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La langue d'oc

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Blaquière

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Blaquière Membre 19 162 messages
Maitre des forums‚ 77ans‚
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il y a 4 minutes, tison2feu a dit :

Aquot es oc ! 

(= Cela est certain)

Quand je tombe sur un texte comme ça, je suis charmé de la tournure :

"may qué argènt vèngo" may=pourvu...

J"entends encore mon grand père dire "mai qué plougué" : "pourvu qu'il pleuve" par exemple. 500 ans; et la langue est la même !... ou presque (!) C'est un bonheur !

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Membre, Posté(e)
tison2feu Membre 3 104 messages
Forumeur alchimiste ‚
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Il y a 2 heures, Blaquière a dit :

Quand je tombe sur un texte comme ça, je suis charmé de la tournure :

"may qué argènt vèngo" may=pourvu...

J"entends encore mon grand père dire "mai qué plougué" : "pourvu qu'il pleuve" par exemple. 500 ans; et la langue est la même !... ou presque (!) C'est un bonheur !

Ce sont ces tournures qui donnent une saveur particulière à chaque langue (J'avais noté cette tournure, incompréhensible pour moi sans ta traduction).

D'ailleurs je trouve passionnant de comparer le provençal avec d'autres langues d'oc, telles que le languedocien, l'auvergnat, le limousin et le gascon. Dans le petit "Que sais-je ?" intitulé La langue occitane, par Pierre Bec, un extrait de la parabole de l'Enfant prodigue est présenté dans ces cinq langues (+ le catalan), à la fois en langue écrite et en langue transcrite phonétiquement. On se rend compte des variétés dialectales et de leur spécificité.

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Membre, 77ans Posté(e)
Blaquière Membre 19 162 messages
Maitre des forums‚ 77ans‚
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Il y a 1 heure, tison2feu a dit :

Ce sont ces tournures qui donnent une saveur particulière à chaque langue (J'avais noté cette tournure, incompréhensible pour moi sans ta traduction).

D'ailleurs je trouve passionnant de comparer le provençal avec d'autres langues d'oc, telles que le languedocien, l'auvergnat, le limousin et le gascon. Dans le petit "Que sais-je ?" intitulé La langue occitane, par Pierre Bec, un extrait de la parabole de l'Enfant prodigue est présenté dans ces cinq langues (+ le catalan), à la fois en langue écrite et en langue transcrite phonétiquement. On se rend compte des variétés dialectales et de leur spécificité.

Je pnse aussi qu'on n'utilise pas assez la notation phonétique...

Ce serait une des premières choses à apprendre à l'école ou au collège. ça faciliterait la prononciation de toutes les langues. Hélas les signes sont difficilement accessibles et encore, s'ils sont connus... le qui est le "ou" ou le [j] qui vaut "y"... du coup pour expliquer la prononciation du provençal qui est une "langue sœur"pourtant, je tente une prononciation "à la française" ! Le "en" provençal par exemple qui correspond au "in" français!... Ou alors, on fait appel à l'anglais ! "Gau" (le coq) qui se prononce comme le "cow" anglais ! Mais c'est approximatif... Et on finirait par prononcer le provençal avec l'accent anglais !

Bon, d'accord : Richard Cœur de Lion (Cor dé Léoun) (arrière petit-fils de Guilhem de Peitieus, premier troubadour, aurait écrit ses poèmes en langue d'oc ! Mais c'est pas un raison ! Sans compter leur fameux "sport" qu' "ils" avaient piqué au grand père : "desport"= plaisir ! (Ils sont forts ces anglais !) "Qu'eu ai agut joi e de(s)port" (car moi j'ai eu d la joie et du plaisir)

( J'ai rien souligné et ça a souligné tout seul et je peux pas l'enlever !)

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Membre, 77ans Posté(e)
Blaquière Membre 19 162 messages
Maitre des forums‚ 77ans‚
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Bon la traduction de "la facture déchirée"

 

"La podisse estrassade"

la facture (ou le reçu) déchiré/e

(Aquo ero l'an 1540)

("ça", c'était l'année 1540!)

 

 

A revelat Honnorat Sieyo :

Honoré Sieille a déclaré :

 

«  Hiou enbe Jehan Selion

Moi, avec Jean Selion

 

et lou tresourier Olivier Pec

et le trésorier Olivier Pec

 

ung pauc avant ou vrayament apres Calendes

un peu avant ou plutôt après Noèl

 

salien toux ensemble foras de la gleyse

Nous sortions tous ensemble (hors) de l'église

 

et en salient Jehan Flayol diguet :

et en sortant, Jean Flayol dit :

 

« Olivier Pec mi voles vous fayre

"Olivier Pec, voulez vous me faire

 

aquelle podisse ? »

Ce reçu ?"

 

et ainsin Olivier Pec va dire :

Et alors, Olivier Pec de dire :

 

« Oy da » (en fait oy et da sont séparés)

"Oui da !"

 

et toux dous mi digeront :

et tous deux me dirent :

 

« Avet vous ung scretore ? »

"avez-vous un écritoire ?"

 

et hiou aneri dire que oy

et moi, j'allai répondre que oui.

 

et ainsin Olivier Pec et Jehan Celion

Et ainsi, Olivier Pec et Jehan Celion

 

tous ensemble aneram a mon houstal

(et moi) tous ensemble allâmes à ma maison

 

per fayre la podisse

pour faire le reçu.

 

et Olivier Pec fes une poudisse

et Olivier Pec fit un reçu

 

et quant l'aguet fache l'anet legir

et quand il l'eut fait "il vint" à le lire

 

laqualle podisse per l’aver de quatorze

lequel reçu (était) pour l'avoir de quatorze

 

ou verament de dix et hoict

ou véritablement de dix-huit

 

soumades de blat

charges de blé

 

que Jehan Celion li avie donat

que Jean Celion lui avait données

 

per la rende del molin

(en paiement) de la rente du moulin

 

es veray que non mi recorde pas ben

il est vrai que je ne me souviens pas bien

 

que mileime si fousse

de quel quantième c'était

 

ni aussi de que mes

et non plus de quel mois.

 

mes es ben veray que la podisse fut fache

Mais il est bien vrai que le reçu fut fait

 

ung pauc avant calendes

un peu avant Noël

 

ou un pauc apres calendas

ou un peu après

 

car dou mes de septembre hiou ero a Aix

car à partir du mois de septembre, moi, j'étais à Aix

 

e aqui demoureri ung mes

et j'y ai demeuré un mois.

 

Il n'y a pas tellement d'influence du français sur la langue j'ai souligné ce que je crois ...

--"Mi voles vous" la précision du "vous"; il me semble, mais c'est pas sûr. Les formules de politesse sont souvent surprenantes.

-- et le "oy da" et le "oy" que je n'ai vus que là.

-- J'aime bien aussi le "x" de "toux" (tous) qui "fait français à l'esbroufe" ! "toux dous" pour "tous deux" ou le "x" et le "s" sont inversés ! Ils savaient qu'il fallait plus de "x" en français, mais ils savaient pas où !

-- et le "Avet vous ung scretore ?" vaut de l'or ! Il fait très chic ! Je l'entends : "avet' vouss ung' scrétoré !" au lieu d'un trop paysan : "avès ung escritori ?" ce qu'ils ont plus probablement dit...

Mais c'est surtout dans la graphie que l'influence est visible :

--les "e" du féminin au lieu des "o" à l'époque, le "o" qui était déjà à mon avis une influence du français par rapport au "a" médiéval.

-- les "soumade" et "dou" pour "saumado" et "dau"...

 

Mais il est intéressant de remarquer que si le "e" final "français" ne les gênait pas, c'est que la prononciation n'était pas si éloigné de la prononciation contemporaine où le "o" final est prononcé comme le "e", atone mais jamais muet comme en français.

Il y avait à mon avis un différence de culture ou de connaissance entre celui qui notait les témoignages et qui était sans doute mieux rompu à la langue française et les gens dont il écrivait ces témoignages et qui devaient bien reconnaître ce qu'ils avaient dit. C'est donc un peu un moyen terme ce texte! D'autant que l'Edit de Villers Cotterêt stipulait bien que tout devait être écrit en langage maternel français ! C'était en un certain sens insoluble puisque ici, le langage maternel n'était pas le français !

La solution trouvée, ici,  c'était d'écrire un provençal qui ressemble à du français !

Légalement, le secrétaire était "couvert" !

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tison2feu Membre 3 104 messages
Forumeur alchimiste ‚
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Il y a 4 heures, Blaquière a dit :

Je pnse aussi qu'on n'utilise pas assez la notation phonétique...

Ce serait une des premières choses à apprendre à l'école ou au collège. ça faciliterait la prononciation de toutes les langues. Hélas les signes sont difficilement accessibles et encore, s'ils sont connus... le qui est le "ou" ou le [j] qui vaut "y"... du coup pour expliquer la prononciation du provençal qui est une "langue sœur"pourtant, je tente une prononciation "à la française" ! Le "en" provençal par exemple qui correspond au "in" français!... Ou alors, on fait appel à l'anglais ! "Gau" (le coq) qui se prononce comme le "cow" anglais ! Mais c'est approximatif... Et on finirait par prononcer le provençal avec l'accent anglais !

Bon, d'accord : Richard Cœur de Lion (Cor dé Léoun) (arrière petit-fils de Guilhem de Peitieus, premier troubadour, aurait écrit ses poèmes en langue d'oc ! Mais c'est pas un raison ! Sans compter leur fameux "sport" qu' "ils" avaient piqué au grand père : "desport"= plaisir ! (Ils sont forts ces anglais !) "Qu'eu ai agut joi e de(s)port" (car moi j'ai eu d la joie et du plaisir)

( J'ai rien souligné et ça a souligné tout seul et je peux pas l'enlever !)

C'est certain ! Une initiation à l'Alphabet Phonétique International (API) dès le plus jeune âge permettrait de transcrire en API aussi bien les sons de sa langue maternelle que ceux de langues étrangères. Je pense que cela pourrait permettre à la fois de se spécialiser dans une ou deux langues, mais aussi de s'initier partiellement à un bien plus grand nombre de langues étrangères (et donc de s'ouvrir à d'autres cultures/modes de penser). Je ne parle même pas de l'intérêt immense que cela représenterait pour le linguiste comparatiste qui pourrait ainsi passer facilement d'une langue à l'autre en n'utilisant qu'un seul alphabet.

Sur Wikipedia, il est possible d'entendre la prononciation de chaque son répertorié par l'API (en cliquant sur le triangle noir correspondant) :

https://fr.wikipedia.org/wiki/Aide:Alphabet_phonétique_international

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tison2feu Membre 3 104 messages
Forumeur alchimiste ‚
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Ci-dessous la transcription graphique (et non phonétique) des différentes versions en langues d'oc de la première phrase de la Parabole de l'Enfant prodigue. Ce qui me semble intéressant, ce sont les diverses traductions de "ne... que".

(Français : "Un homme n'avait que deux fils")

Languedocien : "Un òme aviá pas que dos dròlles"

Provençal : "Un òme avia rèn que dos fius"

Auvergnat : Un òme aviá mas dos garçons"

Limousin : Un òme aviá mas dos filhs"

Gascon : Un òme n'avèva pas que dus hilhs"

(Catalan : Un home només tenia dos fills")

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Membre, 77ans Posté(e)
Blaquière Membre 19 162 messages
Maitre des forums‚ 77ans‚
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Amis de la peuézie, Beujur !

Puisqu 'on est sur le forum de littérature, il serait dommage de cantonner la langue d'oc à des ânes chargés de blé !
J'aime bien comparer la notion du temps chez Bernard de Ventadour (XIIème siècle, troubadour très lyrique et cette même notion chez Bellaud de la Bellaudière, poète "baroque" de la fin du XVIème.

 

Ventadour, lyrique, part du réel "le jour" et l'enfle, le grandit, va vers l'universel (les années) On se sent perdu dans l'immensité du temps :

Lo tems vai e ven e vire.................. (Le temps va et vient et tourne)


Per jorns, per mes e per ans,...........(Par jours par mois et par années)


Et eu, las no.n sai que dire,.............(et moi, hélas, je ne sais que dire)


C'ades es us mos talans..................(car mon désir est toujours le même -un-)


Ades es us e no.s muda,..................(toujours le même et ne change pas)


C'una.n volh e.n ai volguda,............(Car celle que je veux et ai (toujours) voulue)


Don anc non aic jauzimen...............(jamais ne m'a accordé ses... faveurs.)

("Dont jamais je n'ai eu jouissance": n'exagérons rien ! surveillons notre traduction!)

 

Bellaud, lui prend le chemin contraire. il part du temps en général (les années) et en vient à

l'heure présente. A la vie... réelle :

 

Bon an, bon mes, bon jourt, ma dousso Coulombetto,

(Bon an, bon mois, bon jour, ma douce Colombette)

Bon houro, bon matin, tous tems vous doune Diou;

Bonne heure, bon matin, tout le temps vous donne Dieu)

Ouand vous non farez ren, au mens pensas à you

(quand vous ne ferez rien, au moins pensez à moi)

Que per trop vous amar bessay rendray l’armetto.

(qui de trop vous aimer, peut-être rendrai-je l'âme)

 

L'an, le mois, le jour, l'heure, le matin :  tout le temps, chaque minute. l'universel est reconstruit à partir du tout petit, du particulier.

Il est à noter aussi la modestie de sa demande : "quand vous ne ferez rien, au moins, pensez à moi" ! Bellaud se contente de vivre l'heure, il veut du tout petit...

 

 

 

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Membre, 77ans Posté(e)
Blaquière Membre 19 162 messages
Maitre des forums‚ 77ans‚
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Il est à noter les différentes forme du "moi"

Ventadour XIIème : "eu" (prononcé ou" diphtongue)

XIV-XVème et la forme 'officielle" conservée aujourd'hui : "iéu" (Prononcer yéou) triphtongue)

(On pense à l'espagnol et à l'italien qui ont aussi ce son "i" : "yo" et "io")

Mais on voit que Bellaud de la Bellaudière écrit "You" : le "é" a disparu. Mais c'est comme ça qu'on prononce (ici : provençal maritime) depuis Bellaud (400 ans !), alors ? : 

"yiou" triphtongue : c'est le son "é" qui s'est transformé en "i" par rapport au XVème. à mon avis...

Je me suis finalement raisonné à écrire "iéu" tout en prononçant "yiou' !

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tison2feu Membre 3 104 messages
Forumeur alchimiste ‚
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Il y a 6 heures, Blaquière a dit :

L'an, le mois, le jour, l'heure, le matin :  tout le temps, chaque minute. l'universel est reconstruit à partir du tout petit, du particulier.

Il est à noter aussi la modestie de sa demande : "quand vous ne ferez rien, au moins, pensez à moi" ! Bellaud se contente de vivre l'heure, il veut du tout petit...

 

Le poème de Bellaud est un bijou ! Cette impression de "tout petit" est suggéré aussi par l'emploi de diminutifs ("Columbetto", "armetto"). Le poète produit un double effet de rapprochement et de complicité entre lui et sa bien-aimée. C'est très réussi.

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tison2feu Membre 3 104 messages
Forumeur alchimiste ‚
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Il y a 7 heures, Blaquière a dit :

 

Il est à noter aussi la modestie de sa demande : "quand vous ne ferez rien, au moins, pensez à moi" ! Bellaud se contente de vivre l'heure, il veut du tout petit...

 

Belle illustration de l'art de "courtiser" les femmes avec courtoisie et respect. Le fin'amor (amour courtois) s'oppose de façon révolutionnaire au manières des vilans.

"Ne nous étonnons pas, écrit Jean Rouquette, que cette révolution, qui marque la naissance de l'Europe moderne, soit le fait de la classe d'âge des jeunes, socialisée jusqu'à nos jours avec son cap de jovent : classe "dangereuse", âge du risque auquel ne suffit plus l'aventure des armes, et qui transpose le service féodal en service amoureux, l'exaltation guerrière en jòi d'amor civilisateur" (P. 18, La littérature d'oc)

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Membre, 77ans Posté(e)
Blaquière Membre 19 162 messages
Maitre des forums‚ 77ans‚
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il y a une heure, tison2feu a dit :

Belle illustration de l'art de "courtiser" les femmes avec courtoisie et respect. Le fin'amor (amour courtois) s'oppose de façon révolutionnaire au manières des vilans.

"Ne nous étonnons pas, écrit Jean Rouquette, que cette révolution, qui marque la naissance de l'Europe moderne, soit le fait de la classe d'âge des jeunes, socialisée jusqu'à nos jours avec son cap de jovent : classe "dangereuse", âge du risque auquel ne suffit plus l'aventure des armes, et qui transpose le service féodal en service amoureux, l'exaltation guerrière en jòi d'amor civilisateur" (P. 18, La littérature d'oc)

C'est clair ;" faites l'amour pas la guerre !"

Et le vrai scandale c'est en 14, quand les vieux on envoyé les jeunes se faire tuer.

Dans les années 60, mon grand père qui par chance était passé au travers en 14, disait :

"Se quauque jorn l'a mai la guerro, es nautre lei vieilhs que fau que li anem, fau pas que li mandem lei joeines !"

"Si quelque jour y'a encore la guerre, c'est nous les vieux qui devons y aller, il ne faut pas y envoyer les jeunes !"

Je signe tout de suite ! (Aujourd'hui, j'ai le droit !)

(Sinhi subran ! Encuèi n'ai lo drech !

 

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Membre, 77ans Posté(e)
Blaquière Membre 19 162 messages
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Je ne sais pas si tu connaissais tout le sonnet de la "Colombette", mais il est savoureux ! Bellaud nous surprend à chaque ligne ! Je l'avais mis en musique et je l'ai chanté plusieurs fois ! Mais l'enregistrement que j'en ai est tellement mauvais que je me risquerai pas à le mettre !

 

Bon an, bon mes, bon jourt, ma dousso Coulombetto,

Bon houro, bon matin, tous tems vous doune Diou;

Ouand vous non farez ren, au mens pensas à you

Que per trop vous amar bessay rendray l’armetto.

 

 

Hé! que si vous teniou dedins un bouosc souletto,

(Hé ! car si je vous tenais au "fond" du bois, seulette)

 

On imagine la situation, Bellaud ayant la réputation d'un fier luron,

Et on se dit : la pauvre ! qu'est-ce qu'il va pas lui faire au fond du bois ?!

Bellaud, c'est le loup du Chaperon rouge !

Mais non :

 

Autre mau, per ma fé, bello, non vous fariou

autre mal par ma foi, belle je ne vous ferais

Sinon qu'à plenos mans de flours you cuillariou

sinon qu'à pleines mains des fleurs je cueillerai

Las jetant à l'entour de vouostro persounetto.

Les jetant à l'entour de votre personnette !

 

Là il en fait un peu trop ! Il n'est plus crédible !

Du coup, il passe au burlesque baroque :

 

Et puis en vous baisant vous diriou: — Janeton,

Et puis en vous embrassant, je vous dirais : "Jeanneton,

Coumo lard en sartan sy fond mon couraçon,

Comme lard en poêl(on) se fond mon corazon !

Leissen passar eicy la calour titanièro.

Laissons passer ici la chaleur titanesque

 

Veirez que lous ausseoux que sabon mon tourment

Vous verrez que les oiseaux qui savent mon tourment

En cantant vous diran: Sus, fillo, prestament,

En chantant vous diront ; "Sus fille, prestement

De gracy contentas Louis de la Bellaudiero.

De grâce contentez Louis de la Bellaudière !

 

Bellaud n'est pas emprunté pour la rime, il tape même dans l'espagnol au besoin !

Mais celle-là elle est à retenir question "romantisme" :

Coumo lard en sartan sy fond mon couraçon,

Comme lard en poêl(on) se fond mon corazon !

 

Et on passe sur le "sus fille, prestement !..." ("Courir sus à ses ennemis" était largement employé à l'époque.)

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tison2feu Membre 3 104 messages
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Il y a 10 heures, Blaquière a dit :

Je ne sais pas si tu connaissais tout le sonnet de la "Colombette", mais il est savoureux ! Bellaud nous surprend à chaque ligne ! Je l'avais mis en musique et je l'ai chanté plusieurs fois ! Mais l'enregistrement que j'en ai est tellement mauvais que je me risquerai pas à le mettre !

Je ne savais pas qu'il s'agissait d'un sonnet et qu'il devait donc y avoir une suite !!! (Je ne connaissais pas du tout ce sonnet et, pire encore, je ne sais à peu près rien de la littérature occitane dans son ensemble).

Grâce à toi, il est possible d'aller de découverte en découverte. Ce sonnet est très vivant et savoureux en effet.

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Blaquière Membre 19 162 messages
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L’art Poétique selon Bellaud de la Bellaudière

 

On connaît l’art poétique de Boileau (« cent fois sur le métier »... etc.). Bellaud nous est présenté souvent un peu comme l’opposé de ce portrait d'artiste "laborieux" et on a pu dire de lui qu’il n’avait jamais passé sur un sonnet plus de temps qu'il n'en fallait pour l’écrire… (Ce qui reste à prouver !)

Dans le sonnet suivant il explique l'origine de son inspiration.

Il y reste dans un registre burlesque… Mais on verra plus bas qu’il peut et sait dire autre chose, et toujours, "l’air de rien" selon son habitude... Comme ici d'ailleurs

 

Non say dont m’és vengut sy subit la ramado,

Je ne sais pas d’où m’est venu si subitement le besoin

D’aver prés dins ma man, tencho, plumo, papier,

De prendre dans ma main, encre, plume, papier

Per fayre de sounetz, vesent que tau mestier

Pour faire des sonnets, vu qu’un tel métier

fugiou coum’un diablon, fuge l’aigo segnado.

Je fuyais, comme un diablon fuit l’eau bénite !

 

Aros sabi d’ont ven : es que l’autro vesprado,

(Non !) Maintenant, je sais d’où ça vient : c’est que l’autre soirée

Aviou prés lou patron de la clau dau cellier :

J’avais pris le patron 1 de la clé du célier :

Tallament qu’un Ceiron2 my semblav’un pailler

Si bien qu’une pièce d’un sou me semblait une meule

Et un pichot tison, uno torch’ allumado.

Et un petit tison, une torche allumée !

 

Espés coumo faufraich, aqueou vespre dourmery,

« Épais comme une soupe de fèves », ce soir-là je m’endormis

Et puis sus lou matin my semblavo qu’you ery

Et puis sur le matin, il me semblait que j’étais

Montat sus lou cavau emplumat Pegazin.

Monté sur le « cheval emplumé Pégasin »

 

My levant espantat, non saby quallo veno

Me levant, stupéfait, je ne sais quelle veine

My tombet dau cerveou sy ben que sensso peno,

Me tomba du cerveau, si bien que sans la moindre peine

Fery de rimaillons tout un plen Magazin.

Je fis de rimaillons tout un plein magasin !

 

J’ai parlé de Boileau, mais il y a… pire ! Bellaud était copain avec le jeune Malherbe ! Mais oui, Le

fameux Malherbe du :

« Enfin Malherbe vint, et, le premier en France,

Fit sentir dans les vers une juste cadence »

(du même Boileau.)

Malherbe, parangon de la rigueur ! Ils auraient fait les 400 coups à Aix dans leur jeunesse…

Mais ça n’est pourtant pas si étrange – et c’est toujours le cas chez Bellaud de la Bellaudière – : dans la poésie en langue d’oc qui s’est construite avec la musique (comme on le sait chez les troubadours), le mètre, le rythme, sont incontournables, souverains… Indispensables...

(Les "e" (o) finaux, atones ne sont jamais muets, par exemple et comptent comme syllabe ; d'où l'impossibilité de les éluder à la césure...)

Mais passons sur la forme et venons en au fond :

Mi siou vist autrofes non passar la journado

Je me suis vu autrefois sans passer la journée

Sensso faire sounetz, ou ben quauque canson,

Sans faire de sonnet ou bien quelque chanson

Tant aviou à mon dam lou Bourniachou garson

Tant j’avais pour mon malheur le gamin borgne (Cupidon)

Gravat au font dau couort per amar Vourounado

Gravé au fond du cœur pour aimer Honorine

 

J'ai vu (compris) ça il n'y a seulement quelques jours ! Une lucidité qu’on retrouve chez… Freud !

" L’artiste est en même temps un introverti qui frise la névrose. (Pour bellaud on l'a vu, c'est une veine qui lui est "tombée du cerveau" !) Animé d’impulsions et de tendances extrêmement fortes, il voudrait conquérir honneurs, puissance, richesse, gloire et amour des femmes. »

(Ce qui peut passer pour un évidence mais qu'il n'est pas inutile de rappeler !)

Et pour finir cette esquisse sur la manière de Bellaud, laissons-le dire le futur :

 

Toutosfes si per tu, trop verd es ma rimaillo,

Toutefois si pour toi trop verte est ma rimaille

Ty conseilly, durbec, l'aclapir dins la paillo

Je te conseille, nigaud, de l’enfouir sous la paille

Car pouot estre lou tens la fara madurar.

Car peut-être le temps lui permettra de mûrir !

 

 

1Peut-être une inversion de « j’avais pris la clé du patron du sellier ? » pour suggérer que son esprit n’est pas encore très clair ?!

2Ceiron : petite pièce et/ou petit insecte (chiron)

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tison2feu Membre 3 104 messages
Forumeur alchimiste ‚
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Il y a 8 heures, Blaquière a dit :

 

Aros sabi d’ont ven : es que l’autro vesprado,

(Non !) Maintenant, je sais d’où ça vient : c’est que l’autre soirée

Aviou prés lou patron de la clau dau cellier :

J’avais pris le patron 1 de la clé du célier :

Tallament qu’un Ceiron2 my semblav’un pailler

Si bien qu’une pièce d’un sou me semblait une meule

Et un pichot tison, uno torch’ allumado.

Et un petit tison, une torche allumée !

  

1Peut-être une inversion de « j’avais pris la clé du patron du sellier ? » pour suggérer que son esprit n’est pas encore très clair ?!

2Ceiron : petite pièce et/ou petit insecte (chiron)

Bonsoir,

Ce quatrain, lu en début d'après-midi, m'a intrigué, non pas en raison de la présence de "petit tison" devenu "torche allumée" :smile2: , mais à cause de ce vers: "j'avais pris le patron de la clé du cellier". 

J'ai besoin de donner un sens à ce qui m'a échappé en première lecture. Dans ces cas-là, je laisse mariner pendant quelques heures, afin de laisser venir les idées !

Ici, le "patron" de la clé du cellier ne serait-il pas le modèle de la clé ou le double de la clé du cellier dont se serait emparé le poète (ou qui aurait été confectionné par lui à cet effet) dans une auberge afin de vider à l'oeil quelques bouteilles ?! Dans le dictionnaire de S. J. Honnorat, le mot "patroun" a le sens de "modèle, papier ou carton découpé de manière à représenter les contours qu'on veut suivre".

Modifié par tison2feu
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Membre, 77ans Posté(e)
Blaquière Membre 19 162 messages
Maitre des forums‚ 77ans‚
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Il y a 10 heures, tison2feu a dit :

Bonsoir,

Ce quatrain, lu en début d'après-midi, m'a intrigué, non pas en raison de la présence de "petit tison" devenu "torche allumée" :smile2: , mais à cause de ce vers: "j'avais pris le patron de la clé du cellier". 

J'ai besoin de donner un sens à ce qui m'a échappé en première lecture. Dans ces cas-là, je laisse mariner pendant quelques heures, afin de laisser venir les idées !

Ici, le "patron" de la clé du cellier ne serait-il pas le modèle de la clé ou le double de la clé du cellier dont se serait emparé le poète (ou qui aurait été confectionné par lui à cet effet) dans une auberge afin de vider à l'oeil quelques bouteilles ?! Dans le dictionnaire de S. J. Honnorat, le mot "patroun" a le sens de "modèle, papier ou carton découpé de manière à représenter les contours qu'on veut suivre".

Excellente suggestion ! Je m'y tiens désormais !

(J'avais souligné en bleu "tison", exprès !)

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Blaquière Membre 19 162 messages
Maitre des forums‚ 77ans‚
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N'aprèni uno ben boano ! sus lo blog de mon amic René Merle :

J'en apprends une bien bonne sur le blog de mon ami René Merle :

...Mai tornem a Bregançon. Sabi pas s’es un eiretatge de delinquéncia, mai aprenem que lo nòstre ben aimat President es anat de Bregançon a l’iscla de Pòrt Cròs, faire de Jet-ski dins lo santuari marin, monte tota navigacion es enebida !

...Mais retournons à Brégançon (étymologie : brigands !) je ne sais pas si c'est un héritage de la délinquance, mais nous apprenons que notre bien aimé président et allé de Brégançon à l'île de Port-Cros faire du jet-ski dans le sanctuaire marin, où toute navigation est interdite...

 

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Membre, Posté(e)
tison2feu Membre 3 104 messages
Forumeur alchimiste ‚
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il y a 6 minutes, Blaquière a dit :

N'aprèni uno ben boano ! sus lo blog de mon amic René Merle :

J'en apprends une bien bonne sur le blog de mon ami René Merle :

...Mai tornem a Bregançon. Sabi pas s’es un eiretatge de delinquéncia, mai aprenem que lo nòstre ben aimat President es anat de Bregançon a l’iscla de Pòrt Cròs, faire de Jet-ski dins lo santuari marin, monte tota navigacion es enebida !

...Mais retournons à Brégançon (étymologie : brigands !) je ne sais pas si c'est un héritage de la délinquance, mais nous apprenons que notre bien aimé président et allé de Brégançon à l'île de Port-Cros faire du jet-ski dans le sanctuaire marin, où toute navigation est interdite...

 

Très riche d'enseignement !

René Merle se fonde sur le témoignage de Bernard Boisset, chroniqueur d'Arles du XIVe et XVe s. qui emploie ce mot bregançoun dans le sens de pirate ("una galiota armada de bregansons").

L'étymologie la plus répandue de Brégançon, tout comme celle de Briançon, renvoie à la racine celtique BRIG- qui désignait des sites de hauteur ou des gens nobles (les habitants des hauteurs= "brigantes", le roi étant le "le très haut").

Peut-être y a t-il eu un déplacement sémantique au cours des siècles, les sites de hauteur étant des lieux d'insécurité, ou alors s'agit-il de deux étymologies différentes.

Et le mot français "brigand" est quant à lui un emprunt à l'italien brigante "qui va en troupe", "soldat à pied", dérivé de brigare "guerroyer.

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Blaquière Membre 19 162 messages
Maitre des forums‚ 77ans‚
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il y a 4 minutes, tison2feu a dit :

Très riche d'enseignement !

René Merle se fonde sur le témoignage de Bernard Boisset, chroniqueur d'Arles du XIVe et XVe s. qui emploie ce mot bregançoun dans le sens de pirate ("una galiota armada de bregansons").

L'étymologie la plus répandue de Brégançon, tout comme celle de Briançon, renvoie à la racine celtique BRIG- qui désignait des sites de hauteur ou des gens nobles (les habitants des hauteurs= "brigantes", le roi étant le "le très haut").

Peut-être y a t-il eu un déplacement sémantique au cours des siècles, les sites de hauteur étant des lieux d'insécurité, ou alors s'agit-il de deux étymologies différentes.

Et le mot français "brigand" est quant à lui un emprunt à l'italien brigante "qui va en troupe", "soldat à pied", dérivé de brigare "guerroyer.

Tu auras remarqué que René Merle s'amuse de cette étymologie hasardeuse plutôt qu'il l'affirme !...

Le Président "chez les brigands", c'est plus fait pour sourire que pour faire sens !... Encore qu'au second degré...

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Blaquière Membre 19 162 messages
Maitre des forums‚ 77ans‚
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Le 05/09/2018 à 12:41, tison2feu a dit :

Très riche d'enseignement !

René Merle se fonde sur le témoignage de Bernard Boisset, chroniqueur d'Arles du XIVe et XVe s. qui emploie ce mot bregançoun dans le sens de pirate ("una galiota armada de bregansons").

L'étymologie la plus répandue de Brégançon, tout comme celle de Briançon, renvoie à la racine celtique BRIG- qui désignait des sites de hauteur ou des gens nobles (les habitants des hauteurs= "brigantes", le roi étant le "le très haut").

Peut-être y a t-il eu un déplacement sémantique au cours des siècles, les sites de hauteur étant des lieux d'insécurité, ou alors s'agit-il de deux étymologies différentes.

Et le mot français "brigand" est quant à lui un emprunt à l'italien brigante "qui va en troupe", "soldat à pied", dérivé de brigare "guerroyer.

Je viens de penser au navire "brigantin" depuis le XIII ème siècle et à une de ses voiles la "brigantine". Sur Wiki, on ne donne aucune étymologie...

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