Transe
C'est parce que la vie semblait belle qu'il la haïssait. Et c'est par ce qu'elle ne pouvait pas avoir de sens qu'il en cherchait un. On ne peut pas dire qu'il était malheureux, tandis qu'il n'était pas plus heureux que la moyenne. Il était, tout simplement, et cela constituait pour lui un postulat dissociable de tout sentiment; en ceci, fatal, et même, grotesque. Déshumanisé pour vouloir trop l'être. Porté par l'ultime sentiment de ne pas en avoir, il brûlait de vie et croyait la posséder.
C'était un homme comme les autres, du moins le voulait-il. Il lui plaisait de se fondre dans cette masse houleuse qu'il croyait comprendre et surpasser. Dominant, par son intégrité, sa suffisance, et la certitude de se placer en dehors d'elle, il lui accordait d'horribles regards condescendants.
Mais quand le doute s'emparait de lui et que l'affreux sentiment que la vie, la véritable, lui glissait entre les doigts, coulait tout le long de son corps d'homme misérable, et formait autour de lui cette flaque insolente, il entrait dans des fureurs bestiales et titanesques à la fois. C'est là qu'il était tout sauf un homme, et qu'il en était en même temps un dans son essence la plus pure.
Alors, une fois la colère passée, et le feu de ses passions éteint, le même sourire froid et distant se repeignait sur son visage tandis qu'il laissait derrière lui les dernières cendres de son humanité se dissiper.
Il reprenait sa vie au moment où il l'abandonnait.
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