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Le filet se resserre autour d'Herman Kumara au Sri Lanka


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[01/07/2012]

Le défenseur des petits pêcheurs, Herman Kumara, est devenu au fil des ans, et à mesure que le régime sri lankais se durcisssait, un militant des droits de l’Homme très exposé.

Pour ce père de famille de 48 ans, il n’y a aucun doute. « Je ne suis ni un radical ni un gauchiste ou un marxiste. Je suis juste quelqu’un qui a compris qu’il devenait nécessaire que, dans ce pays, certains se lèvent pour rétablir la vérité et faire bouger les choses, affirme-t-il. Je ne fais qu’être aux côtés de la population et défendre ses droits. »

Une prise de position et un engagement qui valent à Herman Kumara, fondateur, en 1997, du National Fisheries Solidarity Movement (Nafso), ONG de défense de la pêche artisanale au Sri Lanka, d’être aujourd’hui considéré par les autorités sri lankaises comme un « traître à la patrie ». Dans ce pays qu’il qualifie de « dictature constitutionnelle », Herman dérange. Au plus haut niveau. Le temps est en effet loin où la petite ONG locale ne s’intéressait qu’aux conditions de vie des pêcheurs et de leurs familles. Au fil des ans, le Nafso est devenu une organisation d’ampleur nationale dont les préoccupations se sont, elles aussi, largement étendues. À côté des programmes destinés aux pêcheurs, notamment la promotion d’une politique de pêche durable et du respect de leurs droits « socio-économico-culturo-politiques », le Nafso assiste les déplacés internes d’origine tamoule dans le nord du pays. « Principalement sur des questions de droit à la terre, à une vie décente et à la sécurité », précise Herman. Questions d’autant plus difficiles à résoudre que, « compte tenu du traumatisme engendré par la guerre et l’oppression exercée par le gouvernement, la confiance est loin d’être rétablie entre les deux communautés ».

Les champs d’action de l’ONG et de son dirigeant ne s’arrêtent pas là. « Nous œuvrons en ce moment, avec six autres organisations nationales de défense des droits de l’Homme, à la constitution d’une Commission populaire sur les droits humains, qui agira en parallèle à la Commission gouvernementale, trop molle à notre goût sur le sujet, annonce Herman. Nous avons également formé, avec d’autres groupes de la société civile, y compris des partis politiques d’opposition et les éléments les plus progressistes du gouvernement, une Plateforme pour la liberté afin de dénoncer les violations régulières des droits de l’Homme, les disparitions, les tortures, les assassinats qui ont lieu dans notre pays. »

Cette plateforme s’organise autour de plusieurs axes : la dévolution du pouvoir, les droits économiques, les droits des minorités et le déplacement de populations. Autant d’activités et de revendications provoquant l’ire d’un gouvernement qui, trois ans après la fin de la guerre contre les Tigres de libération tamouls – le 19 mai 2009 –, continue à faire régner la terreur. Tous les moyens semblent bons pour faire taire les critiques ces dernières années : intimidations, disparitions, éliminations de membres de la société civile, de journalistes, de syndicalistes étudiants, de défenseurs des droits de l’Homme. Jusqu’à l’évêque catholique de Mannar, dans la partie tamoule de l’île, Mgr Rayappu Joseph, qui, le 8 mai dernier, voyait débarquer dans son bureau deux agents du redoutable Département d’investigation criminel (CID). Le prélat fut « interrogé » sur son engagement aux côtés des populations tamoules et ses questions concernant le sort des milliers de disparus pendant le conflit. En mars dernier, Herman lui aussi a dû se cacher pendant plusieurs semaines afin d’échapper à un groupe d’individus lancés à sa recherche.

« Jusqu’à présent c’est la menace la plus sérieuse à laquelle j’ai été confronté, confie-t-il. Toutes ces menaces font qu’aujourd’hui, par peur, la plupart des représentants de la société civile n’osent plus rien dire. Même les médias restent silencieux. » Pour autant, pas question pour ce défenseur des droits humains de revenir sur sa profession de foi. « Si personne ne fait rien, comment pourrons-nous respecter nos engagements auprès des plus démunis ? Il faut bien que quelqu’un continue de dénoncer et de montrer ce qui se passe dans le pays. » Quitte à envisager le pire ? « Le simple fait que ce gouvernement m’en veuille prouve que ce que nous faisons est important et a de la valeur. C’est pourquoi nous devons continuer à nous battre pour faire tomber ce régime qui est l’un des plus oppressifs et des plus corrompus au monde si nous voulons assurer un avenir à notre peuple, à nos enfants. » Alors, entre rendez-vous internationaux, visites sur le terrain, discussions plus ou moins clandestines, Herman Kumara continue. « Quelles qu’en soient les conséquences ».

Patrick Chesnet

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