Edmond

[querida13 20 949]

Amateurs de crimes, de cascades et de romances passez votre chemin ces poncifs du cinéma hollywoodien, un peu trop exploités,  ne sont pas le thème de ce film, fort heureusement d'ailleurs, (ouf,  on est sauvés)!

 Sur le  fond d'un Paris au XIXeme siècle par ailleurs fort  bien reconstitué, nous assistons à la création d'une pièce de théâtre  (Cyrano de Bergerac) créée dans l'urgence, par un auteur , Edmond Rostand, pressé par la nécessité de faire vivre son foyer , par les dettes, par le manque d'inspiration, par l'absence de relations, par les rivalités et ayant essuyé de cuisants échecs. Cherchant dans son quotidien des sources d'inspiration, il crée au pied levé un succès coincé entre  un couple  en perte de vitesse et une jeune femme qui l'admire.

Vue des coulisses, cette création est un film d'artiste sur des artistes un peu à la manière de  Shakespeare in love sauf qu'ici , notre Shakespeare à la française, Edmond a mûri et a le sens des responsabilités  (conjugalité, paternité, soutien de famille) et la tête sur les épaules! Sa pièce se crée, malgré le manque de moyens, malgré des acteurs parfois peu motivés, malgré le manque d'inspiration qui vient d'abord, péniblement, au compte gouttes au fur et à mesure des rencontres et des situations dût- il les susciter un peu en éveillant malgré lui le désir d'une jeune femme convoitée par un autre.

Pressés par la misère, la nécessité, la fureur de vivre chaque acteur de la pièce avance ses pions avec son caractère et cela fonctionne. Jusqu'à la fin, on se demande si la mayonnaise va prendre, si cette pièce faite de bric et de broc va se créer, malgré  les fortes personnalités qui se heurtent,  les obstacles nombreux,  les accidents, le dédain du public.

 Mais au tomber du rideau , jusqu'à ce grotesque salut vu de dos , on s'aperçoit que les acteurs, avec leurs problèmes, leurs doutes, leur craintes et leur trac, seraient allés jusqu'à montrer leurs fesses pour jouer , pour que l'affaire tourne rond   afin  que le show puisse go on...,(avec l'aide de la claque recrutée dans des endroits plutôt équivoques parfois). 

Il faut passer par une introduction  un peu poussive , qu'il faut plutôt voir comme une reconstitution fouillée bien brossée,où tout  l'univers parisien du XIX eme siècle est scrupuleusement reconstitué, et tout, jusqu'à la musique d'Offenbach est choisi à la perfection (exception faite plus avant dans le film,  du boléro de Ravel beaucoup plus tardif) mais, jusqu'au succès final, ce film est un long crescendo un peu comme la gloire qui fait passer quelqu'un de rien... à tout.

A noter que dans les dialogues, des tirades de Cyrano s'intercalent, tels des clins d'oeil  mais on voit que refaire une énième version de Cyrano n'intéressait pas le réalisateur qui  en insère avec subtilité, par touches parfois sublimes (comme ce dernier acte filmé dans  un cloître au cèdre séculaire),  les plus belles scènes, dans son film.

 C'est instructif, divertissant, joliment bien filmé, la distribution est prestigieuse. A voir!

[Gouderien 37 374]

Ça donne envie d'aller le voir.