Jéricho
Je me lavais à l'encre de tes mots.
Forcément, j'en ai broyé du noir.
Tu me laissais, le diable dans la peau,
Avec mes cicatrices pour seul pochoir.
Tu connaissais de mon histoire, les infortunes,
Et tu savais de mes façades, toutes les failles.
Tu façonnais les miroirs taciturnes
Qui m'enclavaient comme autant de murailles.
Je ne me reflétais plus que dans tes yeux,
Comme si j'étais le produit de tes fusains.
Et comme de moi, tu savais tout mieux,
Tu te dressais, maîtresse de mon destin.
Fallait-il qu'il n'y ait plus la moindre goutte d'eau dans les chutes du Niagara ?
Plus le moindre grain de sable sur les dunes du Sahara ?
Plus une braise, même aux enfers,
Plus une brise sur les sept mers,
Plus le moindre morceau d'orge pour mon être vermisseau
Pour que tu régisses mon coeur mort comme si c'était Jéricho ?
Isolé, désolé, comme ville fantôme
Je t'ai laissé, esseulée, diriger mes errements.
Et j'ai mené, malmené, existence monochrome
Tandis qu'en tendresse tu soignais tes pigments.
Pacifiste comme la dépression,
Tu ne me frappais que lorsque je ne pouvais plus me défendre.
Passéiste comme la régression,
Tu me flattais quand il ne me restait plus que des cendres.
C'était là le paradoxe de cet amour en dents de scie,
Tantôt la danse, tantôt la boxe forgeait tes désirs indécis.
Entre les roses et les bleus, tu m'inondais par tes couleurs
Jusqu'au moment silencieux où ne restait que la froideur.
On ne m'avait jamais aimé auparavant.
A vrai dire, on ne m'avait même pas haï.
De tous ces subterfuges, j'étais ignorant
Et je t'offrais ma confiance sans me savoir trahit.
Je connaissais l'inconstance,
En son sein j'avais été nourri.
Mais je croyais, plein d'innocence
Que ces voltes-face ne pouvaient être que subis.
Toi tu en jouais. Parfois enjouée, parfois sans joie,
Tantôt fragile ou sûre de toi,
Tu m'as fait croire au désarroi
Tout ça pour mieux te jouer de moi.
Fallait-il qu'il n'y ait plus la moindre goutte d'eau dans les chutes du Niagara ?
Plus le moindre grain de sable sur les dunes du Sahara ?
Plus une braise même aux enfers,
Plus une brise sur les sept mers,
Plus le moindre morceau d'orge pour mon être vermisseau
Pour que tu m'enfermes dans un décor pareil aux murs de Jéricho ?
Après sept tours, après sept jours, après sept ans,
J'ai détourné le regard de ces lumières artificielles.
Jeté au diable tous les adieux de satin
Pour m'en aller, enfin sortir de cette étrange citadelle.
Enfant de l'ombre, le coeur noircit à force
De me laver à l'encre de tes mots.
C'est ton nom qui fend l'écorce
Des ébéniers qui poussent au coeur de Jéricho.
Un nom caché par les arabesques
De la passion qu'on idéalise.
Une idée qu'on oublierait presque
Et qui n'est autre que l'emprise.
Modifié par Kégéruniku 8
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