer dans ces-moments là, sinon confier son sort au "destin" en comptant sur "lui" pour qu'il soit "bienveillant" ? (tu noteras que je mets tout entre guillemets pour ne pas provoquer de résistance psychologique à se refuser le moindre "mysticisme" ^^)

Ton espoir ne se transforme-t-il jamais en souhait ? Je t'assure que je ne cherche pas à te faire dire quoique ce soit, si tu me réponds "non" je te croirai.

---

Je reviens sur la "transcendance" parce que tu me dis qu'il n'y en a aucune chez toi et je viens de lire ce que tu écris à garalacass, et là je m'adresse à tous. Tu as écrit : "Je dirai plus volontiers, que l'espoir est partie prenante du doute en ce qui concerne un avenir, un devenir". Oui, et c'est en substance ce que je dis depuis le début.

Maintenant, demande-toi comment il est possible d'avoir un doute (ou une certitude) quant à l'avenir ou un devenir sans "sortir de soi-meme", sans dépasser l'instant immédiat ?, sans projection de la conscience sur un "ailleurs" ? sans transcendance de la conscience ?

Nous ne vivons jamais l'instant présent, l'immédiateté, nous nous projetons toujours sur l'à-venir la plupart du temps inconsciemment. Là je suis en train d'écrire un post, sans penser un instant que tu ne le liras peut-etre jamais (enfin bon, maintenant j'y pense forcément^^) De même que je ne commence pas une phrase en pensant que je ne la terminerai pas. Tous nos actes et toutes nos pensées sont intentions sur un "au-delà de soi". C'est ce que j'appelle "la transcendance". Et il faut bien que cet "au-delà" ait un ordre ! celui-là même que nous avons expérimenté jusqu'alors. En ce sens, l'homme se transcendent continuellement.

L'espoir, sans dimension religieuse, c'est la projection de la conscience sur un à-venir ordonné qui pourrait bien répondre à nos intentions (lorsque nous sommes acteurs) et à nos désirs. Pour reprendre la terminologie de Dompteur: c'est l'expectative. Je pense qu'on peut se mettre d'accord pour dire que cette forme d'espoir est commune à tous les hommes. (non?)

Maintenant, j'ai deux questions :

1) Comment est-il possible "d'expecter" sans la croyance d'un monde ordonné qui nous dépasse et qui donne du sens à notre vie (comme il nous en a donné jusqu'alors) ??

2) Quand cette expectative concerne un désir intense dont l'objet ne dépend pas de soi, ne se transforme-t-elle jamais en souhait chez vous ?

Voilà, j'espère t'avoir à défaut de pleinement satisfaite, au moins sustentée! :D

:smile2: et en public !

************

Il est difficile d'aspirer à la transcendance lorsque l'on oppose le refus de la possibilité d'existence de forces organisatrices qui nous dépassent. Que serait une transcendance, en l'absence de toute force antérieure à et indépendante de ce qui nous entoure ? La mise à l'écart de toute déité ou de tout principe premier ne peut que nous enfermer dans l'immanence.

En conséquence, l'espoir pour l'autre ne peut se concevoir que dans la croyance de réalisations extérieures, donc d'une intervention, en tout cas d'une médiation, du divin. Et bien sûr que, dès lors, on ne peut que quêter les signes. Car, comme tu le remarques plus loin, la recherche de la cohérence du monde ne peut qu'obliger à en supposer des lois extérieures à nous-mêmes, donc émanant de forces qui nous dépassent.

"Aspirer à la transcendance" c'est déjà apporter une dimension religieuse à un ordre qui nous transcende. Je ne pense pas nécessaire d'aller si loin, ni d'évoquer un divin, pour accepter que l'espoir est lié au doute et à l'inconnu à venir, donc à notre impuissance et par extension à un désir secret qu'un ordre qui nous dépasse donne du sens à nos vies.

Mais je persiste à dire que l'espoir peut ne pas concerner les autres, être complètement auto-centré, affronter de face la terrible hypothèse d'un monde chaotique dépourvu du moindre sens et ne concerner, alors, que son harmonie intérieure, en attendant la dissolution dans le néant de l'absurde.

Oui, c'est pourquoi l'espoir n'implique pas nécessairement la croyance en un Dieu. Simplement je ne vois pas comment il est possible d'espérer quoique ce soit, sans la croyance, la foi même, que notre propre vie a un sens. Je dirais même un sens qui nous dépasse. Autrement, à la première douleur qui nous parait insurmontable, nous serions tous tentés de nous suicider.

Pourquoi t'étonnes-tu que le Divin soit constitutif du rêve humain ?:|

Mais je ne m'en étonne pas du tout ! :)

Donc, oui, l'espoir a immanquablement une connotation religieuse, du moins dans son acception de préservation de l'avenir. La temporalité oblige à Dieu.

Hum, "oblige à Dieu" non ; mais à un ordre qui nous dépasse oui.

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Invité Simplicius
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Invité Simplicius
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Hum, "oblige à Dieu" non ; mais à un ordre qui nous dépasse oui.

Ne sont-ce pas des synonymes ? Qu'est-ce que Dieu, sinon le nom que nous donnons à ce qui nous est antérieur et nous dépasse ?;)

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Invité
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Ne sont-ce pas des synonymes ? Qu'est-ce que Dieu, sinon le nom que nous donnons à ce qui nous est antérieur et nous dépasse ?;)

Non pour moi ce ne sont pas des synonymes. "Dieu" revêt souvent l'idée d'une Volonté, d'une Intention, et même le plus souvent d'une Morale. Or l'acceptation d'un "ordre qui nous dépasse" ne dit rien quant à l'existence d'une intentionnalité transcendantale (je ne vois pas comment le sens que l'on donne à cet ordre pourrait être autre qu'une construction humaine). On peut s'y référer en dehors de toute signification divine. Chercher un sens à cet ordre ou une cause première est encore un autre débat.

Ce que j'essaie de démontrer ici c'est que la transcendance fait partie de nous, tous, c'est elle qui nous fait vivre et qui nous permet de donner un sens à notre vie. Nous vivons tous continuellement et inconsciemment avec l'idée d'un "ordre qui nous dépasse". L'espoir, qu'il soit expectative ou non, est intimement lié à cette transcendance. L'espoir vise toujours la part d'inconnu qui ne dépend pas de nous. Et il n'est pas étonnant que l'espoir se transforme en souhait, et même en "prière", lorsqu'il nous renvoie à notre impuissance la plus insupportable. Car oui, il n'y a rien d'illogique à ce que nous soyons parfois portés à projeter notre transcendance sur l'idée d'un ordre naturel bienveillant qui nous transcende.

Après, il y a tout un panel possible de comportements. Personnellement je suis trop consciente que cet "ordre naturel bienveillant" relève bien plus d'un désir que d'une réalité pour m'y abandonner pleinement =)

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Dompteur de mots Membre 1 841 messages
Forumeur activiste‚
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On y arrive je crois.

C'est ce "réflexe naturel" (que j'appellerais "mouvement vital") que tu décris que je cherche à identifier chez vous.

Il me semble inévitable chez tous, car le résultat d'un ensemble de mouvements qui nous font vivre : l'instinct de survie, la transcendance (dans le sens de projection de la conscience) , la désir, la crainte, la conscience de notre finitude, le besoin de sens.

Comme toi j'ai tendance à spontanément l'adresser à... rien, qui dans ces moments-là, devient quelque chose, sans vraiment pouvoir la qualifier. Et comme toi ça ne dure jamais que quelque secondes parce que je ne crois pas en dieu et parce que je me rends bien compte que c'est à ce moment-là qu'il aurait toute sa place.

Je pense d'ailleurs que cette fameuse intuition que dieu existe dont parlent les croyants découle précisément de ce réflexe.

Selon moi l'espoir vient de là, de cette intrication de processus cités plus hauts qui nous font vivre l'instant, en lui donnant du sens, tout en nous projetant continuellement sur un "ailleurs", qui n'est autre que l'instant suivant, puis le suivant. L'espoir est un mouvement transcendant de la conscience. Sans lui il ne reste que le suicide.

Et bien moi je pense que l'espoir n'est qu'un reflet du "mouvement vital" dont tu parles (que j'appelais Désir quant à moi). Je re-pointe ici vers ce que j'ai écrit au début, en page 3: l'espoir est un état de celui dont l'esprit est quelque peu fatigué par la vie. Ce n'est pas pour rien que pour des esprits athées (puisque nous sommes encore scotchés à ce mot) tels que nous, l'expression la plus claire de l'espoir nous vient dans des moments d'impuissance et donc de découragement. Mais un esprit au faîte de sa puissance n'a pas besoin de passer par l'espoir: il vit seulement de sa confiance. Une confiance qui lui fait élaborer des projets, qui le pousse dans l'expectative, mais jamais dans la production de représentations secondaires d'impuissance.

L'homme qui est pétri d'espoir engendre des pensées qui ne sont que des dérivés de volonté, des produits seconds, des rejets dégénérés. Lorsque toi et moi prions un dieu qui n'existe pas, c'est précisément que notre volonté est dégénérée, momentanément malade. Lorsque nous sommes au faîte de notre confiance, il n'y a pas de ces états seconds, de ces rejets représentatifs: nous courons directement au but. Ainsi, par exemple - et je suis sûr que c'est la même chose pour toi, mes plus beaux élans philosophiques me viennent de manière assez spontanée, comme si la musique des mots coulait naturellement de mon aire de Broca. J'écris au contraire des merdes (évidemment, ça ne m'arrive que très peu) lorsque je suis fatigué, lorsque j'assemble les idées de manière laborieuse, lorsqu'aussi, parallèlement, j'espère que je serai compris, j'espère que ce que j'écris sera à la hauteur, j'espère que cela sera fidèle à ce que je pense vraiment, j'espère que ce que j'écris sera cool. "À ce que je pense vraiment": comme si j'étais à côté de la plaque, précisément, à cause de quelque disposition physiologique ou psychique qui m'empêcherait de penser avec toute la puissance de mon appareil cérébral, ou peut-être juste à cause de quelque manque de sincérité, ou peut-être d'accès de pédanterie, etc. Bref, à cause d'une maladie (bénigne mais maladie quand même) momentanée de ma volonté.

Ainsi, plutôt que de dire que la conscience espérante est à l'opposé de la conscience suicidaire, je dirais plutôt que l'âme qui est pétrie d'espoir marche à quelque part entre la pleine vie et le suicide. Ce qui est logique puisqu'à un moment où l'autre nous espérons tous, de même que nous ne sommes que rarement au faîte de notre vitalité. L'espoir nous est naturel parce que nous sommes des êtres fluctuants par essence.

J'ai une amie qui a frappé un cul-de-sac dans sa vie et qui est devenue par la suite une "born again christian". Depuis ce moment, elle a perdu un certain éclat dans ses yeux qui me la rendait si attachante. Il m'a frappé qu'elle s'est débarrassée de tous ses disques de musique pour ne conserver que des disques de musique chrétienne franchement insipide. Exactement comme si sa propre volonté lui était devenue trop lourde et que pour se supporter elle-même, elle avait besoin d'en passer par des chemins secondaires, des détours, des représentations secondaires - un peu comme on passe par un ruisseau lorsque le torrent du fleuve nous effraie. Elle est malade de la volonté. Il y a à mes yeux un air de facticité dans tous ses gestes et ses paroles. Et son âme n'aura sans doute jamais été aussi tourné vers l'espoir. On a besoin d'espoir quand on ne sait plus. On a alors au moins besoin de se donner l'impression que l'on sait. Sait-on jamais me demanderas-tu ? Il y a savoir et savoir. On ne sait jamais vraiment au premier sens, le sens littéral, causal. Au deuxième sens par contre, le sens instinctif ou intuitif, on a souvent un savoir suffisant pour embrasser la vie.

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Membre, 55ans Posté(e)
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Baby Forumeur‚ 55ans‚
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Ordre naturel, j'adhère, mais bienveillant implique pour ma part l'idée que cet ordre implique une volonté Autre.. J'aime l'idée de tao, d'une sorte de "flux", de Loi ou d'ordre naturel qu'il est juste préferable de suivre si l'on veut eviter des désagréments, plutot que l'idée d'un ordre bienveillant. La recherche de l'action juste et de ses consequences est à mon avis préférable à l'espoir en quelque chose d'exterieur à soi qui récompense l'enfant s'il a été sage...

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Ordre naturel, j'adhère, mais bienveillant implique pour ma part l'idée que cet ordre implique une volonté Autre..

Nous sommes d'accord ;)

=====

@Dompteur, La différence entre nous, c'est que tu différencies l'espoir de l'expectative, et tu lui attribues une connotation négative en l'associant à une faiblesse.

Alors que de mon côté j'affirme qu'il n'y a pas d'expectative possible sans espoir ; que l'espoir n'est pas une faiblesse mais un mouvement naturel et permanent de la conscience (Si tu n'as pas lu mes derniers posts je t'invite à mon tour à le faire parce que j'en explique les raisons).

(PS : je confirme qu'à mes yeux en tout cas, tu écris rarement des merdes :D)

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Invité Simplicius
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Non pour moi ce ne sont pas des synonymes. "Dieu" revêt souvent l'idée d'une Volonté,

C'est la seule partie de ta définition que je valide, l'existence même de l'Univers impliquant fatalement une volonté de création et de mise en ordre. On ne voit pas très bien comment une absence complète de volonté aurait pu déboucher sur l'ordre des lois qui régissent notre environnement physique.

Pour le reste, c'est historiquement limité. L'ordre n'implique pas forcément une idée de devenir et la bienveillance n'est pas la norme première des cosmogonies polythéistes ni même du Dieu vengeur de l'Ancien Testament.

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Dompteur de mots Membre 1 841 messages
Forumeur activiste‚
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Nous ne vivons jamais l'instant présent, l'immédiateté, nous nous projetons toujours sur l'à-venir la plupart du temps inconsciemment. Là je suis en train d'écrire un post, sans penser un instant que tu ne le liras peut-etre jamais (enfin bon, maintenant j'y pense forcément^^) De même que je ne commence pas une phrase en pensant que je ne la terminerai pas. Tous nos actes et toutes nos pensées sont intentions sur un "au-delà de soi". C'est ce que j'appelle "la transcendance". Et il faut bien que cet "au-delà" ait un ordre ! celui-là même que nous avons expérimenté jusqu'alors. En ce sens, l'homme se transcendent continuellement.

Mais je reviens à ce que j'ai dit un peu plus tôt: quand écris-tu le mieux Théia ? C'est précisément lorsque tu n'es plus empêtrée dans la temporalité de ce que tu écris. De même que le pianiste se met à survoler sa partition lorsque précisément il a acquis assez de pratique pour la connaître jusqu'au bout de ses doigts et ainsi dépasser la temporalité de son acte musical.

Cet au-delà de soi dont tu parles découle de la propension de l'homme pour l'abstraction. Bergson appelle cela l'esprit géométrique, parce que dans cette propension se découvre le goût de l'homme à découper le temps pour établir dans ces découpes les mécanismes des choses. À cet esprit géométrique Bergson oppose un esprit intuitif, où l'homme se laisse glisser dans la fluidité du temps, dans son écoulement naturel, dans le mouvant. Philosopher, pour Bergson, c'est précisément d'abord capter une intuition dans la mouvance dans notre esprit pour ensuite tâcher de la traduire en la géométrisant (il n'y a que l'art qui parle le langage du mouvant). Or, cet état où tu écris le mieux et où le pianiste survole sa partition, c'est celui où l'on s'abandonne dans le mouvant. Je dis "abandonner" mais en effet, c'est une lutte (ne serait-ce que pour détromper les néo-spiritualistes qui pensent que la grâce peut être quelque chose de facile). Bergson affirme que la pente naturelle de notre esprit nous pousse vers la géométrisation du temps et de l'espace et qu'il faut se faire violence pour remonter cette pente. De même que la pente naturelle de notre esprit nous pousse vers l'espoir, qui n'est autre qu'une construction géométrique que notre âme désirante insère dans la vision abstraite que nous nous faisons du monde. Comme lorsque nous prions un Dieu qui n'existe pas. Nous n'avons alors plus l'énergie de lutter pour nous élever à l'autre état, qui à mon sens est celui nous intéresse, et que tu nommes état transcendant, et que Simplicius dénomme peut-être plus justement immanent.

L'espoir, sans dimension religieuse, c'est la projection de la conscience sur un à-venir ordonné qui pourrait bien répondre à nos intentions (lorsque nous sommes acteurs) et à nos désirs. Pour reprendre la terminologie de Dompteur: c'est l'expectative. Je pense qu'on peut se mettre d'accord pour dire que cette forme d'espoir est commune à tous les hommes. (non?)

Maintenant, j'ai deux questions :

1) Comment est-il possible "d'expecter" sans la croyance d'un monde ordonné qui nous dépasse et qui donne du sens à notre vie (comme il nous en a donné jusqu'alors) ??

Je ne sais pas si l'ordre qui fait que je puis légitimement penser que lorsque j'ouvrirai le réfrigérateur le beurre y sera encore, si cet ordre donc est un ordre qui nous dépasse. J'ai plutôt l'impression que cet ordre est immanent à nous, qu'il est en continuité avec nous, que nous nous y sentons bien intriqués, si bien qu'il nous devient comme une seconde nature. Alors que dans l'espoir, n'y a-t-il pas comme une rupture de cette immanence ? Lorsque nous prions un Dieu qui n'existe pas, est-ce que nous ne venons pas de sortir de cette chaîne qui nous entoure ? Est-ce qu'il ne s'agit pas là de la représentation seulement d'une confiance qui nous fait défaut ? C'est une transcendance comme tu le dis si bien: il s'agit d'une sorte de changement d'étage, de registre. C'est comme un éléphant qui soudain accourt et chamboule toutes les constructions régulières qui font le quotidien de nos vies.

Je reviens à Bergson: c'est comme si, incapables de nous faire violence pour justement nous hisser jusqu'à un état intuitif, nous faisions entrer de force l'intuition, le mouvant, le vital dans l'abstraction, contrecarrant le rôle qui est normalement dévolu à l'art ou à la réflexion intuitive.

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Membre, If you don't want, you Kant..., Posté(e)
deja-utilise Membre 5 749 messages
If you don't want, you Kant...,
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Je crois que tu tiens le bon bout, continue, je sens que ça vient... :smile2: ( pas d'esprit mal placé SVP )

Je te rappelle que tu es dans l'attente d'un résultat médical, que tu ne sais strictement rien de ce qu'on t'annoncera, que la nouvelle peut encore être optimiste, que rien n'est joué. Je suppose que dans ce moment là tu nourris encore l'espoir que le médecin t'annoncera une bonne nouvelle !

Si ta réponse est "oui bien sûr que j'espérerai", tout ce que je te demande c'est de te concentrer sur ce moment, aussi furtif soit-il, où tu espères. Que signifie espérer dans ces-moments là, sinon confier son sort au "destin" en comptant sur "lui" pour qu'il soit "bienveillant" ? (tu noteras que je mets tout entre guillemets pour ne pas provoquer de résistance psychologique à se refuser le moindre "mysticisme" ^^)

Ton espoir ne se transforme-t-il jamais en souhait ? Je t'assure que je ne cherche pas à te faire dire quoique ce soit, si tu me réponds "non" je te croirai.

C'est enfin plus clair, mieux vaut tard que jamais, parait-il!

Alors oui, je vais espérer un certain nombre de choses, avant l'annonce du diagnostic:

J'attends donc de bonnes nouvelles ou pas trop mauvaises, espérant toujours que la mécanique du corps n'est pas trop détraquée, que le corps médical se trompe, ou doute du résultat qui sera annoncé. Je ne fais aucun voeu d'aucune sorte, ce n'est pas être défaitiste, mais lucide, les choses ne sont pas du ressort de ma volonté, je sais que la santé est fragile, que d'innombrables causes peuvent la faire chavirer, mais aussi que notre organisme est armé pour se défendre bien souvent seul, ou aidé un peu par l'extérieur, que toutes personnes malades ou se rendant à l'hôpital ne meurt pas précipitamment, j'espère ou souhaite que la balance chance vire du coté le plus favorable, tel un jeu de pile ou face, il n'y a rien de transcendant, juste le hasard qui détermine le résultat, rien n'empêche d'espérer obtenir le coté que l'on a choisi, et bien en ce qui concerne l'équilibre interne, ( la fameuse homéostasie dont tu m'avais parlé par exemple ) qui est soumises à moult paramètres invisibles, inaccessibles, se maintienne ou se rétablisse en cas de problème, ou autrement dit que le lancé de tous les paramètres influents tombe du bon coté, ou si ce n'est pas le cas dans un premier temps, que les cellules du corps récupère d'une manière ou d'une autre ce qui est nécessaire au bon fonctionnement, notre corps est avant tout une machine autonome qui s'auto-répare, le résultat attendu ne changera pas ce fonctionnement, je ne peux juste espérer que les circonstances, physiques/naturelles, soient favorables.

Pour t'aider à mieux saisir cette façon d'appréhender la vie, je te rapporte la genèse de mon a-croyance, qui n'est pas forcément à connotation religieuse, croyance au sens très large. Très tôt dans mon enfance, j'entendais des gens se référer à une entité "transcendante", que celle-ci soit un dieu, une force, une entité, une volonté, importe peu, j'ai eu beau chercher et vérifier ce qu'ils m'en disaient, je n'ai jamais perçu les choses comme ils l'évoquaient, avec les raisons ou les explications fournies. Puis continuant à comprendre mon environnement, curieux que je suis et qui ne m'aura jamais quitté, je me suis orienté vers des études sup. de physiques théoriques, où là aussi, j'ai critiqué minutieusement toutes les théories enseignées, ce qui non seulement confirmait toujours davantage la nature déterministe du monde, bien que pas toujours prévisible pour différentes raisons que je t'épargne pour l'heure, mais aussi je commençais à sérieusement douter de la véracité de toutes les théories, qui sont devenues pour ma part de simples représentations plus ou moins fidèles en terme de prévision de la réalité, aucunement des explications satisfaisantes. J'ai donc perdu toute forme de foi envers toute explication qui soit trop artificielle/construite, sans un rapport étroit avec les faits et la raison, et j'ai bien dit perdu, car j'ai l'intime conviction que nous naissons tous avec cette capacité à croire en quelque chose, que certains perdent superficiellement, comme ceux qui se pensent faussement athée, jusqu'au moment où leur raison, explications habituelles, échouent à rendre compte des évènements, alors ils "retombent"/retournent dans ce qu'ils pensaient étranger à eux-même, mais ce n'était qu'une protection, qu'un masque, alors que pour ma part, j'ai perdu toute trace, aussi infime puisse t-elle être de croyance, de ressenti, d'intuition contraire à l'entendement, à la raison, et très loin dans mes retranchements, je le sais, il n'y a qu'un désert de Gobi au delà de mes constructions psychiques, conscientes ou inconscientes, puisque je me suis également auto-analysé très profondément. Je n'ai pas plus foi en la bonté humaine ou en la grandeur d'âme de l'être humain, ce que j'en ai vu ou vécu, m'a enlevé/retiré toute rêverie/illusion.

Donc si espoir il m'arrive d'avoir, c'est un espoir épuré, mathématique, froid, sans arrière pensée, arrière attente, de double niveau, uniquement une vision extra-lucide/réaliste des choses présentes ou à venir, même si je ne maitrise pas la situation, l'impuissance comme tu l'écris n'est pas incompatible avec un détachement total sur ses attentes, mais empruntes d'émotions ou de sentiments, qui se surajoutent à l'espoir neutre ainsi décri.

Je n'ai absolument aucune forme d'illusion, la seule "magie" que je reconnais est celle de la vie elle-même et son corollaire les sentiments viscéraux, tel l'amour de ses enfants/parents ou de son "double", voire d'amis particuliers.

Je reviens sur la "transcendance" parce que tu me dis qu'il n'y en a aucune chez toi et je viens de lire ce que tu écris à garalacass, et là je m'adresse à tous. Tu as écrit : "Je dirai plus volontiers, que l'espoir est partie prenante du doute en ce qui concerne un avenir, un devenir". Oui, et c'est en substance ce que je dis depuis le début.

Maintenant, demande-toi comment il est possible d'avoir un doute (ou une certitude) quant à l'avenir ou un devenir sans "sortir de soi-meme", sans dépasser l'instant immédiat ?, sans projection de la conscience sur un "ailleurs" ? sans transcendance de la conscience ?

Tout simplement par le double effet de la mémoire et de la causalité, dans ce cas nous pouvons projeter mentalement quelque chose dans l'avenir ( une sorte de "remémorisation" revisitée ), y compris dans une expectative. C'est à dire que d'avoir constaté certaines régularités, puis intériorisées, nous pouvons nous faire un scénario imaginaire en modifiant des paramètres, ou avec de nouvelles entrées, ou penser à une nouvelle réalisation de ce que nous avons enregistré, déjà vécu similairement, nous construisons une possibilité de réalisation Irl. Et puisque cette scénarisation est hypothétique, imaginée, fantasmée, en devenir, potentielle, elle n'a donc qu'un caractère probable tant qu'elle n'est pas passée, un doute inévitable s'immisce, et si elle est désirée ( souhaitée-voulue ), si nous projetons de l'obtenir, de la réaliser vraiment, alors nous allons par conséquent, espérer.

Nous sommes capables de reconstruire avec des bribes de la réalité, et des liens logiques habituels, de nouvelles possibilités ou les mêmes modifiées ou pas, tout ceci avant concrétisation, nous projetons dans notre psyché un avant goût de ce qui peut advenir, moyennant des impondérables, pas toujours solubles par notre seule volonté.

Nous ne vivons jamais l'instant présent, l'immédiateté, nous nous projetons toujours sur l'à-venir la plupart du temps inconsciemment. Là je suis en train d'écrire un post, sans penser un instant que tu ne le liras peut-etre jamais (enfin bon, maintenant j'y pense forcément^^) De même que je ne commence pas une phrase en pensant que je ne la terminerai pas. Tous nos actes et toutes nos pensées sont intentions sur un "au-delà de soi". C'est ce que j'appelle "la transcendance". Et il faut bien que cet "au-delà" ait un ordre ! celui-là même que nous avons expérimenté jusqu'alors. En ce sens, l'homme se transcendent continuellement.

Oui, on utilise simplement un vocabulaire différent, je réserve ce terme de transcendance à quelque chose qui dépasse l'homme, dans sa totalité, or une activité mentale consciente ou inconsciente, n'est pas pour moi, un acte transcendant, mais un processus interne, normal!

Toutes nos actions ont nécessairement un but, volontaire ou pas, nous sommes d'accord, et ce but pour qu'il y ait action doit être différent de l'état présent, c'est comme pour mouvoir un objet, il faut que l'on désire qu'il soit ailleurs d'où il est ( ou différemment ), sinon il n'y a pas de mouvement possible, il en va de même avec notre psychique, il faut que le but soit ailleurs que là où nous sommes, en quelque sorte, sinon nous ne bougeons pas, même potentiellement.

L'espoir, sans dimension religieuse, c'est la projection de la conscience sur un à-venir ordonné qui pourrait bien répondre à nos intentions (lorsque nous sommes acteurs) et à nos désirs. Pour reprendre la terminologie de Dompteur: c'est l'expectative. Je pense qu'on peut se mettre d'accord pour dire que cette forme d'espoir est commune à tous les hommes. (non?)

Oui, comme je l'ai dit l'espoir n'est qu'une des manifestations du désir, on peut l'appeler de manière synonyme expectative, je n'y vois aucun inconvénient, mais cela réduit toutes les possibilités que j'avais rattaché à l'espoir, puisqu'il existe aussi un espoir où l'on est inactif ou encore celui qui repose entièrement sur autrui, quoique si on le retraduit lui aussi en "attente d'un objet désiré", il n'y plus de restriction. Alors va pour expectative!

Maintenant, j'ai deux questions :

1) Comment est-il possible "d'expecter" sans la croyance d'un monde ordonné qui nous dépasse et qui donne du sens à notre vie (comme il nous en a donné jusqu'alors) ??

2) Quand cette expectative concerne un désir intense dont l'objet ne dépend pas de soi, ne se transforme-t-elle jamais en souhait chez vous ?

1) Manifestement, ce sera selon l'histoire de chacun.

Primo, je ne vois pas de sens à ma vie, ni à celles des autres, secundo le monde ordonné nous est donné par l'expérience, nous aurions pu être dans un monde régi par d'autres règles, où il ne nous aurait pas été possible de faire de liens causaux par exemple, et donc des catégories, nous n'aurions trouvé aucun ordre, de plus nous "n'expecterions" rien du tout, puisqu'aucune prévision ne serait possible.

Peu importe que le monde nous dépasse ou pas, puisqu'il nous dépasse nécessairement, nous ne sommes qu'un simple élément parmi une multitude gigantesque.

Les choses qui importent, c'est qu'il soit suffisamment régulier et que l'on puisse se souvenir de ces régularités, pour "travailler" dessus: imaginer, souhaiter, vouloir, espérer.

2) Le désir étant protéiforme, on peut bien sûr passer d'une forme à une autre, selon les circonstances particulières, l'évolution de la situation, de la prise de conscience, de la réflexion, etc...

Il arrive également qu'à trop triturer le "bébé" avant sa concrétisation, que le désir s'estompe, à force d'en avoir fait le tour, l'énergie, l'effet de surprise diminuant, l'intensité du désir également, pouvant être contre-balancé par des résistances mises dans la balance.

:smile2: et en public !

Arh zut, j'avais oublié que nous sommes des singes évolués civilisés, et que nombre de choses sont tabous...

***********

Je finirai par ceci:

" Dans la perspective de Deleuze et Guattari, le désir n'est plus conçu comme un manque, mais comme une production, une affirmation. "

Ce que j'essayais de dire précédemment aussi.

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Dompteur de mots Membre 1 841 messages
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@Dompteur, La différence entre nous, c'est que tu différencies l'espoir de l'expectative, et tu lui attribues une connotation négative en l'associant à une faiblesse.

Alors que de mon côté j'affirme qu'il n'y a pas d'expectative possible sans espoir ; que l'espoir n'est pas une faiblesse mais un mouvement naturel et permanent de la conscience (Si tu n'as pas lu mes derniers posts je t'invite à mon tour à le faire parce que j'en explique les raisons).

J'attends ta réaction à mon dernier post pour la différence entre espoir et expectative.

L'espoir est un mouvement naturel et permanent de la conscience, certes… Et on ne saurait conséquemment faire l'économie d'une introspection à ce sujet. Mais ce n'est pas parce que c'est un penchant inscrit en nous qu'il ne faut pas lutter contre ce penchant.

Je pense aussi qu'il y a moyen de commercer avec cette partie de nous incorrigiblement avide d'espoir. Par exemple, je ne crois aucunement en une quelconque forme de vie après la mort. Aucunement. En même temps, je crois au fait que les personnes qui me sont chères et qui sont décédées m'accompagnent tous les jours. Pourtant, je sais que c'est une illusion - aussi ne la laisse-je pas avoir de conséquences néfastes sur mon existence (contrairement à ceux qui deviennent adeptes de la communication avec les esprits, ou qui espèrent tout simplement que la mort ne sera pas le terme de leur existence). Mais j'aime cette illusion. Je m'accommode alors en me disant que la trace que ces personnes ont eu sur ma vie s'est infiltrée à quelque part dans mon inconscient et que cette trace a sa propre vie, sa propre énergie en moi. Et bon, je me permets de romancer quelque peu les effets de cette énergie psychique-là. Mais je sais que c'est une romance.

Quelle différence entre une fiction qui nous remplit d'émoi et l'espoir ? Nous savons que la fiction est fausse et conséquemment, nous y investissons un amour lucide. Nous pourrions appeler cette fiction lucide la fantaisie.

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C'est la seule partie de ta définition que je valide, l'existence même de l'Univers impliquant fatalement une volonté de création et de mise en ordre. On ne voit pas très bien comment une absence complète de volonté aurait pu déboucher sur l'ordre des lois qui régissent notre environnement physique.

Je ne voudrais pas dévier sur un autre débat, mais on peut aussi se demander si notre façon d'interroger l'univers ne joue pas un rôle dans l'existence de ces lois. Les "lois qui régissent l'univers" pourraient n'être que le produit de la rationalité humaine.

Pour le reste, c'est historiquement limité. L'ordre n'implique pas forcément une idée de devenir et la bienveillance n'est pas la norme première des cosmogonies polythéistes ni même du Dieu vengeur de l'Ancien Testament.

Oui c'est vrai, je suis allée à la plus courante (selon moi) des conceptions de Dieu mais elle n'est pas exclusive évidemment. C'est pourquoi j'ai précisé "souvent". Mais tu as raison j'aurais dû me contenter de te répondre "Ils ne sont pas toujours synonymes, tout dépend de ce que l'on entend par Dieu".

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Mais je reviens à ce que j'ai dit un peu plus tôt: quand écris-tu le mieux Théia ?

Jamais :/ Tu tombes mal c'est un très mauvais exemple pour moi. Quand j'écris je suis comme un peintre droitier qui a le pinceau dans la main gauche. Mais je pratique un autre moyen d'expression que l'écriture alors je devrais pouvoir te suivre.

C'est précisément lorsque tu n'es plus empêtrée dans la temporalité de ce que tu écris. De même que le pianiste se met à survoler sa partition lorsque précisément il a acquis assez de pratique pour la connaître jusqu'au bout de ses doigts et ainsi dépasser la temporalité de son acte musical.

Cet au-delà de soi dont tu parles découle de la propension de l'homme pour l'abstraction. Bergson appelle cela l'esprit géométrique, parce que dans cette propension se découvre le goût de l'homme à découper le temps pour établir dans ces découpes les mécanismes des choses. À cet esprit géométrique Bergson oppose un esprit intuitif, où l'homme se laisse glisser dans la fluidité du temps, dans son écoulement naturel, dans le mouvant. Philosopher, pour Bergson, c'est précisément d'abord capter une intuition dans la mouvance dans notre esprit pour ensuite tâcher de la traduire en la géométrisant (il n'y a que l'art qui parle le langage du mouvant). Or, cet état où tu écris le mieux et où le pianiste survole sa partition, c'est celui où l'on s'abandonne dans le mouvant. Je dis "abandonner" mais en effet, c'est une lutte (ne serait-ce que pour détromper les néo-spiritualistes qui pensent que la grâce peut être quelque chose de facile)

.

Il faudrait sans doute que je lise ce qu'en écrit Bergson pour mieux comprendre, mais d'après ce que tu m'en dis j'ai plutôt le sentiment que cet au delà de soi dont je parle correspond à ce qu'il nomme l'esprit intuitif et non à l'esprit géométrique.

Bergson affirme que la pente naturelle de notre esprit nous pousse vers la géométrisation du temps et de l'espace et qu'il faut se faire violence pour remonter cette pente. De même que la pente naturelle de notre esprit nous pousse vers l'espoir, qui n'est autre qu'une construction géométrique que notre âme désirante insère dans la vision abstraite que nous nous faisons du monde. Comme lorsque nous prions un Dieu qui n'existe pas. Nous n'avons alors plus l'énergie de lutter pour nous élever à l'autre état, qui à mon sens est celui nous intéresse, et que tu nommes état transcendant, et que Simplicius dénomme peut-être plus justement immanent.

(...)

Je ne sais pas si l'ordre qui fait que je puis légitimement penser que lorsque j'ouvrirai le réfrigérateur le beurre y sera encore, si cet ordre donc est un ordre qui nous dépasse. (tssss tu dis ça parce que tu ne connais pas les vertus magiques du beurre !) J'ai plutôt l'impression que cet ordre est immanent à nous, qu'il est en continuité avec nous, que nous nous y sentons bien intriqués, si bien qu'il nous devient comme une seconde nature. Alors que dans l'espoir, n'y a-t-il pas comme une rupture de cette immanence ? Lorsque nous prions un Dieu qui n'existe pas, est-ce que nous ne venons pas de sortir de cette chaîne qui nous entoure ? Est-ce qu'il ne s'agit pas là de la représentation seulement d'une confiance qui nous fait défaut ? C'est une transcendance comme tu le dis si bien: il s'agit d'une sorte de changement d'étage, de registre. C'est comme un éléphant qui soudain accourt et chamboule toutes les constructions régulières qui font le quotidien de nos vies.

Je reviens à Bergson: c'est comme si, incapables de nous faire violence pour justement nous hisser jusqu'à un état intuitif, nous faisions entrer de force l'intuition, le mouvant, le vital dans l'abstraction, contrecarrant le rôle qui est normalement dévolu à l'art ou à la réflexion intuitive.

Je ne comprends pas ce qui te fait penser que l'espoir serait une construction géométrique. Pour moi au contraire il est de l'ordre de l'intuition. Ce qui serait construction géométrique c'est la traduction que les hommes s'en font : superstitions, dieux, etc.. Mais l'espoir en soi, sans ses représentations imaginaires, est semblable à une fenêtre ouverte sur le monde, sans contrainte "géométrique". C'est une fenêtre dont nous disposons tous naturellement parce qu'elle est constitutive de notre état d'être vivant en mouvement permanent dans le temps et l'espace, réel et virtuel. Si je reprends ce que tu viens de me dire de Bergson, l'espoir serait un pont entre l'esprit géométrique et l'esprit intuitif.

Je te donne un exemple personnel puisque je pratique un art visuel. Pour moi il est le seul moyen de parler le langage du mouvant que tu évoques plus haut (je pense cependant que la musique serait plus adaptée encore, mais je ne maîtrise pas assez). Comme tu le dis à juste titre, les moments d'expression les plus authentiques d'une idée intuitive sont ceux où je réussis à "me laisser glisser dans la fluidité du temps, dans son écoulement naturel, dans le mouvant". Concrètement , je suis seule, dans le silence, en dehors du temps, et je dois même souvent plisser les yeux pour conserver une vision "idéelle" de ce que je produis, pour ne pas me laisser happer par un détail qui me ramènerait au contraintes du concret. Ces moments, où une intuition se transforme en langage, je ne les vis que lorsque l'espoir se fait sentir en moi, il est le moteur de la création. Dans ces moments-là, je ne prie aucun dieu ; je m'adresse au monde, au nom du monde ; je SUIS dieu ! (non ne m'enfermez pas encore je vous en prie). C'est quand l'espoir me fait défaut que je ne bafouille que du mauvais, du vide.

Tu conçois l'espoir comme une faiblesse de l'esprit, teintée de nostalgie si je ne m'abuse. Quant à moi je pense au contraire qu'il n'y a d'espoir que dans l'impuissance mais que c'est l'espoir qui nous en sort et nous transcende. Ce qui peut en faire une faiblesse de l'esprit, c'est peut-être "l'objectivation" de l'espoir et la tendance à remettre notre sort entre ses mains. Comme dans ces moments où il nous arrive de lancer une prière au ciel "en désespoir de cause".

Mais l'espoir n'est qu'une ouverture sur un possible. En cela je ne vois pas ce qu'il aurait de sclérosant. C'est lorsqu'il nourrit nos illusions ou qu'il mène à l'inaction qu'il peut être néfaste.

L'espoir est un mouvement naturel et permanent de la conscience, certes… Et on ne saurait conséquemment faire l'économie d'une introspection à ce sujet. Mais ce n'est pas parce que c'est un penchant inscrit en nous qu'il ne faut pas lutter contre ce penchant.

Je pense aussi qu'il y a moyen de commercer avec cette partie de nous incorrigiblement avide d'espoir.

Tu vois, le fait que tu écrives "avide d'espoir" me dit déjà que tu l'objectives, que tu en définis des contours, qu'on pourrait presque appeler "dieu" non ?

Ce n'est pas mon cas. Si je reconnais que l'espoir peut mener à une croyance (croire en l'existence d'un dieu par exemple), il né avant tout de ce que l'on ne sait pas, de ce qui nous dépasse. Mais espérer ce n'est pas croire! L'espoir est une sorte d'espace ouvert aux objets de nos croyances, ou de nos désirs. On peut porter un jugement sur ce que chacun fait de cet espace, mais l'espoir en soi est neutre. Je distingue bien l'espoir de la croyance.

Par exemple, je ne crois aucunement en une quelconque forme de vie après la mort. Aucunement. En même temps, je crois au fait que les personnes qui me sont chères et qui sont décédées m'accompagnent tous les jours. Pourtant, je sais que c'est une illusion - aussi ne la laisse-je pas avoir de conséquences néfastes sur mon existence (contrairement à ceux qui deviennent adeptes de la communication avec les esprits, ou qui espèrent tout simplement que la mort ne sera pas le terme de leur existence). Mais j'aime cette illusion. Je m'accommode alors en me disant que la trace que ces personnes ont eu sur ma vie s'est infiltrée à quelque part dans mon inconscient et que cette trace a sa propre vie, sa propre énergie en moi. Et bon, je me permets de romancer quelque peu les effets de cette énergie psychique-là. Mais je sais que c'est une romance.

Quelle différence entre une fiction qui nous remplit d'émoi et l'espoir ? Nous savons que la fiction est fausse et conséquemment, nous y investissons un amour lucide. Nous pourrions appeler cette fiction lucide la fantaisie.

Justement, c'est un bon exemple que tu choisis-là. Selon mon point de vue que j'ai tant de mal à expliquer, sans espoir (celui que les personnes qui te sont chères t'accompagnent) tu ne pourrais pas te créer cette fiction lucide. C'est l'espoir qui te permet d'accommoder ton désir à ton système de pensée, et qui en fait une force. Mais parce que tu sais que c'est une illusion, tu ne t'abandonneras pas à quelques croyances mystiques. Chez d'autres en effet, le même espoir peut mener à la croyance qu'il y a une vie après la mort et qu'il est possible de communiquer avec les défunts.

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Edit : Puisqu'on a évoqué plus d'une fois le mythe de Sisyphe dans ce topic, je voudrais y ajouter ma lecture. L'espoir chez Sisyphe c'est ce qui lui a permis de défier à nouveau les dieux en trouvant la capacité de supporter son châtiment, malgré l'absurde, malgré "le silence déraisonnable du monde".

La lutte pour vivre est une réponse à l'absurde. Lacher le rocher, se suicider, serait accepter que la vie n'a aucun sens. Certes Sisyphe ne nourrit plus l'espoir que le monde a un sens, mais c'est l'espoir de donner du sens à son existence qui lui donne la force de toujours lutter vers les sommets.

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Modifié par Théia
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