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kabal

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Membre, Posté(e)
Sérénity 49 Membre 549 messages
Baby Forumeur‚
Posté(e)

DE LA LIBERTé

Vous serez vraiment libres non pas lorsque vos jours seront sans soucis et vos nuits sans désir ni peine,

Mais plutôt lorsque votre vie sera enrobée de toutes ces choses

et que vous vous élèverez au-dessus d'elles, nus et sans entraves.

Et comment vous élèverez-vous au-dessus de vos jours et de vos nuits sinon en brisant les chaînes qu'à l'aube de votre intelligence vous avez nouées autour de votre heure de midi ?

En vérité, ce que vous appelez liberté est la plus solide de ces chaînes, même si ses maillons brillent au soleil et vous aveuglent.

Et qu'est-ce sinon des fragments de votre propre moi que vous voudriez écarter pour devenir libres ?

Si c'est une loi injuste que vous voulez abolir, cette loi a été écrite de votre propre main sur votre propre front.

Vous ne pourrez pas l'effacer en brûlant vos livres de lois ni en lavant les fronts de vos juges, quand bien même vous y déverseriez la mer.

Et si c'est un despote que vous voulez détrôner, veillez d'abord à ce que son trône érigé en vous soit détruit.

Car comment le tyran pourrait-il dominer l'homme libre et fier si dans sa liberté ne se trouvait une tyrannie et dans sa fierté, un déshonneur ?

Et si c'est une inquiétude dont vous voulez vous délivrer, cette inquiétude a été choisie par vous plutôt qu'imposée à vous.

Et si c'est une crainte que vous voulez dissiper, le siège de cette crainte est dans votre coeur, et non pas dans la main que vous craignez.

En vérité, toutes ces choses se meuvent en votre être dans une perpétuelle et demi-étreinte, ce que vous craignez et ce que vous désirez, ce qui vous répugne et ce que vous aimez, ce que vous recherchez et ce que vous voudriez fuir.

Ces choses se meuvent en vous comme des lumières et des ombres attachées deux à deux.

Et quand une ombre faiblit et disparaît, la lumière qui subsiste devient l'ombre d'une autre lumière.

Ainsi en est-il de votre liberté qui, quand elle perd ses chaînes, devient elle-même les chaînes d'une liberté plus grande encore.

Khalil Gibran, Un prophète et son temps

Robin Waterfield

Fides, 390 pages, Octobre 2000

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Membre, Au coeur de la Cité des Papes, Posté(e)
PUNCHETTE Membre 34 166 messages
Au coeur de la Cité des Papes,
Posté(e)

A une dame créole

Au pays parfumé que le soleil caresse,

J'ai connu, sous un dais d'arbres tout empourprés

Et de palmiers d'où pleut sur les yeux la paresse,

Une dame créole aux charmes ignorés.

Son teint est pâle et chaud ; la brune enchanteresse

A dans le cou des airs noblement maniérés ;

Grande et svelte en marchant comme une chasseresse,

Son sourire est tranquille et ses yeux assurés.

Si vous alliez, Madame, au vrai pays de gloire,

Sur les bords de la Seine ou de la verte Loire,

Belle digne d'orner les antiques manoirs,

Vous feriez, à l'abri des ombreuses retraites,

Germer mille sonnets dans le c¿ur des poètes,

Que vos grands yeux rendraient plus soumis que vos noirs.

CHARLES BAUDELAIRE

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Membre, Au coeur de la Cité des Papes, Posté(e)
PUNCHETTE Membre 34 166 messages
Au coeur de la Cité des Papes,
Posté(e)

Les petites vieilles

A Victor Hugo

I

Dans les plis sinueux des vieilles capitales,

Où tout, même l'horreur, tourne aux enchantements,

Je guette, obéissant à mes humeurs fatales

Des êtres singuliers, décrépits et charmants.

Ces monstres disloqués furent jadis des femmes,

éponine ou Laïs ! Monstres brisés, bossus

Ou tordus, aimons-les ! ce sont encore des âmes.

Sous des jupons troués et sous de froids tissus

Ils rampent, flagellés par les bises iniques,

Frémissant au fracas roulant des omnibus,

Et serrant sur leur flanc, ainsi que des reliques,

Un petit sac brodé de fleurs ou de rébus ;

Ils trottent, tout pareils à des marionnettes ;

Se traînent, comme font les animaux blessés,

Ou dansent, sans vouloir danser, pauvres sonnettes

Où se pend un Démon sans pitié ! Tout cassés

Qu'ils sont, ils ont des yeux perçants comme une vrille,

Luisants comme ces trous où l'eau dort dans la nuit ;

Ils ont les yeux divins de la petite fille

Qui s'étonne et qui rit à tout ce qui reluit.

- Avez-vous observé que maints cercueils de vieilles

Sont presque aussi petits que celui d'un enfant ?

La Mort savante met dans ces bières pareilles

Un symbole d'un goût bizarre et captivant,

Et lorsque j'entrevois un fantôme débile

Traversant de Paris le fourmillant tableau,

Il me semble toujours que cet être fragile

S'en va tout doucement vers un nouveau berceau ;

A moins que, méditant sur la géométrie,

Je ne cherche, à l'aspect de ces membres discords,

Combien de fois il faut que l'ouvrier varie

La forme de la boîte où l'on met tous ces corps.

- Ces yeux sont des puits faits d'un million de larmes,

Des creusets qu'un métal refroidi pailleta...

Ces yeux mystérieux ont d'invincibles charmes

Pour celui que l'austère Infortune allaita !

II

De Frascati défunt Vestale enamourée ;

Prêtresse de Thalie, hélas ! dont le souffleur

Enterré sait le nom ; célèbre évaporée

Que Tivoli jadis ombragea dans sa fleur,

Toutes m'enivrent ; mais parmi ces êtres frêles

Il en est qui, faisant de la douleur un miel

Ont dit au Dévouement qui leur prêtait ses ailes :

Hippogriffe puissant, mène-moi jusqu'au ciel !

L'une, par sa patrie au malheur exercée,

L'autre, que son époux surchargea de douleurs,

L'autre, par son enfant Madone transpercée,

Toutes auraient pu faire un fleuve avec leurs pleurs !

III

Ah ! que j'en ai suivi de ces petites vieilles !

Une, entre autres, à l'heure où le soleil tombant

Ensanglante le ciel de blessures vermeilles,

Pensive, s'asseyait à l'écart sur un banc,

Pour entendre un de ces concerts, riches de cuivre,

Dont les soldats parfois inondent nos jardins,

Et qui, dans ces soirs d'or où l'on se sent revivre,

Versent quelque héroïsme au coeur des citadins.

Celle-là, droite encore, fière et sentant la règle,

Humait avidement ce chant vif et guerrier ;

Son oeil parfois s'ouvrait comme l'oeil d'un vieil aigle ;

Son front de marbre avait l'air fait pour le laurier !

IV

Telles vous cheminez, stoïques et sans plaintes,

A travers le chaos des vivantes cités,

Mères au coeur saignant, courtisanes ou saintes,

Dont autrefois les noms par tous étaient cités.

Vous qui fûtes la grâce ou qui fûtes la gloire,

Nul ne vous reconnaît ! un ivrogne incivil

Vous insulte en passant d'un amour dérisoire ;

Sur vos talons gambade un enfant lâche et vil.

Honteuses d'exister, ombres ratatinées,

Peureuses, le dos bas, vous côtoyez les murs ;

Et nul ne vous salue, étranges destinées !

Débris d'humanité pour l'éternité mûrs !

Mais moi, moi qui de loin tendrement vous surveille,

L'¿il inquiet, fixé sur vos pas incertains,

Tout comme si j'étais votre père, ô merveille !

Je goûte à votre insu des plaisirs clandestins :

Je vois s'épanouir vos passions novices ;

Sombres ou lumineux, je vis vos jours perdus ;

Mon c¿ur multiplié jouit de tous vos vices !

Mon âme resplendit de toutes vos vertus !

Ruines ! ma famille ! ô cerveaux congénères !

Je vous fais chaque soir un solennel adieu !

Où serez-vous demain, éves octogénaires,

Sur qui pèse la griffe effroyable de Dieu ?

CHARLES BAUDELAIRE

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Invité Adrien1er
Invités, Posté(e)
Invité Adrien1er
Invité Adrien1er Invités 0 message
Posté(e)

Salut.

C'est Bon de Voir de si Jolie Poèmes dès le Matin!

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Invité ouaif
Invités, Posté(e)
Invité ouaif
Invité ouaif Invités 0 message
Posté(e)

Fable de la sirène et des ivrognes

Tous ces messieurs étaient là-bas

Lorsqu'elle entra complètement nue

Ils avaient bu et commencèrent à lui cracher dessus

Elle ne comprenait rien, elle sortait à peine du fleuve

C'était une sirène qui s'était égarée

Les insultes couraient sur sa chair lisse

L'immondice couvrait ses seins d'or

Elle ne savait pas pleurer c'est pourquoi elle ne pleurait pas

Elle ne savait pas s'habiller c'est pourquoi elle ne s'habillait pas

Ils la tatouèrent avec des cigarettes et des bouchons brûlés

Et ils riaient jusqu'à tomber sur le sol de la taverne

Elle ne parlait pas car elle ne savait pas parler

Ses yeux étaient couleur d'amour lointain

Ses bras bâtis de topazes jumeaux

Ses lèvres se coupèrent dans la lumière du corail

Et tout à coup elle sortit par cette porte

é peine entra t-elle dans le fleuve qu'elle fut propre

Elle resplendit comme une pierre blanche dans la pluie

Et sans se retourner elle nagea à nouveau

Elle nagea vers jamais plus vers la mort.

Pablo Neruda

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Membre, Posté(e)
sadsky Membre 1 139 messages
Baby Forumeur‚
Posté(e)

:o° LE DESIR DE PEINDRE :coeur:

Malheureux peut-être l'homme, mais heureux l'artiste que le désir déchire!

Je brûle de peindre celle qui m'est apparue si rarement et qui a fui si vite, comme une belle chose regrettable derrière le voyageur emporté dans la nuit. Comme il y a longtemps déjà qu'elle a disparu!

Elle est belle, et plus que belle; elle est surprenante. En elle le noir abonde : et tout ce qu'elle inspire est nocturne et profond.

Ses yeux sont deux antres où scintille vaguement le mystère, et son regard illumine comme l'éclair : c'est une explosion dans les ténèbres.

Je la comparerais à un soleil noir, si l'on pouvait concevoir un astre noir versant la lumière et le bonheur. Mais elle fait plus volontiers penser à la lune, qui sans doute l'a marquée de sa redoutable influence ; non pas la lune blanche des idylles, qui ressemble à une froide mariée, mais la lune sinistre et enivrante, suspendue au fond d'une nuit orageuse et bousculée par les nuées qui courent ; non pas la lune paisible et discrète visitant le sommeil des hommes purs, mais la lune arrachée du ciel, vaincue et révoltée, que les Sorcières thessaliennes contraignent durement à danser sur l'herbe terrifiée!

Dans son petit front habitent la volonté tenace et l'amour de la proie. Cependant, au bas de ce visage inquiétant, où des narines mobiles aspirent l'inconnu et l'impossible, éclate, avec une grâce inexprimable, le rire d'une grande bouche, rouge et blanche, et délicieuse, qui fait rêver au miracle d'une superbe fleur éclose dans un terrain volcanique.

Il y a des femmes qui inspirent l'envie de les vaincre et de jouir d'elles; mais celle-ci donne le désir de mourir lentement sous son regard.

Charles Baudelaire

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Membre, Au coeur de la Cité des Papes, Posté(e)
PUNCHETTE Membre 34 166 messages
Au coeur de la Cité des Papes,
Posté(e)

Je voudrais pas crever

Je voudrais pas crever

Avant d'avoir connu

Les chiens noirs du Mexique

Qui dorment sans rêver

Les singes à cul nu

Dévoreurs de tropiques

Les araignées d'argent

Au nid truffé de bulles

Je voudrais pas crever

Sans savoir si la lune

Sous son faux air de thune

A un coté pointu

Si le soleil est froid

Si les quatre saisons

Ne sont vraiment que quatre

Sans avoir essayé

De porter une robe

Sur les grands boulevards

Sans avoir regardé

Dans un regard d'égout

Sans avoir mis mon zobe

Dans des coinstots bizarres

Je voudrais pas finir

Sans connaître la lèpre

Ou les sept maladies

Qu'on attrape là-bas

Le bon ni le mauvais

Ne me feraient de peine

Si si si je savais

Que j'en aurai l'étrenne

Et il y a z aussi

Tout ce que je connais

Tout ce que j'apprécie

Que je sais qui me plaît

Le fond vert de la mer

Où valsent les brins d'algues

Sur le sable ondulé

L'herbe grillée de juin

La terre qui craquelle

L'odeur des conifères

Et les baisers de celle

Que ceci que cela

La belle que voilà

Mon Ourson, l'Ursula

Je voudrais pas crever

Avant d'avoir usé

Sa bouche avec ma bouche

Son corps avec mes mains

Le reste avec mes yeux

J'en dis pas plus faut bien

Rester révérencieux

Je voudrais pas mourir

Sans qu'on ait inventé

Les roses éternelles

La journée de deux heures

La mer à la montagne

La montagne à la mer

La fin de la douleur

Les journaux en couleur

Tous les enfants contents

Et tant de trucs encore

Qui dorment dans les crânes

Des géniaux ingénieurs

Des jardiniers joviaux

Des soucieux socialistes

Des urbains urbanistes

Et des pensifs penseurs

Tant de choses à voir

A voir et à z-entendre

Tant de temps à attendre

A chercher dans le noir Et moi je vois la fin

Qui grouille et qui s'amène

Avec sa gueule moche

Et qui m'ouvre ses bras

De grenouille bancroche

Je voudrais pas crever

Non monsieur non madame

Avant d'avoir tâté

Le goût qui me tourmente

Le goût qu'est le plus fort

Je voudrais pas crever

Avant d'avoir goûté

La saveur de la mort...

Boris Vian

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Membre, 54ans Posté(e)
koï Membre 5 695 messages
Baby Forumeur‚ 54ans‚
Posté(e)

chanson de Barbara vivant poème

Va. Ce monde, je te le donne.

Va. Jamais n'abandonne.

C'est vrai qu'il n'est pas à l'image

Des rêves d'un enfant de ton âge,

Je sais.

Le monde a des accents.

Souvent, il nous montre les dents

Mais je l'aime comme je t'aime.

et Je voudrais tant que tu l'aimes

Je voudrais tant

Tu en es le vivant poème.

Pars. Le monde est un espoir.

L'espoir, jamais ne l'abandonne.

Oui, le monde est notre histoire

De matins clairs et de nuits noires,

Je sais.

Je sais que le monde a des armes.

Le monde parfois nous désarme

Mais il t'aimera comme tu l'aimes.

Il t'aimera.

La vie est un poème

Que tu vas écrire toi-même.

Pars. Ce monde, va le voir.

Jamais ne perds l'espoir.

Va. Dans ce monde, va te voir.

Traverse les miroirs.

Je sais,

Je sais que le monde a des dents.

Comme nous, le monde se défend

Mais il t'aimera comme tu l'aimes.

et je voudrais tant que tu l'aimes

La vie est un long je t'aime,

Un long je t'aime.

Pars. Ce monde, et va le voir.

Traverse les miroirs

Et jamais n'abandonne.

Va, va.

La vie est un long je t'aime,

que tu va écrire toi même

va , et jamais n'abandonne.

Va, va.

Va, traverse les miroirs

Où se reflète ton regard.

Tu es un vivant poème.

La vie est un long je t'aime

Dont tu es le vivant poème,

Le vivant poème,

Le vivant poème,

Mon vivant poème.

Modifié par koï
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Membre, Posté(e)
sadsky Membre 1 139 messages
Baby Forumeur‚
Posté(e)

Le désir

Je sais la vanité de tout désir profane.

A peine gardons-nous de tes amours défunts,

Femme, ce que la fleur qui sur ton sein se fane

Y laisse d'âme et de parfums.

Ils n'ont, les plus beaux bras, que des chaînes d'argile,

Indolentes autour du col le plus aimé ;

Avant d'être rompu leur doux cercle fragile

Ne s'était pas même fermé.

Mélancolique nuit des chevelures sombres,

A quoi bon s'attarder dans ton enivrement,

Si, comme dans la mort, nul ne peut sous tes ombres

Se plonger éternellement ?

Narines qui gonflez vos ailes de colombe,

Avec les longs dédains d'une belle fierté,

Pour la dernière fois, à l'odeur de la tombe,

Vous aurez déjà palpité.

Lèvres, vivantes fleurs, nobles roses sanglantes,

Vous épanouissant lorsque nous vous baisons,

Quelques feux de cristal en quelques nuits brûlantes

Sèchent vos brèves floraisons.

Où tend le vain effort de deux bouches unies ?

Le plus long des baisers trompe notre dessein ;

Et comment appuyer nos langueurs infinies

Sur la fragilité d'un sein ?

Anatole FRANCE [/CENTRER]

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Invité ouaif
Invités, Posté(e)
Invité ouaif
Invité ouaif Invités 0 message
Posté(e)

Philistins, épiciers

Tandis que vous caressiez,

Vos femmes

En songeant, aux petits

Que vos grossiers appétits

Engendrent

Vous pensiez, Ils seront

Menton rasé, ventre rond

Notaires

Mais pour bien vous punir

Un jour vous voyez venir

Sur terre

Des enfants non voulus

Qui deviennent chevelus

Poètes

J.Richepin

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Membre, Au coeur de la Cité des Papes, Posté(e)
PUNCHETTE Membre 34 166 messages
Au coeur de la Cité des Papes,
Posté(e)

b36uusg8.jpgde charles baudelaire

L'Invitation au voyage

Mon enfant, ma s¿ur,

Songe à la douceur

D'aller là-bas vivre ensemble !

Aimer à loisir,

Aimer et mourir

Au pays qui te ressemble !

Les soleils mouillés

De ces ciels brouillés

Pour mon esprit ont les charmes

Si mystérieux

De tes traîtres yeux,

Brillant à travers leurs larmes.

Là, tout n'est qu'ordre et beauté,

Luxe, calme et volupté.

Des meubles luisants,

Polis par les ans,

Décoreraient notre chambre ;

Les plus rares fleurs

Mêlant leurs odeurs

Aux vagues senteurs de l'ambre,

Les riches plafonds,

Les miroirs profonds,

La splendeur orientale,

Tout y parlerait

A l'âme en secret

Sa douce langue natale.

Là, tout n'est qu'ordre et beauté,

Luxe, calme et volupté.

Vois sur ces canaux

Dormir ces vaisseaux

Dont l'humeur est vagabonde ;

C'est pour assouvir

Ton moindre désir

Qu'ils viennent du bout du monde.

¿ Les soleils couchants

Revêtent les champs,

Les canaux, la ville entière,

D'hyacinthe et d'or ;

Le monde s'endort

Dans une chaude lumière.

Là, tout n'est qu'ordre et beauté,

Luxe, calme et volupté.

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Membre, Posté(e)
sadsky Membre 1 139 messages
Baby Forumeur‚
Posté(e)

L'Amazone

Devant le frais cottage au gracieux perron,

Sous la porte que timbre un tortil de baron,

Debout entre les deux gros vases de faïence,

L'amazone, déjà pleine d'impatience,

Apparaît, svelte et blonde, et portant sous son bras

Sa lourde jupe, avec un charmant embarras.

Le fin drap noir étreint son corsage, et le moule ;

Le mignon chapeau d'homme, autour duquel s'enroule

Un voile blanc, lui jette une ombre sur les yeux.

La badine de jonc au pommeau précieux

Frémit entre les doigts de la jeune élégante,

Qui s'arrête un moment sur le seuil et se gante.

Agitant les lilas en fleur, un vent léger

Passe dans ses cheveux et les fait voltiger.

Blonde auréole autour de son front envolée :

Et, gros comme le poing, au milieu de l'allée

De sable roux semé de tout petits galets,

Le groom attend et tient les deux chevaux anglais.

Et moi, flâneur qui passe et jette par la grille

Un regard enchanté sur cette jeune fille,

Et m'en vais sans avoir même arrêté le sien,

J'imagine un bonheur calme et patricien,

Où cette noble enfant me serait fiancée ;

Et déjà je m'enivre à la seule pensée

Des clairs matins d'avril où je galoperais,

Sur un cheval très vif et par un vent très frais,

A ses côtés, lancé sous la frondaison verte.

Nous irions, par le bois, seuls, à la découverte ;

Et, voulant une image au contraste troublant

Du long vêtement noir et du long voile blanc,

Je la comparerais, dans ma course auprès d'elle,

A quelque fugitive et sauvage hirondelle.

Auteur:François COPPéE

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Membre, Au coeur de la Cité des Papes, Posté(e)
PUNCHETTE Membre 34 166 messages
Au coeur de la Cité des Papes,
Posté(e)

Sursis

l'amour c'est comme la mort

on le vit en sursis

avec des «je t'aime»,

des «je t'oublierai jamais»,

promesses vaines!

l'amour est grand quand il est unique

l'amour vrai demande du courage

ce courage n'existe pas

chez les bourgeois, les biens nantis,

ceux qui s'installent dans leur fauteuil,

devant leur poste de Télé,

et se livrent aux combats ménagers

en donnant l'un à l'autre

libre cours aux reproches,

au chantage à tour de bras,

aux coups de gueule ..

tout ça, de préférence

au vagabondage d'un amour fou

qui leur ferait perdre comfort,

sécurité, maison, tout le tra la la

au risque, de s'attirer

les foudres familiales, ceux que ça dérange,

et d'être traité comme un paria

ces gens-là.. messieurs, dames

ces gens-là pantouflent dans leur ménagerie

usent de redites, à tour de bras

d'anciennes promesses vagues et confuses

comme arguments, la nuit venue

ils glissent sous les couvertures

moyennent leurs besoins mutuels

avec des caresses mensongères

utilisent le verbe aimer à l'usure

en faisant semblant d'y croire

que reste-t-il à l'autre?

effroi, peines, tourmentes

du coeur esseulé, attente du glas

sonnerie de l'Adieu

puis.. elle partira brisée, déchirée

le coeur ulcéré par l'ingrat

qui savait si bien chanter,

mais...ignorait les notes

de l'amour vrai

plaignez ces ramasseuses de miettes

ne blamez pas leur choix

pour apaiser leur soif d'amour

elles usent leurs dernières flammes

jusqu'à ce qu'anorexie s'ensuive

Pier de Lune

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Membre, 54ans Posté(e)
koï Membre 5 695 messages
Baby Forumeur‚ 54ans‚
Posté(e)

Barbara

L'Amoureuse

Celle qui tendait les bras,

Celle qui aimait si fort,

Mais qui ne le savait pas,

Qu'aimer encore et encore,

éa vous brûle, ça vous damne,

Celle-là qui, les yeux clairs,

Marchait les bras grands ouverts,

Et qui voulait tout donner,

Et tout prendre,

Celle-là s'en est allée,

Le coeur, d'amour, éclaté,

Les bras fourbus de se tendre,

Et d'attendre,

Fut-elle innocence,

Fut-elle démence,

Qui donc le saura jamais,

Qui donc le saura jamais?

Elle jouait, toute enfant,

Déjà, d'attraper le vent,

Dedans ses bras frêles,

Mais elle ne retenait rien,

Le vent, ça va et ça vient,

Et c'est infidèle,

Elle découvrit la mer

La garce lui fit son oeil vert

En robe d'écume

Elle se jeta dedans

Ses cheveux blonds s'emmêlant

Aux reflets de lune

Puis elle voulut aussi

Voler un morceau de nuit

Qu'elle pensait, éblouie

Tenir tout contre elle

Mais revint le coeur chagrin

L'eau, ça vous glisse des mains

Et c'est infidèle

Fut-elle innocence,

Fut-elle démence,

Qui donc le saura jamais,

Qui donc le saura jamais?

On a crié "c'est assez,

De vouloir t'écarteler,

A donner, à prendre,

A vouloir donner ton sang,

A te brûler tant et tant,

Tu deviendras cendre"

Elle ne répondait rien,

Elle espérait quand soudain,

On se le rappelle,

Comme l'hiver était venu,

Un homme lui est apparu,

Qui marchait vers elle,

Elle lui ouvrit les bras,

Et l'homme s'y réchauffa,

La caressa tant et tant,

Qu'elle en devint belle,

Ce fut, la nuit et le jour,

Le temps des chaudes amours,

Et l'homme restait toujours,

Il était fidèle,

Fut-elle innocence,

Fut-elle démence,

Qui donc le saura jamais,

Qui donc le saura jamais?

Puis l'hiver a disparu,

Les oiseaux sont revenus,

Il a dit "écoute,

J'entends les arbres craquer,

La forêt s'est réveillée,

Je reprends ma route",

Alors, elle tendit le bras,

Ce fut la dernière fois,

Et son couteau se planta,

Dedans l'infidèle,

Puis calme, elle se coucha,

C'est ainsi qu'on la trouva,

Morte, dans le petit jour,

D'avoir trop aimé d'amour,

Fut-elle innocence,

Fut-elle démence,

Qui donc le saura jamais,

Qui donc le saura jamais?

Fut-elle innocence,

Fut-elle démence,

Elle est morte désormais,

Nul ne le saura jamais,

Elle est morte au petit jour,

D'avoir trop aimé d'amour...

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Membre, Au coeur de la Cité des Papes, Posté(e)
PUNCHETTE Membre 34 166 messages
Au coeur de la Cité des Papes,
Posté(e)

Et,... si tes yeux n'étaient...

Et,... si tes yeux n'étaient... couleur de mer!

ni le vert tendre des feuilles à peine écloses

ni l'ocre des rameaux,

ni le bleu éclatant des cieux printaniers

ni le rose et le rouge

des couchers flamboyants

ni l'or de ses reflets qui,

à la brunante,

entament une valse joyeuse

dessinant sur l'eau des arabesques légères,

vaporeuses comme le voile d'une mariée

qui disparaît la noirceur venue

non ...rien ne remplace

le regard de l'aimé

la douceur d'une voix

rien ne pourra

jamais remplacer

les instants perdus

Pier de Lune

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Membre, Posté(e)
sadsky Membre 1 139 messages
Baby Forumeur‚
Posté(e)

Je respire où tu palpites,

Je respire où tu palpites,

Tu sais ; à quoi bon, hélas !

Rester là si tu me quittes,

Et vivre si tu t'en vas ?

A quoi bon vivre, étant l'ombre

De cet ange qui s'enfuit ?

A quoi bon, sous le ciel sombre,

N'être plus que de la nuit ?

Je suis la fleur des murailles

Dont avril est le seul bien.

Il suffit que tu t'en ailles

Pour qu'il ne reste plus rien.

Tu m'entoures d'Auréoles;

Te voir est mon seul souci.

Il suffit que tu t'envoles

Pour que je m'envole aussi.

Si tu pars, mon front se penche ;

Mon âme au ciel, son berceau,

Fuira, dans ta main blanche

Tu tiens ce sauvage oiseau.

Que veux-tu que je devienne

Si je n'entends plus ton pas ?

Est-ce ta vie ou la mienne

Qui s'en va ? Je ne sais pas.

Quand mon orage succombe,

J'en reprends dans ton coeur pur ;

Je suis comme la colombe

Qui vient boire au lac d'azur.

L'amour fait comprendre à l'âme

L'univers, salubre et béni ;

Et cette petite flamme

Seule éclaire l'infini

Sans toi, toute la nature

N'est plus qu'un cachot fermé,

Où je vais à l'aventure,

Pâle et n'étant plus aimé.

Sans toi, tout s'effeuille et tombe ;

L'ombre emplit mon noir sourcil ;

Une fête est une tombe,

La patrie est un exil.

Je t'implore et réclame ;

Ne fuis pas loin de mes maux,

O fauvette de mon âme

Qui chantes dans mes rameaux !

De quoi puis-je avoir envie,

De quoi puis-je avoir effroi,

Que ferai-je de la vie

Si tu n'es plus près de moi ?

Tu portes dans la lumière,

Tu portes dans les buissons,

Sur une aile ma prière,

Et sur l'autre mes chansons.

Que dirai-je aux champs que voile

L'inconsolable douleur ?

Que ferai-je de l'étoile ?

Que ferai-je de la fleur ?

Que dirai-je au bois morose

Qu'illuminait ta douceur ?

Que répondrai-je à la rose

Disant : " Où donc est ma soeur ?"

J'en mourrai ; fuis, si tu l'oses.

A quoi bon, jours révolus !

Regarder toutes ces choses

Qu'elle ne regarde plus ?

Que ferai-je de la lyre,

De la vertu, du destin ?

Hélas ! et, sans ton sourire,

Que ferai-je du matin ?

Que ferai-je, seul, farouche,

Sans toi, du jour et des cieux,

De mes baisers sans ta bouche,

Et de mes pleurs sans tes yeux !

Auteur:Victor HUGO

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Invité ouaif
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Invité ouaif
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La Nature à l'Homme

Dans tout l'enivrement d'un orgueil sans mesure,

ébloui des lueurs de ton esprit borné,

Homme, tu m'as crié : « Repose-toi, Nature !

Ton oeuvre est close : je suis né ! »

Quoi ! lorsqu'elle a l'espace et le temps devant elle,

Quand la matière est là sous son doigt créateur,

Elle s'arrêterait, l'ouvrière immortelle,

Dans l'ivresse de son labeur?

Et c'est toi qui serais mes limites dernières ?

L'atome humain pourrait entraver mon essor ?

C'est à cet abrégé de toutes les misères

Qu'aurait tendu mon long effort ?

Non, tu n'es pas mon but, non, tu n'es pas ma borne

A te franchir déjà je songe en te créant ;

Je ne viens pas du fond de l'éternité morne.

Pour n'aboutir qu'à ton néant.

Ne me vois-tu donc pas, sans fatigue et sans trêve,

Remplir l'immensité des oeuvres de mes mains ?

Vers un terme inconnu, mon espoir et mon rêve,

M'élancer par mille chemins,

Appelant, tour à tour patiente ou pressée,

Et jusqu'en mes écarts poursuivant mon dessein,

A la forme, à la vie et même à la pensée

La matière éparse en mon sein ?

J'aspire ! C'est mon cri, fatal, irrésistible.

Pour créer l'univers je n'eus qu'à le jeter ;

L'atome s'en émut dans sa sphère invisible,

L'astre se mit à graviter.

L'éternel mouvement n'est que l'élan des choses

Vers l'idéal sacré qu'entrevoit mon désir ;

Dans le cours ascendant de mes métamorphoses

Je le poursuis sans le saisir ;

Je le demande aux cieux, à l'onde, à l'air fluide,

Aux éléments confus, aux soleils éclatants ;

S'il m'échappe ou résiste à mon étreinte avide,

Je le prendrai des mains du Temps.

Quand j'entasse à la fois naissances, funérailles,

Quand je crée ou détruis avec acharnement,

Que fais-je donc, sinon préparer mes entrailles

Pour ce suprême enfantement ?

Point d'arrêt à mes pas, point de trêve à ma tâche !

Toujours recommencer et toujours repartir.

Mais je n'engendre pas sans fin et sans relâche

Pour le plaisir d'anéantir.

J'ai déjà trop longtemps fait oeuvre de marâtre,

J'ai trop enseveli, j'ai trop exterminé,

Moi qui ne suis au fond que la mère idolâtre

D'un seul enfant qui n'est pas né.

Quand donc pourrai-je enfin, émue et palpitante,

Après tant de travaux et tant d'essais ingrats,

A ce fils de mes voeux et de ma longue attente

Ouvrir éperdument les bras ?

De toute éternité, certitude sublime !

Il est conçu ; mes flancs l'ont senti s'agiter.

L'amour qui couve en moi, l'amour que je comprime

N'attend que Lui pour éclater.

Qu'il apparaisse au jour, et, nourrice en délire,

Je laisse dans mon sein ses regards pénétrer.

- Mais un voile te cache. - Eh bien ! je le déchire :

Me découvrir c'est me livrer.

Surprise dans ses jeux, la Force est asservie.

Il met les Lois au joug. A sa voix, à son gré,

Découvertes enfin, les sources de la Vie

Vont épancher leur flot sacré.

Dans son élan superbe Il t'échappe, ô Matière !

Fatalité, sa main rompt tes anneaux d'airain !

Et je verrai planer dans sa propre lumière

Un être libre et souverain.

Où serez-vous alors, vous qui venez de naître,

Ou qui naîtrez encore, ô multitude, essaim,

Qui, saisis tout à coup du vertige de l'être,

Sortiez en foule de mon sein ?

Dans la mort, dans l'oubli. Sous leurs vagues obscures

Les âges vous auront confondus et roulés,

Ayant fait un berceau pour les races futures

De vos limons accumulés.

Toi-même qui te crois la couronne et le faîte

Du monument divin qui n'est point achevé,

Homme, qui n'es au fond que l'ébauche imparfaite

Du chef-d'oeuvre que j'ai rêvé,

A ton tour, à ton heure, if faut que tu périsses.

Ah ! ton orgueil a beau s'indigner et souffrir,

Tu ne seras jamais dans mes mains créatrices

Que de l'argile à repétrir.

Louise Ackermann

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Membre, Au coeur de la Cité des Papes, Posté(e)
PUNCHETTE Membre 34 166 messages
Au coeur de la Cité des Papes,
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Le porteur de rêves

Il est tombé à mes pieds

délicatement je l'ai ramassé

contre ma poitrine je l'ai posé

je sentais son coeur palpiter

je voulais le réchauffer

le garder le réconforter

j' eus beau panser ses blessures

recoller ses ailes

ses plaies ne cicatrisaient jamais

chaque jour venait s'ajouter une blessure nouvelle

chaque jour je le voyais doucement s'éteindre

ses yeux tristes me regardaient

ils me demandaient pardon

avec lui partaient mes rêves

puis un jour sa tête vacilla

pour toujours il est parti

je retirai de ses plumes

entaché de sang

ce dernier message

"Adieu ! je pars

je vous ai tout donné

je vous aime"

il m'a quitté emportant avec lui

mes rêves les plus secrets

c'était mon messager

mon porteur de rêves

PIER DE LUNE

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sadsky Membre 1 139 messages
Baby Forumeur‚
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étre aimé

écoute-moi. Voici la chose nécessaire :

étre aimé. Hors de là rien n'existe, entends-tu ?

étre aimé, c'est l'honneur, le devoir, la vertu,

C'est Dieu, c'est le démon, c'est tout. J'aime, et l'on m'aime.

Cela dit, tout est dit. Pour que je sois moi-même,

Fier, content, respirant l'air libre à pleins poumons,

Il faut que j'aie une ombre et qu'elle dise : Aimons !

Il faut que de mon âme une autre âme se double,

Il faut que, si je suis absent, quelqu'un se trouble,

Et, me cherchant des yeux, murmure : Où donc est-il ?

Si personne ne dit cela, je sens l'exil,

L'anathème et l'hiver sur moi, je suis terrible,

Je suis maudit. Le grain que rejette le crible,

C'est l'homme sans foyer, sans but, épars au vent.

Ah ! celui qui n'est pas aimé, n'est pas vivant.

Quoi, nul ne vous choisit ! Quoi, rien ne vous préfère !

A quoi bon l'univers ? l'âme qu'on a, qu'en faire ?

Que faire d'un regard dont personne ne veut ?

La vie attend l'amour, le fil cherche le noeud.

Flotter au hasard ? Non ! Le frisson vous pénètre ;

L'avenir s'ouvre ainsi qu'une pâle fenêtre ;

Où mettra-t-on sa vie et son rêve ? On se croit

Orphelin ; l'azur semble ironique, on a froid ;

Quoi ! ne plaire à personne au monde ! rien n'apaise

Cette honte sinistre ; on languit, l'heure pèse,

Demain, qu'on sent venir triste, attriste aujourd'hui,

Que faire ? où fuir ? On est seul dans l'immense ennui.

Une maîtresse, c'est quelqu'un dont on est maître ;

Ayons cela. Soyons aimé, non par un être

Grand et puissant, déesse ou dieu. Ceci n'est pas

La question. Aimons ! Cela suffit. Mes pas

Cessent d'être perdus si quelqu'un les regarde.

Ah ! vil monde, passants vagues, foule hagarde,

Sombre table de jeu, caverne sans rayons !

Qu'est-ce que je viens faire à ce tripot, voyons ?

J'y bâille. Si de moi personne ne s'occupe,

Le sort est un escroc, et je suis une dupe.

J'aspire à me brûler la cervelle. Ah ! quel deuil !

Quoi rien ! pas un soupir pour vous, pas un coup d'oeil !

Que le fuseau des jours lentement se dévide !

Hélas ! comme le coeur est lourd quand il est vide !

Comment porter ce poids énorme, le néant ?

L'existence est un trou de ténèbres, béant ;

Vous vous sentez tomber dans ce gouffre. Ah ! quand Dante

Livre à l'affreuse bise implacable et grondante

Françoise échevelée, un baiser éternel

La console, et l'enfer alors devient le ciel.

Mais quoi ! je vais, je viens, j'entre, je sors, je passe,

Je meurs, sans faire rien remuer dans l'espace !

N'avoir pas un atome à soi dans l'infini !

Qu'est-ce donc que j'ai fait ? De quoi suis-je puni ?

Je ris, nul ne sourit ; je souffre, nul ne pleure.

Cette chauve-souris de son aile m'effleure,

L'indifférence, blême habitante du soir.

étre aimé ! sous ce ciel bleu - moins souvent que noir -

Je ne sais que cela qui vaille un peu la peine

De mêler son visage à la laideur humaine,

Et de vivre. Ah ! pour ceux dont le coeur bat, pour ceux

Qui sentent un regard quelconque aller vers eux,

Pour ceux-là seulement, Dieu vit, et le jour brille !

Qu'on soit aimé d'un gueux, d'un voleur, d'une fille,

D'un forçat jaune et vert sur l'épaule imprimé,

Qu'on soit aimé d'un chien, pourvu qu'on soit aimé !

14 mars 1874

Auteur:Victor HUGO

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Membre, Au coeur de la Cité des Papes, Posté(e)
PUNCHETTE Membre 34 166 messages
Au coeur de la Cité des Papes,
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Les mains d'Elsa

Donne-moi tes mains pour l'inquiétude

Donne-moi tes mains dont j'ai tant rêvé

Dont j'ai tant rêvé dans ma solitude

Donne-moi te mains que je sois sauvé

Lorsque je les prends à mon pauvre piège

De paume et de peur de hâte et d'émoi

Lorsque je les prends comme une eau de neige

Qui fond de partout dans mes main à moi

Sauras-tu jamais ce qui me traverse

Ce qui me bouleverse et qui m'envahit

Sauras-tu jamais ce qui me transperce

Ce que j'ai trahi quand j'ai tressailli

Ce que dit ainsi le profond langage

Ce parler muet de sens animaux

Sans bouche et sans yeux miroir sans image

Ce frémir d'aimer qui n'a pas de mots

Sauras-tu jamais ce que les doigts pensent

D'une proie entre eux un instant tenue

Sauras-tu jamais ce que leur silence

Un éclair aura connu d'inconnu

Donne-moi tes mains que mon c¿ur s'y forme

S'y taise le monde au moins un moment

Donne-moi tes mains que mon âme y dorme

Que mon âme y dorme éternellement.

LOUIS ARAGON

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