Un peu de douceur

A l'heure du désarroi, à l'heure de l'effroi

A l'heure où Monsieur Malheur suit Madame Malheur

A l'heure où l'amant devient traître

A l'heure où l'imam devient prêtre

A l'heure où les psychologues deviennent des psychopathes

A l'heure où les sages marchent à quatre pattes

A l'heure où le phare s'éteint,

Une voix de l'intérieur

M'appelle comme un empereur :

« Hé, coran ! Coran, vite »

Et vite je m'élance vers mon Coran

Je le prends, les mains trébuchantes,

Je le lis, puis les larmes, douces et touchantes,

Me secouent jusqu'aux ténèbres de mon c¿ur,

Mais je ne pleure

Qu' un instant, juste le temps

Où mon c¿ur s'épanouit comme une fleur !

OWI ! De la poésie fanatique ! Comme si c'était pas déjà assez tendu comme ça !

Exaltons, exaltons, on s'étonnera après que ce soit violent !

Heureusement, ça ne vaut littérairement pas un clou. Littéralement non plus, ô héautontimorouménos.

La journée de travail avait été éreintante — malgré mes soupirs, c'est donc avec une joie certaine que je retrouvais ma femme Farida dans le petit appartement que nous occupions depuis quelques années déjà. Elle m'accueillit, volubile, dans un déluge de paroles alternativement en français et en arabe, auquel je saisis vaguement qu'il y avait un problème. é la maison donc aussi! Apparemment, un chèque avait été refusé par la banque — déclaré sans provision, avait-on tant dépensé ce mois-ci? — et cela donnait lieu à une sorte d'amende. La logique implacable voulant que ce soit aux pauvres de payer se révélait une fois de plus. Il était encore tôt : m'emparant de la somme en liquide, je courus à la banque régulariser l'affaire.

Le phare s'éteignait ; j'avais l'impression de suivre les pas de Madame Malheur.

Une voix de l'intérieur m'appela cette nuit-là, impérieuse et imprécatoire : avec la majesté et les promesses qu'une étoile du Berger guide les voyageurs égarés sur mer ou sur terre, de cette manière je m'élançai vers mon Coran. Je le pris, mains trébuchantes, alors que des larmes me venaient aux yeux — elles avaient à moitié pour cause mes malheurs, et à moitié l'émotion devant la puissance de cet appel divin. Laissant le hasard me guider, je l'ouvris à une page inconnue.

Car c'est ainsi que Nous l'avons façonné ; Nous lui avons insufflé vie et substance, irrigué ses plaines et bombé ses vaux. Pour cette raison excellente et très véritable, le sexe féminin exsude le plaisir goutte à goutte lorsque l'on le parcourt en voyageur, comme un pays étranger, et selon Notre volonté.

J'ouvris grand mes yeux, sans oser croire à ce que je découvrais de cette manière impromptue. étais-je devenu fou? Ne pouvais-je plus lire l'arabe du Saint Coran, un djinn n'agitait-il pas les lettres, les liant et les déliant à l'envi devant mes yeux mortels? Qu'était-ce que ce verset inconnu et peu conforme aux préceptes?

D'un mouvement brusque, je fermai le livre sacré, et le rouvrit jusqu'à retrouver le même verset. Il était là, rusé, fixé éternellement selon l'ordonnance d'Allah. Il me fut difficile de croire que je n'étais pas en plein rêve.

Le lendemain matin, je me précipitai vers la librairie islamique tenue par mon voisin et frère dans la foi. Parcourant deux autres Coran, je recherchai avec impulsivité le verset incriminé... et l'y trouvai, fièrement tracé des lettres de la langue divine. Cela était impossible : il fallait que j'en parle à l'imam. La journée de travail fut l'une des plus longues et pénibles que je subis lors de cette période — souvent en effet des larmes me venaient aux yeux en pensant qu'au lieu d'avoir épanoui mon cœur comme une fleur comme le faisait d'habitude le Livre, il m'avait instillé au plus profond de moi-même le doute : celui-là même qui fait vaciller un homme et le promet aux abysses les plus noires de l'Enfer.

magnifique je le trouve vraiment ainsi

magnifique je le trouve vraiment ainsi

Merci! J'ai reçu énormément de commentaires sur mon blog, mais je suis fier du tiens!

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N.B. C'est sur ce forum que j'ai publié mes premiers textes (en 2006). J'allais oublier de dire que 99 % de mes lecteurs sont français.