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XIII


Exo7

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Membre, 103ans Posté(e)
Exo7 Membre 886 messages
Mentor‚ 103ans‚
Posté(e)

La populace, les subordonnés de l'art de la laine comme ceux des autres corporations étaient, pour les raisons susdites, pleins de ressentiment. Poussés aussi par la crainte d'être punis pour les incendies et les vols qu'ils avaient commis, ils se réunirent plusieurs fois la nuit pour parler de ce qui était arrivé, en se montrant les uns les autres les dangers qui les menaçaient. 

L'un des plus hardis et des plus expérimentés, pour encourager les autres, leur parla en ces termes :

"Si nous avions à décider aujourd'hui s'il faut prendre les armes, brûler et piller les maisons des citoyens, dépouiller les églises, je serais d'avis qu'il convient d'y réfléchir et je penserais peut-être qu'il nous faut préférer la pauvreté et la paix à des profits risqués.

Mais, comme on a pris les armes et commis de nombreux méfaits, il me semble qu'il faut maintenant discuter pour savoir si on les dépose et comment on peut se garantir des méfaits accomplis Je suis sûr que, même si personne ne nous l'apprenait, la nécessité le ferait. 

Vous voyez que la ville est pleine de rancœur et de haine à notre égard : les citoyens serrent les rangs, la Seigneurie consulte sans cesse les magistrats ; sachez que l'on dresse des pièges contre nous et que l'on rassemble des forces pour frapper nos têtes. 

Nous devons chercher deux choses et fixer deux buts à nos délibérations : l'un, d'empêcher que nous soyons prochainement châtiés de nos actes ; l'autre, de pouvoir vivre avec plus de liberté et de satisfaction que par le passé. Aussi faut-il, selon moi, pour que nous soient pardonnées nos anciennes erreurs, en commettre de nouvelles, en redoublant de méfaits, en multipliant les incendies et les vols, et nous efforcer d'avoir en cela de nombreux compagnons.

Car là ou les fautifs sont nombreux, on ne chatie personne ; là où l'on punit les petits délits, on récompense les fautes graves ; quand les victimes sont nombreuses, peu nombreux sont ceux qui cherchent à se venger. En effet, les injures générales sont plus aisément supportées que celles infligées aux particuliers".

 

A suivre...

(Histoire de Florence 1380-1393).

 

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Membre, 69ans Posté(e)
pic et repic Membre 17 544 messages
Maitre des forums‚ 69ans‚
Posté(e)
Il y a 11 heures, Exo7 a dit :

La populace, les subordonnés ...

bonjour,

toute ressemblance avec des personnages ou une situation réelle et présente ne serait que fortuite et indépendante de la volonté de l'auteur ?

bonne journée.

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Membre, 103ans Posté(e)
Exo7 Membre 886 messages
Mentor‚ 103ans‚
Posté(e)
Il y a 10 heures, pic et repic a dit :

bonjour,

toute ressemblance avec des personnages ou une situation réelle et présente ne serait que fortuite et indépendante de la volonté de l'auteur ?

bonne journée.

Non, on est dans une situation similaire, et pas mieux que Machiavel pour décrire ce genre d'épisode de l'histoire de l'Italie de l'époque. Je posterai la suite dans la semaine... 

Bien à toi.

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Membre, 103ans Posté(e)
Exo7 Membre 886 messages
Mentor‚ 103ans‚
Posté(e)

"Multiplier les méfaits nous procurera donc plus aisément le pardon et nous offrira la possibilité d'obtenir ce que nous désirons pour notre liberté. Il me semble que nous nous dirigeons vers de sûres conquêtes, parce que ceux qui pourraient s'y opposer sont riches et désunis : leur désunion nous donnera donc la victoire, et leurs richesses, quand nous les aurons prises, nous les conserverons.

Ne vous effrayez pas de l'ancienneté de leurs origines, qu'ils nous opposent. Car tous les hommes, ayant une même origine, sont également anciens et sont faits de la même façon par la nature. Mettez-nous tout nus, vous verrez que nous sommes semblables ; revêtez-nous de leurs habits et eux les nôtres, nous paraîtrons certainement nobles et eux ne le paraîtront pas. Car seules la pauvreté et les richesses nous rendent inégaux.

Il me déplaît que nombre d'entre vous se repentent en conscience de ce qui est arrivé et veuille s'abstenir d'entreprendre de nouvelles actions. Si cela est vrai, vous n'êtes assurément pas les hommes que je croyais.

Ni scrupule de conscience ni crainte d'infamie ne doivent nous effrayer. Car ceux qui l'emportent, de quelque façon qu'ils l'emportent, n'en éprouvent jamais de honte. Nous ne devons tenir aucun compte de notre conscience, parce que, là où, comme nous, on craint la faim et la prison, il n'y a pas de place pour la peur de l'enfer.

Mais si vous observez le comportement des hommes, vous verrez que tous ceux qui parviennent à de grandes richesses et à une grande puissance y sont arrivés par la ruse ou par la force.

Ce qu'ils ont usurpé par tromperie ou par violence, ils le couvrent, pour cacher la laideur de leur conquête, du faux nom de gain. Ceux qui, par manque de sagesse ou par excès de sottise, fuient ce comportement restent toujours plongés dans la servitude et la pauvreté.

Car les fidèles serviteurs et les hommes bons sont toujours pauvres.

A la servitude n'échappent que les hommes audacieux et sans foi ; à la pauvreté, que les hommes avides et fraudeurs.

Dieu et la nature ont placé les biens à la portée de tous les hommes ; ils sont offerts davantage au vol qu'au travail, aux mauvais procédés qu'aux bons. Il en résulte que les hommes s'entre dévorent et que les plus faibles sont toujours perdants.

On doit donc user de la force, quand on vous en donne l'occasion. Celle que nous offre la fortune (la chance) ne peut être meilleure : les citoyens sont désunis, la Seigneurie hésitante, les magistrats effrayés. De sorte que l'on peut, avant qu'ils ne s'unissent et reprennent courage, aisément les vaincre. 

Nous serons alors les maîtres de la ville, ou bien nous y aurons assez de pouvoir pour que non seulement nos erreurs passées nous soient pardonnées, mais que nous soyons en mesure de les menacer de nouvelles violences.

J'avoue que ce choix est audacieux et périlleux. Mais, là où la nécessité l'exige, l'audace devient sagesse.

Les hommes courageux ne tiennent jamais compte du danger dans les grandes choses. Car les entreprises que l'on aborde avec des risques finissent toujours par des succès et l'on n'est jamais sorti d'un danger sans péril.

Je pense que, là où l'on voit se préparer les prisons, les tortures et les exécutions, il est plus dangereux de ne rien faire que de chercher à s'en défendre. Car, dans le premier cas, le malheur est assuré, dans le second il est incertain.

Combien de fois vous ai-je entendu vous plaindre de l'avidité de vos patrons et de l'injustice de vos magistrats !

Il est temps maintenant, non seulement de se débarrasser d'eux, mais de devenir si puissants qu'ils auront plus à se plaindre et à craindre de vous que vous n'en aurez d'eux.

L'opportunité qui nous est fournie par l'occasion est fugitive. C'est en vain que l'on cherche à la saisir à nouveau, quand elle s'est enfuie. Vous voyez que vos adversaires se préparent ; prévenons leurs desseins. Le premier qui reprendra les armes sera certainement vainqueur et entraînera, avec son triomphe, la ruine de son ennemi.

Nombre d'entre nous en auront l'honneur ; tous la sécurité."

 

Ces arguments enflammèrent des esprits déjà gagnés par eux-mêmes au mal. Ils décidèrent donc de prendre les armes, après avoir gagné des compagnons à leur dessein. Et ils s'obligèrent par serment à se secourir, si l'un d'eux était victime de la répression. 

 

 

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