Peut-on connaître ce que l'on ignore ?

Mais le plus grand des dangers n'est-il pas se remettre à quelqu'un qui se dit posséder le savoir absolu ? Et pourtant qui ne serait pas tenté d'accéder immédiatement au savoir, surtout quand on est au plus profond de l'ignorance ? Il suffit d'avoir un caractère faible pour croire en l'autorité d'une personne qui détiendrait la somme de tous les savoirs, une vérité éternelle et absolue... le danger le plus grand étant la dérive sectaire, par exemple.

C'est aussi ce qui se passe avec la techno-science, tout un chacun fait confiance à cette dernière puisqu'elle nous dépasse.

Et c'est pour cela que l'on entend régulièrement qu'il y a eu des dérapages, et que nous en sommes réduits à observer rageusement que nous sommes uniquement des pions que l'on abuse, mais sans pour autant qu'il y ait de véritable responsable, car bien souvent cette responsabilité est diluée dans la dispersion grandissante, en de multiples personnes plus ou moins directement intéressées à l'objet lui-même, mais plus vraisemblablement de nos jours, à l'argent que cela peut faire rapporter. Ainsi les événements échappent à tout contrôle, y compris les conséquences à venir, mais sinon l'être humain est intelligent!?

Peut on connaitre ce que l'on ignore ? 

D'après ma propre expérience, il est remarquable que la sensation de comprendre soit aussi proche de la sensation de se souvenir. 

Plus simplement, je suis personnellement confronté à des problèmes de méthodologie en sciences sociales et notamment au cours d'enquêtes qualitatives (entretiens et non pas questionnaire). Il se trouve par exemple qu en ce moment je suis dans le situation ou je dois, sur un sujet nouveau non encore traité et pour lequel il n y a pas de tradition de pensée sur laquelle s'appuyer (que ce soit en terme de guide ou au contraire pour appuyer une critique), faire parler un corpus d'entretiens assez large. Or je m'apercois de manière très concrète qu'à la croisée des entretiens, il y a soi. Au moins de deux manières : tout d'abord mes propres représentations (et j inclus les modèles théoriques en sciences humaines) qui influent sur ma lecture. Or il me semble que nous pouvons raisonnablement admettre que ces représentations, moins que de fausser mes analyses en vertu d'une aspiration à l'objectivité, participent au contraire de mon travail d'analyse et constituent autant de ressources potentielles, surtout pour ce qui concerne les modèles théoriques. Mais il y a également les raisonnements "compressés" qui guident ou semblent guider mon attention et déterminent donc mes analyses. Or avec le temps, je réalise que ces raisonnements 'compressés' sont plutôt 'en décompression' en vertu de quoi ils semblent rétroactivement 'compressés'. Mais, de manière générale, ils aboutissent sur un travail réflexif, à me souvenir de choses auxquelles je n avais pas prêté attention mais qui maintenant sont pertinentes dans ma lecture des entretiens, bien qu elles soient en quelque sorte intime. 

Peut on connaitre ce que l'on ignore ?

D'après ma propre expérience, il est remarquable que la sensation de comprendre soit aussi proche de la sensation de se souvenir.

Je verrais les choses sous un autre angle, si pas ignorer on entend consciemment, et par connaitre en avoir une intuition ou une connaissance inconsciente, il n'y a plus d'antinomie, il ne reste pus qu'à attendre que perce le fait ou le processus inconscient jusqu'à la mémoire de travail dans la conscience par le biais d'un effet d'associations d'idées par exemple, et on se retrouvera à connaitre ce que l'on ignorait jusqu'à présent. Comme la blague: "pourquoi rit il? Et bien, il s'est raconté une histoire qu'il ne connaissait pas! " :smile2:

Montaigne est ici encore pris en flagrant délit de plagiat : "Nul ne questionne jamais, ni ceux qui savent, d'autant qu'ils savent, ni ceux qui ne savent pas, car pour s'enquérir, il faut savoir de quoi on s'enquiert." "Pour corriger son ignorance, il faut la confesser." Du même auteur.