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Y a-t-il un droit naturel ?


Loufiat

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épixès Membre 1 815 messages
Forumeur alchimiste ‚ 51ans‚
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Il y a 16 heures, Loufiat a dit :

je me permets de te faire remarquer que c'est ton jugement personnel qui veut que les réflexions conduites depuis des millénaires sur la nature humaine, soient nulles et non avenues (tu estimes donc que l'ensemble du système juridique en France par ex. est nul).

Je ne dis pas que ces réflexions sont inutiles, je dis qu'en tant que réflexions il est vain de chercher à leur conférer un caractère universel (ou même à les objectiver dans certains cas) puisque subjectives, d'autant plus vain qu'il n'existe pas de «nature humaine».

Il y a 16 heures, Loufiat a dit :

Enfin, je voudrais bien que tu précises un peu, ce que "la science" nous apprend sur le sujet, qui te semble contradictoire avec la doctrine du droit naturel ?

Le droit naturel désigne des normes supposées relatives à la nature de l'Homme et cette idée de nature humaine est une séquelle de l'essentialisme, or c'est l'idée même d'essentialisme qui s'oppose aux sciences puisqu'il suppose des entités immatérielles flottant dans un monde idéel et introduit de la discontinuité dans la nature: par exemple en biologie l'essentialisme est une conception selon laquelle les diverses espèces animales et végétales diffèrent entre elles « par essence », ce qui supposerait des classifications d'origine non humaine dans la nature tandis que la position scientifique prétend que les individus et leurs populations préexistent, et les catégories ne sont que des regroupements établis par l’homme par commodité au sein d'un vaste continuum de formes dans la nature.

De façon empirique rien ne permet de supposer cet au-delà platonicien et philosophiquement parlant, cette rupture ontologique qu'exige l'essentialisme s'oppose au rasoir d'Ockham et au matérialisme méthodologique de la science.

Il y a 16 heures, Loufiat a dit :

Idem : veux-tu bien préciser ce que la science nous apprend à ce sujet ?

Le finalisme est une théorie qui estime plausible l'existence d'une cause finale de l'univers, de la nature ou de l'humanité. Elle présuppose un dessein, un but, une signification, immanents ou transcendants, présents dès leur origine. En raison du principe de l'antériorité (au moins logique, sinon chronologique) de la cause par rapport à ses effets, la question des causes finales à l'œuvre dans la nature touche de près à celle de l'existence de Dieu

Cela viole trois piliers épistémologiques de la science: le scepticisme initial sur les faits, le principe de parcimonie ainsi qu'encore une fois le matérialisme méthodologique puisque si vous acceptez une entité surnaturelle sans preuve, vous devrez accepter n'importe quelle entité surnaturelle. Ainsi vous détruisez le processus de la preuve.

PS: j'aimerais continuer à argumenter et fournir des exemples mais là je tombe de sommeil, désolé. :wink:

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Membre, 35ans Posté(e)
Loufiat Membre 2 589 messages
Mentor‚ 35ans‚
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Le 22/03/2022 à 04:51, épixès a dit :

Je ne dis pas que ces réflexions sont inutiles, je dis qu'en tant que réflexions il est vain de chercher à leur conférer un caractère universel (ou même à les objectiver dans certains cas) puisque subjectives, d'autant plus vain qu'il n'existe pas de «nature humaine».

En fait si on suit ce raisonnement, droit naturel ou non, il n'existe tout simplement plus de sujet de droit...

Le 22/03/2022 à 04:51, épixès a dit :

Le droit naturel désigne des normes supposées relatives à la nature de l'Homme et cette idée de nature humaine est une séquelle de l'essentialisme, or c'est l'idée même d'essentialisme qui s'oppose aux sciences puisqu'il suppose des entités immatérielles flottant dans un monde idéel et introduit de la discontinuité dans la nature: par exemple en biologie l'essentialisme est une conception selon laquelle les diverses espèces animales et végétales diffèrent entre elles « par essence », ce qui supposerait des classifications d'origine non humaine dans la nature tandis que la position scientifique prétend que les individus et leurs populations préexistent, et les catégories ne sont que des regroupements établis par l’homme par commodité au sein d'un vaste continuum de formes dans la nature.

De façon empirique rien ne permet de supposer cet au-delà platonicien et philosophiquement parlant, cette rupture ontologique qu'exige l'essentialisme s'oppose au rasoir d'Ockham et au matérialisme méthodologique de la science.

Prenons un cas pratique : un apatride ; il n'a pas de citoyenneté, il n'existe pas au regard du droit positif et donc, tu réponds, il n'y a pas de droit naturel, c'est une chimère, il n'y a donc pas plus de dignité humaine, et on peut par exemple découper cet être humain en morceaux, ou en faire un esclave sexuel, que sais-je, cela n'a aucune signification réelle de toute façon, il n'y a aucune différence que si on avait tondu sa pelouse ou débité un arbre ; car de plus, qu'est-ce qu'un être humain ? Oui où est la frontière, on se demande ? Allons plus loin : qu'est-ce que la vie ? La science nous apprend qu'il y a surtout un continuum ininterrompu, que les frontières entre animé et inanimé sont poreuses...

La liberté, la sécurité, la dignité humaine sont-elles des séquelles de l'essentialisme dont la science doit nous débarrasser ? (Sais-tu que certains ont effectivement réfléchi de cette façon par le passé ? Je te laisse deviner qui était particulièrement friand d'une application radicale du "matérialisme méthodologique")

Le 22/03/2022 à 04:51, épixès a dit :

Le finalisme est une théorie qui estime plausible l'existence d'une cause finale de l'univers, de la nature ou de l'humanité. Elle présuppose un dessein, un but, une signification, immanents ou transcendants, présents dès leur origine. En raison du principe de l'antériorité (au moins logique, sinon chronologique) de la cause par rapport à ses effets, la question des causes finales à l'œuvre dans la nature touche de près à celle de l'existence de Dieu

Cela viole trois piliers épistémologiques de la science: le scepticisme initial sur les faits, le principe de parcimonie ainsi qu'encore une fois le matérialisme méthodologique puisque si vous acceptez une entité surnaturelle sans preuve, vous devrez accepter n'importe quelle entité surnaturelle. Ainsi vous détruisez le processus de la preuve.

PS: j'aimerais continuer à argumenter et fournir des exemples mais là je tombe de sommeil, désolé. :wink:

Mais il est question de Droit et de justice, pas de science (bien qu'il existe une science juridique). Tu vois bien que ces questions obligent quelque peu à revenir sur terre. (C'est sans animosité aucune, au contraire je te remercie vivement pour ce développement que tu as pris la peine de proposer.)
 

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Membre, 51ans Posté(e)
épixès Membre 1 815 messages
Forumeur alchimiste ‚ 51ans‚
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Le 23/03/2022 à 18:03, Loufiat a dit :

En fait si on suit ce raisonnement, droit naturel ou non, il n'existe tout simplement plus de sujet de droit...

Pas du tout: il n'y a que le droit naturel qui prétend avoir un caractère universel. La nature contingente du droit positif l'immunise à ma critique, il ne se revendique pas comme objectif et n'affirme que son caractère obligatoire et répressif.

Le 23/03/2022 à 18:03, Loufiat a dit :

La liberté, la sécurité, la dignité humaine sont-elles des séquelles de l'essentialisme dont la science doit nous débarrasser ? (Sais-tu que certains ont effectivement réfléchi de cette façon par le passé ? Je te laisse deviner qui était particulièrement friand d'une application radicale du "matérialisme méthodologique")

En effet les idées et les concepts n'existent pas, pas dans le sens fort d'exister tout au moins.

Cependant ne pas reconnaitre leur existence objective ne nous contraint pas à ignorer nos valeurs, à affirmer comme un relativiste que tout se vaut ou comme un nihiliste que rien ne vaut. Personnellement cela m'a conduit à revoir non mes valeurs mais le rapport que j'entretiens avec elles: conscient qu'elle ne sont que la manifestation de préférences subjectives, j'évite précisément de leur conférer l'autorité qu'une objectivité supposée légitime, ce qui mène presque invariablement à tous les abus au nom d'un idéal supérieur.

Le 23/03/2022 à 18:03, Loufiat a dit :

Mais il est question de Droit et de justice, pas de science (bien qu'il existe une science juridique). Tu vois bien que ces questions obligent quelque peu à revenir sur terre. (C'est sans animosité aucune, au contraire je te remercie vivement pour ce développement que tu as pris la peine de proposer.)

Tout droit et toute justice qui ignorerait la science, et donc ce que nous savons de la réalité, est une aberration. La philosophie analytique avance main dans la main avec la science, de même que l'épistémologie et la justice fait très souvent appel à des experts (bien maladroitement, certes), il me semble que c'est précisément avoir les pieds sur Terre que de réfléchir prudemment à la lumière des connaissances de son époque plutôt que de façon complètement désincarnée, sans connexion avec le réel.

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Loufiat Membre 2 589 messages
Mentor‚ 35ans‚
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Le 30/03/2022 à 00:18, épixès a dit :

Pas du tout: il n'y a que le droit naturel qui prétend avoir un caractère universel. La nature contingente du droit positif l'immunise à ma critique, il ne se revendique pas comme objectif et n'affirme que son caractère obligatoire et répressif.

Mais le droit positif s'élève, en France notamment, sur des éléments qui empruntent au droit naturel. Ailleurs ce sera sur des fondements théologiques (lesquels n'excluent pas non plus systématiquement le droit naturel).

Le 30/03/2022 à 00:18, épixès a dit :

En effet les idées et les concepts n'existent pas, pas dans le sens fort d'exister tout au moins.

Voilà qui pose un sérieux problème.

Le 30/03/2022 à 00:18, épixès a dit :

Cependant ne pas reconnaitre leur existence objective ne nous contraint pas à ignorer nos valeurs, à affirmer comme un relativiste que tout se vaut ou comme un nihiliste que rien ne vaut.

Mais il n'y a pas 36 alternatives. Si tu prends sérieusement ce parti tu es conduit au nihilisme (vraisemblablement sous la forme de l'hédonisme).

Le 30/03/2022 à 00:18, épixès a dit :

Personnellement cela m'a conduit à revoir non mes valeurs mais le rapport que j'entretiens avec elles: conscient qu'elle ne sont que la manifestation de préférences subjectives, j'évite précisément de leur conférer l'autorité qu'une objectivité supposée légitime, ce qui mène presque invariablement à tous les abus au nom d'un idéal supérieur.

L'argument est absurde pour un philosophe du droit naturel. Le droit naturel bien compris ne peut pas amener à "tous les abus" (mais quels abus, selon quelle échelle de valeur, qu'est-ce qui te fonde à juger que ce sont des abus au delà de ta seule préférence personnelle ?) C'est en fin de compte un argument en faveur du droit naturel : l'ignorance de celui-ci, et ses dévoiements, conduisent à des abus.

On ne sort pas si facilement de la problématique. Mais tu ne fais que ressasser le préjugé de départ, à savoir que, s'il y a un droit naturel, il doit s'exprimer partout de façon identique et définitive. Or te semble-t-il que la variété des conceptions de l'univers à travers les âges et les lieux, atteste que l'univers n'existe pas ? Si tu ne peux pas appliquer le même raisonnement au droit, c'est parce que tu dénies aux valeurs, leur valeur. C'est bien ça le nihilisme, et qu'on s'en garde ou non, les conséquences à terme sont partout les mêmes.

Le 30/03/2022 à 00:18, épixès a dit :

Tout droit et toute justice qui ignorerait la science, et donc ce que nous savons de la réalité, est une aberration.

Selon quoi ? Ta préférence personnelle ? pourquoi devrais-je prendre cet argument au sérieux ?

Le 30/03/2022 à 00:18, épixès a dit :

La philosophie analytique avance main dans la main avec la science, de même que l'épistémologie et la justice fait très souvent appel à des experts (bien maladroitement, certes), il me semble que c'est précisément avoir les pieds sur Terre que de réfléchir prudemment à la lumière des connaissances de son époque plutôt que de façon complètement désincarnée, sans connexion avec le réel.

Mais qui fait cela ? C'est toi qui dès le départ suppose que droit naturel et science s'excluent mutuellement.

Bon j'essaierai prochainement d'apporter davantage de substance

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