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Scénon

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Tout ce qui a été posté par Scénon

  1. Bon, ben, j'ai fini de reparcourir tout le topic. Je n'ai pour ma part plus d'arguments à formuler, ni trouvé des arguments à analyser. Merci aux interlocuteurs !
  2. Les passages de Tacite et de Pline le Jeune qui parlent du Christ ne sont pas du tout considérés comme des falsifications. C'est l'hypercritique qui l'a prétendu pendant un temps, mais cette idée a été abandonnée depuis longtemps. Quant à longue liste d'auteurs qui suit, il y a une sorte de perfidie intellectuelle (pas chez vous, n'est-ce pas ? mais dans la source citée) à suggérer que leur silence unanime au sujet de Jésus argumenterait en faveur de sa non-existence. En effet, il y a là-dedans de très nombreux auteurs qui n'ont rien à voir avec l'historiographie : la plupart sont tout simplement des poètes (Perse, Juvénal, etc.), romanciers (Pétrone, Apulée), rhétoriciens (Quintilien), scientifiques (Pline l'Ancien), qui n'ont pas la moindre raison d'aborder dans leurs œuvres des événements s'étant déroulés en un coin perdu de l'Empire. Si dans trois ou quatre cents ans on devait douter de l'existence de Clinton ou d'Obama, invoquera-t-on comme argument le silence unanime, dans leurs écrits, des poètes, auteurs de théâtre, journalistes sportifs, physiciens, astronomes, cuisiniers, architectes ou archéologues contemporains, dont les livres ou ouvrages auraient survécu jusque-là ? Stace, par exemple, est un poète épique qui, dans sa longue Thébaïde, traite d'événements mythologiques antérieurs à la guerre de Troie. Qu'irait-il soudain parler de Jésus, même s'il en avait entendu parler cent fois ?
  3. (Je relis les interventions les plus pertinentes faites depuis la création du topic. Le reste, c'est souvent digne de gamins jouant et se disputant dans le bac à sable.) Philon était un Alexandrin ou vivait tout au moins en Égypte. Il n'était pas historien, mais exégète des Écritures. Quant à la proximité entre l'enseignement de Philon et celui des chrétiens (par exemple, au sujet du Logos ou Verbe), il ne rend en rien le silence de Philon, au sujet de Jésus, plus étrange, voire « décisif ». À ce titre là, il devrait être tout aussi étonnant de ne pas trouver la moindre allusion à Jésus dans le fameux Corpus Hermeticum (textes philosophiques purement païens du début de notre ère, d'inspiration égyptienne, où il est beaucoup question du Logos, et du Père et du Fils). Prenons un exemple beaucoup plus flagrant de deux parfaits contemporains qui s'ignoraient : Tzetzès et Eustathe. Tous les deux habitaient et fréquentaient Constantinople au XIIe siècle, et chacun a rédigé un très volumineux commentaire sur l'œuvre d'Homère. Nombre de commentaires qu'on lit chez l'un et l'autre, se ressemblent comme deux gouttes d'eau. Or jamais Tzetzès ne fait la moindre allusion à Eustathe, ni inversement. Les deux n'en sont pas moins des personnes historiquement incontestables. Il n'est pas, disons, “franchement étonnant” de ne pas rencontrer d'allusion à Jésus chez un Philon. Jésus le lui a d'ailleurs bien rendu : on ne trouve chez lui la moindre allusion à Philon...
  4. Malgré le conditionnel employé, cette interprétation des passages talmudiques ne confère pas seulement une existence historique à Jésus, elle jette une lumière très intéressante sur les conditions historiques dans lesquelles il a enseigné. Il faut bien le reconnaître : quand il est question de l'historicité de Jésus, on se contente en général de s'adresser aux sources chrétiennes et païennes. Bien moins souvent, on interroge la tradition juive dont il était nourri et au sein de laquelle il vivait.
  5. Inquiétant, cet emploi du mot « suspect » : celui qui a des convictions serait « suspect ». Suspect de quoi ? on l'ignore encore, mais il suffit d'en attraper un pour l'interroger, de manière musclée si nécessaire, et il finira bien par avouer.
  6. Intéressant. À ce propos, il existe un autre argument concernant l'historicité de Jésus, qui me trotte dans la tête depuis longtemps (si vous êtes encore en contact avec cette correspondante, elle pourrait donner son avis) : Les personnes présentées et citées dans les Midrachim et le Talmud, la plupart du temps des rabbins, sont, je pense, toujours reconnus comme historiques : on peut les situer, plus ou moins, dans telle famille, école, région, ainsi que dans le temps. Bref, sauf erreur, ces personnes ont toutes une réalité historique incontestable et incontestée. Or votre ancienne correspondante – et elle n'est pas la seule – voit dans les Évangiles, avec raison, un authentique et typique texte juif traditionnel. Alors, pourquoi la personne de Jésus serait-il soudain moins historique que tous ces autres “héros” de la littérature juive ? À moins qu'on ait des exemples bien attestés de maîtres purement imaginaires dans la littérature juive, Rabbi Jésus devrait être lui aussi tout ce qu'il y a de plus historique. C'est en tout cas ce que semble affirmer implicitement votre correspondante juive dans la phrase citée ci-dessus. On trouve par ailleurs, dans la littérature juive, des exemples de maîtres ou disciples rabbiniques n'ayant pas toujours marché tout à fait “droit”, et dont le comportement est çà et là stigmatisé.
  7. Eh bien ! là, j'en ai le bec cloué... En tout cas, merci d'avoir transmis cet échange. Rien à opposer aux arguments de cette Juive, visiblement très au fait de sa propre tradition ; d'autant moins à opposer que, comme je l'ai indiqué, mes souvenirs de l'article dont je parlais sont plutôt vagues. Cela aurait été intéressant de comparer son contenu aux arguments énumérés ici, mais j'ignore malheureusement comment remettre la main dessus. Je confirme cependant ce que j'ai déjà eu l'occasion d'énoncer sur ce forum, à savoir qu'un juif instruit qui lit les Évangiles s'y retrouve en effet “comme un poisson dans l'eau” (pour reprendre l'expression de votre correspondante), et y saisit, du premier coup, de nombreux éléments doctrinaux qui resteront à jamais du chinois pour la plupart des chrétiens qui refusent, consciemment ou non, de s'abreuver à la source juive de leur religion. Les Évangiles sont très certainement “dans le plus pur style des discussions rabbiniques tel qu’on le retrouve dans le Talmud”, ou encore “de simples copiés-collés de textes mishnaïques ou toraïques”. Et je comprends parfaitement la perplexité d'un juif “quand il entend des chrétiens affirmer que ce sont ces textes qui viennent « réformer l’ancien Testament »”. J'ai surtout apprécié sa conclusion : Cela me paraît tout à fait évident... bien que cela nous éloigne du sujet principal où, en ce moment, mon dernier argument a pauvre mine !
  8. À moitié sérieux tout de même : il y a de nombreux Occidentaux dont l'état d'esprit est aussi tyrannique, exclusif et haineux que celui qu'ils dénoncent chez d'autres. Je ne sais pas si vous avez lu Les Dieux ont soif d'Ayatole France : il en ressort que nous n'avons rien à “envier” aux pays des ayatollahs, et que, seuls comme des grands, nous sommes tout à fait capables, malgré toutes nos belles idées républicaines et démocratiques, d'en susciter (des “ayatollahs”) un peu partout chez nous, avec ou sans religion, à gauche ou à droite, qu'ils soient croyants ou athées ; nous n'avons pas besoin de l'islam, radicalisé ou non, pour y “réussir”... Voilà ce (ou ceux) que je crains !
  9. Zut ! votre développement sérieux et argumenté me fait craindre que mon jeu de mots n'ait pas été perçu du tout... Tant pis. Je ne redoute en rien ni ne dénonce une possible “ayatollahsition de la France”. Cela m'apprendra à faire le malin.
  10. (Mon jeu de mots était un peu perfide, je le reconnais... )
  11. Comment dire ? J'ai plusieurs fois essayé de faire discrètement comprendre à tel ou tel internaute qu'à force de “bouffer du curé”, on en devient un. Je pourrais écrire aussi que l'idée de vivre un jour dans un pays dirigé par des Ayatole m'indispose assez.
  12. Pourtant, et à ce propos, un autre argument qui plaiderait en faveur de l'historicité de Jésus, ce seraient les circonstances précises de son accusation, de sa condamnation et de son exécution. Les Évangiles canoniques relateraient avec précision les moyens mis en œuvre pour parvenir à une condamnation légale de Jésus, sans que ses adversaires y soient finalement parvenus (je veux dire : à une condamnation légale). Je n'ai plus sous la main, hélas ! l'article détaillé qui parle de tous les aspects juridiques ayant mené au procès de Jésus. Je me contente donc de signaler la chose pour ceux qui voudraient approfondir la question. En gros, je me souviens de ceci : sous l'occupation romaine, le Sanhédrin n'avait plus le pouvoir, comme jadis, de condamner quelqu'un à mort ; il fallait donc nécessairement que les ennemis acharnés de Jésus le fassent condamner par les Romains ; mais ceux-ci, représentés par Pilate, ne trouvaient justement aucune raison légale pour le condamner ; c'est finalement par “complaisance” envers la foule, excitée par les chefs religieux locaux, qu'ils l'exécutèrent. Beaucoup d'autres détails m'échappent en ce moment, mais la description du déroulement de toutes les démarches juridiques (ou pseudo-juridiques !) serait telle, dans les Évangiles, qu'elle suggère au moins une connaissance très exacte de la réalité politico-juridique du début de notre ère dans la province romaine de Palestine, sinon une relation circonstanciée d'événements bien réels. À creuser, dirais-je !
  13. Oui, je connais l'hypothèse, mais le nom qu'on donne à ce père est toujours Pandera, Pantera, Panther, Panthera ou Pentera, non Pantheros. D'autre part, quel rapport voudrait-on insinuer entre le nom supposé du père charnel de Jésus et la naissance de ce dernier à partir d'une vierge ? Si encore les sources disaient que la jeune fille, elle, s'appelait en réalité “Panthera”, voire “Panthéros”, et non “Marie” (ce qui ne serait en rien un obstacle pour la prétendre engrossée par un légionnaire...) ; mais ce n'est pas le cas. Cela n'empêche, j'y réfléchis parfois, à cette hypothèse, mais elle ne me convainc pas jusqu'ici.
  14. ... et par d'autres textes, chrétiens apocryphes et autres, avec force détails parfois. Mais peut-être Flavius-Josèphe est-il le plus ancien auteur à en parler, c'est possible.
  15. Oui, si votre jeu de mots est bien ce que vous prétendez : rien d'autre qu'un jeu de mots. Mais sans nier a priori cette possibilité, je n'en suis pas certain du tout. Il y a des chances qu'il s'agisse d'un vestige d'information sur la naissance du Jésus historique. Quant à l'enfantement virginal, il est basé sur la traduction d'Isaïe dans la Septante.
  16. Il suffirait d'avoir assisté une seule fois dans sa vie à un événement plus ou moins miraculeux pour se dire que le miracle, sans être courant, est néanmoins possible. En attendant, chacun fait le tri comme il l'entend – sans aucune garantie d'être “dans le vrai”. Mais ce débat-là serait ici hors sujet.
  17. Autre argument qui, à mon avis, plaide pour l'historicité de Jésus : aucun auteur ancien non chrétien ne la conteste, ni un Tacite ou un Celse, ni le Talmud ou un Flavius-Josèphe, etc. Or il me semble que si le personnage était une pure invention “mythologique”, quelque historien antique, par exemple, aurait au moins exprimé un doute sur l'existence attestée de Jésus. C'est même tout le contraire qui se passe : Celse et le Talmud se font l'écho d'une naissance de Jésus beaucoup plus “prosaïque” et bien moins “glorieuse” que ce que les Évangiles en présentent. La Vierge Marie devient, chez eux, une jeune femme engrossée des œuvres d'un légionnaire. Allégation gratuite ou écho d'un fait historique ? En tout cas, jamais païens ou juifs (le Talmud accuse aussi Jésus d'avoir appris la sorcellerie en Égypte) ne mettent en cause l'historicité même du personnage de Jésus.
  18. Vous avez bien résumé le débat en cours, et je ne peux que vous donner raison en ce qui concerne les citations évangéliques, dans l'ensemble bien choisies. Oui, on ne peut nier que la stupeur soit souvent évoquée dans ces textes. La vérité est peut-être quelque part au milieu : les contemporains de Jésus auraient alors été témoins de phénomènes miraculeux dont la description, ainsi que celle de la fascination exercée, aurait été amplifiée ou magnifiée dans les Évangiles. Je reconnais que c'est une hypothèse parmi d'autres. Après tout, vous avez peut-être raison (et @dubandelarochepar la même occasion) : les historiens ou chroniqueurs de l'époque auraient peut-être été un peu plus bavards sur Jésus si les Évangiles étaient à prendre au seul sens historique. Il reste qu'il ressort des textes de l'Antiquité, contemporains des Évangiles, ou antérieurs ou encore postérieurs, issus de milieux juifs, chrétiens ou païens, que les miracles observés et décrits ailleurs n'ont souvent rien à envier à ceux de Jésus ; le Talmud en témoigne, ainsi qu'une kyrielle d'autres sources, égyptiennes, grecques, latines...
  19. Je viens de dire exactement le contraire ; c'est la deuxième fois que vous me faites le coup. Cela est pour moi une autre raison suffisante pour ne plus discuter avec vous.
  20. L'histoire ne vous intéresse donc pas. Cela règle le débat entre nous deux. Bonsoir.
  21. Oui, je sais, vous aimez bien qu'on vous mâche la besogne. Consultez les ouvrages de Maspero, par exemple, et le Talmud, tant que vous y êtes ; et si vos autres lectures vous prennent trop de temps, le seul livre de l'Exode et les plaies de Moïse, partiellement imitées par les magiciens de pharaon, feront aussi l'affaire. Quand je parle de « choses bien plus spectaculaires », je parle de phénomènes magiques, vous l'auriez bien compris.
  22. Il s'agit bien, d'après mes souvenirs, du Talmud de Babylone. (N.B. Mon message précédent, posté au même moment que le vôtre, y ajoute aussi le témoignage comparable de Celse.) Mon point est, toujours et encore, de montrer que ni juifs ni païens de l'époque ont dû être impressionnés par les miracles de Jésus (dont on connaît de nombreux parallèles ailleurs), ou par les rumeurs à leur sujet, du moins au point que l'absence de tout témoignage écrit contemporain en devient inexplicable. Je ne vois pas comment, par exemple, un Égyptien du début de notre ère, s'il en entendait parler, devrait être impressionné par le miracle du changement d'eau en vin. De tout temps, les Égyptiens avaient la réputation de pouvoir faire avec l'eau des choses bien plus spectaculaires. Vous semblez faire la distinction, en gros, entre miracles considérés comme divins et tours de magie tenus pour démoniaques. Oui, cette distinction existe très nettement chez les juifs et les chrétiens, et il y a lieu de la faire. Si on n'en a pas encore parlé jusqu'ici, c'est simplement parce que la plupart des intervenants, répétant à longueur de pages qu'ils ne croient ni en Dieu ni au diable (car je suis un idiot qui risquerais de les prendre pour des interlocuteurs non valables si, malgré tous leurs avertissements, déclarations et protestations, je voyais en eux, ne serait-ce que pendant une fraction de seconde, des authentiques croyants – alors que je ne cesse, à mon tour, d'essayer de leur montrer, entre les lignes, que je m'en contrefous de ce qu'ils croient ou non, et que leur croyance n'a absolument aucune importance pour quelque débat que ce soit), la plupart des intervenants, donc, ne croient ni aux miracles divins ni à la sorcellerie, mettant tous ces phénomènes dans le même sac, comme inexistants. Bien sûr, le Talmud et Celse cherchent à dénigrer Jésus ; mais ils ne contestent nullement la réalité ou tout au moins la possibilité de ces tours de force, divins ou démoniaques, peu importe pour le point que je défends.
  23. Celse (IIe siècle) affirme d'ailleurs la même chose : que Jésus apprit la magie en Égypte – ce qui montre implicitement que lui, un païen, ne trouve pas non plus que les miracles qu'on lui attribue ont un caractère si extraordinaire que cela.
  24. De Babylone, je pense. Hélas ! je n'ai pas le texte sous la main ici. La suite de votre raisonnement, je ne la comprends pas ; je cite l'opinion du Talmud, pas la mienne, sur les miracles opérés par Jésus, sans doute associés ici, certes, à une forme de magie.
  25. Le Talmud, certainement pas un avocat de Jésus, prétend qu'il apprit en Égypte la méthode d'opérer les miracles relatés par les Évangiles. Les juifs eux-mêmes ne les nient donc pas, ils contestent seulement à Jésus la nature messianique (ou christique).
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