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Annie Ernaux


satinvelours

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Membre, Posté(e)
satinvelours Membre 3 006 messages
Forumeur vétéran‚
Posté(e)

Je ne vois pas de fil ouvert pour elle seule…

Je désire lui rendre hommage et lui dédier mes pensées.

Je ne la connaissais pas avant que lui soit attribué le prix Nobel de littérature. 

Sauf un bref contact quand elle professait au CNED et qu’elle me conseilla d’écrire après avoir corrigé mon essai. 
 

En lisant sa biographie je fus accrochée.

En lisant les analyses de son œuvre, encore plus. 

Je découvre son style et les quelques pages que je viens de lire  (Regarde les lumières mon amour) font d’elle soudain une compagne dans cet autre monde.

Celui que je vois se juxtaposer au monde réel,

Les deux mondes, dans une danse longue.

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Membre, 77ans Posté(e)
G2LLOQ Membre 26 288 messages
Maitre des forums‚ 77ans‚
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Je la connais depuis son 1er roman , (pas d'hier)  je suis vraiment heureux pour elle  ;    :France:  :plus:

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Membre, Posté(e)
satinvelours Membre 3 006 messages
Forumeur vétéran‚
Posté(e)

J’ai terminé ce premier livre, Regarde les lumières mon amour. 

Je suis surprise par le style, froid, glacé, sans aucun souci de séduction du lecteur.

Impossible de lire cette auteure pour passer un moment plus ou moins distrayant. 

Je ne sais pas si c’est un roman. Elle-même dit, dans ce livre, qu’elle mène une étude.

Ca me plait ce style. Cette volonté délibérée de ne pas enjôler le lecteur. Cela oblige à l’attention, cela oblige à lire attentivement.

Son style vient en correction du mien, qui s’échappe volontiers dans l’envolée. 

Il y a une violence chez cette femme, le refus de plaire au petit bourgeois qui cherche dans la littérature un moyen de s’évader.

Par curiosité je m’informe des réactions. Je suis surprise par la violence des opinions de droite. Qui voit dans ce prix Nobel une décision politique. La droite aurait préféré Houellebecq qui chante lui, la décadence de notre civilisation. La nomination de Houellebecq aurait été tout aussi politique. 
 

Quelque chose m’intrigue dans cette rage froide des classes plutôt privilégiées  à voir cette femme lauréate. Et je m’interroge sur ses mêmes classes qui se régalent quand Houellebecq décrit ses errements sordides qu’il fait passer pour des errements des décadents. 
 

 

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Membre, 41ans Posté(e)
Crève Membre 3 513 messages
Mentor‚ 41ans‚
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Vous conseillez de commencer par quoi ? Ma libraire m'a conseillé La place.

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Membre, Posté(e)
satinvelours Membre 3 006 messages
Forumeur vétéran‚
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Il y a 20 heures, Crève a dit :

Vous conseillez de commencer par quoi ? Ma libraire m'a conseillé La place.

Je viens de recevoir : la Place. Et je commence à le lire. Je pense que c’est en effet celui là qu’il est intéressant de lire en premier.

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Membre, Posté(e)
satinvelours Membre 3 006 messages
Forumeur vétéran‚
Posté(e)

Dans la Place, Annie Ernaux écrit : « par la suite j’ai commencé un roman » dont son père aurait été le personnage principal.  « Sensation de dégoût au milieu du récit » puis : « le roman est impossible » et encore : « je n’ai pas le droit de prendre d’abord le parti de l’art, ni de chercher à faire quelque chose de passionnant ou d’émouvant »

Ses réflexions font écho dans mon esprit à mes interrogations. N’ai je pas aussi ce sentiment de dégoût lorsque je veux romancer un écrit ? À tel point que j’arrête d’écrire.  N’ai je le sentiment de céder à quelque chose d’infantile quand je tiens à « prendre le parti de l’art » ? C’est à dire quand je tiens à « bien » écrire ainsi que les conventions communes artistiques définissent ce « bien » ?

Je crois bien que je n’ai jamais osé aller aussi loin qu’elle dans cette façon de tourner le dos à « l’art ».

Et si j’écrivais en pratiquant le sentier qu’elle s’est autorisé à suivre ? Renoncer à toute esthétique, c’est à dire renoncer à complaire, à s’assujettir  au jugement du commun qui se pâme du bien écrire pour se désintéresser du fond des choses, du fond de l’âme, du fond de l’esprit, du fond du réel vécu sans fioritures par chacun(e) ? 

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Membre, Posté(e)
satinvelours Membre 3 006 messages
Forumeur vétéran‚
Posté(e)

Terminé de lire la Place. Ce livre me secoue. Comment ai je pu passer à côté de cette œuvre. À côté de l’œuvre de cette femme.

C’est violent. Violent. Si je m’appliquais à écrire comme elle écrit, alors je basculerai dans une violence telle que je ne pourrais plus écrire.

Ce qu’elle expose relève d’une violence sociale. Mais la classe dont elle est issue n’est pas en elle même violente avec ses enfants.

Si j’écrivais comme elle, il y aurait la violence de la guerre, la violence au sein de la famille, et même la folie. Et la violence ressentie par qui vient d’un pays étranger. J’ai cumulé dans mon enfance des violences rageuses que je ne pourrai jamais peut être exposer comme sait le faire dans ce roman, ou ce récit plutôt, cette auteure, concernant la violence sociale qu’elle a vécue. 

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Membre, 77ans Posté(e)
Blaquière Membre 19 162 messages
Maitre des forums‚ 77ans‚
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Le 13/10/2022 à 14:30, satinvelours a dit :

Dans la Place, Annie Ernaux écrit : « par la suite j’ai commencé un roman » dont son père aurait été le personnage principal.  « Sensation de dégoût au milieu du récit » puis : « le roman est impossible » et encore : « je n’ai pas le droit de prendre d’abord le parti de l’art, ni de chercher à faire quelque chose de passionnant ou d’émouvant »

Ses réflexions font écho dans mon esprit à mes interrogations. N’ai je pas aussi ce sentiment de dégoût lorsque je veux romancer un écrit ? À tel point que j’arrête d’écrire.  N’ai je le sentiment de céder à quelque chose d’infantile quand je tiens à « prendre le parti de l’art » ? C’est à dire quand je tiens à « bien » écrire ainsi que les conventions communes artistiques définissent ce « bien » ?

Je crois bien que je n’ai jamais osé aller aussi loin qu’elle dans cette façon de tourner le dos à « l’art ».

Et si j’écrivais en pratiquant le sentier qu’elle s’est autorisé à suivre ? Renoncer à toute esthétique, c’est à dire renoncer à complaire, à s’assujettir  au jugement du commun qui se pâme du bien écrire pour se désintéresser du fond des choses, du fond de l’âme, du fond de l’esprit, du fond du réel vécu sans fioritures par chacun(e)

J'ai toujours rien lu d'elle, mais là tu donnes envie !

J'en connais de ces "écritures fleuries". Elles me sont souvent insupportables.

Hier elle était à la manif de la NUPES.

PS : je viens de commander "La Place"

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Membre, 77ans Posté(e)
Blaquière Membre 19 162 messages
Maitre des forums‚ 77ans‚
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Trop génial !

Ce matin la facteuse ou la facteure non : la factrice !

M'a apporté un colis : j'ai deviné : c'et "la place" !

Ce soir en bon petit bourgeois, je vais m'évader dans "La Place" ! Il faut dire qu'en mal de lecture, depuis deux ou trois jour j'ai commencé "l'Archipel du Goulag" ! Et j'en suis scotché !

Je suis tout pareil à BHL : La première fois que je l'ai pris, (l'Archipel), je sortais d'  "Une journée d'Ivan Dénissovitch" tellement subtil, humain, relatif, intelligent,  que cet archipel je ne l'ai pas tenu plus d'une trentaine de pages. Je l'ai trouvé ni écrit ni à écrire... Ces jours-ci, non j'ai été fasciné... Comme BHL, donc, deux jugements !Un premier, c'est nul, aucun style, (tant que l'on se croit de gauche donc peu ou prou communiste), un second quand Soljenitsyne a été reconnu officiellement comme un grand écrivain (ou que Poutine est décidément insupportable) : "Soljenitsyne est le nouveau Châteaubriant !"

Alors merci Annie Ernaux ! Ce soir, vous me sortez de mon incohérence !

Je pourrais vous raconter l'arrivée de la factrice, mais non : ce serait vous parler de MOI ! Ici le sujet c'est Annie Ernaux... :o°

Peut-être ailleurs ?

Je rajoute : J'ai pensé, je craignais un peu qu'avec l'attribution du Prix Nobel, ses livres allaient être épuisé !

Naïf que j'étais ! Le livre que je viens de recevoir et qui était donné pour d'occasion au départ est manifestement neuf de cher neuf !... Quand il y a de l'argent à se faire, les éditeurs ne rechignent pas à la besogne. C'est une constatation. Sans préjuger de l'intérêt du livre, bien sûr. ce ne serait pas la première fois que le libéralisme-capitalisme fasciné par les doublons scie la branche sur laquelle il est assis...

Il faut juger sur pièces. En toute naïveté !

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  • 1 mois après...
Membre, 41ans Posté(e)
Crève Membre 3 513 messages
Mentor‚ 41ans‚
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Je viens de terminer le récit Les Années.

J'avais un peu de préjugé, quand j'ai tendu l'oreille, pour écouter les uns et les autres sur le contenu de son oeuvre ; on disait, elle fait un livre sur sa mère, puis après, sur son père. Je me disais, voilà encore un auteur qui tourne autour de son nombril.

Mais suite à sa réception du Nobel, je me suis dit qu'il y avait plus que ça, forcément, un prix d'une telle ampleur ne pouvait pas récompenser quelqu'un qui ne ferait que se regarder.

Eh bien je suis agréablement surpris, Les Années est la recension de 60 ans d'histoire française, une enfilade de micro faits sociologiques qui ont émaillé la vie française, vu par une femme, qui relate la réception et les impressions. On trouve pêle-mêle, des faits politiques, internationaux ou d'intérieur, des faits technologiques, la place de la télé, des moeurs, le tout entrecoupé de descriptions de photos, qui imagent le temps, sans noyer la description du siècle, mais lui donne une chaire ; ce n'est pas nombriliste, ça s'insère adroitement, c'est à la fois personnel et collectif. Il ne faut pas croire non plus que c'est journalistique, ce n'est pas non plus une accumulation d'informations, parce qu'on a ce que le temps a imprimé sur elle/nous, comment elle/on l'a vécu.

Je me disais justement, avant de l'avoir lu, que ça manquait dans le paysage littéraire, un récit qui soit la totalité/une grosse partie du siècle en France. Eh bien maintenant, je constate que c'est fait.

Ce qui m'a le plus plu : c'est la recension de l'arrivée des technologies. La télé, le portable. Si je devais décrire mon siècle, c'est ce que je mettrais en premier. Plus que la vie politique, qui m'apparaît loin de la vie matérielle, brute et quotidienne.

 

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  • 1 mois après...
Membre, Posté(e)
satinvelours Membre 3 006 messages
Forumeur vétéran‚
Posté(e)

Dans le Monde numérique du 23 décembre 2022 il y a une tribune de Michel Guerrin que je trouve interessante ( je ne crois pas pouvoir donner une référence vu que cette tribune est spécifiquement indiquée comme étant réservée aux abonnés).
 

Il y oppose Ernaux et Houellebecq. En faisant d’emblée remarquer que l’une est adulée à gauche ( par les Insoumis en fait) tandis que l’autre est adulé à droite, voire la droite extrême depuis que, récemment, dans la revue Front Populaire il a qualifié  le « grand remplacement » comme étant non pas théorique mais réel.

Ces deux écrivains du coup ne sont pas examinés pour leur œuvre mais pour leurs idées politiques. 
 

L’intérêt  de l’article de Michel Guerrin est qu’il souligne le ressemblance entre l’œuvre de l’une et celle de l’autre. Leurs romans sont construits à partir de leur biographie, ils ont le même talent pour sentir la société, bien qu’il ne s’agisse pas de la même société.  Ils ont un goût similaire pour les mots crus, refusent ensemble la phrase ornementée…

Il y a chez eux une originalité artistique, assez parente quand on compare leurs œuvres sur le plan technique et sur le plan talentueux. 

En revanche leurs positions politiques sont complètement opposées. 

Ainsi les gens de droite, d’extrême droite, ou encore les libertaires individualistes ne comprennent pas pourquoi ce ne fut pas Houellebecq qui hérita du prix Nobel, tandis que les gens de gauche, voire d’extrême gauche, et les libertaires communautaristes ( genre : la révolution qui vient…petit ouvrage du fameux collectif) sont au contraire satisfaits de ce prix Nobel. 
 

Finkielkraut, représentant de la droite dure ( il fut plutôt indulgent avec les positions de Zemmour, ses attaques contre le féminisme font désormais partie  de la posture idéologique des droites comme ses critiques contre la composition ethnique de l’équipe de France de football) estime que l’attribution du Nobel de littérature participe d’une idéologie. Comme si cette critique, sa critique, ne relevait pas d’une idéologie. 

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Membre, 41ans Posté(e)
Crève Membre 3 513 messages
Mentor‚ 41ans‚
Posté(e)
il y a 42 minutes, satinvelours a dit :

Dans le Monde numérique du 23 décembre 2022 il y a une tribune de Michel Guerrin que je trouve interessante ( je ne crois pas pouvoir donner une référence vu que cette tribune est spécifiquement indiquée comme étant réservée aux abonnés).
 

Il y oppose Ernaux et Houellebecq. En faisant d’emblée remarquer que l’une est adulée à gauche ( par les Insoumis en fait) tandis que l’autre est adulé à droite, voire la droite extrême depuis que, récemment, dans la revue Front Populaire il a qualifié  le « grand remplacement » comme étant non pas théorique mais réel.

Ces deux écrivains du coup ne sont pas examinés pour leur œuvre mais pour leurs idées politiques. 
 

L’intérêt  de l’article de Michel Guerrin est qu’il souligne le ressemblance entre l’œuvre de l’une et celle de l’autre. Leurs romans sont construits à partir de leur biographie, ils ont le même talent pour sentir la société, bien qu’il ne s’agisse pas de la même société.  Ils ont un goût similaire pour les mots crus, refusent ensemble la phrase ornementée…

Il y a chez eux une originalité artistique, assez parente quand on compare leurs œuvres sur le plan technique et sur le plan talentueux. 

En revanche leurs positions politiques sont complètement opposées. 

Ainsi les gens de droite, d’extrême droite, ou encore les libertaires individualistes ne comprennent pas pourquoi ce ne fut pas Houellebecq qui hérita du prix Nobel, tandis que les gens de gauche, voire d’extrême gauche, et les libertaires communautaristes ( genre : la révolution qui vient…petit ouvrage du fameux collectif) sont au contraire satisfaits de ce prix Nobel. 
 

Finkielkraut, représentant de la droite dure ( il fut plutôt indulgent avec les positions de Zemmour, ses attaques contre le féminisme font désormais partie  de la posture idéologique des droites comme ses critiques contre la composition ethnique de l’équipe de France de football) estime que l’attribution du Nobel de littérature participe d’une idéologie. Comme si cette critique, sa critique, ne relevait pas d’une idéologie. 

Avant d'être positionné sur l'échiquier politique, M.H. est pour moi un anticipateur social ; il sent les secousses sismiques qui agitent la société. De plus, je suis persuadé que M.H. est un lecteur de science-fiction. Même dans son dernier roman, Anéantir, il décrit les avancées technologiques : le deep fake va tellement évoluer qu'il va causer des problèmes aux personnalités médiatisées. Depuis ses débuts, avec Extension..., M.H. se faisait l'écho de malaises, quand il décrit le sentiment de Raphaël Tisserand en ces termes : sur le marché de la séduction, je me sentais comme un cuisse de poulet sous cellophane. Il avait entrevu en 94 déjà, la vitrinisation de nos solitudes : les sites de rencontre.

 

Je n'ai lu qu'un livre de Annie, c'est Les Années ; et je n'ai pas décelé ce regard d'anticipateur social qu'a M.H.. Le roman de A.E. c'est une enfilade de faits sociaux sur 60 ans en France, qui fait son effet ; mais qui porte pas au-delà du présent.

 

Plus que la division droite/gauche (qui au fond m'importe peu), le ressenti que j'ai à la lecture de ces deux auteurs est plutôt homme/femme, dans un premier temps, puis anticipateur des faits sociaux pour M.H.

 

 

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Membre, Posté(e)
satinvelours Membre 3 006 messages
Forumeur vétéran‚
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il y a 14 minutes, Crève a dit :

Avant d'être positionné sur l'échiquier politique, M.H. est pour moi un anticipateur social ; il sent les secousses sismiques qui agitent la société. De plus, je suis persuadé que M.H. est un lecteur de science-fiction. Même dans son dernier roman, Anéantir, il décrit les avancées technologiques : le deep fake va tellement évoluer qu'il va causer des problèmes aux personnalités médiatisées. Depuis ses débuts, avec Extension..., M.H. se faisait l'écho de malaises, quand il décrit le sentiment de Raphaël Tisserand en ces termes : sur le marché de la séduction, je me sentais comme un cuisse de poulet sous cellophane. Il avait entrevu en 94 déjà, la vitrinisation de nos solitudes : les sites de rencontre.

 

Je n'ai lu qu'un livre de Annie, c'est Les Années ; et je n'ai pas décelé ce regard d'anticipateur social qu'a M.H.. Le roman de A.E. c'est une enfilade de faits sociaux sur 60 ans en France, qui fait son effet ; mais qui porte pas au-delà du présent.

 

Plus que la division droite/gauche (qui au fond m'importe peu), le ressenti que j'ai à la lecture de ces deux auteurs est plutôt homme/femme, dans un premier temps, puis anticipateur des faits sociaux pour M.H.

 

 

Je n’ai pas perçu les écrits de Houellebecq comme étant des anticipations. À mon avis cela vient du fait que je suis plus âgé que vous. Dans les particules élémentaires les personnes de ma génération ont surtout été étonnées par la « crudité » de ses propos, crudité de la pulsion sexuelle  brute, déconnectée du sentiment. Il disait, révélait, exprimait une sorte de « misère » ( je n’aime pas ce mot) sexuelle qui à l’époque se répandait sur le Minitel. Il a donc été pour moi, non un anticipateur, mais un révélateur des sentiments et désirs plus ou moins honteux ou dévalorisants qui existaient à l’époque (d’autant qu’il les vivaient et même les réalisaient dans le réel ces comportements pour le moins, parfois, assez veules).  Il a permis d’aller au delà d’une sorte de honte sociale pour tous ceux qui utilisaient, comme lui, les sites de rencontre du Minitel rose. Sa hardiesse d’ailleurs à dire sa propre « misère » a sidéré. Comme son courage à passer par dessus son amour propre pour raconter ses ratages relationnels avec les femmes. Il révélait à toute une génération, la mienne, ses propres gênes à dire les errements, les tâtonnements, les non dits relatifs à toute tentative d’entrer dans une relation intime. 
Que cela devienne pour vous une anticipation est étonnant. Cela montre à quel point l’histoire n’est jamais objective. On fait aujourd’hui de Houellebecq un révélateur de certaines dérives sociales alors qu’en fait il ne fut pas un révélateur mais un ACTEUR de ces dérives ( comme toute ma génération !). Je suis étonné par cet imaginaire qui réécrit  l’histoire, comme sans doute mon propre imaginaire doit me conduire, sans que je m’en rende compte, à la réécriture de l’histoire de la génération qui me précéda dans l’histoire. 
Quant à ses autres anticipations je n’ai pas le même jugement que vous. Comme il le dit dans son entretien dans Front populaire il fut un grand lecteur de science fiction ( comme je le fus d’ailleurs, ainsi que ma génération) et tout ce qu’il anticipe fut déjà anticipé. Sur ce point il est d’ailleurs honnête dans son entretien avec Onfray, il dit combien il doit aux auteurs de science fiction des années 60 et 70.  
Je pense notamment à cet écrivain : PK Dick qui, pour le coup, anticipe le monde même des multivers. 
Pour moi Houellebecq révèle les obsessions d’une certaine classe sociale ce qui est déjà beaucoup. De même qu’Ernaux révèle les malaises d’une autre classe sociale, celle qui est issue des classes qui furent les plus défavorisées dans le passé et qui se retrouvent aujourd’hui coincés dans le sentiment d’être des transfuges. 
Pour moi l’un comme l’autre  sont surtout des sociologues de talent. 

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satinvelours Membre 3 006 messages
Forumeur vétéran‚
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J’ai l’impression de m’être fait piégé dans cette discussion Annie Ernaux vs Michel Houellebecq. On en revient toujours à une opposition des idées. On sort de la politique mais on y revient par le biais de la sociologie. Houellebecq est formidable parce qu’il a su anticiper me dit-on . Au fond Houellebecq est formidable parce qu’il a la dimension d’un prophète. Quand à Annie Ernaux elle fait chier son monde en décrivant la vie banale des banlieues parisiennes ( Cervy-Pontoise). Quoi décrire de pire ? Au moins avec Paris on a les bobos, avec la Province on a les notables et les ploucs. Ça, au moins, c’est du solide, de l’éternel. 
Mais les banlieues ? C’est aussi minable que les rapides masturbations tristes décrites par Houellebecq dans certains de ses romans.
 

Comment peut on lire Ernaux quand elle décrit ce qui se passe dans le mega Carrefour de Cergy ? 
Et à vrai dire, les descriptions d’Ernaux ne sont en effet pas très réjouissantes.

Mais est ce pour cela que je me suis intéressé à Ernaux ou à Houellebecq ? Est ce pour leurs pensées ? 


En fait non.

Je me suis intéressé  à eux parce que j’ai cette curiosité : comment écrivent ils ? Quelle est leur technique ? Et même encore plus : comment font ils pour dire ce qu’ils sentent, ce qu’ils perçoivent ? Quel est leur style ?

C’est en tant qu’écrivain que je m’intéresse à eux. Et n’importe quel écrivain qui tend à une « façon » artistique ( et non à une façon professionnelle, dans cette façon là, professionnelle, il y en a des paquets d’écrivains !) N’importe quel écrivain qui tend à une expression artistique ( à une façon propre, unique) s’intéresse à la « façon » de tout autre artiste écrivain, pour tout simplement apprendre ou désapprendre, approuver ou désapprouver la façon de l’artiste lu.


Et si je tente à être lucide avec moi même, en fait je ne m’intéresse pas aux contenus ni de l’un ni de l’autre, je m’intéresse à leur art. A cette façon subtile, immatérielle, cette façon perceptible par si peu de gens, de dire. 
 

Pour ce qui est de leurs idées au fond je m’en fous, ou encore je lis des résumés de leurs idées.
 

Difficile tout de même de se foutre de leurs idées puisque l’une symbolise en quelque sorte les Gilets jaunes, et l’autre les bourgeois oisifs des grandes métropoles. 

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Membre, 77ans Posté(e)
Blaquière Membre 19 162 messages
Maitre des forums‚ 77ans‚
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Il y a 21 heures, satinvelours a dit :

Je n’ai pas perçu les écrits de Houellebecq comme étant des anticipations. À mon avis cela vient du fait que je suis plus âgé que vous. Dans les particules élémentaires les personnes de ma génération ont surtout été étonnées par la « crudité » de ses propos, crudité de la pulsion sexuelle  brute, déconnectée du sentiment. Il disait, révélait, exprimait une sorte de « misère » ( je n’aime pas ce mot) sexuelle qui à l’époque se répandait sur le Minitel. Il a donc été pour moi, non un anticipateur, mais un révélateur des sentiments et désirs plus ou moins honteux ou dévalorisants qui existaient à l’époque (d’autant qu’il les vivaient et même les réalisaient dans le réel ces comportements pour le moins, parfois, assez veules).  Il a permis d’aller au delà d’une sorte de honte sociale pour tous ceux qui utilisaient, comme lui, les sites de rencontre du Minitel rose. Sa hardiesse d’ailleurs à dire sa propre « misère » a sidéré. Comme son courage à passer par dessus son amour propre pour raconter ses ratages relationnels avec les femmes. Il révélait à toute une génération, la mienne, ses propres gênes à dire les errements, les tâtonnements, les non dits relatifs à toute tentative d’entrer dans une relation intime. 
Que cela devienne pour vous une anticipation est étonnant. Cela montre à quel point l’histoire n’est jamais objective. On fait aujourd’hui de Houellebecq un révélateur de certaines dérives sociales alors qu’en fait il ne fut pas un révélateur mais un ACTEUR de ces dérives ( comme toute ma génération !). Je suis étonné par cet imaginaire qui réécrit  l’histoire, comme sans doute mon propre imaginaire doit me conduire, sans que je m’en rende compte, à la réécriture de l’histoire de la génération qui me précéda dans l’histoire. 
Quant à ses autres anticipations je n’ai pas le même jugement que vous. Comme il le dit dans son entretien dans Front populaire il fut un grand lecteur de science fiction ( comme je le fus d’ailleurs, ainsi que ma génération) et tout ce qu’il anticipe fut déjà anticipé. Sur ce point il est d’ailleurs honnête dans son entretien avec Onfray, il dit combien il doit aux auteurs de science fiction des années 60 et 70.  
Je pense notamment à cet écrivain : PK Dick qui, pour le coup, anticipe le monde même des multivers. 
Pour moi Houellebecq révèle les obsessions d’une certaine classe sociale ce qui est déjà beaucoup. De même qu’Ernaux révèle les malaises d’une autre classe sociale, celle qui est issue des classes qui furent les plus défavorisées dans le passé et qui se retrouvent aujourd’hui coincés dans le sentiment d’être des transfuges. 
Pour moi l’un comme l’autre  sont surtout des sociologues de talent. 

"Pour moi Houellebecq révèle les obsessions d’une certaine classe sociale ce qui est déjà beaucoup. De même qu’Ernaux révèle les malaises d’une autre classe sociale, celle qui est issue des classes qui furent les plus défavorisées dans le passé et qui se retrouvent aujourd’hui coincés dans le sentiment d’être des transfuges. 
Pour moi l’un comme l’autre  sont surtout des sociologues de talent."

Bonne réflexion ! 

Houellebecq nous expose une "veulerie (mieux qu'une misère) sexuelle décomplexée"...

Cela me fait penser à l'idée à la mode depuis Sarko d'une "Droite décomplexée"...

Comme on vient de voir se type qui affirme avoir tué ces Kurdes parce qu'il est raciste...

Comme une affirmation éhonté de ce qu'on présuppose moche en nous... 

(De ce que la moralité ambiante dit être moche)

Comme une quête, une recherche d'identité -originale?-, un besoin de sortir du lot  "Je suis ce vilain-là !" 

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Membre, 41ans Posté(e)
Crève Membre 3 513 messages
Mentor‚ 41ans‚
Posté(e)
Il y a 7 heures, satinvelours a dit :l’une symbolise en quelque sorte les Gilets jaunes, et l’autre les bourgeois oisifs des grandes métropoles. 

Je sais pas trop si on peut les mettre dans ces cases, par exemple, je suis aux minimas sociaux et je vis dans une petite ville de province. donc tout l’inverse du « bourgeois oisif de la grande métropole » et pourtant j’attends la sortie du Houellebecq 

 

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