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Le village. (1)


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Une forteresse de la Nature! — C'étaient les mots qui s'imprimèrent dans mon esprit dès que j'aperçus le village. Il avait fallu conduire des heures, bordé d'un côté et de l'autre par des forêts de conifères; la route traversant les collines, le paysage alternait continuellement entre vue sur l'horizon et vue sur les arbres du bas-côté - comme une danse de perspective. Le chemin me rappelait mon paysage natal de Pennsylvanie.

J'étais arrivé au sommet de la dernière colline: d'ici, le regard portait loin. L'on voyait en contre-bas un village bordant un petit lac. Les maisons aux toits rouges étaient agencées de manière irrégulière, comme il arrive souvent à ces endroits riches en histoire. Vers le centre, une épine s'élevait beaucoup plus haut dans le ciel; l'église. — Tout autour de l'endroit, collines et montagnes se dressaient, et c'était cette couronne qui donnait l'impression d'une forteresse. Les habitants devaient avoir une distinction plus subtile entre "dedans" et "dehors"; car même "dehors", l'on était dans cette cour, et il fallait s'aventurer par-delà les montagnes pour véritablement sortir.

Maintenant ma voiture dévalait la dernière pente et je voyais grandir les maisons au fur et à mesure de ma descente. Un instant, j'eus la sensation d'atterrir plutôt que de conduire - sans doute un effet de la fatigue du trajet ainsi que de cette perspective particulière. Rapidement j'arrivai dans le village, et me garai à proximité de la grand-place. Il faisait beau ce milieu d'après-midi, mais pourtant je n'avais pu apercevoir que peu d'habitants, à chaque fois des silhouettes élusives qui semblaient faites de la même roche que les murs des maisons. Sans doute étaient-ils tous sortis; il y avait quelques champs aux alentours, et bien que je n'y aie pu voir quiconque, peut-être y travaillaient-ils encore à cette heure. — En attendant je me promenais d'un pas lent le long des rues. Elles étaient tout en zigzag, étrangement disposées; je trouvais cela fascinant. Quelles péripéties avaient dicté ces combinaisons?

La brise était maintenant de plus en plus fraîche, et, las de mes flâneries, je revins sur la grand-place, passai l'église et entrai dans la petite maison qui tenait lieu d'hôtel de ville. Le plancher en bois, récemment verni, immaculé, contrastait avec l'atmosphère ancienne du dehors. Il n'y avait personne. J'examinai alors les quelques meubles de la pièce, agencée comme une salle d'attente, avec table basse, une quantité de chaises en bois, quelques vieux magazines géographiques.

— "Monsieur...?"

Je me retournai, étonné: dans un coin de la pièce, un homme court et trapu se tenait, que je n'avais pas vu. Il devait venir d'une salle attenante, derrière lui la porte ouverte montrait un bureau sobre. L'esprit encore un peu ébahi, je marquais une pause, tentant de remettre un peu d'ordre dans mes pensées. Il me fixait, et ne semblait pas gêné de ce silence. Sans doute était-il habitué aux discrétions des vieux villageois; les pauses faisaient partie intégrante des conversations. Je répondis enfin:

— "Je suis là pour l'affaire dont nous avions parlé au téléphone. Vous devez être M. Griboux."

Un sourire franc se dessina sur son visage. Il me tendit la main, et serra la mienne d'une poigne vive, honnête. — "Nous sommes très contents que vous soyez là. Excusez; les hommes sont sortis, mais ils devraient revenir d'un instant à l'autre. Nous allons les attendre ici, car il y a quelques documents que j'aimerais vous montrer, et qui concernent les faits présents. Puis nous pourrons aller dans les bois... Dites; vous devez être fatigué de la route; voulez-vous boire quelque chose?". - J'acceptai un grand verre d'eau.

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