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Redécouverte de l'oeuvre de Ségolène Royale


Invité Long Nao

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Ségolène Royale, Le ras-le-bol des bébés zappeurs, Robert Laffont, 1989

Ce dimanche après-midi dernier, lassé par l'écriture de mon mémoire, je fermai mon ordinateur et partis à la recherche d'une lecture de substitution. Et là, dans la bibliothèque parentale, je fis une double découverte : Le manifeste de Marx et Engels (que je suis censé avoir lu depuis un mois¿) et ce livre, écrit il y a maintenant vingt ans par Ségolène Royale. A l'occasion de sa candidature à la présidence de la République, ce livre ressuscita en tant qu'avatar de le retrait brutal des anime, et de la mort de Club Do', son ennemi naturel. Marx pouvait attendre, d'autant qu'en 2 heures le livre de Royale était lu. Mais qu'on ne s'y méprenne pas ! Ca se lit vite, mais faut rester concentré.

Car c'est un livre rigoureux, dans un sens positif, qui se veut réellement scientifique, pédagogue, et pas seulement révélateur. On sent que ce n'est pas n'importe qui qui écrit ces lignes, jalonnées de chiffres, de statistiques, de pourcentages, de sondages, que tout un chacun pouvait, en 1989, retrouver dans le Point ou le Nouvel Obs. A un niveau encore supérieur, Ségolène Royale fait appel à des études de sociologues américains, suédois qui viennent donner un peu plus d'eaux à son moulin. Son moulin, c'est une conception plus personnelle de la société française. Et c'est un fait que tout cet attirail sert un objectif bienfaiteur ; la télévision, service culturel imposant, n'est pas en phase avec son objet qu'est son public ; les conséquences peuvent, ou sont déjà, à l'¿uvre, et c'est alarmant. Finalement, le discours construit est IR-RE-PRO-CHABLE. Elle envisage chaque contre-argument, le démonte après l'avoir frappé du sceau de l'injustice, et propose quelque chose de juste, de bon, de fédérateur (hormis pour ceux visés par les piques bien aiguisées). Ainsi, celui qui attaquerait le livre passerait immédiatement pour un méchant (car il souscrirait aux conséquences données pour inévitables par l'auteur¿ ).

Le discours construit est irréprochable, sans conteste. Mais ce qui est construit l'est de façon personnelle, dans une optique précise, qui connaît ses omissions. Et je pense qu'il y en a un grand nombre dans ce livre, et chacune remet sérieusement en question la démonstration de Ségolène. Je vais passer sur les considérations morales, qui gouvernent la plupart des chapitres, et qui n'engage que l'auteur ; je n'ai pas à en commenter le bien fondé où non. Je ne crois guère à la télé hyper éducative, mais ce n'est pas mon problème principal.

Une démonstration logique n'a pas le droit de manquer un élément. Quand Ségolène Royale vomit sur ce que représente la femme dans diverses émissions de « chaînes commerciales » (comprenez TF1, Antenne 2 et M6¿ on s'y fait vite, disons au bout de dix pages), elle finit de facto par faire passer ces femmes comme de vraies connes, des cruches, sans jamais se demander ce que sont vraiment ces femmes. J'avais notamment en tête le cas de Sophie Favier, qui était une des « cocogirl ratée» que vilipende Ségolène (p.73). Et aujourd'hui, on a l'exemple de Victoria Sylvedst, bardée de diplômes, et à poil sur les plateaux télés aux côtés de Dechavanne.

Il y a partout ce genre de maladresse qui donnent la désagréable (où agréable quand on est détracteur de la femme politique) impression que Ségolène Royale ne maîtrise pas complètement son sujet ! Malgré ses références d'autorités en terme de sociologie et de psychologie, quand elle écrit qu'une fille battue deviendra une femme battue, d'aucuns pourront lui reprocher de supposer que les femmes battues sont les seules responsables !! Cet exemple se retrouve parmi des analogies incroyables : l'exemple des enfants battus et de leur devenir est censé montré que l'exemple présenté à la télévision sera suivi quand les enfants deviendront adultes. Les théories avérées (déjà à l'époque) sur l'effet cathartique d'images violentes se voient battues en brèche par¿ la rhétorique. Et Tom Sawyer devient une série de science-fiction !

J'en arrive justement au plus fort, en tout cas c'est ce qui m'a fait plusieurs fois sursauté, c'est la confrontation avec les pays étrangers, les USA et le Japon. Ils s'en prennent plein la tronche. Dans chaque chapitre une diatribe est consacrée soit à leurs programmes télévisuels (logique puisque les Français avaient alors la malchance d'en profiter), soit à leur criminalité, soit les deux. Quand on regarde de plus près, on s'aperçoit que Ségolène est capable de citer nombre d'émissions américaines, mais pas une seule japonaise ! Alors que le Japon est autant critiqué que les USA. Le faîte de l'erreur est atteint dans les dernières pages, et il est franchement difficile à avaler :

« Mais sans être chauvins ou dirigistes, il faut quand même admettre que, sans quotas, nos enfants finiront par penser américain ou même parler japonais. »

Donc ces deux choses sont mauvaises¿ pas glop¿

Avant de lire cette ¿uvre, très intéressante (je n'ai pas l'impression d'avoir perdu mon temps) je ne pensais pas lire l'ouvrage de la femme politique. Mais c'est ça qui pèche¿ Et maintenant je comprend pourquoi ce livre n'est jamais cité dans les ouvrages consacrés à la violence télévisuelle.

Certes à la base il y a une méthode cohérente et viable. Mais la méthode seule n'est qu'un squelette. Et sans chair autour, habituellement on laisse ça sous terre. Ce livre est un réquisitoire, argumenté, mais de telle sorte que ça devient un message public. Les deux destinataires sont les dirigeants des chaînes de télévision (et même Berlusconie, qui, selon elle, faisait intervenir des prostitués sur sa chaîne de télévision¿ lol), et tous les parents de France, qui ne sont pas censé connaître énormément de choses sur ce qui est cité.

Je m'attendais aussi à voir un lynchage du manga. Bien qu'aux rares fois où il est cité, il devient porteur de tous les maux de la terre, c'est pas le sujet. Au mieux c'est un outil, pour Ségolène. Le fait est que pour dénoncer les productions japonaise, elle ne connaît que ce qui est arrivé en France (encore que¿ la citation de Tom Sawyer montre que c'est pas encore ça). Et quand elle évoque le cas de Tsutomu Miyazaki, c'est pour descendre la pornographie, pas le manga, alors que c'était l'occasion rêvée pour le faire !

Enfin, je terminerai en disant que ses prédictions ne se sont pas réalisées (Disneyland n'a pas à subir la concurrence de Biomanland ^^). Heureusement.

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Membre, Tu n'auras d'autre batracien devant ma face, 109ans Posté(e)
Grenouille Verte Membre 32 822 messages
109ans‚ Tu n'auras d'autre batracien devant ma face,
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Bon, c'est quoi les références ? :o°

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Invité Long Nao
Invités, Posté(e)
Invité Long Nao
Invité Long Nao Invités 0 message
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D'oh ! La règle de base :o°

Ségolène Royale, Le ras-le-bol des bébés zappeurs, Robert Laffont, 1989

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Membre, Tu n'auras d'autre batracien devant ma face, 109ans Posté(e)
Grenouille Verte Membre 32 822 messages
109ans‚ Tu n'auras d'autre batracien devant ma face,
Posté(e)

Merci.

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