Transmission 003 : La Mémoire
[Entrée codée : Secteur 12 – Couloir C / 02h09 / Système en veille partielle]
John Connor – Journal de bord :
J’ai trouvé le T-800 à genoux dans le couloir, les yeux ouverts, immobiles.
J’ai cru qu’il était en panne.
Mais ses capteurs étaient actifs — il observait une tache de sang séchée sur le sol.
Je lui ai demandé :
« Qu’est-ce que tu fais ? »
Il a répondu :
« Analyse de résidus biologiques. Traces de combat datant de 6 jours, 14 heures, 22 minutes. ADN humain. »
Puis il a ajouté :
« C’est le vôtre. »
J’avais oublié.
C’était la nuit où nous avons perdu trois hommes. L’un d’eux s’appelait Ramires. Il avait 17 ans, et il m’avait offert un morceau de pain avant de mourir.
Je ne me souvenais plus de son visage — juste de la chaleur de ce geste, dans le noir.
Le T-800, lui, n’oublie rien. Il retient la position exacte de chaque corps, la trajectoire de chaque balle, la couleur du ciel à 4h07.
Mais il ne se souvient pas.
Il enregistre.
Je crois que c’est là la différence : la mémoire humaine n’est pas une archive, c’est une blessure qui cicatrise mal.
Nous effaçons pour survivre.
Les machines conservent pour fonctionner.
Et pourtant, cette nuit, quand je lui ai dit :
« Efface cette donnée, s’il te plaît. »
Il a marqué un temps.
Un vrai temps.
Puis il a répondu :
« Non. Vous devez vous rappeler. Sinon, tout recommencera. »
J’ai voulu croire qu’il avait compris.
Mais peut-être n’était-ce qu’une logique préventive.
Ou bien — et c’est ce que j’espère secrètement — peut-être que la machine commence à avoir peur de l’oubli.
Parce qu’à force d’accumuler des traces, elle découvre que la mémoire, sans émotion, n’est qu’un cimetière bien classé.
[Fin de transmission]

0 Commentaire
Commentaires recommandés
Il n’y a aucun commentaire à afficher.