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Les chemins du Pouvoir


J'men'fou

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J'men'fou Membre 219 messages
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Genre : Dark-Fantasy.

Accroche : Certains sages prétendent qu'il existerai une énergie qui altère les âmes et le corps que maitriserai un Ordre secret et influerai sur la politique des royaumes de Bélavaïn.

Ce mystérieux Ordre agirai dans l'ombre : assassinat, enlèvement, manipulation mentale, chantage..

* * *

Chapitre Un :

JEHAN DE RANVILLE, CHEVALIER DE BRIENNE

* * *

Jehan chevauchait sur un chemin étroit au cœur de la forêt de Brienne. Le feuillage dense filtrait la lumière du soleil en une faible pénombre, mais le chevalier n'avait aucun mal à suivre les traces laissées dans la neige par celui qu'il cherchait. C'était comme si celui-ci n'avait même pas pris la peine de dissimuler son passage.

Le chemin déboucha dans une clairière baignant dans la faible lumière du crépuscule. Son adversaire était là, immobile, et semblait l'attendre. Son heaume posé au sol, Jehan put donc observer le visage aux traits allongés, dont la chevelure noire contrastait avec la pâleur de la peau et de la tunique. Le visage du Chevalier affichait un sourire énigmatique, et ses yeux l'observaient tandis qu'il s'approchait de lui. Un énorme destrier noir se tenait là, portant un caparaçon. Le bouclier appuyé contre un arbre, et l'armure portaient le dessin d'un loup de sable hurlant sur fond d'argent. Les armoiries du comte d'Orfeuil reconnut Jehan. Une question surgit aussitôt dans la tête ; que fait-il si loin de son fief ?

- Je suis Jehan de Ranville, chevalier de Brienne ! Je cherche celui qui a causé tant de tourments, ravagé mes champs et terrorisé mes Gens. Est-ce vous ?

Devant l'absence de réponse, il intima à son adversaire :

- Présentez-vous !

Après quelques secondes d'un lourd silence, le chevalier parla d'une voix calme et basse.

- Je suis Odomar III, comte de Mankelbourg. M'auriez-vous donc traqué depuis tout ce temps ?

Mais vous ne devriez pas vous préoccuper de mon sort , jeune Jehan. M'affronter n'aurait aucun sens, vous n'avez aucune chance de me vaincre et cette lutte inégale ne m'intéresse même pas. Passez votre chemin, mon garçon. Vous ne voulez tout de même pas que l'on organise un nouvel enterrement ?

Jehan, oubliant sa méprise sur les armoiries, explosa de colère devant l’insolence du chevalier. Pendant un instant, les visages de son père et de son frère lui traversèrent l'esprit. Il abaissa sa lance et éperonna son destrier, chargeant son adversaire en criant. Le Chevalier ne bougea pas d'un pouce et la lance de cavalerie toucha sa cible. Sa pointe d'acier pénétra la tunique et la hampe s'enfonça profondément dans la chair du guerrier avant de se briser. Jehans exulta immédiatement de triomphe. Tout ennemi frappé ainsi ne pouvait qu’être culbuté par la force terrible de l’impact.

Jehan tira sur les brides de son destrier et lui fit faire demi-tour.

Le Chevalier était toujours debout. La lance s'était enfoncée dans sa poitrine juste en dessous de la clavicule et la pointe dépassait entre ses omoplates. La créature se tourna lentement vers Jehan, arracha le fragment de hampe qui lui transperçait le torse et le jeta nonchalamment. Sa blessure béante ne laissa échapper qu'un très mince filet de sang.

- Belle démonstration de vos talents de jouteur, chevalier de Brienne. Mais je vous avais bien dit que vous ne pouviez gagner. Je ne me répèterai pas. Allez-vous en, si vous tenez à vivre.

Jehan fut sidéré par la résistance de son adversaire. Il ressentit soudain le désir de fuir aussi loin que possible d'un ennemi aussi puissant, mais il fit taire sa peur et répondit :

- Peut-être avez vous raison. Peut-être ne puis-je vous occire, mais je suis chevalier et ne puis briser mon code de l'honneur. Plutôt la mort que la couardise ! Défendez-vous !

Tirant son épée hors du fourreau, Jehan s'élança à nouveau et, lorsqu'il atteignit son ennemi, porta un large coup circulaire de toute la force de son bras et de son destrier en charge.

Cette fois-ci, son adversaire bougea. D'un rapide mouvement, sa main gauche enserra le poignet de Jehan dans un étau de fer alors que sa main droite arrêtait net le destrier. Cette halte soudaine dans leur charge impétueuse déstabilisa aussi bien l'animal que le jeune chevalier qui se retrouvèrent tous deux immobilisés et sans défense, à la merci de leur ennemi à la force surnaturelle. Pendant une seconde, les regards des deux adversaires se croisèrent et, plongeant ses yeux dans deux gouffres insondables, Jehan comprit qu'il existait en ce monde des puissances contre lesquelles il ne pouvait pas grand-chose.

Le Chevalier désarçonna Jehan d'un mouvement du bras et le lança comme une poupée de chiffon vers les arbres. Le Rohannais heurta violemment un tronc et les ténèbres l'engloutirent.

* * *

Jehan se réveille. Il fait nuit maintenant et la neige tombe. Un vent glacial souffle, faisant siffler et onduler la cime des arbres. Petit à petit, il reprend ses esprits et sait maintenant qu'il faut fuir.

Mais quelque chose d'étrange se passe, il semble terrifié sans aucune raison apparente, son instinct lui dictant qu'il n'en a pas fini avec le chevalier. Il essaye bien de courir, mais la tête lui tourne horriblement, semblant être toujours assommé. Il grelotte. Il chute. Se relève. Avance. Ce sentiment de terreur toujours présent, lui semble se renforcer au fur et mesure qu'il s'enfonce dans la forêt. Il sait qu'il doit fuir mais une attirance irrépressible l'entraîne vers les ténèbres.

Parfois, sa propre volonté semble enfin reprendre le dessus, il s'arrête, le visage déformé par une terreur sans nom, et cherchant un chemin par où il pourrait s'enfuir mais une volonté supérieure à la sienne reprend le dessus et l'attire invariablement vers son maître.

Une silhouette se détache de l'ombre d'un immense arbre et apparaît à l'éclat de la pleine Lune, observant le jeune chevalier, il se tient au centre de la clairière. Son armure rouge couverte de runes entrelacées brille à la lueur des étoiles. Ses larges épaules sont recouvertes d'une lourde cape de fourrure et d'un casque bestial en forme de crâne masquant en partie son visage. Il fait danser sa tête de droite à gauche, observe Jehan.

Odomar frappe le sol de son bâton, faisant tinter les charmes et les osselets. D'une de ses mains gantées, il retire son casque, laisse tomber en cascade une lourde chevelure noire sur ses épaules. Il a le visage pâle, les traits tirés, ses joues sont couvertes de cicatrices rituelles, des entrelacs de symboles archaïques creusés profondément à même sa chair. Ses yeux d'un noir de jais réfléchissent la lumière des étoiles.

Jehan s'arrête soudain. Il observe avec plus d'insistance devant lui, il reconnaît soudain le guerrier combattu plus tôt. C'est un chevalier de l'Ordre Rouge !

Un ordre de chevalerie corrompu par l'énergie impitoyablement pourchassé et finalement annihilé par les ducs du Rohan et leur vassaux.

Du moins, c'est ce que Jehan a cru jusqu'à maintenant.

Jehan songe alors à la tunique et les armoiries aperçu plus tôt. Ils appartenaient finalement bien au comte d'Orfeuil, qui doit être mort maintenant.

Odomar soulève son bâton, adresse un grognement au ciel. Des éclairs dansent dans ses yeux quand les cieux répondent à son appel et que des échos se font entendre à travers les plaines. Les ténèbres se rassemblent, forment un voile semblant attirer à lui les ombres, puis des volutes d'obscurité se répandent autour de lui. Jehan lutte, essayant de résister face aux assauts d'énergies psychique du sorcier. Mais prisonnier au milieu de ce torrent qui le soulève sur quelque centimètres et aspirant à son contact glacé son énergie vitale, celle-ci finit par être drainée par l'essence maléfique, puis, il s'éteint.

Alors, dans les ténèbres, le sorcier parle. Sa voix résonne, se fait l'écho de dizaines d'autres.

Un voile apparaît autour des mains du sorcier, formant un halo lumineux blanc et bleu, puis, en désignant le corps inanimé, l'énergie se dirige vers celui-ci et l'entoure, soulevant encore une fois le corps de quelques centimètres, l'énergie tournoie autour entraînant avec elle le corps inanimé de plus en plus rapidement. Puis, au bout de quelques secondes, l'énergie se dissipe et fait chuter brutalement le corps au sol.

Le sorcier prononce encore quelques mots.

Le corps de celui qui était il y a peut encore le fier chevalier de Brienne tressaute.

Lentement, il se redresse.

Il se dirige, titubant, vers le sorcier.

Son visage a oublié la terreur pour une expression démoniaque, ses yeux sont rouges et son teint bien plus pâle.

Il se prosterne, tremblant, devant le favori des dieux.

* * *

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J'men'fou Membre 219 messages
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Chapitre deux :

FOULQUE DE LOMÉNIE, DUC D'ORFEUIL

* * *

- MONTJOIE !!!

Dans un bruit de tonnerre, les chevaliers hurlèrent leurs cris de guerre et chargèrent à travers la plaine. Des mottes de terre humide volaient à leur passage et le ciel était obscurci comme des nuées de flèches sifflaient au-dessus de leurs têtes et criblaient les rangs ennemis. En première ligne, Foulque sentit l'exaltation s'emparer de lui tandis qu'ils dévoraient la distance qui les séparait des barbares. Il choisit sa victime, un homme immense criant comme un dément, et abaissa sa lance. Le Nordique tenta de l'éviter en sautant sur le côté mais le chevalier s'attendait à une telle feinte. Sa lance de cavalerie atteignit le plexus du barbare, mue inexorablement par le poids du cavalier et de sa monture. Le bois laqué transperça le guerrier de part en part, et des hurlements fusèrent de tous côtés tandis que des dizaines d'autres subissaient le même sort.

Les sabots des destriers battaient l'air, disloquant les crânes et les os alors que les chevaliers tailladaient furieusement les chairs nues. Foulque lâcha sa lance brisée et dégaina son épée. Il frappa un adversaire au visage et plongea sa lance dans la gorge d'un autre qui tentait de saisir les rênes de son destrier. L'acier cramoisi décrivait de grands arcs, prenant une vie à chaque coup. Il sentit un vent de panique courir dans les rangs de leurs ennemis, et vit leurs visages en proie au doute. Abattant un autre barbare, il se retrouva soudain sans adversaire à sa portée.

Mais à ce moment, Foulque aperçu, à droite et à gauche , deux bois remplis d'hommes d'armes et d'archers par lesquels il courait un risque d’être enveloppé , s’il se permettait d’aller braver le gros de l’armée du connétable. En conséquence il suspendit sa course , et se borna à se tenir sur ses gardes. Dans le même moment il aperçut deux autres corps de cavalerie qui débouchaient d’un bois. Il fait halte , et se dispose à bien les recevoir. L'ennemi, étonné d'une aussi ferme contenance, s'arrête un moment. Foulque, saisissant cet instant d’indécision , en profite pour regagner en bon ordre la hauteur, premier théâtre du combat, et, par cette manœuvre , se dégager entièrement de l’armée ennemie.

En arrivant à son premier poste , le duc y trouva les sergents-à-cheval du duc de Vendeuvre , le comte de Chivré , le comte d’Arvernes , le chevalier d’Ogny, de Viri , de Clermoy, de Riey, des Ayx , de Rabusson, de La Curée , de Lures, de Sainte-Suzane , de Boulay , qui arrivaient avec leurs compagnies au nombre de plus de 800 chevaux ; il les range sur le coteau , en ordre de bataille , en forme deux pelotons , se met à la tête du premier, donne l’autre au maréchal de La Villardière, prêt à tourner l'infanterie nordique si elle venait à bouger. Mais les ennemis , persuadés que l’armée rohanaise était derrière la hauteur, n’osèrent pas venir recommencer l’attaque, et accusant de trahison le duc de Pouy, par un tour de conversion, rebroussèrent chemin; leur infanterie s’ouvrit pour donner passage à la cavalerie et protéger sa retraite. Foulque, en capitaine expérimenté , voulant faire un pont d’or à l’ennemi qui fuyait, se contenta de faire suivre les Nordiques jusqu'à ce qu’ils repassent le village de Sane où était le quartier général du connétable de Borgo, et convoqua aussitôt le reste de la cavalerie qu’il avait laissée à Orfeuil. Le lendemain , il fit suivre l'armée par le baron de Gyse, jusqu'à ce qu’elle est repassé les ponts. Au retour de cette reconduite, le duc embrassa le jeune baron , qui avait tué de sa main un nordique dont il avait reçu un défi. Puis, s'adressant à tout ses hommes qui l'entouraient, il prononça un court discours avant de rejoindre son château :

- Il est bien juste que ceux qui trouve de vieux exemple de vertu devant eux, les imitent et renouvellent pour ceux qui viennent après. Dans bien des batailles, vous et moi, mes braves soldats, mes amis, mes frères, nous avons combattu pour la gloire. Mais aujourd'hui, nous avons combattu... POUR LA VIE !!!

Les soldats crièrent des HOURAS et des FOULQUE...

* * *

Foulque entra à grandes enjambées dans son bureau. La journée avait été bonne. Il avait sans nul doute porter un coup fatal à l'ennemi et le Roi le récompenserai largement de cette victoire obtenue lorsqu'une ombre se détacha du plafond pour atterrir silencieusement derrière lui et se fondre à nouveau dans l'obscurité. Les sens du duc tressaillirent et il jeta un regard soupçonneux par-dessus son épaule. La surprise lui fit ouvrir de grands yeux quand il vit que l'ombre l'observait par deux fentes rouges qui luisaient comme des charbons ardents.

La forme vêtue de noir fondit sur le duc, paraissant entrainer les ténèbres derrière elle comme une cape. Des griffes aux lames sombres attachées aux mains de cet ennemi fendirent l'air et le duc dû se jeter en arrière pour éviter les armes qui l'auraient éviscéré. Révélant ses dents jaunies et dans un rictus de mépris, il leva sa lame contre l'assassin. Ce dernier avança lentement d'un pas parfaitement silencieux, le corps et le visage dissimulés dans des tissus noirs.

L'obscurité s'enroulait autour de l'exécuteur telle une créature vivante et le duc fut pris d'un étrange vertige en tentant de le fixer. Foulque plongea en avant pour abattre sa lourde épée sur la tête de l'assassin, mais celui-ci la détourna aisément et lança une contre-attaque qui traça trois lignes de sang sur le visage et ne rata son œil que d'un poil.

L'Ombre recula, une lueur de satisfaction éclairant son regard cruel. La peur traversa l'esprit du duc, il commença à sentir son visage s'engourdir et le poison se déverser dans ses veines pour atteindre son cœur. Sa vision se troubla.

Avec l'énergie du désespoir, il tituba vers l'Ombre qui se laissa tomber accroupi en battant l'air de ses griffes de combat d'un air belliqueux. Foulque lança une série de vives attaques que son agresseur esquiva en se déplaçant à une vitesse hors du commun, puis il bloqua l'arme du duc entre les lames d'une de ses griffes et la brisa d'un coup sec de la paume de son autre main. S'approchant de la silhouette drapée de ténèbres, le duc porta un coup ascendant avec le pommeau qui lui était resté dans les doigts. Un craquement retentit lorsque le coup fendit la mâchoire de l'Ombre qui recula sous l'impact, permettant au duc de tirer une longue épée de son fourreau en se rapprochant de son adversaire sonné.

Mais l'Ombre retrouva rapidement ses esprits et fit un pas de côté pour éviter le tranchant qui frôla son coup. D'un vif mouvement de la gauche, il saisit au passage le poignet du duc. Un gémissement de souffrance s'échappa d'entre les dents serrées du duc lorsqu'une vigoureuse torsion de son bras lui démit l'épaule. Il laissa tomber son épée à terre. L'Ombre frappa d'un coup de paume sec la clavicule de sa victime et ce fut alors un hurlement qui suivit le craquement qui résonna dans la pièce. Le bras du duc retomba pour pendre mollement à son côté.

Rendu fou par la rage et la douleur, le duc agrippa la gorge de l'Ombre, enfonçant lentement la lame de son épée brisées dans le cou. L'Ombre se débattit frénétiquement sans pouvoir se libérer de la vigoureuse poigne de son adversaire. Dans un grognement bestial, le duc enragé étendit le cou. Les yeux emplis de terreur, l'Ombre détourna de justesse la tête devant cette attaque.

Le duc sourit. Un intense éclat de rage embrasait son regard. Soulevant son adversaire à bout de bras, il le jeta violemment contre le mur opposé. Il y eut un craquement sec de côtes brisées et l'Ombre glissa au sol où il demeura, à demi inconscient. Le duc se pencha pour ramasser son épée et la brandit avec une expression menaçante en jetant un œil torve sur la forme brisée vêtue de noir.

- Imbéciles... Croient-ils vraiment que je serais battu facilement ?

Puis il s'approcha du cadavre pour voir de qui il s'agit mais tout d'un coup, le duc se raidit, rendu muet par l'incompréhension, avant de se mettre à cracher son propre sang. La seconde Ombre retira le poignard dentelé qu'il venait de lui planter entre les omoplates, le sang se mêlant alors à un liquide verdâtre qui s'écoulait de la lame. Une goutte de ce poison grésilla un instant sur la pierre du sol où elle était tombée, bientôt suivie du duc dans sa lourde armure.

Le duc était étendu sur le dos, le corps agité des convulsions. Les Ombres se replièrent silencieusement dans les recoins de la pièce pour regagner les ténèbres. L'espace d'un instant, leurs yeux continuèrent de briller d'une lueur rouge et malveillante, avant de disparaître à leur tour.

* * *

Au son de ses paroles inhumaines résonnant dans la clairière après avoir vu la preuve de la mort du duc d'Orfeuil. L'homme masqué posa son regard sur les deux Ombres et dit :

- Bien, bien, bien, Vous avez fait du bon travail. Enfin débarrassé du duc d'Orfeuil, le général le plus talentueux du royaume du Rohan ! Le chemin d'Érendel est devenu un boulevard.

Les Ombres acquiescèrent respectueusement en retirant leur capuchon.

S'en retournant, il ordonna :

- Emmenez-le !!!

Puis, se dirigeant vers son destrier, il revêtit son heaume. La lumière de la Lune reflétant sur son armure rouge.

* * *

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Membre, Jedi pas oui, jedi pas no, 32ans Posté(e)
Jedino Membre 48 051 messages
32ans‚ Jedi pas oui, jedi pas no,
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Je m'attendais à une histoire médiévale, au début, mais on est rapidement tombé dans le fantastique.

D'ailleurs, les Ombres m'ont fait penser, un temps, à une histoire qu'un ami écrit (l'histoire est différente, mais comme il utiliser le même mot, voilà).

Sinon, c'est agréable à lire. :)

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Membre, Posté(e)
J'men'fou Membre 219 messages
Baby Forumeur‚
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Chapitre trois :

L'ÎLE

* * *

Les bras robustes de plusieurs marins tirèrent la barque sur la plage de sable fin. Une fois l’embarcation bien au sec, trois silhouettes, vêtues d’un long manteau gris, capuche rabattue sur le visage, enjambèrent le rebord et se dirigèrent vers l’orée de la forêt toute proche, située à quelques dizaines de mètres à peine de là. Sans prononcer une parole, les trois compagnons s’éloignèrent à vive allure. Les marins, tout aussi muets, les suivirent un instant des yeux puis, manifestement dans l’attente de leur retour, s’assirent à même le sable. Un silence étrange régnait, troublé seulement par le ressac de l’océan et le cri strident et agaçant des mouettes. Au loin, le navire qui les avait amenés, avait jeté l’ancre. Les voiles avaient été baissées, laissant à nu les mâts décharnés, qui se détachaient, tel un squelette, sur le ciel d’un bleu désespérément métallique. Pas le moindre nuage. Seule une mince bande de brume vaporeuse noyait l’horizon lointain.

Les trois silhouettes pénétrèrent dans la forêt. La végétation, peu touffue, rendait leur avancée relativement aisée. Le vent dans les branchages faisait bruisser les feuilles et une odeur musquée montait aux narines des compagnons.

Toujours en silence, les trois personnages, progressant à pas feutrés dans la forêt, parvinrent à une petite colline qui dominait les bois. Ils en entreprirent l’ascension. Au fur et à mesure qu’ils grimpaient, la végétation se faisait de plus en plus rare. Parvenus au sommet, ils aperçurent, au centre d’un terre-plein aride, une imposante bâtisse de pierres à la façade curieusement tapissée de lierre, laissant à nu, par endroit, des pans de mur rongés par la mousse. Cette végétation envahissante contrastait avec la nudité et l’aridité des lieux où poussait seule une herbe rase et sèche.

La bâtisse présentait une façade étrangement aveugle ; aucune ouverture, à l’exception d’une porte, bien dissimulée sous une épaisse tenture de végétation. L’une des silhouettes s’approcha et sortit de sous son manteau une longue épée. Vivement, il trancha les solides ramures torses et entremêlées et dégagea la porte en bois, vermoulue par les ans.

- Vous êtes sûrs que c’est ici ?

L’homme qui se tenait près de la porte se retourna :

- Pas ici, non, mais pour parvenir à notre but, nous devons passer par là.

Sur ce, il ouvrit la porte…qui, tournant péniblement sur ses gonds, émit dans le profond silence un grincement lugubre. Les trois compagnons pénétrèrent dans une petite pièce carrée, sans aucun mobilier, pavée de dalles multicolores.

- Il va falloir explorer les lieux, commenta le troisième individu en se dirigeant vers un mur.

- Et que sommes-nous censés chercher ? Demanda celui qui, le premier, avait pris la parole.

- Un passage secret ! Grommela le troisième.

Ainsi se mirent-ils à la recherche du fameux passage. Ils sondèrent minutieusement murs et sol. Les trois compagnons pensaient avoir plus de chance de découvrir le passage au niveau du sol que le long des murs, mais estimèrent cependant préférable de tout passer au crible. L’enjeu était trop important pour laisser quoi que ce soit au hasard.

A coups de pommeau d’épée, de talons et de poings, ils explorèrent la salle. Chaque coup résonnait et se répercutait dans le silence. Malgré l’humidité des façades extérieures, l’endroit était sec. Dans leurs vêtements, les trois hommes, en sueur, commençaient à étouffer. Pourtant, indifférents à leur peine physique, ils poursuivirent minutieusement leur examen. Ils avaient du temps devant eux, du moins ici.

Soudain, la voix du second retentit, assourdie par la nudité de la pièce qui lui renvoyait son écho :

- Je crois que j’ai trouvé ! S’exclama t-il.

Les deux autres s’approchèrent. L’homme, agenouillé près d’un angle, frappait le sol qui, à cet endroit, sonnait creux.

- Maintenant, il s’agit de réussir à ouvrir. Peut-être devrions-nous creuser ? Demanda t-il.

- Je doute qu’il y ait un automatisme, songea tout haut le premier.

- Reculez !

Ses deux compagnons obtempérèrent. Alors l’homme, tendant les bras devant lui, se mit à les agiter en formant des cercles et en psalmodiant une formule. L’air autour d’eux commença à onduler. La salle devint floue. Impassible, le premier continua son sort. Cette fois, l’air devint palpable et lourd. Un halo vert se forma, grandit et finit par occuper tout l’espace. Les deux autres individus n’osèrent bouger ni prononcer une parole afin de ne pas rompre la magie.

Alors, le sol se déroba devant les pieds du premier.

Aussitôt, l’homme cessa ses psalmodies. Les phénomènes mystérieux disparurent et tout, autour d’eux, redevint normal. Les deux compagnons s’approchèrent du trou. Une dalle avait pivoté. La cavité ne paraissait pas profonde. Cependant, le premier compagnon prit la précaution d’y jeter un caillou. Le résultat ne se fit pas attendre : ils perçurent très vite le bruit mat de la pierre heurtant le sol.

- Effectivement, le trou ne paraît profond, fit le second, songeur. Qui s’y aventure en premier ?

- Celui qui vient d’en faire la proposition, répondit le troisième.

Le concerné haussa les épaules et se dirigea vers la cavité puis sauta à l’intérieur.

- Il faudrait que l’un d’entre nous reste en haut pour nous aider à remonter, fit l’homme, après s’être réceptionné sur ses deux pieds sans difficulté, c’est quand même assez bas !

- Pas la peine, je doute que nous ressortions par ici , rétorqua le premier en s’aventurant à son tour dans le passage.

Le troisième l’imita en silence.

Un tunnel s’étendait devant eux. Les trois hommes pouvaient se tenir côte à côte sans problème. Face à eux, un rectangle de lumière éclairait le chemin. Précautionneusement, les trois compagnons avancèrent.

Ils atteignirent rapidement l’endroit d’où provenait la lumière. A cet instant, le second ralentit brusquement.

- Étrange que nous ne soyons pas tombés sur des pièges, déclara t-il.

- Pour découvrir le passage et parvenir jusqu’ici, encore fallait-il posséder des pouvoirs et savoir s’en servir à bon escient, ce qui n’est pas donné à tout le monde. Et puis, qui connaît ce lieu ? Qui connaît l’existence de ce passage ? Seul des initiés comme nous pouvaient s’aventurer ici. Et quand bien même quelqu’un serait parvenu à l’île et aurait découvert le bâtiment, il en serait bien vite reparti, le trouvant vide et abandonné. Ceux qui ont conçu ce passage secret n’ont pas jugé utile, dans ces conditions, de s’embarrasser de mesures de précaution supplémentaires. Je concède tout de même qu’ils ont fait preuve d’une certaine imprudence, d’un certain manque de réflexion … mais de cela, nous ne saurions nous plaindre, répliqua en souriant le premier.

Le second hocha la tête et s’approcha de la lumière.

Il ne s’agissait pas, à proprement parler, de lumière mais d’une sorte de liquide blanchâtre qui se mouvait, ondulait, formant des cercles et des remous.

- Je ne sais pas ce que vous en pensez, mais moi, je me méfie, fit le second.

- Ne crains rien. Personnellement, je pense qu’il s’agit là d’une sorte de porte.

Il plaqua sa main sur l’espèce de liquide. Son bras s’enfonça et d’un pas résolu, il avança et disparut, absorbé par le flot.

- Bon. Et bien, en avant, déclara le second.

Les deux autres hommes pénétrèrent dans le liquide.

Ils se retrouvèrent en haut d’un escalier monumental. Le ciel était rouge, strié de lourds nuages noirs et gris. Où qu’ils portassent leur regard, ils ne voyaient qu’une vaste plaine à perte de vue. Songeur, le premier commença à descendre les marches. Aucun signe de vie : cela l’intriguait sérieusement. Ils n’étaient manifestement plus sur l’île et cela aussi l’intriguait. Où pouvaient-ils donc bien se trouver? Il leva les yeux vers le ciel et, dubitatif, hocha la tête de droite à gauche.

Au loin, vers l’horizon, deux lunes rondes et blanches se détachaient, presque diaphanes, sur le ciel tourmenté. L’homme se tourna vers ses compagnons qui paraissaient tout aussi perplexes et déroutés que lui et leur fit signe de les rejoindre.

Ils continuèrent tous trois de descendre les marches. La couleur de la plaine leur paraissait, au fur et à mesure qu’ils s’en rapprochaient, de plus en plus étrange. Ni verte, ni bleue, ni grise mais de toutes ces nuances à la fois.

- Serions-nous parvenus dans un endroit maudit ? Demanda le troisième.

- Je ne pense pas que nous soyons chez nous. Je veux dire, dans notre monde, fit le premier.

Le second avait dégainé son épée et examinait les alentours.

- Cet endroit ne me plait pas, annonça-t-il.

-Tu es trop alarmiste, fit le troisième.

Cependant, un certain trouble commençait à s’insinuer dans l’esprit du premier. Lui aussi sortit son arme, mais la laissa baissée.

- Je suppose que nous allons nous y engager ? Demanda le troisième.

En guise de réponse, le premier avança et s’enfonça dans les hautes herbes. Celles-ci leur arrivaient aux genoux. Pas le moindre vent, pas la moindre bise n’agitait les tiges qui se couchaient sous les bottes des compagnons, laissant derrière eux un sillage bien visible.

* * *

- Regardez, souffla le premier.

Les compagnons s’immobilisèrent brusquement. De là où ils se tenaient, ils apercevaient, bien qu’encore lointaines, de hautes murailles barrant l’horizon. Jamais ils n’avaient vu pareille enceinte, aussi impressionnante et de telles dimensions. Ils n’auraient même jamais pu l’imaginer…

Ils reprirent leur progression, toujours aussi stupéfiés par la vision majestueuse. Plus ils en approchaient, plus ils se sentaient minuscules face à l’imposante silhouette de pierre, la sensation d’une fourmi face à un homme.

- Je ne vois pas de porte, fit le troisième.

De fait, aucune porte n’était apparente. Rien que de hauts murs, parfaitement lisses, qui donnaient le vertige lorsqu’on levait le regard vers le sommet. Tous les dix mètres environ se dressait une tour au sommet pointu. Les compagnons n’apercevaient toujours ni porte ni sentinelle. Comme si l’endroit était abandonné ou désert.

- Cela ressemble à un Krak, déclara le premier.

- Mais en plus impressionnant, fit le second.

Le troisième se contenta d’opiner du chef. Les deux hommes qui avaient dégainé, rengainèrent alors et tous trois se rapprochèrent de la forteresse.

- Pas de douve ou de fossé, commenta tout haut le premier, plus pour lui-même que pour ses compagnons auxquels cette particularité n’avait pu échapper.

- Les murs ne présentent ni lézardes ni fissures. Aucune végétation, aucune plante sauvage ou mauvaise herbe ne les a envahis, constata, non sans perspicacité le second, à mon avis, si elle a été abandonnée, elle l’a été récemment.

Se tenant tout de même sur leurs gardes, ils commencèrent à longer l’enceinte, tout en continuant à l’examiner et tentant d’apercevoir des silhouettes tout en haut, sur les remparts. Nul doute que si des soldats montaient la garde, ils n’avaient pu manquer de les apercevoir. Mais personne ne se manifestait. Par peur ? Cela était peu plausible : trois individus ne peuvent constituer une réelle menace face à une telle forteresse ! Évidemment, rien n’exclut qu’un guetteur, apercevant trois silhouettes vêtues de noir, aurait pu trouver cela étrange, le présage d’un danger imminent. Mais l’hypothèse la plus simple et la plus vraisemblable est que la forteresse était déserte.

- On pourrait crier pour se signaler, lança alors le second.

- Je doute qu’il y ait quelqu’un en vie là-derrière, fit alors le troisième. En tout cas, ce n’est pas ce que nous recherchons !

- Quoi qu’il en soit, nous devons entrer et peut être trouverons-nous un indice de ce que nous cherchons, répondit le premier.

- Mais comment entrer ? Soupira le second.

Une heure plus tard, alors qu’ils commençaient à désespérer, ils finirent par découvrir une sorte de passage, pas une porte mais une grille conduisant à un tunnel. Les égouts, sans aucun doute. Cependant il n’y avait ni odeur nauséabonde ni liquide brunâtre, épais et nauséeux. Pas de rats non plus, pourtant familiers de ce genre de lieux. En tout cas, la grille, en piteux état et apparemment mal entretenue, ce qui paraissait pour le moins étrange en ce lieu, semblait vétuste.

Deux coups de bottes suffirent à la briser. Courbés, les trois compagnons pénétrèrent dans le tunnel qui paraissait remonter quelques mètres plus loin.

- Non seulement les murs sont hauts, mais en plus d’une formidable épaisseur, commenta le troisième, j’ai l’impression que ceux qui vivaient ici craignaient des attaques…Défendue par une garnison, ce devait alors être une forteresse imprenable…

- D’où visiblement on ne peut ressortir, railla le second.

Le sol était sec et même craquelé d’après ce que le premier, à quatre pattes, ressentit à travers ses gants. Il en conclut que personne n’avait dû utiliser ce tunnel depuis un bon bout de temps.

Puis il se rendit compte que la galerie remontait. Levant les yeux, il aperçut une bouche laissant, à travers des trous, percer une lumière blanche. Lorsqu’il l’atteignit, il la poussa. Celle-ci, dans un grincement, racla lourdement à terre mais s’ouvrit. Le premier déboucha à l’air libre, mais à l’intérieur de l’enceinte. Il se releva et ce qu’il vit le statufia sur place.

C’était une ville, une ville extraordinairement étendue. Plus étendue que toutes celles qu’il avait vues jusque là. Mais, tout compte fait, rien d’étonnant à cela, étant donné la longueur de la muraille. Tout y était démesuré : les rues larges, mais vides, les habitations monumentales, à plusieurs étages, aux murs décorés de balcons en fer forgé aux rambardes pansues. Mais les fenêtres avaient perdu leurs vitres, tout était couleur de sable et la poussière s’accumulait sur les vastes trottoirs. Il y régnait une atmosphère étrange de désolation, l’atmosphère d’une ville abandonnée après une catastrophe. Cette sensation était d’autant plus oppressante que la ville, malgré ses ravages, donnait l’impression d’avoir connu jadis, dans un passé peut-être pas si lointain, une certaine opulence.

Ses deux compagnons furent autant ébahis que lui. Une fois revenus de leur étonnement, ils se concertèrent :

- Il y a forcément quelque part un palais, une demeure où auraient vécu le gouverneur des lieux, les dignitaires, leurs familles, commença le premier.

- Cette ville a l’air déserte, mais sa taille laisse supposer qu’une population très importante devait y vivre autrefois, rétorqua le second. Comment trouver ce palais, cette demeure ?

- Le mieux serait d’accéder à un de ces toits pour avoir une vue plus étendue sur la ville, suggéra le troisième.

Les deux autres acquiescèrent. D’un pas décidé, le troisième se dirigea vers un bâtiment. L’entrée était fermée par une porte en bois…en assez bon état. Il appuya sur la poignée qui n’opposa aucune résistance. La porte s’ouvrit sans le moindre grincement. L’un après l’autre, tous trois entrèrent.

Elle donnait sur un couloir étroit. De chaque côté, étaient alignées des portes en bois numérotées. A l’autre extrémité, faisant face à la porte d’entrée, un escalier en colimaçon.

- J’aimerais bien visiter un de ces appartements, lança, désinvolte, le second.

- Pas le temps, nous sommes là dans un but bien précis, fit le troisième, pour la visite, nous verrons plus tard

Ils empruntèrent donc l’escalier qui semblait ne jamais avoir de fin. Essoufflés, ils parvinrent au dernier étage mais n’y trouvèrent aucune issue, aucune trappe donnant accès au toit.

- Allons sur un balcon, proposa le premier. Mes jambes ne me portent plus.

De fait, cette ascension avait exténué les trois hommes. Au jugé, ils avaient dû gravir une trentaine d’étages.

- Tu voulais explorer un appartement ? Fit le premier. Et bien, tu vas être servi.

Et il poussa la porte. Cette fois encore, elle s’ouvrit sans un bruit. Le second eut l’air déçu. Il entra, presque courbé. Devant lui : un lit en bois, sans matelas, un tapis poussiéreux, une commode, une table de chevet, ameublement plus que sommaire. A droite, une pièce donnait accès à une cuisine, meublée d’une simple table en bois et de deux chaises. Pas un ustensile, aucune vaisselle, sauf une vieille casserole rouillée. Pas trace de nourriture. Ils ne s’attardèrent pas dans l’appartement, préférant gagner le balcon.

Ils eurent le souffle coupé : la vue dominante était époustouflante. Le vertige gagna les trois compagnons. Devant eux, à perte de vue, se dressaient des tours et des bâtiments, aux toits pointus ou en terrasses.

- Et comment reconnaître le palais que nous cherchons ? Demanda le troisième.

- Je pense savoir, fit le premier en désignant une construction au loin.

Une immense coupole de verre, soutenue par une puissante armature d’acier, coiffait un bâtiment plus long et plus élevé que les autres.

- Et bien allons-y, soupira le second

- Je commence à douter que nous trouvions ce que nous cherchons, maugréa le troisième.

- Je pense plutôt que nous approchons du but, fit le premier en tournant le dos à la cité.

* * *

- Je n’aurais jamais cru marcher un jour aussi longtemps dans une ville sans âme, grommela le troisième.

- Le silence m’oppresse, renchérit le second.

Le premier, sans dire un mot, continua à se diriger droit devant lui. Les rues, malgré le sable ocre qui les recouvrait, étaient propres : pas le moindre immondice, pas le plus petit détritus. Rien ne bougeait, non plus. C’était une forteresse fantôme. Qu’est-ce qui avait bien pu pousser les habitants à abandonner un tel lieu ? De plus, il avait l’impression que le temps s’était figé. Le ciel était toujours aussi rouge que quelques instants plus tôt, et les nuages, qu’aucun souffle d’air ne déplaçait, stagnaient immuablement au-dessus de leurs têtes.

- Aucun être vivant, humain ou animal, aucun cadavre non plus, aucune trace de vie, reprit le second.

- En quittant les lieux, ils ont dû emporter avec eux tout ce qu’ils pouvaient, fit le premier.

- L’ampleur de la ville, sa conception, son architecture grandiose ne peuvent qu’être le fait d’un peuple plus avancé que nous, fit le second.

- Plus avancé certes, mais qui pourtant a déserté le lieu. Décidément, je n’arrive pas à en saisir la raison. Une attaque ? Un danger imminent ? La forteresse semble imprenable ; d’ailleurs, on ne trouve nulle part, trace de combats et la ville ne semble pas avoir été désertée dans la précipitation. La menace d’une famine ? A priori, la population ne risquait pas de souffrir de disette. Les champs de l’autre côté sont suffisamment vastes pour y cultiver blé, maïs, céréales et autres produits de la terre en quantité suffisante pour nourrir la cité entière. Non, il doit y avoir une autre raison, reprit dubitatif le premier.

- Oui, pourquoi sont-ils partis ? Poursuivit le troisième, peut-être le saura-t-on bientôt. Quoi qu’il en soit, notre objectif n’est pas de découvrir ce qui s’est passé ici !

Le premier acquiesça d’un hochement de tête.

Alors qu’ils cheminaient, perdus dans leurs pensées, le palais apparut brusquement devant eux. Des escaliers en marbre menaient à une immense porte cintrée à double vantaux, sculptée d’armoiries inconnues des trois compagnons. Les voussures et les piliers latéraux de la porte étaient sculptées de motifs anthropomorphiques, grotesques ricanant et autres monstres. De la corniche supérieure de la façade saillaient des gargouilles grimaçantes qui narguaient les passants.

- Je pense que le Mal est passé par ici, grommela le troisième.

Deux compagnons grimpèrent les marches et poussèrent les battants. Verrouillés. Le premier recula :

- Nous allons devoir, encore une fois, avoir recours à la magie, fit-il.

Sur ce, il étendit les bras devant lui, joignant les mains, comme s’il priait les bras tendus, et marmonna quelques mots incompréhensibles. Aussitôt, une vague de froid les enveloppa tous trois puis un souffle violent alla heurter la porte de plein fouet. Les battants, projetés vers l’intérieur, volèrent en éclats : la voie était libre.

Le premier, exténué, tomba à genoux. Le second l’aida à se relever.

- Bon sang, on dirait qu’ici, les sorts se heurtent à une forte résistance.

Les deux autres opinèrent.

Ils pénétrèrent dans un vaste hall au faste tapageur et ostentatoire: sol couvert de dalles d’un beau marbre blanc veiné de gris et, par endroits, de tapis de soie chatoyants aux nuances changeantes, murs décorés de tapisseries mille fleurs et miroirs dans lesquels devaient se refléter, lorsque le palais était encore habité, les flammes des riches chandeliers en or posés sur des consoles aux pieds contournés, marquetées de bois précieux. Au fond, un escalier à double révolution menait à l’étage.

Comme mû par un instinct, le premier, suivi de ses compagnons, se dirigea vers les escaliers. A l’étage, ils trouvèrent un couloir orné de tableaux représentant des scènes de chasse et sur lequel s’ouvraient, de part et d’autre, des portes qu’il ignora pour continuer son chemin. Il parvint à un second escalier qu’il emprunta.

Suivant toujours son instinct, il guida ses compagnons à travers les étages et les salles, un véritable labyrinthe. Comme si une force secrète et irrésistible le poussait en avant, le dirigeait. Il n’était jamais venu en ces lieux, il ne savait pas où il allait et pourtant il avançait sans aucune hésitation, parcourant des couloirs dallés de marbre, comme le hall d’entrée, et par endroits recouverts, comme lui, de tapis de soie. Portraits et tableaux représentant des scènes de batailles, peut-être les portraits et les exploits guerriers des habitants des lieux, ornaient les murs. Près de chaque porte, sur une console murale, des chandeliers en or à trois branches dont les bougies paraissaient neuves.

Les pièces qu’ils traversaient étaient toutes vastes et spacieuses. L’une d’elles était meublée, en son centre, d’une très longue table en bois, encadrée, de part et d’autre, de bancs en cuir. Le long des murs, des armures scintillaient, sans une once de poussière. Dans la salle suivante, fauteuils et canapés, également en cuir, formaient une sorte de cercle. Sans doute une salle d’accueil ou de réunion. Les armoires en bois massif étaient vides, de même que les étagères qui couraient le long des murs. Cependant, là encore, aucune poussière.

Ils montèrent encore trois étages puis empruntèrent une rampe assez raide s’élevant en colimaçon vers l’étage supérieur. Ils y parvinrent, essoufflés, et aperçurent, à l’autre extrémité, une sorte de portail en fer forgé vers lequel ils se dirigèrent, après avoir repris leur souffle.

Le portail était entrouvert. Ils le poussèrent.

Ils se retrouvèrent alors sous le fameux dôme qu’ils avaient aperçu de loin. A leur plus grande surprise, ils constatèrent que la coupole formait une sorte d’immense serre sous laquelle poussait une végétation luxuriante et exotique. Ils pénétrèrent dans cette forêt où la main de l’homme, qui l’avait pourtant créée, avait su se faire discrète et humble devant la nature. Des sentiers caillouteux serpentaient à travers arbres et buissons aux essences et formes variées. Couleurs et senteurs se mêlaient agréablement, réjouissant les sens. Des cascades chantantes jaillissaient de rochers, que l’on aurait cru posés là depuis la nuit des temps. Au détour des allées, à l’abri des feuillages, de superbes statues de marbre blanc : Vénus aux rondeurs sensuelles, angelots potelés et rieurs, guerriers arborant fièrement arcs et javelots. Un véritable enchantement, un paradis sur terre.

Mais il ne s’agissait pas de perdre du temps à flâner.

Après une marche d’environ une demie-heure, d’après l’estimation du premier compagnon, ils atteignirent une sorte de bâtiment, en bois cette fois, au centre même du dôme. Il poussa la porte sans aucune hésitation et entra.

Une trappe était ouverte à même le sol. Sans même jeter le moindre regard autour de lui, le premier descendit. Étonnés, les deux autres se dévisagèrent brièvement avant de le suivre. Le second, qui avait avisé un bâton sur une table, le prit à tout hasard.

Et il avait eu raison. En bas, c’était le noir le plus complet. D’une simple formule magique, le second embrasa le bâton pour en faire une torche et la tendit au premier.

Les compagnons avancèrent dans un couloir apparemment taillé dans de la pierre. De temps en temps, ils apercevaient des torches fixées au mur mais le premier estima préférable de ne pas les allumer.

Ils atteignirent un rideau en parfait état. D’un revers de la main, le premier le poussa et éteignit la torche improvisée : des dizaines de chandeliers éclairaient la pièce dans laquelle ils venaient de pénétrer.

La salle, véritable capharnaüm, était meublée de tables, poufs, chaises, fauteuils et canapés en grand nombre et le sol recouvert de tapis bariolés. Au loin, de dos, assise sur un tabouret, et faisant face à un miroir, une silhouette dont les longs cheveux gris cascadaient sur les épaules.

- Bienvenue, chevaliers, fit-elle alors, je ne vous attendais plus.

* * *

Les trois compagnons s’immobilisèrent sur le seuil. La silhouette se tourna vers eux et se leva. Elle était grande, le visage couvert de rides et de cicatrices. Une longue robe tombait jusqu’à ses pieds qu’elle dissimulait. Un pendentif en or oscillait sur sa poitrine.

- Asseyez-vous Grand-Maître Waldemar, Maître Oderic et Maître Ragnar.

Surpris, les trois hommes se regardèrent. Ensemble et d’un même geste, ils rejetèrent leur capuche en arrière, dévoilant leurs traits.

- Comment nous connaissez-vous ? Demanda le premier, celui qui se nommait Waldemar.

La femme, car c’en était, une, leur désigna de la main les fauteuils :

- Cela n’a aucune importance. Vous dirigez l’Ordre Rouge, Grand-Maître Waldemar Quant à vous, Maître Oderic, et vous, Maître Ragnar, vous en êtes les deux plus haut-conseillers. Vous vous êtes retrouvés pour accomplir une quête spécifique. Par delà le temps et les dimensions, vous êtes prêts à tout pour y parvenir.

Elle se dirigea vers une commode, l’ouvrit, en sortit trois verres et une bouteille rempli d’un breuvage rouge :

- Voulez-vous du vin ?

Voyant leur étonnement, elle sourit :

- Le temps ici n’existe pas, enfin, n’existe plus…le vin garde en permanence toute sa saveur…et sa fraîcheur…mais jugez plutôt par vous-même…

Elle remplit les verres et les tendit au trois hommes qui les prirent, non sans crainte et suspicion. La femme reprit sa place sur le tabouret.

- Le temps presse, messieurs. Pour ressusciter les Douze, il va vous falloir beaucoup de force physique et mentale. Cela n’ira pas sans risques. Cependant, le Mal arrive. Il s’insinue un peu partout. Son ombre s’étend déjà…Le Mal est déjà passé par mon monde.

- Que s’est-il passé ? S’enquit Oderic.

Elle le dévisagea puis son regard se perdit dans le lointain.

- Nous avions construit ces murailles pour empêcher les ennemis de notre peuple de nous attaquer et cela a fonctionné pendant des siècles…et puis le Mal est arrivé, détruisant toute vie, jaillis du néant, décimant la population…les réduisant en charpie…puis lorsque le Mal fut assuré d’avoir détruit tout être vivant, humain aussi bien qu’animal, sur mon monde, il est reparti.

Waldemar leva le doigt.

- Désolé de vous interrompre, madame, mais vous aviez dit que le Mal avaient réduit votre population en charpie…Cela signifie donc, passez-moi les termes, démembrement, déchiquetage…bref, du sang…Or, en arrivant ici, nous n’en avons pas vu la moindre trace…

La femme sourit. Mais d’un sourire triste et désabusé :

- Le Mal a aspiré les cadavres en lui-même. Mais si vous aviez assisté à la bataille… une véritable boucherie…et le peu d’ennemis que nous réussissions à tuer, disparaissaient aussitôt !

- Comment avez-vous échappé au Mal ? Demanda Ragnar resté jusque là silencieux.

- Comme chaque monde, nous possédons des sorciers. Leur dernier acte fut de créer un bouclier puissant permettant de rendre invisible l’un des nôtres…moi en l’occurrence. Pourquoi moi, me demanderez-vous ? Je ne le sais point. Je ne suis qu’une sorcière.

Elle se tut, plongée dans ses souvenirs. Les trois hommes se dévisagèrent :

- Puisque vous savez pourquoi nous sommes ici, reprit Oderic, pourriez-vous nous aider ?

Elle leva les yeux. Des flammes y dansaient :

- Certainement.

- Donc, nous ferions mieux d’y aller, fit le Grand-Maître en se levant.

- Vous d’abord. Je vous rejoindrai quand paraîtra la pleine lune…J’ai encore quelque chose à faire ici…

Le Grand-Maître Waldemar ouvrit la bouche pour parler mais il n’en eut pas le temps : l’air s’agita devant eux, la salle devint floue…

Et ils se retrouvèrent à l’orée de la forêt, en direction de la mer. Les marins les observaient. Waldemar cligna des yeux plusieurs fois.

Il se tourna vers la forêt, puis haussa les épaules. La magie était omniprésente. Il était certain que plus jamais, ni lui ni ses compagnons, ne pourraient retourner dans cet autre monde. Ils ne savaient même pas comment s’appelait cette étrange femme !

D’un pas rapide, il se dirigea vers la barque. Peu de temps après, ses compagnons lui emboîtèrent le pas.

* * *

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Membre, Jedi pas oui, jedi pas no, 32ans Posté(e)
Jedino Membre 48 051 messages
32ans‚ Jedi pas oui, jedi pas no,
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Du suspens, haha. Bonne idée ;)

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Membre, Posté(e)
J'men'fou Membre 219 messages
Baby Forumeur‚
Posté(e)

pardon... erreur de manip.

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Membre, 33ans Posté(e)
Destiny-Hope Membre 16 826 messages
Forumeur balbutiant‚ 33ans‚
Posté(e)

Ouah, c'est long ! ça me fait mal aux yeux de lire beaucoup sur un écran. Le premier chapitre est sympa, je lirais le reste plus tard.

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