Le règne de l'anecdote

Mais qu'arrive-t-il donc aux chaînes d'information ? Une bizarre maladie semble les atteindre, presque toutes. Le nom de cette pathologie n'est pas fixé. On parle de « sujets concernants », de « télé-miroir », d'info « de proximité ». Depuis longtemps, le 13 heures de TF1 célébrait « les bons plats qui réchauffent » dès les premiers frimas et la fraîcheur du rosé de Provence dès que pointait l'été. Les archives débordent de séquences d'anthologie, neige d'automne dans le Cantal, cueillette du muguet par les vendeurs du 1^er mai…

Ceci est du passé. La nouveauté, c'est ce vécu des « vraies gens » qui s'est désormais faufilé partout, s'adaptant aux diverses rubriques, infiltrant les chaînes publiques aussi bien que privées, les généralistes comme les tout-info. La météo fait régulièrement la une, avec reportages prévisibles à la clef. Canicule : la vie torride des livreurs d'eau minérale, des marchands de glaces, des urgences de l'hôpital. Verglas soudain : la vie des urgences de l'hôpital, derechef, et bien sûr l'interview d'un conducteur de camion de salage. Entre-temps, inondations, feux de forêt, noyades sur les plages, foudres sur les campings vont meubler le quotidien.

Ce serait bénin si l'étrange manie n'avait fini par submerger aussi les autres rubriques. En « société », la rentrée scolaire ne semble pas affaire de nombre de postes, de surcharge des programmes ni de stratégie des politiques éducatives. Nous accompagnons Muriel, élève de seconde à Montauban, dans l'achat de sa trousse et la découverte de ses nouvelles copines.

L'économie ne semble plus dépendre du PIB, des investissements, de la croissance ou de la balance extérieure, elle se réduit à ce que disent de la TVA à 10 % Maurice, artisan maçon à Colmar, ou de la refiscalisation des heures supplémentaires par André, manutentionnaire à Brest.

L'exemple vécu paraît tenir lieu d'information, le cas singulier se substituer aux analyses. En fait, ce n'est pas entièrement vrai : quand sont finis les témoignages, arrivent fréquemment des experts, chargés de les commenter.

Les journalistes n'auraient-ils pour fonction que de dénicher et l'exemple et l'expert ? Rien de plus ? Derrière ces nouvelles pratiques, des questions de fond se profilent. Car cette information de proximité, qui dit si peu du monde, de ses tendances et de ses tensions, qui parle tant des Français, de leurs villages, leurs bourgs, leurs banlieues et leurs oeillères, à quoi correspond-elle au juste ? A défaut de certitude, on peut esquisser des hypothèses.

Serait-ce que seuls notre propre visage et nos petites aventures nous intéresseraient ? Notre moi, hypertrophié, souverain, se contemple-t-il complaisamment au salon, au lieu de s'informer des autres et du dehors ?

Suite http://www.lesechos.fr/entreprises-secteurs/medias/debat/0203015830562-le-regne-de-l-anecdote-607242.php

Faut éviter à tous prix les sujets de fond, réfléchis, incitant de fait à insurrection.

Tous les sujets de fond n'incitent pas à l'insurrection.

Pour TF1, le midi la France est belle, le soir le monde est moche. Les marronniers sont navrants, autant que les témoignages de ces gens qu'on interviewe au marché et qui sortent des banalités déconcertantes et souvent misérabilistes. Heureusement, il arrive de temps à autre qu'une personne fasse entendre un avis plein de raison. Est-ce du bon journalisme ? Les médias répondent-ils aux attentes d'une majorité de Français ou suivent-ils une voie que la plupart regrette ?

autant que les témoignages de ces gens qu'on interviewe au marché et qui sortent des banalités déconcertantes et souvent misérabilistes.

Et coupées au montage, ça me semblait important de le souligner.

La semaine dernière TF1 a manqué un scoop : je suis allée à la cueillette des mûres.

Obligée de cueillir des mûres pour te nourrir ?

Mince, j'croyais pas que la situation française était si désespérée que ça..

@ Notre moi, hypertrophié, souverain, se contemple-t-il complaisamment au salon, au lieu de s'informer des autres et du dehors ?

Peut-être je me trompe, mais il me semble bien que tout est comme cela et non pas que d'un point de vue de l'information, et cet article Des Echos, me semble t-il aussi, aurait pu être écrit il y a bien longtemps, d'ailleurs je le pensais avant de cliquer sur le lien. Bref "les" Jean Pierre Pernaut (et son petit côté populiste) ne sont pas là d'hier et visiblement pas prés de se barrer non plus, nous pourrons encore compter sur eux pour nous conter les histoires de dame pipi qui, d'une main branlante, fait les comptes de la journée. Mais qu'il s'agisse d'info, ou d'autre chose, (ou internet pour ne pas le citer), oui : Notre moi, hypertrophié, souverain, se contemple complaisamment au salon, au lieu de s'informer des autres et du dehors.Mais ce n'est pas un scoop non plus.

Obligée de cueillir des mûres pour te nourrir ?

Mince, j'croyais pas que la situation française était si désespérée que ça..

Bah non, mais on était en plein dans la période des mûres, des confitures, tout ça, et TF1 n'en a pas dit un mot ! C'est louche, ça.:bad:

Jette tes mûres, elles sont contaminées t'as raison ! :(

:D

@ Notre moi, hypertrophié, souverain, se contemple-t-il complaisamment au salon, au lieu de s'informer des autres et du dehors ?

Peut-être je me trompe, mais il me semble bien que tout est comme cela et non pas que d'un point de vue de l'information, et cet article Des Echos, me semble t-il aussi, aurait pu être écrit il y a bien longtemps, d'ailleurs je le pensais avant de cliquer sur le lien. Bref "les" Jean Pierre Pernaut (et son petit côté populiste) ne sont pas là d'hier et visiblement pas prés de se barrer non plus, nous pourrons encore compter sur eux pour nous conter les histoires de dame pipi qui, d'une main branlante, fait les comptes de la journée. Mais qu'il s'agisse d'info, ou d'autre chose, (ou internet pour ne pas le citer), oui : Notre moi, hypertrophié, souverain, se contemple complaisamment au salon, au lieu de s'informer des autres et du dehors.Mais ce n'est pas un scoop non plus.

Pas un scoop, mais n'y aurait-il pas un phénomène "d'identification" également ? Réel ou engendré par cette façon d'informer ?

Regarder untel à la télé et se dire "ah oui c'est vrai son truc, c'est vrai ce qu'il dit", ou l'inverse, bien avant de raisonner par soi-même et de se faire sa propre opinion ?

@mais n'y aurait-il pas un phénomène "d'identification" également ?

Bien évidemment et cela alimente la machine à café et autres brèves de comptoir, et soit on se complait, soit on se rassure ( voir des plus pauvres que soit blablabla blablabla ). Quand à la part de responsabilité ou non d'un tel mode d'info sur ça façon de raisonner et son livre arbitre, tout ce que je sais c'est que quand tu demande aux personnes, qui regardent les infos de Pernaut, pourquoi ils regardent "ça", ils te répondent qu'ils aiment cela, que le reste du monde ne les intéressent pas, que les nouvelles du monde s’arrête au clocher de leur village, bref perso si cela leur va, ça me va aussi et quelque part ils n'ont peut-être pas tout à fait tort.