Médiocrité de ce moi existentiel dont ce targuent les artistes !
L’aube entrecroisée de fils d’ors les regardaient d’un œil lumineux, et les remous de l’eau allaient et venaient, comme le souffle d’un dormeur. Clo clop clop… saccadait le doux fracas de la mer sur le rivage. Ils fermaient les yeux et n’écoutaient pas cette douce complainte funèbre, aux notes encore ensommeillées. L’air frai, coulait sur leur corps insensibles, et leurs yeux perdus dans le bleu de l’eau et du ciel ne renvoyaient qu’une ombre pâle et morne. Autour, les oiseaux chantaient, la vie s’éveillait et peuplait de ses bruits et de sa présence une nature encore sauvage et fraîche. On voyait très haut, comme un ombre discrète de la lune, qui achevait de se retirer, définitivement. Le sable ondulait et crissait, le vent soufflait, et l’aurore s’agitait à les rappeler. Ils ne voulaient pas les entendre, et laissent le sel dévorer leur chair. La rosée perlait sur les feuilles, comme un pétale rouge naissait au coin de leur bouche. Mutant, l’océan les englobait, l’écume blanche lavait leurs membres sanglants et leurs esprits torturés. Calmes et glacés, apaisés, cadavres exquis qui couraient sur la mer entraînés par une vie folle et délirante, fondus dans le lointain horizon de la mort, agonisant dans le ballet multicolore de la mer aux reflets jaunes, rouges, violets. Ils naissaient.
Cette fois, c’était le soir, et le noir étouffant d’une nuit sans étoile se mêlait à celui de l’eau. Les fines ondulations blanchâtres qui faisaient encore vibrer la mer maussade, brillaient sous la lune. Tandis que le ciel s’obscurcirait encore davantage, les fines paillettes mousseuses des vagues mourantes se heurtaient à la froideur du cosmos. Il n’y avait aucun bruit hormis la lutte du terrible immortel. Haletant, et gémissant, l’océan expirait entre les mains de ses bourreaux. Il saignait de mille feux, et de ses plaies béantes on voyait jaillir ses tortionnaires. Comme une mère nourricière, une amante trompée, sacrifiée par ceux qu’elle avait portés en son sein, et nourrit de son amour. Une eau sale, grisâtre, sanguinolente, empoisonnait toute la nature atterrée, mordait la plage. La bouche bleu et glacée, translucides, et tremblant, ceux qui avaient voulu s’enfuir se voyaient rejetés par la marée en colère. Béats et gelés, ils regardaient le spectacle immonde de leur meurtre. A mesure que l’eau s’enfonçait dans la terre, emportant avec elle les derniers murmures d’une mer fiévreuse et folle, ils se dressaient sur le sable souillés. Le carnage de leur humanité, dépassés par l’angoisse de leur existence, fit d’eux des monstres.
5 Commentaires
Commentaires recommandés