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La langue d'oc

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Blaquière

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tison2feu Membre 3 032 messages
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il y a 28 minutes, Blaquière a dit :

Je viens de penser au navire "brigantin" depuis le XIII ème siècle et à une de ses voiles la "brigantine". Sur Wiki, on ne donne aucune étymologie...

En tapant "brigantin étymologie" sur Google, une même étymologie est donnée par le Littré et surtout le CNRTL :

1/ Le Littré https://www.littre.org/definition/brigantin

BRIGANTIN ÉTYMOLOGIE Bas-lat. brigentinus ; ital. brigantino, anciennement vaisseau de course. On a dit que ce mot venait de brig ou brick ; mais brig ou brick ne comporte aucun suffixe de ce genre : brig-antin. Il faut y voir un dérivé de brigant : brigant-in ; c'est-à-dire le vaisseau destiné à la course.

2/ Le CNRTL http://www.cnrtl.fr/etymologie/brigantin

BRIGANTIN, subst. masc.: Étymol. et Hist. 1360-1400 brigandin (Froissart, t. IV, ch. 18 dans Du Cange, s.v. brigentinus : Une maniere de vaisseaux courans, lesquels on nomme Brigandins); id. brigantin (Id., Chron., XIV, 213, Kerv. dans Kemna : nos petits vaisseaulx que on appelle brigantins [var. brigandins]). Empr. à l'ital. brigantino « petit bâtiment rapide muni de voiles et de rames » (Sain. Lang. Rab., p. 118; Vidos, p. 256; Kemna, p. 199; EWFS2; Hope, p. 31) attesté dep. 1379 déc. (Carlo Anton. Marin dans Jal). L'ital. brigantino est un dimin. avec suff. -ino (-in*) de brigante proprement « celui qui fait partie d'une troupe, d'une compagnie » [navire d'escorte], v. brigand (Migl.-Duro; Devoto); la forme brigandin p. infl. de brigand*.

3/ Idem dans le Dictionnaire étymologique de la langue française (Le Robert).

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tison2feu Membre 3 032 messages
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Finalement, c'est l'étymologie du terme bregansons utilisé par le chroniqueur Pierre Boisset qui pose problème dans ce bout de phrase "una galiota armada de bregansons". Il faudrait savoir dans quel contexte ces termes sont employés...

Je ne sais comment s'appellent, en provençal, les habitants de Bregançon; sont-ils des bregansons ?

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Membre, 76ans Posté(e)
Blaquière Membre 18 860 messages
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il y a 1 minute, tison2feu a dit :

Finalement, c'est l'étymologie du terme bregansones utilisé par le chroniqueur Pierre Boisset qui pose problème dans ce bout de phrase "una galiota armada de bregansons". Il faudrait savoir dans quel contexte ces termes sont employés... Je ne sais comment s'appellent, en provençal, les habitants de Bregançon; sont-ils des bregansons ?

Oui ! Pour les habitants je ne vois guère que la forme provençale classique et générale :  "lei bregançonencs" ce qui nous avance pas ! (et bregançonencos" pour le féminin.)

(Tolonenc/tolonenco)

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tison2feu Membre 3 032 messages
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il y a 32 minutes, Blaquière a dit :

Oui ! Pour les habitants je ne vois guère que la forme provençale classique et générale :  "lei bregançonencs" ce qui nous avance pas ! (et bregançonencos" pour le féminin.)

(Tolonenc/tolonenco)

Nous savons juste que c'est Mistral qui considère que Boisset a employé ce mot bregançons dans le sens de "pirates". 

Mais je me demandais, sans certitude aucune, si Boisset n'aurait pas employé ce mot bregançons pour décrire simplement des soldats originaires de Bregançon embarqués sur cette galiote.

(Cela nécessiterait de lire Boisset dans le texte pour se faire une meilleure idée !)

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Membre, 76ans Posté(e)
Blaquière Membre 18 860 messages
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il y a 13 minutes, tison2feu a dit :

Nous savons juste que c'est Mistral qui considère que Boisset a employé ce mot bregançons dans le sens de "pirates". 

Mais je me demandais, sans certitude aucune, si Boisset n'aurait pas employé ce mot bregançons pour décrire simplement des soldats originaires de Bregançon embarqués sur cette galiote.

(Cela nécessiterait de lire Boisset dans le texte pour se faire une meilleure idée !)

Je vais essayer de chercher, si c'est dans ses chroniques, je trouverai....

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Membre, 76ans Posté(e)
Blaquière Membre 18 860 messages
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Il y a 2 heures, tison2feu a dit :

Nous savons juste que c'est Mistral qui considère que Boisset a employé ce mot bregançons dans le sens de "pirates". 

Mais je me demandais, sans certitude aucune, si Boisset n'aurait pas employé ce mot bregançons pour décrire simplement des soldats originaires de Bregançon embarqués sur cette galiote.

(Cela nécessiterait de lire Boisset dans le texte pour se faire une meilleure idée !)

ça a été rapide c'était qu'à la 27 ème page ! et encore au début y'a baucoup de pages en latin et j savais que c'était pas là !

Je ne sais pas s'ils venaient de Brégançon, mais ce qui est sûr c'est que c'était des brigands !

La vache ! les "martégaus", ils ont pas fait de quartier ! Et dire qu'aujourd'hui, ils passent pour des farceurs ! Mais il n'est rien dit sur les pêcheurs arlésiens qui avaient été enlevés....

583822217_lagaleotadebregansons.png.50910397fb0befe0e4a13452b4e31693.png

 

L’an .M. CCC LXXXXIIII. Lo jorn. Quatre davost

Fon .1. galeota armada de breganson al

gras de rose e preron . XIIII. homes pescados

darle an tota lur rauba et apres sen a-

neron alila de martegue quant foron

lay. las gens de lila salhiron sus la galeota

et ausiron hi quatre homes e priron tots

los autres que foron ennombr(on) los vieus

.XVII. Lescrivan layseron anar quar pendet

tot los autres.

 

Ce qui semble vouloir dire (mot à mot) :

 

L’an 1394, le jour quatre d’août

fut une petit galère armée de breganson à

l’embouchure du Rhone et ils prirent 13 hommes, pêcheurs

D’Arles avec toutes leurs affaires (?) et après s’en

allèrent à L’île des Martigues quand ils furent

là, les gens de l’île sortirent sur (envahirent) la galère

et y occirent quatre hommes et prirent tous

les autres qui étaient en nombre (ou "en comptant"?) les vivants

17. Il laissèrent aller l’écrivain (le secrétaire) car il avait pendu

tous les autres.

 

J'ai fait rapide : y'aurait sûrement à retoucher. Il put toujours y avoir un contresens monumental : ça arrive !

Il sembleraient qu'ils aient fait pendre les "briganson" par leur propre "écrivain" . Il faudrait encore y réfléchir...

je vais vérifier "pendet"... Non c'est bien le passé simple 3ème prsonne singulier  de "pendre" [pèndré] (Fr=pendre !)

 

 

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tison2feu Membre 3 032 messages
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Il y a 2 heures, Blaquière a dit :

ça a été rapide c'était qu'à la 27 ème page ! et encore au début y'a baucoup de pages en latin et j savais que c'était pas là !

Je ne sais pas s'ils venaient de Brégançon, mais ce qui est sûr c'est que c'était des brigands !

La vache ! les "martégaus", ils ont pas fait de quartier ! Et dire qu'aujourd'hui, ils passent pour des farceurs ! Mais il n'est rien dit sur les pêcheurs arlésiens qui avaient été enlevés....

583822217_lagaleotadebregansons.png.50910397fb0befe0e4a13452b4e31693.png

 

L’an .M. CCC LXXXXIIII. Lo jorn. Quatre davost

Fon .1. galeota armada de breganson al

gras de rose e preron . XIIII. homes pescados

darle an tota lur rauba et apres sen a-

neron alila de martegue quant foron

lay. las gens de lila salhiron sus la galeota

et ausiron hi quatre homes e priron tots

los autres que foron ennombr(on) los vieus

.XVII. Lescrivan layseron anar quar pendet

tot los autres.

 

Ce qui semble vouloir dire (mot à mot) :

 

L’an 1394, le jour quatre d’août

fut une petit galère armée de breganson à

l’embouchure du Rhone et ils prirent 13 hommes, pêcheurs

D’Arles avec toutes leurs affaires (?) et après s’en

allèrent à L’île des Martigues quand ils furent

là, les gens de l’île sortirent sur (envahirent) la galère

et y occirent quatre hommes et prirent tous

les autres qui étaient en nombre (ou "en comptant"?) les vivants

17. Il laissèrent aller l’écrivain (le secrétaire) car il avait pendu

tous les autres.

 

J'ai fait rapide : y'aurait sûrement à retoucher. Il put toujours y avoir un contresens monumental : ça arrive !

Il sembleraient qu'ils aient fait pendre les "briganson" par leur propre "écrivain" . Il faudrait encore y réfléchir...

je vais vérifier "pendet"... Non c'est bien le passé simple 3ème prsonne singulier  de "pendre" [pèndré] (Fr=pendre !)

 

 

Génial ! L'hypothèse de Mistral s'éclaire davantage.
En lisant le début du texte de Boisset, on aurait pu penser un bref instant que breganson signifie Bregançon : "Une galéote armée de Bregançon (sous-entendu "partie de Bregançon") fut à l'embouchure du Rhône..." puisque les noms de lieu ne portent pas de majuscule. Mais, dans la suite de la phrase, tout laisse à penser que breganson = êtres animés, qualifiés de "pirates" par Mistral.

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Membre, 76ans Posté(e)
Blaquière Membre 18 860 messages
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il y a 18 minutes, tison2feu a dit :

Génial ! L'hypothèse de Mistral s'éclaire davantage.
En lisant le début du texte de Boisset, on aurait pu penser un bref instant que breganson signifie Bregançon : "Une galéote armée de Bregançon (sous-entendu "partie de Bregançon") fut à l'embouchure du Rhône..." puisque les noms de lieu ne portent pas de majuscule. Mais, dans la suite de la phrase, tout laisse à penser que breganson = êtres animés, qualifiés de "pirates" par Mistral.

Il reste que ton hypothèse d'une "galéote" venue de Bregançon n'est pas à exclure car on peut vérifier sur le texte que le mot de "breganso" (avec l'accolade sur le "o" pour remplacer le "n") n'est pas au pluriel  puisque dans ce cas Boisset aurait écrit "bregansos", (avec l'accolade : "bregansons").  Il est rare qu'il commette ce genre d'erreur.

Comment savoir si Brégançon était ou non réputé pour être un foyer de pirates au XIV-XV ème ? Je n'ai pas souvenir d'avoir lu ce nom dans les archives de Toulon au XVème en tout cas.

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tison2feu Membre 3 032 messages
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il y a 15 minutes, Blaquière a dit :

Il reste que ton hypothèse d'une "galéote" venue de Bregançon n'est pas à exclure car on peut vérifier sur le texte que le mot de "breganso" (avec l'accolade sur le "o" pour remplacer le "n") n'est pas au pluriel  puisque dans ce cas Boisset aurait écrit "bregansos", (avec l'accolade : "bregansons").  Il est rare qu'il commette ce genre d'erreur.

Comment savoir si Brégançon était ou non réputé pour être un foyer de pirates au XIV-XV ème ? Je n'ai pas souvenir d'avoir lu ce nom dans les archives de Toulon au XVème en tout cas.

Ta précision au sujet du nombre (breganso = mot singulier) incite en effet à se poser encore et encore des questions du point de vue historique (histoire de Bregançon; situation historique de la Provence du temps de Boisset; qui peuvent être ces "pirates" ?, etc.).

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Membre, 76ans Posté(e)
Blaquière Membre 18 860 messages
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il y a 17 minutes, tison2feu a dit :

Ta précision au sujet du nombre (breganso = mot singulier) incite en effet à se poser encore et encore des questions du point de vue historique (histoire de Bregançon; situation historique de la Provence du temps de Boisset; qui peuvent être ces "pirates" ?, etc.).

Philippe Rigaud avait en 1984 sorti une étude sur "la capture d'une galeota catalane en Camargue en 1469"...

(Je sens du Valls, là dessous ! :smile2:)

 

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tison2feu Membre 3 032 messages
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il y a 40 minutes, Blaquière a dit :

Philippe Rigaud avait en 1984 sorti une étude sur "la capture d'une galeota catalane en Camargue en 1469"...

(Je sens du Valls, là dessous ! :smile2:)

 

Oui, catalane, mais aussi la piraterie aragonaise. J'étais plongé dans la lecture d'un article : "Îles, corsaires et pirates dans la Méditerranée médiévale", avec cette citation du troubadour - et non "trouvère" (sic) - languedocien Peire Vidal à propos du navigateur Enrico Pescatore: « Larcs es et arditz e cortes, et estela dels Genoes, e fai per terra e per mar tots ses enemichs tremelar ».

Plus proche de l'époque de Boisset, Toulon est cité dans cet extrait: "Les îles offrent aussi des refuges : c'est dans les îles de la mer Tyrrhénienne qu'en 1404, le cavalier castillan Petro Niño pourchasse les corsaires de port en port. Parti de Toulon, à l'aube après une nuit de tempête, lui apparurent les îles tyrrhéniennes les plus septentrionales. Une fois reposés à Capraia, les équipages « prirent les rames et les galères et partirent à la recherche des corsaires, par toutes les îles petites. Ils allèrent à l'île de la Gorgone, à l'île de Pianosa et fouillèrent tous les ports dans les bouches de Bonifacio qui est en Corse. Là ils trouvèrent une embarcation aragonaise. Ils revinrent alors en Sardaigne, à Longosardo et à Alghero », d'où ils continuèrent la chasse, explorant l'une après l'autre les côtes de l'île.

https://journals.openedition.org/medievales/500#ftn8

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tison2feu Membre 3 032 messages
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Le témoignage très précieux de Boisset m'inspire cette autre réflexion : sur cette galéote, il y a un écrivain (secrétaire) qui semble avoir un pouvoir important; peut-être tient-il un journal de bord, ce qui tendrait à prouver que cette piraterie est tolérée sinon planifiée, les "pirates" devant rendre des comptes à des autorités supérieures (aragonaises, catalanes, etc.). Ces autorités devaient fermaient les yeux sur les actes de barbarie commis, dans la mesure où cela permettait de remplir les caisses de leur royaume ! 

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tison2feu Membre 3 032 messages
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Rectifications Il fallait lire "galiote" (et non "galéote" comme je l'ai écrit plusieurs fois), et c'est sans doute préférable d'utiliser, comme tu le fais, le terme de "petite galère".
A oublier également mon histoire de "pouvoir important" de cet écrivain. Celui-ci n'a pas de pouvoir de vie et de mort : il n'a dû que chercher à sauver sa peau en acceptant, sous la menace, de pendre ses compagnons d'équipage capturés par les gens de Martigues.

 

 

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Membre, 76ans Posté(e)
Blaquière Membre 18 860 messages
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Il y a 11 heures, tison2feu a dit :

Rectifications Il fallait lire "galiote" (et non "galéote" comme je l'ai écrit plusieurs fois), et c'est sans doute préférable d'utiliser, comme tu le fais, le terme de "petite galère".
A oublier également mon histoire de "pouvoir important" de cet écrivain. Celui-ci n'a pas de pouvoir de vie et de mort : il n'a dû que chercher à sauver sa peau en acceptant, sous la menace, de pendre ses compagnons d'équipage capturés par les gens de Martigues.

 

 

Tu te fais du mal, là !

Français : "galiote"

 

Provençal  XIVème :   galeota.png.2108ef3405c5f4935494cf0989525e1d.png c'est bien lisible !

Il st à remarquer que Mistral quand il cite Bertrand Bouisset :

1146356428_mistralgaliota.png.21e20ba53abcb8e0367a77fb72dba125.png

Fait deux erreurs : le "i" de "galeota" et le "s" de 'breganson"...

782166560_galeota2.png.e3c0ee59afdf12c867983f94b0e50cdf.png

Le provençal du 14ème correspond à son "roman" (qu'il note "rom"), et pourtant il ne site la graphie "galeota" que pour l'espagnol :

1563086722_mistralgalioto2.png.a44ad25689a8cb0c7284d81329c529ba.png

A-t-il eu accès à l'original ? Si oui, il peut s'agir d'un effet idéologique pour "prouver" que le provençal moderne reste proche de celui du moyen âge.

J'ai souvent remarqué que le provençal, encore au 16ème, en tout cas dans l'écrit est assez proche de l'espagnol. Quand on y voit l'article "les" écrit "los" (puisque le "o" se prononce "ou"), ça en devient frappant ! Et je forme l'hypothèse que les provençaux du début du 16ème (du temps de la rivalité François 1er / Charles Quint) pouvaient mieux se comprendre avec les espagnols qu'avec les français... L'Edit de Villers Cotterêts, en 1539, l'année suivante de l'entrevue des deux princes à Nice en 1538 où les gens d'armes des deux camps se sont certainement côtoyés, pourrait en prendre un sens un peu différent... Ce n'était peut-être pas que le latin qui était visé... Mais tout particulièrement le provençal ?

J'avais d'ailleurs été amusé de trouver dans les archives du village à propos des espagnols : "los espanhols inimics de notre prinse" (les espagnols ennemis de notre prince) : c'était pas les leurs d'ennemis !!! Mais c'est aussi un trait de profonde sagesse populaire.

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Membre, 76ans Posté(e)
Blaquière Membre 18 860 messages
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La leçon de français…

C’est un morceau d’anthologie (à mon avis!).

L’auteur, Marius Trucy. Un "poète" provençal de Lorgues (Haut var). Trucy Critiquait Mistral en disant « pour Mistral, tout est poésie ! ». On pourrait penser que pour un poète c’est bien la moindre des choses ! Bien sûr c’est le lyrisme de Mistral qui le gênait. Et en un sens il n’avait pas tort. Sa Provence à lui, Marius, c’est une Provence rustique qu’il veut être la « Vraie Provence ». Le succès de Mireille, d’une Provence qui à son avis n’existait pas a pu le faire enrager. Mais ce qui est curieux, c’est que pour son « Margarido » qu’il concevait comme une « Mireio » véritable, bien réelle, contrairement à celle de Mistral, il a employé le mètre exact des strophes de Mistral !

Le passage où ses deux paysans qui comparent le français au provençal, et qui termine l’introduction à son poème « Margarido » est savoureux. Quelques mots nous manquent seulement. Je mets la version en français. Le texte provençal viendra plus tard….

 

"Légende"
 

Écoutez la belle besogne

qu'ont faite ces « sans vergogne »

deux paysans l'autre jour, marchaient en se disant

Maudits soient les chemins de fer !

Que l'éternité les emporte ! Ils ne viennent ici

que pour nous prendre que ce que nous avons de meilleur;

et qu’est-ce qu’ils nous apportent ? Rien !

 

Mais François dit : – Et si qu'ils nous apportent

des beaux « Françiots » qui nous importent

une langue nouvelle; c’est rien, ça ? Tonnerre de l'air !

Croirais-tu, Dominique, qu'à Marseille

on appelle enfant une fille ?

Qu’un voulamé, est une faucille ?

– Pas possible ! – C'est sûr ! Je le sais depuis hier !

 

Une camié, ils l'appellent chemise

pour grafien, ils disent cérise

la chichourlo est jujube et cinq centimes, un soou !

le magaou, ils l'ont baptisé pioche;

jeu de boule, le jué dé bocho

ils disent béquille pour dire crocho

-- Où allons-nous, mon pauvre François ? -- Qui tonnerre de Dieu le sait ?

 

C'est pas tout !.. le tourdré, ils l'appellent la grive,

à présent, la bugado, c'est la lessive;

tapéno, se dit câpre, — et banéto, haricot !

chat-huant veut dire machoto

ils nomment cave ce que nous appelons croto

nos boutièro sont des botes...

-- Mais, François où allons-nous donc?  Où allons-nous comme çà ?

 

Pour dire tranèlo, ils disent trèfle;

les gnaspou ils les appellent nèfles.

Ah çà mais... fit Dominique ils ont donc tout renversé ?

J'ignore, Dominique, quel diable les possède

mais ils appellent téton ce que nous nommons pouço

le mot recuite, à présent, signifie brousso. (?)

-- Mais enfin, François, ils donnent leurs raisons ? -- Ils nous traitent d'arriérés !

 

Tu n'es pas au bout, mon camarade !

la mingrano est une grenade

un esqueirar, solive et conque un caraviou

aux pécègué, ils disent des pèches

une eissado, ils l'appellent bêche;

jusqu'à l'agrupi, qu'ils disent crèche

-- Oh les misérables! C'est donc pour se moquer de Dieu ?

 

Croirais - tu que ce que nous appelons blé ils le nomment mâche (?)

qu'une déstraou est une hache?

Tiens pour te dire tout, il y en aurait jusqu'à demain !...

l'aïgarden se nomme eau de vie;

une booudufo, une toupie,

une boufigo une vessie.

Dominique l'arrête en s'écriant: -- François, nos dieux s'en vont !

 

-- Oui, ils s'en vont de notre présence

ils vont chercher dans une autre Provence

le ciel bleu, l'air si pur, et l'eau de nos fontaines

Ils vont fonder, sur d'autres rivages,

nos gracieux pèlerinages

et nous verrons nos antiques usages

disparaître peu à peu. François nos dieux s'en vont !


 

La dernière strophe, quand Trucy s’essaie au Lyrisme… C’est… un peu à côté ! Il tombe vite dans "ma belle Provence" !... il est à noter aussi l'incohérence entre "se moquer de Dieu" et "Nos dieux s'en vont"... Mais c'est aussi le reflet de l'opposition idéologique ou politique de l'époque "blancs-rouges" particulièrement vive dans le haut Var à cette époque : Trucy n'arrive pas à choisir...

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Blaquière Membre 18 860 messages
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@tison2feuJe profite de ton passage pour mettre le texte provençal de Trucy. C'est du provençal écrit en phonétique à la française. Mais ça renseigne bien aussi sur la manière dont les provençaux n'arrivaient pas bien à prononcer le français au XIX ème. Il ne s'agissait pas que d'un accent comme aujourd'hui :

Les "j" (zuzubo) ils les prononçaient "z", les "ch" (cémise) ils les prononçaient "s"... le son "e" à l'intérieur d'un mot il était remplacé par "é" (chemise, eau de vie) ou "a" (granade)... Et d'autres déformations comme "licivo" pour "lessive"...

Les non locuteurs en langue d'oc, auront toujours pu apprendre que la "tapenade" doit se faire avec des câpres et pas que des olives, puisque  "tapéno se dit câpre " !

 

Escoutas la bèlo bésougno

Qu'an fa' quélei sènso vargougno

Doui peysan, l'aoutré jou, marchavoun si disèn :

Maougrabiou dei camin dé fèrré

Qué lou "santoustèn" leis entèrré l

Vènoun eici qué pèr nou quèrré

Cé qu'avèn dé millou !.. pui qué n'adusoun Rèn !

 

Mai Choua digué: — Si qué nou pouartoun

Dé bèou francio qué n'inpouartoun

Uno lenguo nouvèlo; aco's rèn Tron dé l'èr ?

Creiriés-ti, Niquo qu'à Marsillo,

Apèloun enfan uno fillo ?

Qu'uno ooulamo es uno fooucillo?

— Pa poussiblé ! — Es ségu(r), va sabi despui d'hier.

 

Uno camié li dién cémiso ;

Pèr dire grafien dién cériso;

La chichourlo es zuzubo, et cin centimo, un soou !

Lou magaou l'an batéja piocho;

Jué dé boulo, lou jué dei bocho ;

Dién bequillo per dire crocho

— Mount'anan, paouré Choua ? – Qu tron dé diou va soou

 

Es pa tou, lou tourdre es la grivo ;

La bugado, aro, es la licivo;

Tapéno si di capro, et banéto, arico !

Sahuan voou dire machoto ;

Apèloun cavo cé qu'es croto ;

Nooastei boutiéro soun dé boto

Mai Choua, mount' anan doun, mount' anan coumo aco ?

 

Per dire tranèlo dien treflo

Lei gnaspou, dien que soun dé nèflo.

Assamai! digué Niquo an doun tou révira ?

Sabi pa qué diablé lei pousso,

Mai dien teton ce qué dian pouço

Recuito aro voou dire brousso (?)

Mai dounoun sei résoun ?— Dién que sian d'areira

 

Li siés panca moun canbarado ;

La mingrano es uno granado,

Un esqueirar soulivo, et conco un caraviou ;

Ei pécègué, li dién dé pècho ;

Uno eissado, l'apèloun bècho ;

Jusqu'à l'agrupi, qué dien crècho

0 lei marrias es doun per si trufa de Diou ?!

 

Creiries-ti qu'ei blé li dien macho (?)

Qu'uno adéstraou si noumo hâcho?..

Vé, pèr ti dire tou n'aourié jusqu'à déman !

L'aigardën si dis odévio ;

Uno booudufo, uno toupio ;

Uno boufigo, uno vessio.

Aqui Choua, s'escrídé Niquo, nouastei diou s'en van !

 

0, s'en van dé nouasto présénço,

Van sarca d'uno aoutro Prouvénço

Lou ciel blu l'èr tan pur, l'aigo dé nouastei fouan!..

Van founda, din d'aoutrei paragé,

Nouastei tan pouli roumeiragé,

Et veiren nouastei vieis usagé

Paouc à paou s'einana : Choua, nouastei diou s'en van !


 

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Membre, Posté(e)
tison2feu Membre 3 032 messages
Forumeur alchimiste ‚
Posté(e)
Il y a 12 heures, Blaquière a dit :

La dernière strophe, quand Trucy s’essaie au Lyrisme… C’est… un peu à côté ! Il tombe vite dans "ma belle Provence" !... il est à noter aussi l'incohérence entre "se moquer de Dieu" et "Nos dieux s'en vont"... Mais c'est aussi le reflet de l'opposition idéologique ou politique de l'époque "blancs-rouges" particulièrement vive dans le haut Var à cette époque : Trucy n'arrive pas à choisir...

Je trouve néanmoins émouvante la tournure que prend la fin du poème. "Importer une nouvelle langue", cela signifie ni plus ni moins tuer la langue des ancêtres et ce faisant toute une culture qui l'accompagnait. Chaque mot provençal, par sa charge affective et culturelle, avait un je-ne-sais-quoi de sacré. Le remplacer par un mot étranger s'apparente à un sacrilège. Ce poème me fait penser à une longue agonie, un chemin de croix où humiliations et insultes ("arriérés") ne sont même pas épargnées au locuteur provençal qui voit, jour après jour, chaque mot de sa langue chérie remplacé par un mot vidé de sens affectif et culturel.

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Membre, 76ans Posté(e)
Blaquière Membre 18 860 messages
Maitre des forums‚ 76ans‚
Posté(e)
il y a 53 minutes, tison2feu a dit :

Je trouve néanmoins émouvante la tournure que prend la fin du poème. "Importer une nouvelle langue", cela signifie ni plus ni moins tuer la langue des ancêtres et ce faisant toute une culture qui l'accompagnait. Chaque mot provençal, par sa charge affective et culturelle, avait un je-ne-sais-quoi de sacré. Le remplacer par un mot étranger s'apparente à un sacrilège. Ce poème me fait penser à une longue agonie, un chemin de croix où humiliations et insultes ("arriérés") ne sont même pas épargnées au locuteur provençal qui voit, jour après jour, chaque mot de sa langue chérie remplacé par un mot vidé de sens affectif et culturel.

Je suis d'accord avec toi. En dépit des maladresses, on peu ressentir une vraie émotion. C'est tout cet ensemble qui fait que je trouve ce morceau remarquable. A la fois amusant et tragique.

Merci de l'avoir senti. Et de l'avoir bien dit.

Modifié par Blaquière
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Membre, Posté(e)
Garalacass Membre 1 029 messages
Baby Forumeur‚
Posté(e)

Je passe juste pour dire le plaisir que j'ai à vous lire.

et aussi que j'arrive pas à ouvrir tes liens de *!&?%!*§!

En cherchant un peu j'ai trouvé ça pour Marcabru (pas trouvé Marcabrun)

(Je laisse en lien pour pas alourdir)

https://www.youtube.com/watch?v=_Uw0T0j1EV4

Calenda maia

https://www.youtube.com/watch?v=A77OpgXdAAw


Kalenda maya (rien à voir non plus avec le calendrier maya^^) il y a une flute ici, je préfère, c'est plus léger "envolé")

https://www.youtube.com/watch?v=H_uM0jbvddU

 

Ça ressemble à tes liens?

 

P.S. Je ne sais pas pour la France, mais en Belgique l'interjection "oui da " est toujours fréquemment utilisée (dans la région de Charleroi).

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