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Tout ce qui a été posté par Arkadis
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12 juin 2025 Il est tôt ce matin quand je m'assois "Au forum". Ce café est différent de ceux que je fréquente habituellement en ce qu'il est composé de personnes dont la pensée est étrangère ou opposée à la mienne. C'est justement en cela que ce café me séduit. Il séduit aussi parce que je peux répondre ou m'affirmer, en réel. Mais il y a cette prise de conscience : intervenir ne sert à rien. L'inutilité de toute réponse me laisse songeur. Je suis réduit à rester spectateur ce qui n'est pas dans mon tempérament. Je reviens à cette phrase : " Je ne crois pas à la physique quantique" Répondre ne sert à rien. Il reste la phrase, brute " Je ne crois pas à la physique quantique" Si je reste dans cette confrontation MUETTE (pas de pensée) alors je SENS que cette phrase dit quelque chose. Je SENS avant de PENSER, je suis bien quelqu'un qui accède à la connaissance, non par la pensée, mais par la sensibilité, l'intuition, selon le sens que Jung donne à ce mot. Je suis d'ailleurs selon Jung un "type psychologique" irrationnel. Un intuitif introverti selon sa classification. Ce qui me marginalise tout de même un peu, voire beaucoup, quand je lis ce qu'il dit des intuitifs introvertis. Après il y a cette nécessaire conversion à faire : passer de la sensibilité à la pensée, traduire en mots ce que cette phrase "je ne crois pas à la physique quantique" me dit, dans ma sensibilité. En fait c'est un sacré travail personnel, passer de l'intuition à la pensée, de la sensibilité à la pensée. (Je suis gêné avec les mots car je vois qu'ici, quand les gens parlent d'intuition, ça n'a rien à voir avec ce que j'entends sous ce mot, il faudrait que je leur cite Jung, mais bon...Ce n'est pas pas utile non plus, ils ne comprendront rien)
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11 Mai 2025 Je viens de m'assoir dans le café, je pense que je vais finir par avoir ma place attitrée, me voici spectatrice, pas actrice. Le point de vue n'est pas le même. J'ai noté hier cette remarque, l'un des clients, au bar : "Je ne crois pas à la physique quantique". J'y ai pensé cette nuit, j'ai mal dormi, je répète ce matin : "Je ne crois pas à la physique quantique" je pratique la connaissance par la sensibilité, mon épouse me dit tu es hypersensible, bref je répète la phrase, je reste interdite. Je me sens l'âme féminine ce matin. Je me souviens aussi de cette sortie, toujours au bar : "Je suis le philosophe le plus éminent du café" Il y a de vrais gamins ici, c'est marrant. Bon je suis assise, j'ouvre mon cahier. Lancelot a écrit à sa mère : "je vais tout faire pour que mon père n'ai plus aucun souci dans sa tête". Je suis touché par la sollicitude de mon fils ainé. Dans mon récit je n'en suis pas encore arrivé à sa naissance. Au bureau j'ai bien écrit ce matin, la perspective de venir me détendre dans ce café booste mon inspiration. C'est super.
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10 mai 2025 Il peut être intéressant d'ouvrir un fil "Au forum" "Au forum" serait le nom d'un café de quartier parisien et je viendrai y écrire de temps en temps, façon de me plonger dans une ambiance plus mouvementée que celle de mon bureau. J'ai bien commencé à écrire, chez moi, un récit qui tient de l'autobiographie mais aussi du roman, mais je flemmarde un peu en ce moment. Dans l'espace public "Au forum" il y a des discussions étonnantes qui peuvent nourrir mon inspiration. Les habitués se laissent aller, ils expriment des idées inattendues et souvent contradictoires ce qui ne les gênent pas, ça c'est vraiment inspirant. Leur originalité qui ne l'est, il est vrai, que pour moi, ce qui fait de moi par rapport à eux l'original, me permet de mieux prendre conscience, par opposition, de ma propre idiosyncrasie.
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Il est possible de lancer quelques pistes de recherche avec un tel thème : et l'homme créa les dieux. Je pars de l'hypothèse que l'homme ne s'est pas créé lui même. Si l'homme ne s'est pas créé lui même alors appelons X le ou les créateurs de l'homme. X crée l'être humain qui crée les dieux. Il est logique de penser, par transitivité, que X est présent dans "les dieux". C'est intéressant du coup de comprendre en quoi X est présent dans les dieux. L'être humain d'aujourd'hui (le sage ou le savant surtout) pense que X est totalement "con" (c'est la matière, conne par excellence). Donc il est probable qu'il y a quelque chose de con aussi dans l'homme et dans ses créations. A moins que X ne soit pas totalement "con". S'il y a quelque chose de con dans l'être humain peut il vraiment expurger de ses raisonnements toute trace de connerie ? Ca parait difficile de gommer toute trace de quoi nous a fabriqués, il faudrait gommer la matière, pas évident. A moins que la matière ne soit pas totalement conne, du coup nous pourrions gommer la connerie de la matière sans gommer toute la matière. Mais si je dis que la matière n'est pas totalement conne alors dans la culture occidentale actuelle je fais partie des croyants, c'est à dire des cons ou des connes (ou des débiles ou je ne sais encore quel vocable agréable). Pas évident de raisonner dans le cadre de la culture ambiante actuelle. Dans un dialogue un peu délirant (pour moi) entre Dehaene et Le Cun, les deux hommes pensent qu'enfin est arrivée l'ère où l'homme va devenir Dieu. Jusque là l'homme était déterminé par des trucs cons (la matière et ses lois en gros). Mais l'homme grâce à l'IA va se libérer de la connerie de la matière et devenir Dieu. Il va déterminer son destin. Je me suis demandé si le destin, versus Dehaene et Le Cun serait le même que le destin versus, je ne sais pas, Musk par exemple. Ca va pas être facile de déterminer un seul destin. Mais surtout je me suis dit, ok l'homme va devenir Dieu mais sur quel fondement va t il déterminer son avenir ? Aucun fondement ? Mais alors comment décider ? Il faut bien s'appuyer sur quelque chose. Par exemple va t on choisir l'immortalité ou au contraire la destruction de soi ? Vu qu'il n' y a plus de détermination (plus de désir qui s'appuie lui même in fine sur la matière conne) il devient équivalent d'être immortel ou mourant. Kif kif. Equivalent de souffrir ou de jouir. Kif kif. Et si ce n'est pas équivalent de souffrir ou de jouir alors zut il y a là encore une détermination conne. Pas évident de se libérer de nos déterminations connes (une détermination est conne par essence, vive les essences dirait le philosophe). Définition simple de "con" dans notre culture actuelle : pas intelligent. Définition simple de : intelligent, dans notre culture : ne pas être con. Faut énoncer les postulats. Maintenant il y a aussi l'autre hypothèse : l'homme s'est créé lui même. Intéressant domaine de réflexion. L'homme a donc oublié pourquoi il s'est créé lui même.
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Ce n'est pas certain. Les deux recherches ont dû être menées de front. Lire à ce propos le livre de Jean Loïc Le Quellec, "La caverne originelle" qui tente de comprendre le sens des premières peintures rupestres des humains. Livre passionnant. Les humains tentent de chercher d'où ils viennent à travers leur art, qui, lui même s'affirme grâce à une certaine technique (nous n'en sommes pas encore à la technologie). Dans ce livre l'auteur indique que les premiers hommes (l'éveil conscient au monde ?) ne se tournent pas vers le ciel mais vers la terre. L'intérieur de la terre. Ce ne sont pas les sages et les savants qui font démarrer la grande saga humaine, mais des hommes et des femmes simples, qui se distinguaient par leurs visions, leur inspiration. Le premier homme ou la première femme qui taille un silex n'est pas un savant ou un sage.
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Ce qui est écrit ici comme une vérité (un universel) reste une singularité (une façon de penser propre à certains "caractères"). "Trouver un but" est une recherche qui n'est pas mené de la même façon par tous les "caractères". Je pense que je peux aujourd'hui m'arrêter sur deux grandes classes de caractères. Il y a les rationnels, ceux qui tentent de trouver pour tout une chaine causale. Il y a les sensibles, voire les hypersensibles chez lesquels le but apparait quand ils créent en eux une disponibilité. L'hypersensible sera disposé à "croire" car les "choses" arrivent en lui, il les voit, il les sent "arriver", c'est la lettre du voyant. Le rationnel ne croit en rien car les choses arrivent en lui en suivant une chaine causale qui lui parait surgir de sa propre volonté. D'un côté la sensibilité prime, de l'autre la volonté.
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Chacun son chemin. Chacun sa vie.
Arkadis a répondu à un(e) sujet de mary.shostakov dans Philosophie
Il y a dans ce fil tout ce qui caractérise notre civilisation occidentale. Le "sujet" construit une représentation du monde qui lui convient. Tout son effort tend à une représentation mentale du monde qui lui apporte le maximum de satisfaction. C'est un travail totalement tourné sur soi, qui ne concerne que le sujet, que lui. Un observateur extérieur à notre monde, qui ne comprendrait pas notre parole, ne ferait pas de différence entre ce sujet et une buche. Aucun effet extérieur, social. Cela n'intéresse pas le sujet qui n'est intéressé que par son confort intérieur, son harmonie intérieure. Le sujet sort des mots, art, philosophie, science, qui ont un "effet ", provoquent un ressenti chez lui, sans que lui même sache pourquoi il connait un tel ressenti. Les mots sont employés en fonction de leur effet émotionnel, sentimental, c'est tout. Cette recherche absolument tournée vers soi est nécessaire certes, mais cette recherche ne peut concerner que l'individu, lui seul. Que les autres soient conviés à contempler une démarche absolument personnelle est en définitive décevant. Contempler quelqu'un en train de se caresser, ok, mais celui qui se caresse devrait à mon avis être discret. Notre civilisation fait la part belle à l'exposition de soi, à une sorte d'exhibitionnisme qui appauvrit la vie sociale, celle ci n'étant plus tenue pour rien, il n' y a plus que cela comme souci social : contempler moi, en train de jouir de mes propres représentations éminemment intimes. Je veux bien croire que, lorsque nous nous approchons de la mort nous tendons à figer en soi une représentation du monde, mais tout le monde va mourir bon sang, que chacun tente de maitriser ses angoisses sans déverser sur les autres des représentations qui ne peuvent être vraies que pour l'individu qui les pense. Nous avons déjà du mal à construire, dans notre intimité, nos propres vérités sans devoir en plus se coltiner celles de ceux qui ne veulent respecter en rien notre intimité. -
Certains développements actuels, en philosophie, ici, deviennent de plus en plus étriqués. Ils ne s'agit plus que d'une certaine philosophie, grecque, exclusivement, avec un appauvrissement constant puisqu'il ne s'agit plus que d'une philosophie centrée sur une représentation totalement égocentrée du monde. Cette vision étriquée part du personnage Parménide, intéressant certes, mais profondément narcissique : il n' y plus au monde que le philosophe, seul, sans aucun souci de quiconque, au contraire "quiconque" , l'autre, pourrait le distraire, face aux dieux, ou, quand il n' y plus de dieux, face à lui-même et à ses seules représentations. Ca part de Parménide ca se termine avec Heidegger, très, très étriqué tout cela, plus question de s'intéresser même à la philosophie anglo-saxonne par exemple (forcément conne) , il n' y a plus qu'une philo sectaire, qui s'enfonce dans l'emploi de mots qui ne réfèrent progressivement plus à rien. Ca se termine en essences, en essence des essences, en essence des essences des essences, c'est carrément névrotique à force de vivre dans une boucle, toujours la même, c'est à la fin la recherche dans les mots d'une vacuité qui pourrait peut être les libérer d'eux mêmes. C'est l'enfermement. Et quand ces philosophes enfermés sortent de leur anfractuosité ils se mettent à déverser une mauvaiseté étonnante sur le monde, il leur faut une cible à mépriser, à haïr, un peuple même à vomir, quand ce sont pas les Israéliens, ce sont les Russes , quand ce ne sont pas les Palestiniens ce sont les Ukrainiens, parfois ce sont les Américains, les Iraniens, etc. etc. il y a un lien avec leur pensée étriquée et névrotique et leur besoin de mépriser l'humanité, c'est l'humanité qu'ils méprisent quand ils choisissent de mépriser un peuple. Leur philosophie est une philosophie de l'avarice, de la non générosité.
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Le temps tel que nous le percevons n’est qu’un concept humain...
Arkadis a répondu à un(e) sujet de G6K972 dans Philosophie
Nous créons des concepts puis nous croyons que ces concepts sont de même nature que les choses perçues, cet arbre devant moi par exemple. Et les concepts sont rangés parmi les choses perçues. C'est étonnant cette confusion que les mêmes font pendant dix, vingt ans, qu'ils feront toujours comme si des sillons profonds s'étaient creusé dans leur cerveau, ils ne peuvent plus en sortir. Le mot temps n'a pas toujours existé ou pas toujours été employé pour décrire nos subjectivités. Nous pouvions jadis parler d'ennui, d'enthousiasme, d'ivresse, etc. bref de sentiments. Maintenant il y a référence au mot temps pour parler des sentiments. Ennui : le temps me parait long, effondrement de toute poésie, effondrement dans la petite volonté de puissance du petit homme. La grande lutte moderne contre le sentiment, contre la sensibilité, contre tout ce qui ne peut pas se mettre sous des concepts, mais que le quidam enrage à enfermer dans le concept, je veux parler de ces mots créés par l'entendement. Et la référence à Einstein pour parler de tout, au lieu de le cantonner là seulement où ce qu'il dit vaut : la physique. Car le reste franchement...l'abandon de sa femme, l'abandon de son fils malade mental, l'abandon de sa petite fille, olé olé vive Einstein, le nouveau Jésus, prince moderne de l'égoïsme affectif, cette nouvelle valeur cardinale. -
En faisant le point, à partir d'un effort d'écriture, je m'aperçois qu'il existe des familles culturelles fondamentales très contrastées dans la communauté humaine qui sont même premières par rapport aux familles culturelles historiques. Les familles culturelles qui tentent actuellement de s'imposer sont celles qui se concentrent sur les mots, sur le langage indépendamment de l'action. Ce clivage entre un discours et une action sans rapport avec le discours est étonnant. Il est possible qu'il existe depuis que l'homme s'est sédentarisé ou encore depuis que fut inventée non pas le langage mais l'écriture. Non que l'écriture conduise forcément à ce clivage, mais elle peut y conduire. L'étonnement pour certain enfant/adolescent qui construit une représentation du monde à l'aube de sa vie provient de ce constat : il ne pense pas comme pense son milieu. Il n'interprète pas de la même façon. Il peut même aller jusqu'à interpréter la pensée du "maitre" contre l'interprétation même que ce maitre a de sa propre pensée. Il ne s'aperçoit de ce phénomène que par opposition, il se retrouve en opposition sans le vouloir. Ce retour sur les origines permet aussi de relativiser le trauma. Ce dernier ne rend pas compte de tout. Il existe des déterminations plus mystérieuses qui me conduisent à penser qu'il existe bien "quelque chose" dont il apparait impossible de rendre compte en conscience. Il existe un au-delà de la conscience, laquelle reste "blottie" au sein d'une réalité déterminante qui la dépasse.
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Que la vie soit un épisode bref de l'histoire de l'Univers lui paraissait être une hypothèse crédible. A vrai dire plus il y pensait plus cette hypothèse lui paraissait vraie. Des œuvres humaines il ne resterait rien. Tout ce foisonnement d'idées était simple agitation bactérienne dans un marais qui finirait par s'assécher. L'Univers continuerait sa route indifférent à la disparition du vivant mais quel Univers, sachant que l'être humain n'a pas même accès à la réalité de cet Univers ? Pourtant, au même moment, P. sa belle fille américaine attendait que vienne au monde Baby Boy comme elle l'appelait, là bas, à Milwaukee. P. était resplendissante, elle portait l'humanité dans son ventre. Alexis en était bouleversé. Mais comment concilier la venue de l'enfant et sa représentation d'un monde dont toute vie serait tôt ou tard exclue ? Il se disait qu'il existait quelque chose qu'il ne percevait pas. Une existence inconnue qui ne dépendait pas de cet Univers. Un autre Univers parfaitement impossible à connaitre qui faisait son chemin là, avant de s'en aller. Alexis lui- même était une expérience, l'expérience de cet Univers autre en celui-ci. Nous étions tous expérience de cet Autre ici.
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D'un côté les physiciens s'appuient sur le second principe de la thermodynamique pour annoncer la mort de l'univers, de l'autre les astrophysiciens s'appuient sur l'expansion de l'univers pour en annoncer la mort, aussi. De quelle mort s'agit il ? Celle de la vie. "On va tous mourir" dit Riazuelo dans le "Futur de l'Univers" mais Keynes l'avait déjà dit. "Le vivant disparaitra bien avant l'Univers". "La vie n'est qu'un épisode assez bref dans l'histoire de l'Univers". Dans la représentation de l'avenir que se faisait désormais Alexis non seulement il rencontrait sa propre mort, mais aussi celle de l'humanité, et encore celle de toute vie. Il lui apparaissait difficile d'intégrer dans cette représentation de telles perspectives. "Si tout ce que j'entreprends est voué in fine à la destruction puis-je encore entreprendre ? Si j'entreprends quand même alors l'entreprise ne peut pas trouver sa justification dans les fins mais dans la source, ce jaillissement issu de l'existant, non dans ce qui va exister, comment nommer ce jaillissement ? Désir éventuellement" Comment le désir est-il possible dans un univers dont il est inéluctable qu'il en vienne à l'éteindre ?
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Quelques semaines plus tard, après que cette idée noire lui vint, ce fut plutôt un sentiment qu'une idée, l'humanité disparaissant, il franchit le seuil de la grande salle de l'hôpital Saint-Louis où reposaient les malades, à perte de vue, sans cloisons entre les lits, exposition lourde d'une communauté sans intimité de souffrants. Il alla direct jusqu'au lit où était allongée sa mère atteinte d'un cancer dont il n'était plus possible de guérir. Dès qu'elle le vit elle lui fit savoir qu'elle avait quelque chose d'important à lui dire, vite. " Alexis il faut que tu le saches, l'humanité est une erreur, elle va disparaitre, et Dieu n'existe pas" Elle lui dit cela d'un trait , inquiète d'être interrompue, d'ailleurs le frère ainé et la petite sœur arrivaient, elle se composa un visage souriant, ils s'approchèrent prévenants, tandis qu'Alexis se retirait, l'abandonnant à la fratrie, il les entendit discourir sur la foi et Dieu et les prophètes, l'affirmation par la mère d'une inébranlable foi. Il partit, il maugréait. "Pourquoi me laisses tu cela en héritage, mère, cet horizon noir alors que tu maintiens les autres dans une fable consolatrice ?" Il était en colère contre elle, elle lui laissait comme souvent le soin de reconstruire un sens au monde, si c'était possible ( que ce fût impossible elle n'en avait de toute façon rien à faire) après avoir tout détruit. Dans les années qui suivirent il lui vint de recourir aux phosphorescences de philosophes ou de religieux, il est vrai tous adeptes des sectes grecque ou catholique, il s'aperçut qu'aucun, qu'aucune, n'avait jamais rien bâti qui tint compte de cette hypothèse : la mort de l'humanité, encore moins de cette autre hypothèse : la mort (thermique) de l'univers. "Cela dépasse leur esprit, dit Alexis à sa compagne" Elle lui répondit "Les esprits des Simples, c'est ainsi qu'elle appelait les goys, qu'elle appelait aussi les païens, ne sont pas tels qu'ils disposent d'un esprit apte à contempler certaines hypothèses".
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Justin, le lycéen qui a tué au couteau une jeune fille et blessé trois autres lycéens, a envoyé un manifeste, par mail, aux élèves de son lycée Notre-Dame-de-Toutes-Aides, école catholique privée sous contrat, à Nantes (99 pour cent de réussite au bac, plus de 80 pour cent de mention). Ce manifeste est construit à la manière d'une dissertation, intitulé "L'Action Immunitaire" avec trois parties, l'écocide globalisé, l'aliénation sociale institutionalisée, le conditionnement social totalitaire. Il y a une pièce jointe (écrite dans une police autre) qui contient le tableau de Pieter Brueghel l'Ancien : le Misanthrope, suivi de cette annotation (écrite du temps de Brueghel) : Parce que le monde est si perfide / Pour cela je vais dans le deuil. Brueghel critiqua le fanatisme religieux de son époque. Quant à ce tableau nous y voyons un vieillard misanthrope, dont l'avenir parait sombre (son chemin est parsemé de clous) et surtout il y a accroché à ses basques, un enfant, ou un adolescent, en train de lui voler la bourse, mais ce n'est pas sa bourse, c'est le cœur du vieillard. Le misanthrope se fait voler son cœur. Il y a d'un côté la révolte d'un adolescent, écrite dans un langage convenu, il y a d'un autre côté un adolescent rejeté du monde, qui a le sentiment que son cœur lui est volé. Il y a une histoire d'amour. Ca se passe en 2025. Soixante ans plus tôt, Alexis écrivait des pamphlets incendiaires dans le journal intime qu'il venait d'ouvrir, il s'en prenait à son professeur de français, à HIV. Il finit par l'attaquer de face, par l'intermédiaire des dissertations dont il se servait pour exprimer sa révolte. Il écrivait des poèmes violents dans lesquels des adolescents, tous vêtus de noir, descendaient dans les rues, abattant les passants avec des armes de poing. Il collectionnait des tableaux divers, surtout ceux de Van Gogh et de Gauguin, il voyait même dans les tableaux de Gauguin, la guerre. Il connaissait des émois de cœur, il était fasciné par les femmes qu'il voyait derrière les portes vitrées, sourire aux hommes de l'autre côté du trottoir, et le regard tendu de ces hommes le fascinait aussi. Il suffisait de descendre la rue Saint-Jacques à partir de Panthéon, de traverser la Seine pour se retrouver dans les quartiers sombres, même le jour, où se montraient, déesses dévêtues surgies d'un autre monde, les péripatéticiennes. Deux époques différentes, mais une même révolte. La différence : il n' y avait pas passage à l'acte comme maintenant. Le passage à l'acte pour lui c'était d'affronter le professeur en pleine classe, c'était aussi de partir, de faire l'école buissonnière, c'était marcher seul le long des routes, c'était vouloir accompagner jusqu'en Afrique l'homme aux semelles de vent dont le poème, Le Dormeur du val le fascinait, même les amours d'Arthur lui plaisaient, entre les étreintes rudes des Violons de l'automne jusqu'à l'espérance d'un avenir féminin, dans la lettre du Voyant.
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La première fois où je pensai que l'humanité pouvait bien disparaitre, date d'il y a longtemps, bien avant tous les problèmes actuels. Il me semblait, ce jour là, alors que je remontais le boulevard, près de la tour Saint Jacques, à Paris, que l'humanité ne savait plus où aller. Qu'elle s'encalminait, sans savoir quelle direction prendre, qu'en fait elle ne désirait même plus avancer, le désir de vivre s'éteignait. Nous étions, nous, les enfants des pays développés arrivés dans une impasse, un désert. Les pays moins développés pouvaient encore désirer atteindre notre position, ils étaient encore motivés. Puis ils s'éteindraient eux aussi. L'humanité allait disparaitre, parce qu'elle ne désirait plus exister. Les femmes cesseraient de désirer enfanter, les hommes cesseraient de vouloir transmettre. Je me souviens que je me suis affolé. Que sans doute la vie existait ailleurs, sur d'autres planètes, que l'humanité allait certes disparaitre, mais que la vie jaillissait ailleurs. Et je me dis qu'aujourd'hui cet espoir partagé par tant d'humains que le vie pourrait bien exister ailleurs que sur terre, relève de cette conscience encore peu affirmée que l'humanité, en effet, désire disparaitre.
