Aller au contenu

angelique5

Messages recommandés

Membre, Posté(e)
angelique5 Membre 69 messages
Baby Forumeur‚
Posté(e)

Racines

ChapitreIV

Lesflous et les insinuations de Merlin et Yann m’avaient faite prendreconscience que quelque chose ne m‘était pas dit. Lelendemain, j’étais donc aller voir Merlin. Je lui avais demandéen quoi le monde des hommes pouvait-il être dangereux pour moi etpourquoi fallait-il craindre les hommes? Je lui avais aussi parlédes petites flammes sorties du bout de mes doigts lors del’entraînement. Il m’avait répondu très sereinement que pourmoi les deux mondes resteraient dangereux tant que je n’aurais pasatteint un certain niveau de connaissance. Pour les flammes il ne medit rien de précis. Il prit mon bras, tira la manche de ma chemisevers l’épaule et examina l’intérieur de la pliure du coude. Onvoyait apparaître un liseré rougi comme un tatouage donnantl’impression que quelque chose croissait sous la peau. Il avaitl’air soucieux et pas très sûre du diagnostic.

-Tu dis que tu étais en colère?

-Oui, qu’est ce ?

Merlinn’ajouta que :

-Cache-le en attendant la fin de mes recherches.

Sansgrande réponse, je pris le chemin de la tour flanquante, point derencontre pour la visite. Matthieu, en appui contre le murm’observait :

- Bonjour« sorcière », pas trop mal aux fesses ?!

-Une petite sorcière d’Erèbe, c’est impossible!

Uneravissante jeune fille avait fait son apparition derrière Matthieuqui attendait l’effet de sa provocation.

Elleajouta :

-Je me nomme Isabel, tu esNell?

-Oui, dis-je un peu perdue. Mais, pourquoi je ne peux pas être unesorcière d’Erèbe ?

-Merlin n’a pas dû lui dire.

Yannétait arrivé devant la tour. Un peu en retard au rendez-vous, ilreprit:

-Seuls ceux qui appartiennent à Ten peuvent entrer dans sonespace.

Ilse tut un instant pour voir ma réaction.

-Le père de Mat est seigneur dans le monde des hommes mais sa mèreprotège les eaux de Ten, mon père peut faire fondre del’acier avec un simple souffle d’air.

Isabelconclue :

-Ce que nous voulons te dire, c’est que si tu peux entrer ici, tu esnée ici, tu appartiens à Ten, et tu as donc un minimum desang magique.

Jene réalisais pas très bien ce qu’ils venaient de m’expliquer.J’étais orpheline, alors imaginer que des parents, que « mesparents » m’avaient mise au monde ici et rejetée dans lemonde des hommes, ce monde que je croyais être le mien, c’étaitbeaucoup d’informations à avaler d’un seul coup.

Ilétait clair que comme tout le monde j’avais des parents, lesfilles ne naissent pas dans les roses, mais, qui étaient-ils? Machane le savait. J’avais gardé l’idée de savoir qui ils étaientdans un coin de ma tête et aujourd’hui des réponses seprésentaient.

-Alors je suis comme vous?

-Oui, tu es une éréale, répondit gentiment Isabel.

Matthieudéjà préssé dit :

-Bon, nous la commençons cette visite?

-Attend, Léo doit nousrejoindre, dit Yann.

Jequestionnais :

-Qui est Léo?

-C’est mon frère. En quelques sortes, corrigea Yann. On l’aadopté avec mon père, sa mère était une troll3et son père, on présume que c’est un homme, un savant de surcroîtcar Léo est un vrai scientifique. Avec lui tout s’explique,pas de hasard, ou plutôt si! Enfin bon, il t’expliquerait toutcela mieux que moi.

Jevoyais arriver un jeune enfant frêle, maigrichon, blond avec deuxbouts de verres ronds transparents accrochés à son nez.

-C’est lui ?!

-Oui, répondit franchement Yann.

-Mais il n’a rien d’un troll!Sur les dessins de Macha, les trolls étaient grands, forts, poilus!

-Ne te base pas sur les apparences, sa mère a été privée de sonpouvoir de force avant qu’elle n’accouche, elle n’a pas pu luitransmettre et pour le manque de pilosité il a dû hériter cela deson père, me dit tout naturellement Yann.

-Comment cela elle a été privée de son pouvoir?

-On lui a volé.

-On lui a volé? Mais c’est possible? Avais-je demandé.

-Oui, certains l’on fait, finit sombrement Yann à l’arrivée deLéo.

Lepetit garçon d’environ huit ans s’était approché sanstimidité. De plus près, je pus voir que les deux bouts de verre quitrônaient sur son nez étaient rattachés par une tige de fer quilui passaient de chaque côté des oreilles. Voyant mon air curieuxLéo avait dit:

-Tu es nouvelle? Comment t’appelles tu? Ce sont mes lunettes que turegardes ainsi?

-Ce sont des lunettes? C’est fait pour quoi?

-Et bien, la rétine de mon œil n’est pas bien sphérique, je suisastigmate, alors pour voir normalement je dois porter des lunettes.

Pourne pas paraître idiote j’avais répondu stupidement:

-D’accord! …Je m’appelle Nell.

-Bon, on y va?

L’impatiencede Mat avait repris le dessus.

-Ouiiii! Avait répliqué le groupe.

OOOO

Lavisite guidée du château n’en finissait plus, Mat, déjà lasséde l’excursion tressaillait d’impatience comme l’aurait fait unjeune enfant. Il exprimait son envie de se retirer quand notre petitgroupe entra dans une bibliothèquepar une large double porte ornée au pourtour d‘entrelacs celtes.La quantité de livres était impressionnante, la saleté aussid’ailleurs! Dans un coin sombre de la pièce, une bougie éclairaitun livre vieilli par le temps, tout autant que son lecteur restéimpassible à notre irruption. La pénombre ne permettait pas de voirson visage, sa tête demeurait assombrie par la capuche d’unmanteau retombant sur son corps hivernal. Quand, il se retourna versnous, d’un mouvement léger presque fantomatique, il s’étaitélevé de sa chaise et avait brandi son bâton.

-Chien, chien, chien, chien.

L’hommes’était alors approché.

-Chien, chien, chien, chien.

Tousils s’étaient reculés dans un mouvement de panique voyantl’arrivée du vieil homme répétant comme la lecture d’unmauvais sort le mot « chien »! .

-Pourquoi dites vous « chien »? Avais-je demandé.

-Tu n’entends donc que « chien »?

-Oui! « Chien » que vous répétez d’ailleursincessamment !

Ilse rapprocha encore. Du visage squelettique la peau s’étaitretendue, la chair avait rempli les joues, le nez et le mentoncrochus s’étaient éloignés et affinés pour finir. Le vieilhomme avait laissé place à un homme familier.

-Merlin? Qu’est ce que vous êtes?

-Merci pour le « qu’est ce que vous êtes » ! Avait-ilrendu.

Merlindéclara:

-Nell, c’est bien ce que je pensais, tu es une olfeust.

-Une quoi?!

-Je t’ai dit le mot « chien » en quatre languesdifférentes : français XIIIème , argot, anglais duXXème et latin! Pour en revenir à votre cas chèreenfant, si tu n’entends que le même mot « chien »exactement quatre fois c’est que tu es irrévocablement, et sansaucun doute…

Ilavait interrompu son raisonnement. D’un simple regard il fit sortirtous les spectateurs de la salle, cette fois, il ne s’agissait pasde magie mais juste d’un peu d’autorité. Isabel, Léo, Yann etmême Mat avaient filé droit vers la porte. La place déserte, ilreprit la parole.

-Tu es une olfeust! Je m’étaisprécédemment interrogé sur ta capacité à parler ma proprelangue, mais comme ce pouvoir a peu de défauts, on peut mettre dutemps à le détecter. Macha m’avait prévenu que tu ne parlais queson dialecte du nord des pays celtes. Ta première leçonintellectuelle est donc déjà toute trouvée : je vais t’apprendreà lire sur les lèvres pour bien comprendre chaque langue qui existede part le monde. Cela te permettra de distinguer les différentsprotagonistes que tu pourras rencontrer. Puis, cela te permettraaussi de t’ouvrir à notre culture. Tu ne le sais sûrement pas,nous sommes en relation avec un voyageur du XXIème sièclequi nous donne accès à toute la culture française et même auxcultures mondiales…

Mesyeux écarquillés avaient suspendu l’étalement de connaissancesde Merlin. J’avais répondu à cette tirade :

-C’est quoi un olfeust, uneprotagoniste, la culture, un voyageur, le monde? Il sourit comme pourexcuser son déballage.

-Alors, pour commencer, nous disons un protagoniste et l’olfeustest une personne qui est dotée de facultés lui permettant de liredes textes et parler des langues qui lui sont inconnues. Je diraisplutôt étrangères, cela, de manière instinctive, inconsciente etnon contrôlée si les détenteurs du pouvoir ne sont pas informés.Quand l’olfeust utilise sonpouvoir, des études ont prouvé qu’il retraduit ce qu’il lit ouentend dans sa langue maternelle qui peut être parfois limitée d’oùl’intérêt de s’en émanciper, de s‘en détacher. Chez lesolfeusts, la languematernelle est prédéfinie, elle n’est pas acquise lors del’apprentissage du langage, elle est prédéfinie par ses parentsde manière génétique et évolutive…

Àce moment ma bouche suivit mes yeux en s’ouvrant d’un air abêti.

-C’est quoi des facultés, émancipé, prédéfinie, génétique?

-Bon! Reprenons depuis de début…

Pendantdes jours, il m’avait faite articuler des mots invraisemblables queje devais entendre en me concentrant sur les gesticulations de sabouche. Quand son humeur ne pouvait plus me supporter, il appelaitYann pour prendre le relais. Yann avait fait des études delinguistique avec Merlin, il savait parler couramment le Latin,l’Hébreu, le François, le Gaélique… avec Milo le voyageur venudu futur, il avait même appris le Français du XXIèmesiècle.

Pouvoirs

ChapitreV

Unraclement de gorge m’extirpa de mon sommeil. « M’extirpa! »c’était le bon mot face à ce sommeil de plomb.

Unœil ouvert, je vis Léo redresser d’un doigt ses lunettes.

-Nell, Merlin t’attend à la bibliothèque. Il m’a chargé de teréveiller.

-Oui, répondis-je la bouche pâteuse et le deuxième œil paresseux.

-Tu te rappelles où se trouve la bibliothèque?

-Euh oui, oui, je me rappelle.

Alorsque je reprenais mes esprits je remarquais un énorme chat sur monlit.

-Qu’est-ce que c’est?

-C’est Cunégonde, la chatte deMarion, répondit Léo avec méfiance et dégoût.

Eneffet, le chat avait beau avoir un magnifique pelage roux, son nezaplati et ses yeux globuleux ne le rendaient pas très sympathique.

Unejeune fille très soignée entra en trombe dans la chambre.

-Cunégonde! Dit-elle d’une voix gentille. Que fais tu ici? Tu saisqu’il ne faut pas venir dans cette tour, il n’y a que despersonnes de basse condition et ils mangent les chats quandles rats se font rares. Viens là mon amour.

Léon’avait pas une expression très avenante pour cette jeune fillequi semblait penser que manger du chat au petit déjeuné étaitcourant pour nous autres « personnes de basse condition ».

Elleavait une attitude très hautaine, appartenait sûrement à la« haute condition » et possédait un goût douteux à enjuger par l’aspect physique de son chat.

Prenantson félin dans les bras, elle nous toisa l’un après l’autre eninsistant sur mon visage inconnu puis sortit.

-C’était Marion, commentaLéo.

-Enchantée!

-Lève toi, m’encouragea-t-il avant de sortir.

-Ha oui!

Ilrepassa la tête dans l’entrebâillement :

-Et ne mange pas de chat ce matin, Louisenous a préparés des tartes aux prunes.

-Entre les tartes et du chat mon cœur balance!

Lagrande porte ouverte de la bibliothèque me laissait entrevoir unMerlin d’humeur songeuse. Plus loin, un père lisait pour sa fille.La petite paraissait l’exaspérer avec des questions sans fin :« et pourquoi et parce ce que… ». Sur leur table, unedrôle de petite bête trônait. Comme ça, j’aurais dit quec’était un furet mais ses poils et ses yeux étaient bizarres.

-Nell, viens t’asseoir, dit Merlin.

Dansla bibliothèque, une grande table de lecture s’étalait entre lesrangées de livres manuscrits. J’écartais un long banc dechêne de la table et je m’asseyais les mains réunies sous latable. Merlin resté debout arpentait de long en large l’alléecentrale. Les mains derrière le dos, il gardait sonair soucieux, mais, mettant ses interrogations de coté ilrecommença une de ses longues tirades dont lui seul avait le secret.

-La magie se manifeste grâce à l’esprit. Par un geste, tu guideston esprit vers l’objet. L’objet englobe toutes choses surlesquelles tu veux agir : l’eau, un être humain, un arbre, unlivre …il existe deux catégoriesde pouvoirs : les pouvoirs propres à tout Eréalet le pouvoirspécifique. Les pouvoirs propres ont généralement uneaction faible sur l’objet, leur maîtrise nécessite beaucoup detravail. Le pouvoir spécifique est lui, unique et illimité, iln‘est acquis que quand le corps est prêt à l‘assumer. Une foisacquis, il demande une exploration de ses étendues. Certainsacquièrent leur pouvoir spécifique très jeunes, d‘autres jamais.Ces derniers doivent se contenter de leur savoir et des pouvoirspropres, mais, ils restent des élèves très limités en magie.

Merlinreprit sa mine songeuse.

-L'autre jour, tu m’as dit que de petites flammes s’étaientmanifestées aux bouts de tes doigts quand tu t‘es mise en colèrecontre ce garçon. Comme je te l‘ai dit, un Eréal ne peutavoir qu‘un seul pouvoir spécifique. Tu es une olfeust,normalement tu ne devrais pas maîtriser le feu, mais je préfère enêtre sûre.

Sonregard se porta derrière moi sur un bureau surélevé habituellementhabité par la sentinelle de la bibliothèque : Lyse. En soncoin, il restait encore une bougie éteinte qui, par en juger lapetitesse, avait accompagnée Lyse toute la nuit, surveillantlecteurs nocturnes et rats affamés.

-Tu vois la bougie sur le bureau? Me demanda-t-il.

-Oui.

-Tends ton bras vers elle. Elle représente l’objet. Pince le pouceet l’index en visant toujours l’objet et… écarte les.

Unepetite flamme dansante d’une couleur or avait alors fleuri sur labougie.

S’étaitsurprenant comme phénomène mais mon premier sentiment fût : celava-t-il me causer des ennuis?

-C’est impossible! Ce n’est pas possible! Repince ces deux doigtspour voir.

Unfil de fumée grise remplaça la petite flamme dorée.

-Ce n’est pas possible. Je ne comprends pas.

-Il n’y a peut-être rien à comprendre?

-Tu peux reprendre tes occupations.

Merlinreprit son visage songeur et sortit de la bibliothèque. Ens’éloignant, je voyais ses cheveux châtains s’allonger etblanchir, son corps se rabougrir et son pas se ralentir. Desquestions lui faisaient perdre tout contrôle. Lui, qui savait tantde choses, qui avait souvent réponse à tout, il se trouvaitdéstabilisé par une enfant.

Lesmains de nouveau rangées sous la table, j’avais un peu honte.Merlin m’avait prise avec lui, il me protégeait et apparemment jene lui causais que des ennuis. Si je me débarrassais de cespouvoirs, tout rentrerait dans l’ordre.

-Bonjour damoiselle!

-Qui êtes vous? Demandais je.

-Un fou.

-Un fou?

-Noah le fou.

Ilportait une chemise ample noire à manche rouge. Ses cheveux tresséset agrémentés de perles semblables à de petits fruits multicolors,flottaient! Ils avaient les yeux cernés de noir, une moustachefinement enroulée sur les pointes, les oreilles ornées et lespoignets renforcés de cuir noir.

Surle banc qui se décala de lui-même, il s’assit et posa ses mainssur la table. Des mains dont tous les entre doigts étaient percéset ornés de tiges métalliques. Autour de ses mains se baladaientsans fin des petites billes métalliques brillantes et argentées,certaines de la taille d’un grain de blé d’autres allant jusqu’àla taille d’une noisette.

-Tout le monde est fou, mais moi, je suis le fou de mon seigneur. Pasque je lui appartienne, mais je suis sa folie, son divertissement,parce que finalement tout le monde est fou mais de manière et dansdes proportions différentes. Je le suis peut être plus que lesautres puisque je suis le fou de mon seigneur…Oui je suis trèsclair!

-Oui!

-N’est-ce pas?

Uneplume et un encrier rejoignirent ses mains. La plume se trempa dansl’encrier et entreprit un dessin sur son index par la simpleintervention de sa pensée. La plume flirtait avec les billesmétalliques qui anticipaient les moindres déplacements de la plume.

-Donnez moi vos mains.

Jelui tendais mes mains légèrement recroquevillées.

-Vous avez peur de leur puissance.

J’acquiesçaisde la tête.

-Elles sont belles et jamais elles ne feront souffrir ceux que vousaimerez. Bien sûr, elles seront maîtresses de grands pouvoirs maisvous ne devez jamais en avoir honte sinon ils se retourneront contrevous. Ils sont en vous, vous devez apprendre à les connaître, lescomprendre, les maîtriser, les utiliser sera secondaire. Faitesleur confiance et suis ton instinct, conclut-il en déposant mesmains sur la table.

Laplume acheva son dessin et Noah fut satisfait.

-Vous êtes un peu…m'aventurais je.

-Bizarre? Allumé?

-Fou!

-C’est très perspicace! Vous êtes devineresse?

-Comment?

-Clair voyante?

-Je ne pense pas.

Jen’avais pas assez de deux pouvoirs qu’il voulait m’en affublerd’un troisième.

-Peut-être êtes vous aussi une fée? Non, bien sûr, vous êtes troplourde!

-J’aurais dit trop grande!

-C’est vrai, c’est vrai, un troll peut être? Non pas assez poilu!

-Mais que cherchez vous?

-Et bien je cherche vos pouvoirs. Au fait, quel pouvoir possédezvous?

-Je suis une olfeust et je possède le pouvoir du feu.

-Vous êtes une olfeust et une élémentaire feu, surprenant!

-Surprenant?

-Oui! Surprenant!

-Mais?

-Mais?

Ilétait tellement confus.

-Vous allez répéter tous mes mots? Ajoutais je pour ramener del’ordre dans cette conversation.

-Tous vos mots? Non, bien sûr, dites m’en plus.

-Qui sont les élémentaires?

-Vous maîtrisez aussi la terre, l’eau, l’air, le métal?

-Comment?

-Quoi comment? Les maîtrisez vous?

-Non! Je ne crois pas.

-Vous ne croyez pas ou vous ne savez pas?

-Je ne sais pas.

-Comment ce fait-il que vous ne sachiez pas? Se déconcerta Noah.

-Quelle chose?

-Que vous ne sachiez pas? Comment ce fait-il que vous ne sachiez passi vous avez à votre disposition les autres pouvoirs?

-Comment le saurais-je?

-Vous êtes sur le registre des pouvoirs?

-Un registre?

-J’ai du mal à vous suivre damoiselle.

-Moi aussi!

Ilse dirigea vers les livres et sortit un grand ouvrage.

-Voici le registre des pouvoirs, dit-il en déposant le lourd pavé.

Merlinentra avec vigueur dans la bibliothèque.

-Noah, qu’est-ce que tu fais? Questionna sévèrement Merlin.

-Je montre à cette damoiselle le registre référant des pouvoirs.

Noahinterrompu se retourna vers moi et reprit ses explications.

-Vous pouvez voir les élémentaires : feu, air, métal, terre, eau,photon, électron ; les pouvoirs sensitifs, les pouvoirsd’invulnérabilité, les pouvoirs de guérison. Vous vous avez unpouvoir de communication comme ceux qui parlent aux animaux. Lespouvoirs mimétiques sont aussi très intéressants. Ensuite, pourchaque pouvoir vous avez des registres de possesseurs en plus de ceregistre de base. Chaque personne recevant son pouvoirspécifique s’inscrit dans le registre correspondant à sonpouvoir.

-Noah tu n’as pas à…

-A lui parler de sa pierre magique? Je l'ai vu tu sais.

Merlinétait sacrément irrité par l’intervention de Noah mais tout demême intéressé par son avis. Il le laissa poursuivre.

-La marque du feu en cercles concentriques est sur la pliure de soncoude, dit-il en pointant mon bras du doigt. Le point centralreprésente le feu, les deux cercles concentriques représentent lesdeux éléments amis du feu : la terre en premier et l’air ensuite.L’eau est un cercle entre l’air et la terre mais il n’est pasprésent sur le symbole du feu. La marque est encore rouge maisbientôt elle sera blanche.

-Une pierre magique? Me surpris-je.

-Ce ne sont peut-être que des bouts d’os cassés ou des brûluresde dragons! Réagit Merlin.

Noahpointa de nouveau son index sur mes marques.

-La trace rouge que vous avez dans la pliure du coude marque laprésence d’une pierre magique. Mon pouvoir spécifique est latélékinésie, je déplace les objets par la pensée, et grâce àcela, je peux te montrer ma pierre magique.

Lesparties visibles de sa peau se mirent à scintiller. Les petitesbrillances se rassemblèrent dans le creux de sa paume pour composerune pierre magique en forme de sphère autour de laquelletournoyèrent ses billes métalliques.

-Comme vous pouvez le voir les pouvoirs sont dilués dans le sang. Sila pierre se matérialise d’elle-même c’est que le pouvoirn’appartient pas au porteur.

-Alors, le pouvoir du feu ne m’appartient pas?

-Non.

-Mais c’est peut-être des bouts d’os cassés ou des brûlures dedragons ou des piqûres ou encore une allergie! S’exaspéra Merlin.

-Comment être sûr que c’est une pierre magique? Interrogeais-je.

-Si ces rougeurs s’estompent en Erèbe c’est que c’estbien une pierre de pouvoir. Elles se cachent des hommes pour garderla présence magique de son porteur.

-Si je vais en Erèbe je saurais si cette pierre est magique?

-Oui!

-Mais…non! Tu n’iras pas en Erèbe. Tu dois rester dans leslimites de Ten et du territoire de Magimel aussi,rétorqua Merlin.

-Mais la frontière n’est pas si loin! Suppliais-je.

-Tu restes ici. Si les hommes voient ces traces, qui se prouveront nepas être magiques, tu pourrais avoir de gros problèmes.

-Mais Merlin!

-Il n’y a pas de mais. Et puis Victor souhaite te rencontrer. Noahtu devrais aller préparer ton spectacle pour ce soir et arrête de…

-Renseigner la damoiselle?

-Noah arrête c’est tout! Nell suis moi.

-Il y a un registre pour les dons de pouvoir. Ce pouvoir du feu c’estun don.

-Noah, rien ne nous dit que tu aies raison, s’interposa Merlin.

-Mon instinct me le dit, se justifia Noah de manière convaincue.

-Ton instinct t’a aussi dit de démonter la toiture du château lasemaine dernière.

-Ce château manque cruellement de lumière. Les toits sontsecondaires, se légitima Noah.

-Comme ta raison! Nell viens.

Merlinme poussa vers la sortie.

-Mon cœur à ses raisons que les raisons de ce château ignorent.

-En tout cas tu ne manques pas d’esprit.

Merlinm’emmena au sommet du donjon principal. Derrière une grande porte,au fond d’une salle de distribution, une serre s’ouvrait sur leciel. Le plafond transparent préservait du froid toute unemyriade de plantes, certaines connues d’autres insolites. Surle coté, un homme d’une cinquantaine d’années prenaitsoin d’un petit plan de romarin perdu dans un grand pot. Il étaitgrand, châtain, sa barbe courte poivre et sel contrastait avec sonteint hâlé, ses cheveux courts mais un peu trop long sur ledevant commençaient à cacher ses yeux en amande verts foncés.

L’hommequi termina de tasser la terre autour du petit pied de romarin seconcentra. À ce moment je vis le romarin grossir et prendre bonneplace dans son grand pot. Merlin me posa une main rassurante surl’épaule. Puis, observant l’homme, je remarquais un transfertentre lui et la plante! Sa barbe rentra dans sa peau, ses cheveuxraccourcirent pour libérer son front, sa peau s’éclaircit et sesongles terreux s’alignèrent à ses pointes de doigts. Il regardases mains puis le beau pied de romarin fleuri. Satisfait, il se mitsur ses jambes et prit le pot dans ses bras. Il se tourna vers nouset afficha un sourire accueillant.

-Merlin, voici donc notre nouvelle pensionnaire.

Victors’avança vers moi. J’eus un pas de recul, par précaution.

-Je me présente, Victor de Magimel, seigneur et maître de cechâteau, sois là bienvenue. J’espère que ton séjour se passebien. Tu t’es faite des amis?

-Oui mon seigneur.

-Lesquels, dis moi?

-Yann, Léo, Isabel et Matthieu.

-Très bien. Tant mieux si ton intégration se passe bien. J’espèrene pas te voir souvent et tout ira bien, dit-il en riant. Encore labienvenue.

Ilretourna à ses activités botaniques et Merlin me dirigea vers lasortie.

C’étaitbizarre comme attitude. Je demandais :

-Merlin?

-Oui, dit-il en descendant les escaliers devant moi.

-Qu’a-t-il voulu dire avec « j’espère ne pas te voirsouvent et tout ira bien » et qu’est-ce qu’il s’est passéavec la plante?

-Victor est un iudex, un juge. Comme tu as pu le voir en entrant, iltransfert du temps entre lui et les plantes mais aussi entre lesplantes et entre les êtres. Il peut servir de passerelle comme êtredirectement receveur ou donateur de temps. Et s’il est un jugec’est parce qu’à Ten nous punissons par le temps : nous privonsles criminels de temps. Il est aussi décisionnaire des peines deprisons et de travaux forcés mais celle du temps reste la plusmarquante et la plus symbolique.

-Sûrement, acquiesçais-je perdue dans mes pensés.

Dujour au lendemain, Victor pouvait me rendre vieille, du jour aulendemain, Victor pouvait avoir mon âge!

-Je t’ai prévu une séance de lecture à la bibliothèque,interrompit Merlin. Cela nous renseignera peut être enfin sur talangue maternelle. Ton professeur de lecture t’attend dans labibliothèque. Je te laisse, je m’en retourne à mon laboratoire.

Ilreprit son habituel air soucieux et se dirigea vers la tour ouest.

Lapetite fille et son père étaient toujours dans la bibliothèque. Lepère lisait, sa fille et le furet sur la table étaient absorbéspar ses paroles.

-Êtes vous mon professeur de lecture, demandais-je à l’attentiondu père.

-Oui, répondit, à ma grande surprise, la petite fille.

Lefuret m’observa avec application et l’homme se dirigea vers moi.

-Bonjour, je suis Raphaël le pèrede Marguerite, tu es Nell?

-Oui.

-Je vous laisse, tu seras gentille mon cœur? Dit-il à sa fille.

-Bien sûr, dit la petite l’œil rieur.

Sonsourire remontait ses jolies joues couvertes de taches de rousseurset nous laissait découvrir de toutes petites dents de lait. Elleavait de jolies boucles rousses éparpillées sur la tête etdes yeux verts clairs pétillants de malice.

-Viens t’asseoir Nell, nous allons lire « le Chat botté »,dit-elle surexcitée d’impatience.

-Heu oui, répondis-je en m’asseyant sur la chaise de son père.

Margueritevoulut commencer la lecture mais rapidement quelques mots luiposèrent problème.

Assisesur sa chaise, ses petits pieds ne touchaient pas le sol et sescoudes posés sur la table pour tenir le livre se retrouvaient à lahauteur de son cou. Marguerite était chargée de mimiques deconcentration. Tantôt les yeux plissés et la bouche pincée, tantôtla bouche ouverte les yeux écarquillés. Puis ayant apparemmentretrouvé les mots du livre elle me regarda fixer sa bête bizarre.

-C'est Arthur que tu regardes comme cela?

-Oui.

-C’est Arthur mon furet peluche.

Lapetite bête continuait de me regarder comme si j’étais « une bêtecurieuse ». À l’évidence c’était cet animal « la bêtecurieuse ».

-Peluche?

-Les peluches sont de faux animauxpour les enfants. Normalement ils ne bougent pas mais papa l’arendu vivant grâce à Adam l’anime. Il l’a acheté àMilo le voyageur du futur, tu le connais?

-J’ai déjà entendu parler de lui.

-Donc mon papa l’a acheté à Milo, c’est un jouet du futur mapeluche, et Adam l’a réveillé comme un vrai furet et mon furetmaintenant il est immortel. Jamais il ne me laissera toute seule. Parcontre, comme il est en « plastique » (le mot étaitdifficile à dire pour une petite fille du XIIIèmesiècle), il ne faut pas qu’il prenne trop chaud sinon Milo a ditqu’il pourrait fondre!

Arthurse cacha sous le livre.

-Arthur n’aime pas trop ce mot « fondre », expliquaMarguerite en ne parlant pas trop fort.

Arthurqui entendit quand même le mot fit trembler le livre qui l’abritait.

-je vais commencer le livre, dit Marguerite en découvrant le furet.

Alorsque la petite allait commencer à lire, sur la première page jelisais :

-Il était une fois.

-Mais tu sais lire? Se surprit l’enfant.

-Apparemment!

Moiaussi j’étais surprise. Ce devait être un nouvel aspect de monpouvoir. Les olfeusts parlaient toutes les langues instinctivementmais maintenant je découvrais que même dans l’écriture, ilsétaient instinctifs. Jusqu’au bout, ce pouvoir pouvait masquer laprovenance dans l’espace et dans le temps de son possesseur. Si mesparents avaient le même pouvoir, cela devenait finalement de plus enplus compliqué de les retrouver.

Margueritedescendit de sa chaise, referma le livre et prit son furet surl’épaule.

-C'est dommage, tu aurais été mon premier élève, confia Margueriteun peu déçue.

-Désolé.

-Tant pis! Tu as déjeuné? Demanda-t-elle gaiement.

Soncomportement avait changé du tout au tout. De froissée elle étaitpassée à un enthousiasme débordant.

-Non!

-Viens, me dit-elle en m’attrapant la main pour me tirer versl’extérieur. Louise a préparé des tartes aux prunes ce matin.

-J’en ai entendu parler.

Nousentrâmes dans la cuisine. Une grande table contre le mur avec un bacde pierre, une grande table centrale avec deux grands bancs rangésdessous, deux cheminées, une petite et une grande. Lacuisinière lavait des choux dans le bac de pierre rempli d’eau.Elle était ronde et charnue maisqu’on ne s’y trompe pas, elle était alerte et à l’aise avecses formes généreuses. Sa peau claire et fraîche lui donnait uneexpression de bonne humeur permanente. Cette femme montraitprestance et fermeté mais aussi maternité, douceur et empathie.

-Bonjour jeunes filles.

-Bonjour Louise, c’est Nell et elle voudrait goûter ta tarte auxprunes et moi aussi.

-Bonjour Nell, dit-elle gentiment. Margot, il est un peu tard, fitremarquer Louise.

Unegrande déception s’afficha sur le visage de Marguerite.

-Mais j’en ai gardée à la cave, ajouta la dame en souriant.

-Trop bien! Dit Marguerite le visage illuminé.

Louisedescendit à la cave. Marguerite me reprit la main pour me conduire àl’extrémité de la cuisine.

-Viens voir. De la cuisine, il y a un accès au lac.

Enhaut des escaliers, une porte s’ouvrit sur le bord du lac. Nousétions sur un bout de terre qui entrait dans l‘étendue d‘eau.Il y avait un puits, un quai, une petite tour de surveillanceorientée sur le quai, un terrain d’entraînement, un parc à bêteset derrière nous la muraille reliant la tour sud et ouest ouvraitplusieurs petites portes sur le château.

Jem’avançais sur le quai. D’ici on pouvait voir une petite île.De l’autre coté, on observait un autre quai et une chaumière lacheminée fumante.

-Regarde ce que je sais faire, dit-Marguerite.

Margueriteétait postée à coté du petit parc où cohabitaient poules,canards, oies et lapins. Elle se concentra un instant sur un lapin etun canard proche de la clôture. Le canard se mit à bondir sur sesdeux pattes comme un lapin et le lapin coordonna ses deux pattesgauches et ses deux pattes droites pour se dandiner comme le font lescanards.

-C’est…

Jene savais pas quoi dire : extraordinaire, surprenant, étrange?

-C’est drôle! Compléta Margot.

-Comment fais-tu cela?

-Je suis un échangeur d’âmes. Je peux échanger toutes les âmesque je veux.

Louisepassa la tête par la porte extérieure. Margot remit tout en place.Le canard dandina et le lapin bondit.

-Marguerite, j’espère que tu ne fais pas de bêtises sinon la tartepourrait te passer sous le nez.

Louiseparaissait accoutumée au fait que Marguerite jouait souvent avec sesanimaux.

-Non, non, s’innocenta la petite les mains derrière le dos.

-C’est prêt, vous pouvez venir, informa Louise.

-Trop bien! Répéta Marguerite qui s’était précipitée dans lacuisine.

Lien à poster
Partager sur d’autres sites

Annonces
Maintenant

Archivé

Ce sujet est désormais archivé et ne peut plus recevoir de nouvelles réponses.

×