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Dompteur de mots

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  1. Les hommes qui ont eu l'idée d'anéantir le mal ont toujours paradoxalement fait le mal. Je pense que nous devrions nous abstenir de porter ce genre de jugement absolu. Cela nous oblige du coup à réfléchir à la possibilité que le mal puisse avoir une fonction insoupçonnée mais nécessaire au maintien du monde.
  2. C'est toujours le même problème: nous en venons à penser que le produit de notre raison doit toucher à l'essence des choses alors qu'il n'est qu'un instrument pour nous aider à agir. Who cares si le jaune est bleu pour les serpents à sonnettes ? L'essence du jaune est l'entente que nous avons au sujet de sa signification, entente qui nous permet d'en parler afin de nous aider à agir.
  3. Oui. C'est ça le nihilisme: c'est l'abrupt sevrage après l'ivresse des grands idéaux rationnels des Lumières.
  4. Les hommes ont une tendance générale à former des alliances entre eux, à éprouver souvent une sympathie mutuelle, et même parfois à développer des rapports affectifs profonds. Mais il faut sans doute être un peu fou pour considérer cela comme un acquis.
  5. https://fr.wikipedia.org/wiki/État_de_nature#Jean-Jacques_Rousseau
  6. Mais celui qui agit pour se sauver doit user de raison afin de déterminer quels sont les gestes qu'il doit poser, quel est par exemple le chemin le plus court, comment ouvrir les issues de secours, etc. Ainsi, autant ceux qui luttent pour leur peau que ceux qui agissent en fonction du bien de la collectivité suivent leur raison, une logique; ils sont cohérents avec eux-mêmes, ils adaptent leurs moyens à leurs fins.
  7. Dans ce cas, est-ce que nous avons un défaut de l'action dans sa fin ou dans son moyen ? Ou alors, est-ce que les deux se confondent ? Est-ce que la raison, en nous plaçant dans une posture contemplative, où nous nous sortons de nos seules tripes, nous rend plus apte à élaborer des fins qui tiennent compte de la collectivité ? Je ne crois pas. Car l'homme altruiste n'est pas un homme détaché. C'est tout simplement un homme qui se rend compte que sans les autres, la vie ne vaut rien et qu'il est donc de son intérêt de veiller sur la collectivité. Ceux qui se sauvent de l'édifice en feu dans le chaos n'ont manifestement pas cette idée imprimée dans le corps. D'ailleurs, lors d'une évacuation, on ne peut pas s'attendre à ce que les gens optent par le moyen d'une réflexion rationnelle à sortir dans l'ordre. C'est quelque chose qui doit être déjà assimilé dans l'organisme et qui doit s'exprimer par l'intuition. D'un autre côté, c'est quelque chose que l'on peut aussi inculquer en effectuant des répétitions. Le fait de répéter une évacuation dans des conditions simulées permet au gens de faire l'expérience d'une évacuation ordonnée et d'observer que les résultats peuvent être satisfaisants. Mais cela ne risque de fonctionner que pour ceux qui ont l'intuition de veiller à la collectivité mais qui sont dans le doute car ils ne veulent pas pour autant mettre à mal leur propre bien-être à cette fin. Les répétitions peuvent aussi avoir un effet moral: on fait pénétrer les règles d'évacuation dans la tête des gens. C'est d'ailleurs sans doute tout ce qu'on peut espérer d'une large majorité des gens. Au mieux, ceux qui possèdent l'intuition collectiviste peuvent agir comme des leaders lors d'une évacuation réelle. Ce sont peut-être eux qui vont crier à ceux qui sont tentés par le chaos de se calmer.
  8. Il faudrait alors dans ce cas distinguer les façons d'agir qui sont moralement guidées - c'est-à-dire où l'élaboration des fins et des moyens se fonde sur l'application de règles strictes, de celles qui sont rationnellement ou éthiquement guidées - c'est-à-dire dont les fins sont intuitivement établies et les moyens élaborés par des raisonnements méthodiques.
  9. Dompteur de mots

    La famine

    Si j'ai le SIDA, je peux mourir d'une pneumonie. Pourtant, ce n'est pas la pneumonie qu'il faut éradiquer.
  10. Non, la raison c'est de ramener nos fins à des moyens, de donner de l'efficacité, de l'utilité à nos actes. Non. On distingue le bien et le mal avec ses tripes. Mais les tripes ne me disent pas que ma voiture produit des gaz à effet de serre... Inversement, je peux connaître ce fait sans que cela ne me fasse un seul pli. La voix des tripes a pour effet de nous engager dans le monde et celle de la raison de nous placer "devant le monde", de nous en désengager. L'homme de tripes fonce aveuglément dans le tas, tandis que l'homme de raison contemple le monde avec détachement comme une immense mécanique. Mariage de raison: mariage axé sur l'utilité de la chose, mécaniquement réalisé. Parfaitement rationnel si la priorité morale est de tisser des liens sociaux. Con du point de vue de mes tripes. Parfaitement rationnel si la priorité morale est économique. Évidemment, foncièrement con du point de vue de mes tripes.
  11. Dompteur de mots

    La famine

    C'est écrit partout sur les murs du capitalisme...
  12. Dompteur de mots

    La famine

    Pour ce qui est de la famine, désolé mais nous n'en sommes qu'aux préliminaires. Au siècle prochain, la terre va se mettre à bouillir et c'est là que la partie va se jouer. Mais nous on sera plus là alors on peut continuer de jouer à Candy Crush sur nos téléphones.
  13. Dompteur de mots

    La famine

    Je confirme: Garou me tourmente et me gêne pour vivre.
  14. Dompteur de mots

    La famine

    Et Garou ? Qu'est-ce que nous faisons pour l'arrêter ?
  15. Voici deux propositions. Choisissez celle qui vous arrange le mieux: 1) Vous avez un besoin philosophique. Ce qui veut dire que vous avez besoin de confronter vos idées. Ce qui veut dire que vous avez besoin d'entendre des voix que vous n'avez pas l'habitude d'entendre. Peut-être même celle des déshérités affectifs; 2) Les endroits de discussion philosophique francophone n'abondent pas sur internet.
  16. Aliocha le lion... As-tu remarqué que les lions ne sont jamais que des anges contrariés ?
  17. En somme, vous exprimez une fatigue d'aider. Vous aimeriez recevoir de l'aide vous aussi, parfois, n'est-il pas ? Vous déplorez l'unilatéralité de votre situation ? Ne faites-vous pas l'erreur d'imaginer un terme à votre action - ce que vous appelez la "libération", à l'aide que vous donnez et à celle que vous aimeriez recevoir ? Vous savez comme moi qu'il y a toujours un rocher à pousser... Ou alors mettez-vous votre action - qui est forcément locale - en perspective pour questionner les principes qu'ils servent par la force des choses ? Mais cela ne peut qu'être l'objet de votre démarche philosophique toute entière. Vous sentez-vous philosophiquement égaré ?
  18. C'est comme avec un enfant: parfois, une petite diversion ou un peu de chantage et hop ! Le conflit se dissipe sans heurts et tout le monde y gagne. Dans certains contextes, s'expliquer avec un enfant peut lui donner l'impression que sa colère est justifiée et cela ouvre la porte à ce que s'installe de manière durable un sentiment d'inéquité - et peut-être même une forme de complexe névrotique. Dans les cas où il est acquis que la domination est nécessaire, il vaut donc mieux l'exercer de manière ferme. La différence avec un adulte est qu'un enfant est une centrale nucléaire en fulgurante expansion, alors que l'adulte n'est qu'une vieille centrale au charbon ayant déjà atteint, dans la plupart des cas, sa pleine capacité. S'il est pensable de maintenir une situation d'équilibre avec les adultes, il faut en revanche assumer son propre déclin avec un enfant, sous risque que tout ça ne se détraque. Remarquez bien, ce n'est pas rien non plus. C'est même beaucoup. Mais évidemment, ça ne vous met pas à l'abri d'un certain sentiment d'impuissance. Il n'y avait pas de critique. J'avais tiqué sur votre phrase "je ne pense pas que l'énergie puisse sauter d'un être à l'autre". Elle était vraie mais il y avait place à un approfondissement quant à la manière dont s'intrique l'énergie des uns et des autres. Autrement, je me demandais seulement où vous vouliez en venir avec ce topic.
  19. Il faut à l'homme une certaine quantité d'énergie pour déplacer la pierre qui l'empêche de défricher adéquatement son lopin de terre. Cette énergie peut être investie par le propriétaire du lopin en question, ou bien être investie par des tierces parties rétribuées à cet effet ou bien mues par un sentiment fraternel. C'est la même chose en ce qui concerne ce que j'appelle le complexe socio-névrotique d'un individu: une certaine quantité d'énergie doit être investie afin de le démonter. Parfois, cet individu sera apte à fournir cet investissement, par exemple si les circonstances du moment induisent chez lui un nouvel élan d'optimisme, une nouvelle impulsion libératrice. Parfois, cela requiert des investissement extérieurs, comme dans votre exemple avec vos collègues de travail. Maintenant, la quantité d'énergie à investir varie certainement en fonction des aptitudes et du tempérament de l'individu en question. Le défricheur ayant l'intelligence d'une planche à repasser risque d'avoir à fournir des investissements considérables pour parvenir à ses fins. S'il est en plus sujet à la mélancolie, le seuil sera formidablement élevé. Le tempérament et les aptitudes d'un individu subissent certainement l'influence des conditions sociales dans lesquelles il patauge. Il y avait une rengaine qui courait au Québec, dans la génération de mes grands-parents et de mes arrière-grands-parents: "nés pour un p'tit pain" - sans doute un héritage du colonialisme anglais. Depuis, le peuple québécois s'est mis à s'affirmer (quoique nous n'en sommes pas tout à fait sortis...), mais à l'époque, c'était certainement une forme importante de complexe socio-névrotique. Des sommes considérables d'énergie étaient probablement gaspillées à des fins tout à fait autodestructrices. Notons que le mouvement d'affirmation du peuple québécois, dont celui-ci a d'ailleurs tout le mérite, n'aurait toutefois pas atteint l'ampleur qu'il a eu sans l'investissement énergétique du peuple français, par l'entremise de la personne de Charles de Gaulle, qui cria, du haut du balcon de l'hôtel de ville de Montréal, en 1967: "Vive le Québec libre !" *** Après, il faut voir où vous voulez en venir Aliochaverkiev. Vous savez comme moi que l'impuissance des gens a toujours des causes, aussi sordides soient-elles, et ce même si la complexité des situations les rendent impossible à élucider complètement. Dans votre "pourquoi est-ce ainsi ?", questionnez-vous votre place là-dedans ? Votre responsabilité ? Avez-vous des incertitudes sur l'éthique que cela doit commander ? Ou au contraire, êtes-vous parfaitement assuré sur ces questions et ne voulez-vous que rendre palpable aux esclaves qui nous entourent les tenants et aboutissants de ce jeu ? Dans quel but ? Pour les aider à se libérer ? Vous voulez donner une forme constructive, quoique polémique, à votre compassion ? Ou souhaitez-vous au contraire vous galvaniser en appréciant la distance qui vous sépare de ces gens ? En appuyant sur leur complexes socio-névrotiques comme on appuie sur la blessure d'un prisonnier, afin de lui montrer qui mène ? Ou alors pressentez-vous que malgré vos quelques victoires personnelles, au bout du compte tout à fait dérisoires, vous n'êtes finalement vous aussi qu'un esclave et alors vous vous questionnez sur le sens de l'impuissance inhérente à l'existence humaine ? Ou plus positivement, voulez-vous tâter le terrain d'une prochaine révolution ?
  20. Qu'est-ce qu'on fait pour utiliser la force d'une plante ? On la coupe. Puis on la mange ou on la transforme. On rompt le mécanisme par lequel sa force s’accroît et on sacrifie ces forces potentielles afin de pouvoir consumer celles qui sont recueillies au présent, dans un état d'équilibre. Même chose pour les hommes: pour consumer leur force, on les coupe et on les mange.
  21. Tout n'est pas décidé par le calcul rationnel des idées, mais aussi et surtout par le calcul intuitif des forces en présence. Tel être choisit de ne pas se lancer dans la contestation ou dans la lutte contre autrui parce qu'il sent que ses propres forces ne sont pas suffisantes pour cette entreprise. La plupart des gens se replient stratégiquement sur leur petite vie parce que la dépense d'énergie qu'elle requiert suffit à la consumation de leur forces, ou parce qu'ils sont déjà habités par des complexes névrotiques* qui consument l'excédent de force qui pourrait être employé à d'autres fins. Les maîtres sont des individus qui disposent de forces surabondantes. La justesse ou le mérite qui se dégage de l'utilisation de ces forces est une autre question. Par exemple, un intervenant de ce forum y réfléchira deux fois avant de s'opposer à vous Aliocharverkiev, puisqu'il émerge de vos propos une impressionnante vitalité. Malgré le désaccord qui l'anime, il choisira de ne pas intervenir, ou de le faire seulement sous une forme édulcorée, peu susceptible de provoquer des effets, car vous êtes un danger à ses yeux, une bête, une panthère, un guépard qu'il vaut mieux ne pas réveiller. * Il convient assurément de sortir cette notion de son strict cadre freudien afin d'y ajouter des composantes sociales. La hiérarchie rigide d'une entreprise est suffisante pour induire une sorte de complexe névrotique dans l'esprit d'un employé.
  22. Franchement, je ne comprends pas grand-chose à Lacan. Il faut dire que je ne m'y suis pas mis beaucoup non plus. Vais-je un jour le faire ? Là est la question. *** Le langage de l'intériorité est souvent évanescent, flou, coloré, poétique parce qu'il vise essentiellement à disposer à un certain état d'esprit (du moins, lorsque ce langage n'est pas récupéré à des fins mercantiles). Comme je l'ai dit plus haut, cet état d'esprit consiste en une ouverture au monde. Laisser couler le monde en soi pour mieux l'examiner. C'est pourquoi la proposition de Zenalpha d'arriver à une introspection vraie en définissant le "je" ou le "cogito", bien que remplie de bonnes intentions, manifeste une naïveté attendrissante. En fixant de la sorte les bornes de la pensée, on arrive exactement au contraire de l'introspection. Et c'est pourquoi aussi je dis que l'art du diagnostic du médecin manifeste quelque chose de semblable: au moment d'examiner le patient, il doit en quelque sorte oublier sa science pour saisir l'état du patient d'une façon globale et intuitive. C'est pourquoi l'on ne parle pas de science mais bien d'art du diagnostic.
  23. Les jugements que nous nous forgeons sur le réel ne sont pas le réel, cela va de soi. Mais nos jugements ne sont pas figés dans le béton. L'idée de l'introspection consiste à tenter de dépasser pendant un moment le filtre de nos propres jugements afin d'appréhender le réel d'une façon plus brute. Le pari est en quelque sorte que l'intériorité coïncide avec cette appréhension brute du réel puisque celle-ci favorise un rapport intuitif, instinctif, plus profond et donc plus personnel avec les choses, nous permettant de nous faire de nouveaux jugements plus adaptés. C'est dire que l'intériorité n'est pas une espèce de repaire intérieure, d'âme ou de je-ne-sais-quel entité mystique, mais a plutôt à voir avec le monde qui nous entoure - ce qui n'est pas sans paradoxe. C'est d'ailleurs une idée que je développe plus amplement en ce lieu de perdition. C'est un peu comme dire que pour soigner, il faudrait que le médecin puisse appréhender la totalité des paramètres du corps malade afin de formuler un diagnostic adéquat. La réalité est que l'activité du médecin, comme celle de l'individu qui s'adonne à l'introspection, a un caractère stochastique, c'est-à-dire qu'elle est fondée sur l'expérience, sur une dialectique, une conversation entre l'individu et le monde, qu'elle se déploie comme un processus d'essais et d'erreur, d'avancées, de reculs, etc. Au fond, l'idée d'introspection a une signification qui est davantage éthique qu'épistémologique. Il ne s'agit pas tant d'essayer de "connaître ce qui en nous connaît" que d'adopter cette attitude qui consiste à travailler ses propres jugements plutôt que d'attendre que ce soit les autres (ou le monde extérieur) qui s'adaptent à nous. C'est une erreur de traiter cette question sous l'angle de l'épistémologie.
  24. Certes, tout part d'un appétit. Maintenant, l'appétit bien réfléchi veille à magnifier son objet, pour la bonne raison qu'il est évidemment meilleur de déguster un plat bien apprêté. Une femme rendue belle et heureuse par des soins attentionnés constitue par exemple un plat bien apprêté. Un baiser, un compliment, un regard affectueux: voilà autant d'épices dont on peut la saupoudrer et qui en rehaussent la saveur. Évidemment, cela est mutuel. Le cuisinier et le plat changent constamment de rôle. Celui qui saupoudre se fait saupoudrer à son tour. Et le festin dure ! ... jusqu'à ce qu'il ne dure plus.
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